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1.4 Estimation des propriétés hydrodynamiques d’un sol

1.4.3 Méthode indirectes

Les méthodes indirectes se basent sur des données de variations de teneurs en eau, de potentiels matriciels ou sur les paramètres physico-chimiques (granulométrie, pH, C.E.C5) du sol mesurées en conditions contrôlées ou naturelles et s’appuient sur des outils mathématiques afin de relier ces mesures aux paramètres hydrodynamiques des modèles présentés en 1.3.2.3. Dans une première partie nous présenterons les fonctions de pédotransfert puis dans une seconde partie nous présenterons les méthodes de modélisation inverse en mettant l’accent sur les différentes méthodes d’optimisation mathématique impliquées.

1.4.3.1 Fonctions de pédotransfert

Les fonctions de pédotransfert (FPT) permettent de relier les courbes de rétention ou de conductivité à des propriétés des sols simples à mesurer comme la texture, la teneur en matière organique, la teneur en éléments grossiers, la capacité d’échange cationique, la teneur en eau à des potentiels caractéristiques, etc.

A titre d’exemple, Rawls et Brakensiek ont élaboré la relation suivante :

è é

qui permet de relier la teneur en eau θ [m3.m-3] pour les potentiels h allant de -408 à -15.5.104 mm avec {a b c d e f g h} les coefficients de régression détaillés dans le Handbook of Hydrology (Maidment, 1993).

L’application de cette fonction nécessite la connaissance de la granulométrie du sol, de sa teneur en matière organique, de deux teneurs en eau à des potentiels fixés déterminées par une des méthodes de laboratoire précédemment évoquées (voir 1.4.1). Cela fait beaucoup d’information pour l’obtention de seulement une partie de la CRE.

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38 Il existe des versions simplifiées des formules de Rawls & Brakensiek qui ne nécessitent que la granulométrie et la porosité du sol pour déterminer 3 des 4 paramètres de la loi de Brooks & Corey :

Hbc = exp[5.34+0.18(C)-2.48(ϕ)-0.0021(C²)-0.044(S)(ϕ)-0.62(C)(ϕ)+0.0014(S²)(ϕ²)-0.0086(C²)(ϕ²)-0.000013(S²)(C) +0.0089(C²)(ϕ)-0.00072(S²)(ϕ)+0.0000054(C²)(S)+0.50(ϕ²)(C)]

λ = exp[-0.78+0.018(S)-1.06(ϕ)-0.000053(S² )-0.0027(C² )+1.11(ϕ² )-0.031(S)(ϕ)+0.00027(S² )(ϕ² )-0.0061(C² )(ϕ² ) -0.00000235(S² )(ϕ)+0.00799(C² )(ϕ)-0.0067(ϕ² )(C)]

θr = -0.018+0.00087(S)+0.0051(C)+0.029(ϕ)-0.00015(C²)-0.0011(S)( ϕ)-0.00018(C²)( ϕ²) +0.00031(C²)( ϕ)-0.0024(ϕ²)(C)

avec C le %Argiles, S le %Sables et ϕ la porosité.

Hbc, λ et θr, les trois paramètres du modèle de Brooks & Corey (eq. 1.13 et 1.15).

Enfin, il est possible d’obtenir une estimation des paramètres de la loi de Brooks & Corey en utilisant les formules proposées par Cosby (Cosby et al., 1984) dont l’équation et les paramètres sont regroupés dans le tableau 1-2.

Tableau 1-2: Fonction de pédotransfert de Cosby.

Function type f, with c1+c2.C+c3.S+c4.Si C = clay (%) S = sand (%) Si = silt (%) 10^ f 1/ f f 10^ f Coefficient hbc (cm) λ θs (%) Ks (cm/h) c1 1.54 3.1 50.5 -1.52 c2 0 0.157 -0.0337 -0.0163 c3 -0.0095 -0.003 -0.142 0.0320 c4 0.0063 0 0 0

Il n’existe pas de fonction « simple », n’utilisant que les propriétés texturales du sol, qui permette d’estimer directement les paramètres du modèle de Mualem – van Genuchten. En revanche, il est possible de passer des paramètres du modèle de Brooks & Corey à ceux de Mualem – van Genuchten grâce à des équivalences (tableau 1-3).

Tableau 1-3 : Equivalences des paramètres des modèles de Mualem - van Genuchten et Brooks - Corey

Modèle Mualem – van Genuchten Modèle Brooks & Corey Equivalence

θr θr θr = θr θs θs θs = θs α hb α = hb -1 n λ n = λ+1 Ks Ks Ks = Ks

39 De nombreuses études portent sur la qualité des prédictions des fonctions de pédotransfert que ce soit en fonction des données d’entrées utilisées et de la complexité des fonctions ou en fonction des bases de données utilisées pour la construction de ces fonctions de pédotransfert (Al-Majou et al., 2007; Guber and Pachepsky, 2010; Vereecken et al., 2010; Wösten et al., 2001). Il ressort de ces études que leur utilisation est extrêmement liée au type de sol rencontré sur la zone étudiée et à sa représentativité dans la base de données à partir de laquelle là ou les fonctions utilisées ont été développées. Dans le cas d’une zone d’étude où le sol n’est pas ou très peu connu, les propriétés hydrodynamiques estimées par ces méthodes sont assez loin des propriétés réelles du sol.

1.4.3.2 La modélisation inverse

1.4.3.2.1 Présentation du principe de modélisation inverse

Le but des méthodes de modélisation inverse est d’obtenir une estimation des paramètres des courbes de conductivité hydraulique et de rétention en eau à partir d’observations de variables de sortie (variations de teneur en eau du sol, débits, potentiels matriciels,…) connaissant les variables de forçage du système étudié (pluie, demande évapotranspiratoire dans le cas où l’évapotranspiration est prise en compte). Le principe simplifié est représenté sur la figure 1-11 :

Figure 1-11: Illustration du principe de modélisation directe (en haut) et de modelisation inverse (en bas).

En pratique, les méthodes de modélisation inverse sont des méthodes de calage automatisées qui minimisent l‘écart entre des séries de variables mesurées et simulées (la teneur en eau du sol dans le cadre de ce travail). La méthode d’inversion se base sur les valeurs initiales des paramètres, dites a

priori pour obtenir les valeurs optimisées au bout d’un certain nombre d’itérations. On appelle

dimension du problème le nombre de paramètres à inverser (i.e. le nombre de degrés de liberté du

40 On appellera par la suite système le sol dont on souhaite modéliser le fonctionnement hydrologique en se basant sur le modèle de Mualem – van Genuchten, les 6 paramètres à inverser sont donc a priori : θr, θs, α, n, Ks et l pour chaque horizon du sol. Les variables à représenter peuvent être des chroniques de mesures de θ et/ou h avec comme données d’entrée les précipitations.

Afin d’évaluer l’écart entre les sorties de simulations et les observations, on définit une ou plusieurs

fonctions objectif (OF) basées sur différents critères d’écarts mathématiques (moindres carrés,

logarithmes, décalage dans le temps,…). Au minimum commun des OF correspond le jeu de paramètres optimal pour le système étudié.

Pour que le problème inverse soit correctement posé il doit vérifier les conditions suivantes :

 Existence : il existe une fonction qui satisfait les équations modélisant le système. Si on souhaite estimer plus de paramètres qu’il n’en existe dans le modèle utilisé la condition d’existence n’est pas réalisée d’où l’importance du choix du modèle.  Unicité : la solution du problème d’optimisation est unique.

 Stabilité : les variations de la solution sont d’autant plus petites que l’on choisit des variations d’entrée suffisamment faibles.

Dans le cadre de l’application de cette méthode à l’estimation des paramètres hydrodynamiques des sols, plusieurs manquements à ces conditions peuvent apparaitre :

 Les paramètres des modèles sont rarement indépendants et empêchent souvent l’hypothèse d’unicité (problème d’équifinalité).

 La qualité et la quantité d’observations disponibles varient d’un site à un autre ce qui limite la condition de stabilité dans certains cas.

 Si le modèle choisi n’est pas suffisamment proche de la réalité (processus non représentés, ou insuffisamment) il est possible que le modèle ne soit pas en mesure de fournir de prédictions correctes.

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1.4.3.2.2 Présentation des algorithmes d’optimisation

Une fois le problème d’inversion posé, il est nécessaire de faire appel à un algorithme qui va rechercher la ou les solutions possibles à ce problème.

Les différents algorithmes peuvent être divisés en deux familles :

- Les algorithmes d’optimisation locale - Les algorithmes d’optimisation globale

Dans le premier cas, on recherche la solution du problème d’inversion en partant d’un point de départ dans l’espace des paramètres et en évoluant à partir de ces points au moyen d’une méthode de recherche itérative déterministe. On parle de méthodes heuristiques.

Un des algorithmes les plus simples couramment utilisé est celui de Levenberg-Marquart (Levenberg, 1944; Marquardt, 1963) qui est basé sur la minimisation de l’écart quadratique entre les séries mesurées et les séries simulées selon la méthode du plus faible gradient et de la méthode de Gauss-Newton.

Cette méthode est initialement prévue pour la résolution de systèmes linéaires et présente deux inconvénients majeurs (Vrugt et al., 2008):

 La méthode des gradients se trouve facilement piégée par les minima locaux qui sont fréquents dans le cas de l’inversion des paramètres hydrodynamiques qui ne sont pas indépendants. Ce problème est d’autant plus important que le nombre de variables à optimiser est grand ;

 La plupart des problèmes d’inversion posés en hydrodynamique des sols ne présentent pas suffisamment de données pour contraindre tous les paramètres à caler ce qui diminue d’autant les chances de trouver une solution unique.

Il a été montré notamment par Šimůnek et Hopmans (Šimůnek and Hopmans, 2002) ainsi que par Vrugt et Bouten (Vrugt and Bouten, 2002) que ces méthodes heuristiques n’était pas fiables pour l’estimation de nombreux paramètres ou pour l’étude de sols fortement hétérogènes. Ce sont néanmoins des méthodes rapides et peu complexes ce qui explique leur utilisation fréquente (Inoue et al., 2000; Schneider, 2010; Šimůnek and van Genuchten, 1996) (Jacques et al., 2002; Jhorar et al., 2002) et leur implémentation dans le logiciel d’optimisation PEST (Doherty, 2003) ou le logiciel de modélisation des transfert d’eau, de solutés et de chaleur HYDRUS-1D (Šimůnek et al., 1998).

42 Dans le second cas, l’algorithme est capable de rechercher une solution globale à travers l’espace des paramètres. On parle de méthodes stochastiques.

Beaucoup de méthodes stochastiques sont en fait basées sur une méthode heuristique mais avec un grand nombre de points de départ afin d’explorer plus largement l’espace des paramètres et de réduire leurs chances de rester piégés dans un minimum local (Spall, 2004).

Sont regroupés dans le tableau 1-4 les trois algorithmes ou familles d’algorithmes les plus utilisés ces dernières années pour l’estimation des propriétés hydrodynamiques des sols en conditions non-saturées ainsi que les données d’entrées utilisées, le pas de temps utilisé pour les mesures et le type de mesures effectuées.

Tableau 1-4: Algorithmes stochastiques les plus utilisés, type d'expérimentation et données d'entrés utilisées.

Algorithme Etude Donnée

d’entrée pas de temps de mesure Type d’expérimentati on Shuffle Complexe Evolutionnary Algorithm (SCE-UA et SCEM-UA)

(Durner et al., 2008) θ + h Jours Laboratoire

(Jadoon et al., 2012)

Ground penetrating

radar + θ

Jours Champ

(Pollaco et al., 2013) θ Jours Champ

(Schelle et al., 2013) h Jours Lysimètre

Genetic Algorithm

(Wöhling et al., 2008) θ+h 15 min Champ

(Charoenhirunyingyosa et

al., 2011) ETP + θ Jours Champ

(Köhne et al., 2011) h min Laboratoire

A Multi-Algorithm Genetically

Adaptative Method (AMALGAM)

(Wöhling et al., 2008) θ 15 min Champ

(Wöhling and Vrugt, 2011) θ+h 15 min Champ

(Köhne et al., 2011) h min Laboratoire

43 L’algorithme SCE6

-UA (Duan et al., 1993) est une généralisation de la méthode d’optimisation heuristique basée sur le simplex de Nelder – Mead mais appliqué à une population de taille s=m*p formée par p sous-groupes (les complexes) de m individus. Pour la phase d’optimisation, il combine le principe d’évolution de population que l’on trouve dans les algorithmes génétiques de première génération avec un mélange complexe 7 des solutions intermédiaires qui permet d’éviter les minima locaux. Dans sa version évoluée, SCEM-UA (Vrugt et al., 2003b), l’algorithme Metropolis remplace la méthode du simplex dans l’évolution des individus des différents complexes et permet d’ajouter la notion d’incertitude à l’algorithme initial.

Les algorithmes génétiques (modified-microGA (Ines and Droogers, 2002), NSGA 8(Srinivas and Deb, 1995) et NSGA-II (Deb et al., 2002) par exemple) se basent également sur une population initiale dont la taille dépend du nombre de paramètres à estimer et du nombre de fonction objectif utilisée mais dont l’évolution se fait par transformation des paramètres de départ selon des règles tirées de la génétique : la mutation et le crossing-over. La hiérarchisation de la population permet la conservation des meilleurs individus et la convergence de l’algorithme vers la solution globale. Enfin l’approche par méthodes multiples dont la version la plus utilisée pour l’étude des propriétés hydrodynamiques des sols est AMALGAM9(Vrugt and Robinson, 2007) combine les forces et les avantages des algorithmes NSGA-II, DE10 (Storn and Price, 1997), AMS11 (Haario et al., 2001) et PSO12 (Kennedy et al., 2001) pour chaque individu de la population de départ formée par la méthode des hypercubes latins afin de converger plus rapidement vers l’optimum global du problème à résoudre.

Ces algorithmes sont plus performants que les méthodes heuristiques (Vrugt et al., 2003a; Wöhling et al., 2008; Zhu et al., 2007) et plus robustes face aux problèmes d’équifinalité (Durner et al., 2008; Köhne et al., 2011; Wollschläger et al., 2009) mais nécessitent des temps et des capacités de calculs plus important proportionnels à leur complexité.

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Shuffled complex Evolution algorithm

7

Complexe shuffling

8

Non-dominated sorting Genetic Algorithm

9

A Multi ALgorithm Genetically Adaptative Method

10

Differential Evolution

11

Adaptative Metropolis Sampling

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44 Il existe d’autres algorithmes et combinaisons utilisés dans la recherche des paramètres hydrodynamiques des sols mais leur utilisation est moins courante. Pour plus d’informations, nous conseillons la lecture de la synthèse de Vrugt et al. (Vrugt et al., 2008)).