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Chapitre 1 : État des connaissances

1.4. Les vecteurs de virus

1.4.5. Méthodes de dépistage des vecteurs

Parmi les programmes de gestion des maladies virales transmises par des vecteurs, une des approches considérées est la réduction du nombre de vecteurs actifs (Martin & Tzanetakis, 2015). Le dépistage par piégeage, utilisé pour surveiller

l’activité de vol des vecteurs ailés, apporte donc des connaissances essentielles sur la gestion des maladies virales et sur les modèles de propagation des virus (Minks & Harrewijn, 1989). Le puceron du fraisier et l’aleurode des serres étant au cœur de la problématique de dépérissement des fraisières, il importe donc de les dépister au stade ailé.

En fraisières, la méthode de dépistage la plus utilisée par les agronomes au Québec est l’échantillonnage de feuille du cœur de plant de fraisier, afin de noter la présence des insectes vecteurs (Légaré et al. 2015). Cette méthode est rapide car la détection peut être effectuée directement au champ, à l’aide d’une loupe 20x. Il est également possible de faire une estimation du nombre de pucerons dans un champ en faisant un échantillonnage de 80 feuilles (Frazer & McGregor, 1990). Cependant, cette méthode n’est pas pertinente pour dépister les vecteurs au stade ailé, car les pucerons dérangés ont tendance à s’envoler.

Plusieurs méthodes de piégeages ont évolué au cours des 70 dernières années afin de capturer ces deux vecteurs au stade ailé. Il existe différentes catégories de pièges : attractifs ou non attractifs, capturant les insectes soit par interception, soit par aspiration (Mukhopadhyay, 2011).

Le piège non attractif pour capturer les pucerons ailés par aspiration le plus connu est le piège à succion. Ce type de piège est utile pour capturer un très grand nombre d’insectes de manière constante et faire un suivi rigoureux de toutes les espèces présentes dans une aire déterminée, car étant non-sélectif et non biaisé, il collecte tous les insectes volant au-dessus de la bouche d’aspiration (O’Loughlin, 1963). De 1978 à 1984, ce type de piège a été utilisé par Dr Conrad Cloutier (Université Laval) pour faire un inventaire des pucerons ailés à quatre différents emplacements dans la province de Québec. Grâce à ce système, 65 nouvelles mentions au Québec, dont 14 nouvelles au Canada et même 5 nouvelles pour l’Amérique du Nord ont pu être dénombrées (Cloutier et al. 1986). Plusieurs spécimens de Chaetosiphon fragaefolii ailés, incluant mâles et femelles, ont été capturés lors de cette étude (Conrad Cloutier comm. pers.). Par ailleurs, le principal désavantage de ce type de piège est qu’il nécessite l’accès à une prise de courant électrique à proximité. De plus, les coûts de fabrication d’un tel piège s’élèvent facilement à près d’un millier de dollars (Pascal et al. 2013).

Le piège non attractif pour capturer des insectes par interception le plus utilisé est le piège à fil englué. Il est utilisé pour dépister des pucerons ailés en Europe (Avinent et al. 1991). Il est utilisé en général pour étudier le plancton aérien, lorsqu’il est impossible d’utiliser le piège à succion. Cependant, ces pièges ont une efficacité de capture plutôt faible. De plus, un solvant est nécessaire afin de récupérer les pucerons (Pascal et al. 2013).

Les pièges attractifs capturant les insectes par interception les plus communs sont les pièges-bols et les pièges-collants. L’attraction se fait notamment par l’utilisation de couleur soit bleu, vert, blanc, noir ou jaune, dépendamment de l’insecte que l’on veut capturer (Mukhopadhyay, 2011). En 1948, Broadbent invente un type de piège-collant cylindrique jaune afin de capturer des pucerons ailés en pleine migration, toujours très utilisé aujourd’hui avec quelques modifications (Broadbent, 1948). Le piège-collant consiste en une feuille enroulée en forme de cylindre, enduite d’un adhésif collant. Il peut être modifié en utilisant soit une feuille en forme de rectangle, un pot en plastique ou une plaque, tous enduits d’adhésif collant, soit suspendu ou bien attaché à un support (A’Brook, 1973). Dans le cadre du phénomène de dépérissement des fraisières, des pièges-collants jaunes ont été utilisés en Nouvelle-Écosse afin de connaître les périodes de vols des pucerons du fraisier ailés (Lewis, 2013). Deux des avantages de cette méthode sont qu’elle est très facile d’utilisation et requiert peu de matériel afin d’identifier les vecteurs de virus ailés.

En 1951, Moericke invente un type de piège-bol afin de capturer des insectes ailés qui s’avère également très efficace pour les pucerons (Moericke, 1951; O’Loughlin, 1963). Plusieurs produits liquides peuvent être utilisés dans ces pièges- bols, majoritairement de l’eau, ou un mélange d’eau et de savon, d’éthanol ou de propylène glycol (Mukhopadhyay, 2011). Différents équipements et plusieurs manipulations sont donc nécessaires au succès de cette méthode (Hodgson et al. 2005; Labonne et al. 1989). Plus récemment, Pelletier et al. (2012) utilisait des pièges-bols jaunes remplis de propylène glycol (40 à 60%) afin de conserver l’ARN du virus Y de la pomme de terre PVY provenant des stylets des pucerons capturés. Cette méthode est très utile pour pouvoir mesurer la prévalence des virus dans les spécimens de pucerons ailés capturés, car le propylène glycol a la propriété de conserver les acides nucléiques (Nie et al. 2011). Elle a d’ailleurs été utilisée par des chercheurs d’Agriculture et agroalimentaire Canada tels que Dr Debra Moreau de la

Nouvelle-Écosse et Madame Pam Fisher de l’Ontario (OMAFRA) afin de capturer des vecteurs de virus ailés dans l’actuelle problématique du dépérissement des fraisières (Debra Moreau et Pam Fisher, comm. pers.). Les insectes issus de ces pièges sont facilement identifiables car non seulement ils ont gardés toutes leurs caractéristiques morphologiques intactes, mais il est possible de les monter sur lames et de les identifier au microscope à l’aide de clés d’identification (Maw, 1999; Foottit & Richards, 1993).

Le succès de ces deux pièges provient de la couleur jaune, qui est très attirante pour nombre d’insectes, dont les pucerons et les aleurodes (Eastop, 1955; Berlinger, 1980). Afin de mesurer la variation saisonnière de l’abondance des vecteurs de virus ailés, les pièges-bols jaunes et les pièges-collants jaunes semblent donc être des solutions adéquates.

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