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7.2 Modélisation du fluage de dessiccation

7.2.2 Couplage fluage-retrait

La mise en évidence de l’effet de Pickett a démontré que fluage et retrait sont couplés. L’existence de la déformation de fluage de dessiccation permet d’exprimer ce couplage à tra-vers l’ajout d’une déformation différée supplémentaire. Plusieurs travaux montrent une relation de proportionnalité entre le fluage de dessiccation et le retrait de dessiccation [lqbal Ali et Kes-ler, 1964][Gamble et Parrott, 1978]. Cette observation a conduit les auteurs à proposer la loi suivante :

εdc = λdcεshσ où λdcest une constante (7.2)

D’autres auteurs [Bazant et Chern, 1985] proposent de relier le fluage de dessiccation à l’évo-lution de l’humidité relative interne selon l’équation 7.3. Ces deux relations ne sont pas contra-dictoires car pour des vitesses de séchage lentes (et donc représentatives de celle d’un essai de retrait classique) le retrait de dessiccation dépend quasi-linéairement de l’humidité relative interne dans la gamme d’humidité relative 50-100%.

˙εdc= λdc|˙h|σ (7.3)

F. Benboudjema propose de modéliser le fluage de dessiccation intrinsèque par une chaîne de Kelvin-Voigt où la viscosité de l’amortisseur est inversement proportionnelle à la variation d’humidité relative [Benboudjema, 2002]. Cette modélisation autorise une recouvrance à la dé-charge.

Enfin, à partir du mécanisme du fluage de dessiccation proposé (figure 7.2), A. Sellier propose une modélisation qui ne fait pas intervenir le fluage de dessiccation. La déformation addition-nelle observée est prise en compte via une modification du module de Biot du matériau. Ce dernier est dépendant de la contrainte appliqué [Sellier et al., 2012][Sellier et Buffo-Lacarrière, 2009]. Le retrait de dessiccation est alors dépendant de l’état de contrainte dans le béton. Le modélisation implantée dans le code CAST3M est très proche de celle proposée par Gamble et Parrott :

˙εdc= λdc|˙εsh(7.4)

Retrait et fluage de dessiccation sont donc dépendant l’un de l’autre. La question de la dé-pendance entre fluage propre et retrait endogène se pose alors, faut-il introduire un fluage de retrait endogène ? Cette interrogation est particulièrement pertinente pour les bétons nouveaux qui présentent des déformations de retrait endogène importantes. Plusieurs travaux mettent en évidence la relation entre fluage propre et retrait endogène [Pons et al., 2003][Sicard et al., 1996]. Des éprouvettes de béton avec un faible rapport e/c (e/c = 0.3) sollicitées à 4 niveaux de chargement ont des complaisances de fluage propre identiques [Lee et al., 2006]. Ce constat implique que soit le retrait endogène est indépendant de la contrainte σ (et par conséquent que

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le fluage de retrait endogène n’existe pas), soit il en dépend de la même manière que le fluage

propre (relation linéaire si σ < 0.4 fc). Les auteurs en concluent que la prise en compte d’un

possible fluage de retrait endogène ne présente pas d’intérêt. Cette affirmation est vraie si la cinétique de l’évolution du retrait endogène reste la même quel que soit le cas étudié. Or dans le cas d’une structure massive, l’augmentation de la température en cœur change cette cinétique. Il faudrait alors vérifier que cette possible déformation ne dépend pas de la cinétique du retrait endogène.

Le fluage de dessiccation est tracée en fonction du retrait de dessiccation sur la figure 7.6. Les différentes campagnes menées montrent que ce dernier est proportionnel au fluage de dessicca-tion. La recouvrance est également tracée en fonction du retrait, une relation linéaire est obser-vée. La contrainte de compression était égale à 10.2MPa lors ces campagnes expérimentales.

Gamble et Parrott avaient compilé les différentes données portant sur λdcen fonction du rapport

e/c, les résultats obtenus les conduisirent à proposer une relation entre λdc et e/c. Ces données

sont reprises et complétées par des travaux plus récents sur la figure 7.7, la relation reliant λdc

à e/c est également tracée. Même si peu de résultats existent sur pâte de ciment, le paramètre eau/ciment semble avoir le même impact sur le béton et la pâte de ciment. Cette observation est surprenante car si le fluage de dessiccation fait intervenir un mécanisme de type endomma-gement, l’interface de transition devrait jouer un rôle important et induirait des différences de comportement majeures entre le béton et la pâte de ciment. Si cet endommagement existe, sa principale cause serait la restreinte des déformations de retrait des C-S-H par les anhydres et les autres hydrates insensibles au séchage.

Lors d’une ré-humidification, une déformation additionnelle de fluage est observée. Elle est proportionnelle au gonflement libre mais de sens opposée [Day et al., 1984][Gamble et Parrott, 1978] et est appelée déformation de fluage de ré-humidification. Cette déformation a cependant une amplitude moins important que le fluage de dessiccation. Ainsi, toute variation de volume de la matrice cimentaire entraîne une déformation de fluage additionnelle.

Lors de la décharge, la déformation de fluage de dessiccation n’est pas irréversible dans les essais réalisés. De plus, la relation entre la recouvrance du fluage de dessiccation et le retrait de dessiccation est quasiment la même que celle qui lie ce dernier au fluage de dessiccation. Pour la campagne 2 (resp. 5), le facteur de proportionnalité est égal à 0.984 (resp. 1.09) lors du chargement et à -1.4 (resp. -1.074) lors de la décharge. L’existence d’une recouvrance du fluage de dessiccation est confirmé par Gamble et Parrott. Sur pâte de ciment, Day et al. trouvent un résultat contradictoire. Cependant, dans leur travail, la recouvrance est étudiée pour une pâte de ciment qui a atteint son équilibre hydrique, la déformation volumique due à la contrainte hy-drique est donc très faible, cette observation est certainement à l’origine de cette différence de comportement.Comme lors d’une décharge en conditions endogène, une déformation de recou-vrance est donc observée pour le fluage de dessiccation (si le béton n’a pas atteint son équilibre hydrique).

0 100 200 300 400 500 0 100 200 300 400 500 εsh(µstrain) εdc (µs tr ain ) Campagne 2 εdc σ = 0.965.10−7εsh+ 1.44.10−12 εdc= −1.40εsh+ 9.67.10−4 Campagne 5 εdc σ = 1.07.10−7εsh+ 1.556.10−12 εdc= −1.074εsh+ 7.27901−4

FIGURE7.6: Évolution de la déformation de fluage de dessiccation en fonction du retrait de

dessiccation

7.2.3 Conclusion

La modélisation du fluage de dessiccation implantée dans CAST3M repose sur plusieurs ob-servations expérimentales. Dans ce modèle, le fluage de dessiccation est considéré comme un accroissement du retrait sous contrainte. La simplicité de cette relation ne permet pas de retrou-ver certaines constations : recouvrance du fluage de dessiccation, facteurs de proportionnalité différents entre un cycle de séchage et un cycle de réhumidification. De même, plusieurs des caractéristiques du fluage de dessiccation (ou de ré-humification) laissent à penser qu’il s’agit plutôt d’un accroissement du fluage sous dessiccation.

Néanmoins, l’objectif de ce travail est de proposer une relation pour traiter le problème du vieillissement des enceintes de confinement. Durant leur durée de vie, ces structures subissent des cycles de séchage-humidification qui ne les affectent qu’en surface, de même, les contraintes mécaniques ne changent de signe que lors des épreuves décennales. Les déformations à long terme ne sont donc que faiblement impactées par les problèmes mentionnés ci-dessus.

Enfin, l’identification du facteur de proportionnalité, λdcdans ce travail suppose qu’il ne dépend

pas de la cinétique du retrait de dessiccation. Les travaux de Day et al. démontrent que cette hypothèse est fausse pour de fortes vitesses de séchage (non-représentatives de celles observées sur une structure massive). Malheureusement, des résultats relatifs à des gammes de cinétiques de séchage et de variations de contraintes mécaniques pertinentes pour ce travail ne sont pas disponibles dans la littérature.

Modélisation du fluage de dessiccation 169 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 0 5 · 10−2 0.1 0.15 0.2 0.25 w/c λd c (M Pa 1) Cement paste [Parrott, 1977] [Day et al., 1984] Concrete [Parrott, 1970] [Gamble et Parrott, 1978] [lqbal Ali et Kesler, 1964] [Troxell et al., 1958] [Keeton, 1965] [Granger, 1995] [Reviron, 2009] compression traction

[Rossi et al., 2013a] Present work

Interactions fluage-fissuration-séchage

Cette partie est dédiée aux interactions entre fluage, fissuration et séchage. Sous charge-ments mécaniques importants, fluage et fissuration sont fortement liés (section 4.2.6.2). Cepen-dant, dans un ouvrage de génie civil courant, ce genre de sollicitation est rarement atteint. Ainsi, la précontrainte de l’enceinte de confinement interne est telle que fluage propre et contrainte sont proportionnels. À l’échelle du matériau béton, pour ces contraintes intermédiaires, le calcul des déformations de fluage dans le béton n’est pas lié à l’endommagement.

Pourtant, pour certains auteurs, le mécanisme moteur du fluage propre est lié à la micro-fissuration [Rossi et al., 2012] de la pâte de ciment. À l’inverse, d’autres suggèrent que cette déformation différée trouve sa source dans la nature visqueuse des C-S-H [Acker et Ulm, 2001]. Pour ces deux points de vue, l’eau présente dans le béton joue un rôle fondamental. Cette question est abordée à travers une série d’essais où l’impact du fluage et/ou de la fissuration sur la dessicca-tion et le retrait est observé.

De même, le fluage de dessiccation est analysé comme la conséquence de la micro-fissuration observée à l’interface pâte granulat [Sellier et Buffo-Lacarrière, 2009]. La description du champ de déformation d’une éprouvette sous chargement maintenu apporte certaines réponses à cette suggestion.

8.1 Interactions fluage propre-fissuration-dessiccation

8.1.1 Influence d’un chargement de fluage sur les cinétiques de séchage et

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