• Aucun résultat trouvé

Le transfert de l’eau dans les milieux poreux est complexe, plusieurs mécanismes sont im-pliqués dans ce phénomène : la perméabilité, la diffusion, la désorption, l’évaporation. Lors d’un séchage sous des humidités et des températures intermédiaires (HR ≈ 50%, T ≈ 20 ˚C), la perméabilité de l’eau liquide et la diffusivité de la vapeur semblent prédominantes [Baroghel-Bouny, 1994]. Ces phénomènes sont brièvement décrits.

2.2.1 La diffusion

Dans l’air, les molécules d’eau sont présentes dans la vapeur. Si la concentration molaire des molécules d’eau dans la vapeur n’est pas uniforme, les molécules présentes dans les zones à forte densité se déplacent vers les zones à faible densité. Hors milieu poreux, le flux molaire de

ces molécules dans l’air immobile, Jv

mol, s’exprime par une loi de Fick, où D0

v est la diffusivité

de la vapeur d’eau exprimée en m2.s−1 dans la phase gazeuse et cvla concentration molaire de

vapeur [Crank et al., 1975] :

Jvmol= −D0vgradcv (2.7)

La vapeur est considérée comme un gaz parfait, le flux massique, Jv

m, de vapeur d’eau peut

s’exprimer en fonction de la pression de vapeur d’eau, Pv, selon l’équation suivante où Mv est

la masse molaire de l’eau :

Jvm= −D

0 vMv

RT gradPv (2.8)

Dans le cas d’un milieu poreux désaturé, la diffusivité de la vapeur n’est pas égale à la diffusivité de la vapeur dans l’air [Troeh et al., 1982]. La géométrie du réseau poreux doit être prise en compte via la porosité, la tortuosité, la proportion de pores non connectées...

2.2.2 La perméabilité

Dans un milieu poreux isotrope complètement saturé, si le gradient de pression hydrosta-tique n’est pas nul, alors le fluide s’écoule dans ce milieu. La loi de Darcy relie la vitesse

Mécanismes de transfert dans les milieux poreux 47

moyenne (ou flux volumique), vl, de cet écoulement supposé laminaire au gradient de pression,

Pl, via la perméabilité intrinsèque, Kl, et la viscosité dynamique, µl:

vl= −Kµl

lgradPl (2.9)

Le concept de perméabilité s’applique également pour les gaz. Dans un matériau, si le réseau poreux est occupé par un fluide sous phase gazeuse, alors l’existence d’un gradient de pression entraîne un écoulement.

Pour un écoulement monophasique, la perméabilité intrinsèque ne dépend pas du fluide occu-pant le réseau poreux. La perméabilité mesurée doit par conséquent être identique quel que soit le fluide utilisé pour la mesurer. Cependant, dans le cas d’un gaz, l’effet Klinkenberg introduit un écoulement par glissement qui est absent dans le cas d’un écoulement d’un fluide liquide (écoulement purement visqueux). Néanmoins, si la perméabilité intrinsèque au gaz est corrigée afin de ne pas considérer cet écoulement par glissement, sa valeur est égale à celle mesurée à l’aide d’un fluide liquide. Ainsi, Loosveldt et al. mesurent des perméabilités au gaz et à l’éthanol du même ordre de grandeur [Loosveldt et al., 2002]. En revanche, la perméabilité à l’eau liquide amène des conclusions différentes. Tsivilis et al. mesurent une perméabilité intrinsèque au gaz 10 fois plus importante que la perméabilité à l’eau [Tsivilis et al., 2003]. Cette observation est également faite par Loosveldt et al.. Cette différence de comportement lors de mesures par eau liquide s’explique souvent par les interactions qui existent entre l’eau et la matrice du réseau poreux. Cette explication est à cependant nuancer, Hearn et Morley montrent que la mesure de la perméabilité à l’eau est fortement influencée par le pré-traitement du matériau [Hearn et Mor-ley, 1997]. Ces auteurs observent une différence sur la perméabilité mesurée de deux ordres de grandeurs entre un béton qui n’a jamais subi de dessiccation et un béton qui a subi un protocole

similaire à celui utilisé pour la mesure de la perméabilité au gaz1. Les écarts constatés entre

perméabilité au gaz et à l’eau ne pourraient être qu’une conséquence de la micro-fissuration induite par le séchage.

Néanmoins, parler de perméabilité intrinsèque pour la perméabilité à l’eau liquide peut être considéré comme un abus de langage, certains auteurs, lui préfèrent la notion de perméabilité saturée à l’eau. Dans ce travail, le terme de perméabilité intrinsèque est conservée en dépit de son caractère approximatif.

2.2.3 Mécanismes de transferts dans un milieu poreux non saturé

Le béton est un milieu poreux où coexistent une phase liquide et une phase gazeuse. La migration vers le milieu extérieur d’une molécule d’eau qui est initialement à l’état liquide peut ainsi mettre en œuvre plusieurs mécanismes de transferts et plusieurs changement d’états successifs [Baroghel-Bouny, 1994]. Lorsque l’humidité relative diminue, les pores se vident progressivement, il y a évaporation de l’eau qui migre alors par diffusion (figure 2.2). En re-vanche, les pores de petite dimension restent saturées en eau. Si cette partie du réseau poreux saturée en eau est connectée, la perméabilité reste le principal mécanisme de transfert dans cette

zone. De même, la partie du réseau poreux partiellement saturée voit certains de ses pores satu-rés en eau (mais non connectés entre eux).

FIGURE2.2: Mécanisme de transfert pour des humidités relatives intermédiaires

2.2.3.1 Perméabilité et diffusion dans un milieu poreux non saturé

La non-saturation du réseau poreux complexifie la modélisation des mécanismes de trans-fert, les relations proposées précédemment doivent être modifiées en conséquence. Le facteur déterminant à considérer est le degré de saturation du matériau. S’il est élevé, le réseau est ma-joritairement occupé par la phase liquide, un large chemin de perméabilité permet à l’eau de partir vers le milieu extérieur. Inversement, si le degré de saturation est faible, la diffusivité sera le principal moteur. En conséquence, les équations 2.8 et 2.9 sont modifiées : les coefficients de diffusivité et de perméabilité ne sont plus constants, ils dépendent de l’état de saturation et de

la porosité du matériau. Les flux massiques d’eau transférés par diffusion, Jv

m, et par

perméabi-lité, Jl

m, obéissent aux relations suivantes où De f fv et Kle f f sont la diffusivité et la perméabilité

effectives du milieu poreux non-saturé :

Jvm= −D e f f v Mv RT gradPvavec De f fv = De f fv (p, Sl) (2.10) Jlm= −ρlKle f f µl gradPl avec Kle f f = Kle f f(Sl) (2.11) 2.2.3.2 Isothermes d’adsorption/désorption

Le problème de la dessiccation du béton nécessite la connaissance de la relation entre le degré de saturation et l’humidité relative. En effet, l’humidité relative caractérise l’équilibre entre l’eau liquide et la vapeur, le degré de saturation caractérise la teneur en eau liquide du matériau. La relation entre ces deux grandeurs est établie grâce à l’isotherme de désorption (ou d’adsorption) du matériau. L’isotherme de désorption représente l’évolution de la teneur en

eau2 en fonction de l’humidité relative lorsque l’équilibre hydrique est atteint dans le béton.

Mécanismes de transfert dans les milieux poreux 49

Quelques exemples d’isothermes de désorption de plusieurs pâtes de ciment [Baroghel-Bouny,

2007] sont tracés sur la figure 2.3. Les évolutions des degrés de saturation associés, Sl, sont

tracées sur la figure 2.3(b). Pour des humidités relatives faibles ( HR < 40% ), les isothermes

de désorption ne sont que très peu dépendantes du matériau cimentaire3. En revanche, pour

les niveaux d’humidités relatives compris entre 40% et 100%, les isothermes sont nettement distincts. Or l’humidité relative interne d’une structure en béton se situe dans cette gamme de valeurs.

De plus, l’humidité relative ambiante n’est pas constante, le béton passe donc par des cycles

20 40 60 80 100 10 20 30 RH(%) Mass w ater content (%) w/c = 0.20, SF/C=0.10 w/c = 0.35 w/c = 0.45 w/c = 0.60

(a) Isothermes de désorption

20 40 60 80 100 0.2 0.4 0.6 0.8 1 RH(%) Sl w/c = 0.20, SF/C=0.10 w/c = 0.35 w/c = 0.45 w/c = 0.60 (b) Sl= f (HR)

FIGURE2.3: Isothermes de désorption [Baroghel-Bouny, 2007]

de désorption/adsorption. Or, un hystérésis important est observé lors de ces cycles. Cependant, dans une structure avec une géométrie massive, seul le béton qui se trouve en peau de la structure est impacté par ces changements d’ambiance. De plus l’ambiance autour de l’enceinte de confi-nement interne est régulée en température et en humidité. Les cycles de séchage/humidification de l’enceinte ont par conséquent une amplitude réduite et peuvent être négligés.

2.2.3.3 Conclusions

Le transfert de l’eau dans le béton est particulièrement complexe. Même lors d’un séchage à des humidités ambiantes intermédiaires (HR ≈ 50%), les mécanismes de transfert sont mul-tiples et difficiles à identifier. Cependant, il semble que le transport de l’eau dans le réseau poreux passe par des mouvement darcéens de sa phase liquide et par la diffusion de la vapeur dans l’air sec. La saturation partielle du matériau rend délicate la modélisation de ces phé-nomènes. D’autres difficultés sont soulevées par ce problème : l’interaction de l’eau avec la matrice cimentaire, l’hystérésis observé lors des cycles de séchage/humidification.

3. D’après Baroghel-Bouny, la dessiccation des C-S-H se produit sous ce niveau d’humidité relative, or leur structure n’est que peu sensible au rapport e/c.

De plus, l’identification de paramètres fondamentaux de ce problème repose sur l’isotherme de désorption du béton. Or, cette donnée ne peut être obtenue qu’à partir d’échantillons de volume très faible. La représentativité de tels spécimens est alors discutable dans le cas du béton. Malgré ces obstacles, une modélisation est proposée et validée, la partie suivante la présente.

Documents relatifs