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Figure 4.8: Algorithme de la méthode OAWC. Voir texte pour détails.

4.6 Illustration

A titre d'illustration de l'analyse multifractale et de la méthode OAWC, nous reprenons ici l'exemple synthétique de "fracture en échelon" traité par Ouillon et al. (1995, 1996).

Cet objet géologique simple est caractérisé par un comportement géométrique dépendant de l'échelle (Fig. 4.9). A l'échelle "microscopique", ses différents constituants peuvent être détectés. Ils consistent en de petits segments d'orientation NS dont les centres s'alignent suivant la direction N45° E. A l'échelle "macroscopique", la seule organisation détectable est une ligne d'orientation N45° E. Les figures 4.9b et 4.9c représentent l'analyse

OAWC de l'image 4.9a, aux échelles 2 et 4 pixels.

A l’échelle de 2 pixels, les LRV suivent parfaitement le réseau original, comme le montre la rose d'orientation. A la résolution de 4 pixels, il n'y a plus qu'une seule LRV d'orientation N45° E.

Figure 4.9: Analyse de l'exemple synthétique de "fracture en échelon" (d'après Ouillon et al., 1996). (a)

Fracture en échelon synthétique (image 128 x 128 pixels) et rose d'orientation correspondante. La longueur et l'espacement entre segments sont de 16 et 8 pixels respectivement. (b) Carte OAWC normalisée [0-1] et rose d'orientation correspondante obtenue à la résolution a = 2 pixels. Les points blancs soulignent les Lignes de Rupture Virtuelle (LRV). (c) La transition entre l'image originale et la "zone de cisaillement" synthétique apparaît à la résolution critique a = 4 pixels. Les LRV ont été élargies pour être plus facilement visibles. A titre de test, ces images ont été réalisées avec la méthode NOAWC présentée dans le chapitre suivant.

La méthode permet donc de retrouver les propriétés macroscopiques du système étudié à partir de ses propriétés microscopiques. Elle détermine, sans à priori, les structures de normalisation et l'échelle caractéristique de transition entre deux régimes distincts.

4.7 Application

Les résultats obtenus sur des réseaux réels de failles par Ouillon et al. (1995, 1996) sont suffisamment spectaculaires pour être repris ici. Outre les implications sur les processus de fragmentation et de fracturation, c'est la démarche que nous souhaitons résumer et illustrer. En effet, notre approche des problèmes d'analyse des fabriques mi nérales ou des distributions spatiales de séismes, détaillée plus loin, est très largement inspirée de ces travaux.

A titre d'exemple, l'analyse multi-échelle par la méthode OAWC d'une numérisation d'un champ de failles de 150 km de côté cartographié à l'échelle 1:250,000 (Carte E, Ouillon et al., 1996, Fig.2) est présentée en figure 4.10.

0

1

a

c

b

f

e

d

Figure 4.10: Application de la méthode OAWC à la carte E (Ouillon et al., 1996). (a) Image originale (256 x

256 pixels) et rose d'orientation correspondante. (b), (c), (d), (e) et (f) Cartes OAWC et rose d'orientation associée aux points soulignant les Lignes de Rupture Virtuelle (LRV) pour les résolutions a = 2, 4, 8, 16 et 32. Une première transition apparaît à a = 2 pixels et définit la limite supérieure d'une échelle caractéristique non définie. Une seconde transition apparaît entre a = 16 pixels et a = 32 pixels. Une analyse par dichotomie fixe cette transition à a = 17 pixels, soit une échelle de 21 km. Les niveaux de gris correspondent aux valeurs normalisées [0-1] des coefficients d'ondelette optimaux.

L'image originale a pour taille 256 x 256 pixels. L'analyse a été effectuée aux résolutions 2, 4, 8, 16 et 32 pixels. Le suivi au travers des échelles des roses d'orientation obtenues aux différentes résolutions font ressortir deux échelles caractéristiques (21km et 43km) correspondant à des transitions dans le comportement du réseau de failles. L'analyse multi-fractals donne une troisième échelle caractéristique à 12km (Ouillon et al., 1995).

4.8 Résultats et interprétations

L'analyse multi-fractals couplée à la méthode OAWC ont permis de faire ressortir des transitions dans le régime de fracturation de la plaque arabique. Ces transitions à 1m, 600m, 5km, 12km, 22km et 43 km sont reliées aux données structurales de la plaque arabique.

Les études de terrain ont montré que la couche superficielle de grès est comprise entre 1 et 2m d'épaisseur. Des forages dans la couverture sédimentaire de la formation complète de grès du Saq montrent que son épaisseur est d'environ 600m. D'autre part, des estimations sur l'épaisseur du bassin sédimentaire, avant érosion, donnent une épaisseur d'environ 5km (Castaing et al., 1996). Toutes ces épaisseurs se corrèlent bien avec les échelles caractéristiques précédemment associées à des transitions.

Les transitions à 12 et 22 km s'expliquent par la stratification thermique de la croûte continentale moyenne (Carter et Tsen, 1987). Sur les bases du géotherme continental de Mercier (Mercier, 1980), les profondeurs précédentes ont pu être associées aux variations de comportement mécanique du quartz (~11km, 300°C) et du feldspath (~21km, 450°C), respectivement. Enfin, des expériences de sismiques (Badri, 1991; Mechie et al., 1986) et des observations sismologiques (Niazi, 1968; Mokhtar et Al-Saeed, 1994) proposent une profondeur comprise entre 35 et 45km pour la discontinuité de Mohorovicic (limite entre la croûte et le manteau). Des résultats plus récents proposent quant à eux un Moho a une profondeur légèrement supérieure à 40km, résultat à rapprocher de la transition à 43km établie précédemment. Utilisant les données précédentes, la profondeur de la discontinuité de Conrad, marquant la transition entre la croûte supérieure et la croûte inférieure, est située entre 19 et 21km.

Ainsi, Ouillon et al. (1995, 1996) ont montré qu'à l'échelle de la plaque arabique, la fracturation n'est pas auto-similaire. Différentes échelles caractéristiques existent et se corrèlent bien avec l'épaisseur des différentes unités structurales de la croûte. Cette dépendance était déjà connue pour les fissures. En effet, il a été observé depuis longtemps que l'espacement entre les fissures d'une couche sédimentaire était de l'ordre de grandeur de l'épaisseur de la couche (Pollard et Ayadin, 1988; Narr et Suppe, 1991). Les résultats précédents tendent à généraliser cette observation à la croûte continentale de l'Arabie Saoudite qui de par sa structure tabulaire offre un jeu de données extraordinaire.

4.9 Conclusion et enseignements méthodologiques

En conclusion, la méthode OAWC est un outil sûr et objectif pour l'analyse multi- échelles des réseaux complexes de failles. Elle reprend les trois étapes principales (identification, représentation et classification) décrites par les astrophysiciens (Escalera et MacGillivray, 1995). Malgré le coût de la gestion de l'énorme quantité d'informations générée, l'utilisation des ondelettes anisotropes facilite la représentation des structures linéaires détectées. Basée sur la détection et la quantification des différents niveaux d'organisation d’une image (classification), la technique de "normalisation géométrique" proposée ne nécessite aucune hypothèse sur les lois "d'interaction microscopique". Son application peut donc être avantageusement généralisée à n'importe quel système où ces règles d'interactions sont inconnues.

Dans les chapitres suivants, nous proposons l'application de cette approche à l'étude de l'organisation minérale de roches magmatiques ainsi qu'à l'étude de la distribution spatiale de répliques d’un séisme. Un effort particulier est mené, pour réduire la quantité d'informations en trouvant un critère fixant le seuil au-delà duquel les structures détectées seront jugées statistiquement significatives.