• Aucun résultat trouvé

Les mécanismes induits par les Dnmt et les MBD a. Les mécanismes de verrouillage

Rappelons que la répression génique induite par les Dnmt et les MBD, est basée non seulement sur la méthylation de l’ADN mais également sur leur coopération avec d’autres protéines intervenant dans le remodelage de la chromatine comme des HKMT, des ATPases et des HDAC [3]. En effet, c’est un ensemble de réarrangements épigénétiques qui permet à une région génomique d’atteindre un état de verrouillage définitif et stable (Figure 16). En général, la méthylation de l’ADN ne semble pas être l’événement initial de ce verrouillage génique mais semble être impliquée dans le maintien et la propagation de l’état silencieux [76].

- La connexion avec les complexes de remodelage ATP-dépendants

Chez Arabidopsis thaliana, le gène DDM1 (Decrease in DNA methylation 1) code pour une protéine SNF-2 like. Lorsque ce gène est muté, il y a une diminution globale de la méthylation de l’ADN et une diminution de la méthylation en H3-K9 ainsi qu’une augmentation de la méthylation en H3-K4 [150]. Ce lien est également établi dans les cellules de mammifères par l’étude de Lsh, une hélicase lymphoïde-spécifique appartenant au complexe SWI/SNF et qui présente l’homologue humain de DDM1. Lorsque le gène Lsh est invalidé chez la souris, les souris ont un développement embryonnaire normal mais

meurent environ 13 jours après leurs naissances; présentant un génome globalement déméthylé [151]. D’autre part, la protéine ATRX, codant également pour une protéine SWI/SNF-like chez l’humain se trouve muté dans la α-thalassémie, qui est un syndrome de retard mental lié au chromosome X. Les mutations dans le gène ATRX entraînent des changements globaux de la méthylation de l’ADN [152].

Un lien encore plus direct entre la méthylation de l’ADN et le remodelage de la chromatine a été établi récemment par la découverte que les méthyltransférases de l’ADN, Dnmt1 et Dnmt3b, interagissent directement avec l’ATPase hSNF2H [153, 154]. Ainsi, l’activité méthyltransférase, recrutée par hSNF2H, est modulée par la structure nucléosomale de l’ADN (un ADN plus compact comportant plusieurs nucléosomes est méthylé davantage qu’un ADN mono-nucléosomal). Dnmt3b est également retrouvé dans un complexe contenant les protéines hSNF2H, HDAC1, Sin3A, HP1, Suv39H1 ainsi qu’un complexe de coésine responsable de la condensation de la chromatine [121].

Toutes ces études indiquent que le remodelage de la chromatine est probablement un prérequis pour que l’ADN devienne un substrat pour la méthylation.

- La connexion avec la désacétylation d’histones

Comme nous l’avons déjà mentionné précédemment, les Dnmt aussi bien que les MBD sont capables d’interagir avec des HDAC et d’entraîner une désacétylation d’histones provoquant ainsi une condensation de la structure de la chromatine et donc une répression de la transcription. En effet, des travaux initiaux de A.Bird et A.Wolffe ont révélé cette relation mécanistique entre la méthylation de l’ADN et la désacétylation d’histones, en montrant notamment que les MBD recrutent des HDAC au niveau des séquences génomiques méthylées, ce qui a pour effet de désacétyler les histones et de maintenir une structure condensée de la chromatine [133, 155]. Un autre exemple de cette coopération épigénétique entre MBD et HDAC est le complexe NuRD dont nous avons parlé

précédemment et qui regroupe une ATPase (Mi-2), des HDAC (HDAC1 et HDAC2) ainsi qu’une MBD (MBD3) [33, 156].

D’autre part, les Dnmt peuvent réprimer la transcription d’une manière dépendante ou indépendante de la méthylation de l’ADN. En effet, des Dnmt interagissent avec des HDAC permettant, entre autres, une désacétylation d’histones sans qu’il y ait obligatoirement intervention de leur activité méthyltransférase. Par exemple, dans le cadre de l’interaction de Dnmt3a avec le répresseur transcriptionnel séquence-spécifique RP58, Dnmt3a agit comme co-répresseur sans faire intervenir son activité méthyltransférase de l’ADN mais en recrutant une HDAC [38]. Lorsque Dnmt1 interagit avec l’oncoprotéine Rb, il y a également induction d’une répression indépendante de l’activité méthyltransférase mais dépendante de la déasacétylation d’histones via l’interaction de Dnmt1 avec HDAC1 [103].

- La connexion avec la méthylation d’histones

Certains résidus lysines méthylés des histones et en particulier la méthylation de H3-K9, sont directement corrélés à un état répressif de la chromatine (I.3.3.b). Des travaux chez la plante Arabidopsis thaliana et chez le champignon Neurospora crassa ont montré que la méthylation d’histones peut diriger la méthylation de l’ADN. En effet, des mutations dans les gènes dim-5 chez Arabidopsis thaliana et kryptonite chez Neurospora crassa, codant tous les deux pour des HKMT méthylant en H3-K9, provoquent une nette réduction de la méthylation de l’ADN [157, 158]. Une relation inverse entre la méthylation de l’ADN et la méthylation d’histones semble également de mise car MBD1 et MeCP2 sont décrits comme étant capables de recruter une activité méthyltransférase d’histones au niveau de l’ADN méthylé entraînant ainsi une méthylation en H3-K9 [134, 142].

Des études très récentes ont montré un lien direct entre les Dnmt et la méthylation d’histones. Effectivement, comme nous l’avons déjà mentionné, il y a une interaction physique entre les Dnmt, Dnmt1 et Dnmt3a, et la HKMT,Suv39H1, ainsi qu’une association des deux activités de remodelage [99].

b. Les mécanismes de ciblage

Il est certain que l’interconnectivité des protéines intervenant dans le remodelage de la chromatine permet un ciblage des complexes multi-protéiques contenant chacun une combinaison précise de protéines (Figure 16). Ainsi, par exemple, les complexes de répression contenant des MBD sont ciblés au niveau des sites méthylés, comme nous l’avons illustré précédemment dans le point I.4.6..

En revanche, peu de données sont disponibles en ce qui concerne les mécanismes permettant le ciblage de la méthylation de l’ADN au niveau de séquences spécifiques de l’ADN. Comme décrit ci-dessus, les Dnmt peuvent interagir avec des facteurs de transcription séquence-spécifique, comme Rb, RP58 et PML-RAR (Figure 17). Néanmoins, dans le cas de l’interaction avec l’oncoprotéine PML-RAR, il y a une répression de l’expression d’un gène cible de PML-RAR, le gène RARβ, par méthylation de sa région promotrice [104] ; dans les deux autres cas, seule l’activité HDAC associée intervient dans la répression génique de gènes cibles. Dès lors, le recrutement des Dnmt pourrait, au moins partiellement, s’opérer via des interactions protéine-protéine et d’autres facteurs de transcription pourraient être impliqués (voir But du travail).

c. Le contrôle épigénétique de la transcription

La régulation de la transcription par l’épigénétique dépend de l’équilibre entre les activateurs et les répresseurs de la transcription ainsi que des boucles de régulation entre les différentes modifications épigénétiques (Figure 18). La combinaison des différentes modifications épigénétiques conduit à une sorte de marquage du gène le rendant soit actif soit réprimé pour la transcription [3].