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Chapitre 1. Etat de l’Art

III. Conversion du méthane en composés oxygénés

III.3. Oxydation du méthane en phase gazeuse

III.3.2. Mécanismes cinétiques

Le mécanisme d’oxydation du méthane est à la base des mécanismes pour la combustion du gaz naturel et pour d’autres hydrocarbures. La littérature propose un grand nombre de modèles cinétiques détaillés. Une vue d’ensemble des modèles applicables à l’oxydation du méthane et d’autres hydrocarbures a été présentée par Simmie (2003) [94]. Nous traiterons ici de quelques mécanismes développés pour l’oxydation du méthane. Les mécanismes construits uniquement à partir de données de combustion du méthane (ex :

[95-97]), telles que celles obtenues en tube à onde de choc ou en flamme, sont donc exclus. Les

modèles simples utilisés dans les années 1990 pour simuler l’oxydation du méthane en

méthanol à haute pression [66, 89, 91, 98, 99] ne seront pas non plus présentés en détail.

 Mackie (1991)

Mackie (1991) [100] a proposé un modèle cinétique pour l’oxydation partielle du méthane en conditions généralement riches en méthane, qui peut être appliqué à la

production des hydrocarbures C2 et des composés oxygénés, tels que le formaldéhyde et le

méthanol. Ce mécanisme comporte 31 espèces impliquées dans 147 réactions élémentaires réversibles. A partir de ce mécanisme, l’auteur a discuté l’optimisation de la production des

hydrocarbures C2 ainsi que les réactions importantes pour la production des composés

oxygénés.

En ce qui concerne les composés oxygénés, la Figure 1-7 présente le schéma réactionnel proposé par Mackie (1991). Celui-ci a été obtenu par simulation de l’oxydation du méthane en phase gazeuse dans un réacteur parfaitement agité à 467 °C et sous haute pression (37 bar). Dans ces conditions opératoires, les sélectivités en CH3OH, HCHO et CO sont

respectivement de 52.3, 9.7 et 26.5%. Selon l’auteur, CH3OH est principalement produit par

la réaction de métathèse entre CH3O· et CH4 (R1-14). HCHO est principalement formé par le

radical CH2OH· et la réaction R1-15 représente la majeure partie de son flux de production.

3 4 3 3

CH O CH CH OH CH  (R1-14)

2 2 2 2

CH OH O CH O HO  (R1-15)

Figure 1-7. Schéma réactionnel de l'oxydation partielle du méthane en phase gazeuse proposé par Mackie (1991)[100] (Conditions opératoires : 37 bar,467°C, 1 s, XO2/XCH4 = 1/36)

CH4 CH3· CH3 CH3OH CH2OH· CH2O CH3O2· CH3OOH CH3 CHO· CO C2H6 CH3OOH +OH., CH3. +O2 +CH3. +HO2., CH3O2. +CH3. +CH3OH +CH4, H2, CH2O +CH3., H., HO2. +H. +O2 +CH2O +CH3. +M +HO2., CH3O2., CH3., CH3O. +M, O2

 Mécanisme de Dagaut

Dagaut et al. (1991) [101] ont mené une étude de l’oxydation du méthane dans un

réacteur parfaitement agité (900-1300 K, 1-10 bar). La richesse, définie comme le rapport

(XCH4/XO2)/(XCH4/XO2)stœch., est comprise entre 0.1 et 2 (soit un rapport XO2/XCH4 compris entre 1 et 20). Ils ont développé un modèle cinétique détaillé de 31 espèces et 200 réactions élémentaires permettant de reproduire les résultats expérimentaux obtenus dans un réacteur parfaitement agité ainsi que les délais d’auto-inflammation mesurés en tube à onde de choc

(900-2000 K, 1-13 atm, 0.1≤≤2). Tan et al. (1994) [102] ont étendu ce mécanisme au gaz

naturel. Finalement, il comporte 65 espèces mises en jeu dans 453 réactions et il a été validé

dans les conditions suivantes : 900-1230 K, 1-10 atm, et 0.1≤≤1.5.

 Ranzi et al. (1994)

Ranzi et al. (1994) [103] ont développé un mécanisme cinétique détaillé pour le gaz naturel comprenant 70 espèces et plus de 1600 réactions élémentaires. Leur modèle permet de décrire de nombreuses données expérimentales issues de la littérature concernant la conversion du méthane via différentes voies, dans différentes conditions de température et de richesse ϕ. Ces dernières ont été classées en cinq groupes par les auteurs (Figure 1-8), à savoir :

- D1 : la pyrolyse du méthane ([104, 105]) : haute température (HT), => ∞ ;

- D2 : la production d’acétylène (procédé BASF) : HT, moyen;

- D3 : la production du méthanol ([106, 107]) : basse température (BT), grand, haute pression (HP) ;

- D4 : le couplage oxydant du méthane ([108, 109]) : température moyenne (MT),

 moyen;

- D5 : l’auto-inflammation et la combustion du méthane ([110, 111]) : HT ou MT, petit.

Figure 1-8. Conditions opératoires couvertes par le modèle de Ranzi et al. (1994)

500 1000 1500 CO/CO2 (1-10 atm) D5 D3 D1 (40 atm) CH3OH D3 D4 C2H6/C2H4 C2H2 O2/CH4 T/K D2

 Hunter et al. (1994)

Hunter et al. (1994) [112] ont construit un modèle cinétique détaillé comprenant 40 espèces et 207 réactions pour l’oxydation du méthane à haute pression (650-730°C, 6-10 bar). Les données expérimentales ont été obtenues dans un réacteur tubulaire. Le mécanisme développé est capable de reproduire les profils de concentrations de différents produits, en incluant CH4, HCHO, CH3OH, H2, C2H6, C2H4, CO et CO2. De plus, ce modèle permet également de reproduire les délais d’auto-inflammation observés en tube à onde de choc et les

vitesses de flamme du mélange CH4/air.

 BaseC0C2

Barbé et al. (1995) [113] ont écrit un mécanisme pour modéliser l’oxydation du méthane et de l’éthane au DCPR (LRGP depuis 2010). L’expérimentation a été réalisée sous pression atmosphérique dans des réacteurs continus isothermes parfaitement agités, à 500-600°C pour l’oxydation de l’éthane et à 750-900°C dans le cas du méthane, et aussi dans un réacteur tubulaire pour l’oxydation du méthane à 1300°C. Les auteurs ont validé le mécanisme par l’évolution des profils des espèces stables en fonction du temps de passage et de la température. Le mécanisme a été nommé « BaseC0C2 ». « C0C2 » signifie que le mécanisme inclut toutes les molécules et tous les radicaux qui contiennent moins de trois atomes de carbone. Ce mécanisme est composé de 42 espèces et de 450 réactions élémentaires, dont les données cinétiques proviennent principalement de la littérature [114, 115] et a été mis à jour par Fournet at al. (1999) [116] et Belmekki et al. (2002) [117].

 GDF-Kin ®3.0

El bakali et al. (2006) [118] ont développé, au laboratoire PC2A de Lille, un mécanisme radicalaire détaillé pour la combustion du gaz naturel, incluant 121 espèces et 883 réactions. Il a été validé sur un très large domaine de température (400-2200 K), de pression

(0.04-10 atm) et pour une richesse  variant de 1/5 à 5 (soit un rapport XO2/XCH4 compris

entre 0.4 et 10). Ce mécanisme inclut également les réactions de combustion de C2H6 et C3H8, de formation des NOx et les effets de H2 et CO2.

 Gri-Mech 3.0

Orienté par la proposition de Frenklach et al. [119, 120] concernant l’optimisation des mécanismes cinétiques, le Gas Research Institute (GRI) a développé un modèle cinétique détaillé pour la combustion du méthane. Ce dernier a été mis à jour régulièrement allant de la version 1.2 à la version 3.0. Les constantes de vitesses proviennent de sources expérimentales mais aussi théoriques.

La dernière version Gri-Mech 3.0 [121], qui contient 325 réactions élémentaires, pour les essentielles, impliquant 53 espèces, a été construit pour le méthane et le gaz naturel

comme carburants, et étendu à la chimie des NOx. Ce mécanisme a été optimisé par comparaison des résultats de simulation avec des données expérimentales de différents types, à savoir :

- des délais d’auto-inflammation

- des profils d’espèces mesurés en tube à onde de choc - des vitesses de flammes laminaires

- des profils d’espèces en flammes laminaires - des expérimentations en réacteurs piston

- des expérimentations en réacteurs parfaitement agités - des délais d’auto-inflammation de mélanges

Globalement, les conditions de validation du mécanisme Gri-Mech 3.0 sont : 0.01-10 bar, 1000-2500 K, 0.1≤ ≤5 (soit un rapport XO2/XCH4 compris entre 0.4 et 20) pour le système pré-mélangé. En outre, nous pouvons trouver sur le web les informations complètes concernant ce mécanisme, par exemple, les cibles d’optimisation, les performances, les sources des constantes de vitesses des réactions, etc.

 Mécanisme de A.Konnov

A part le mécanisme du GRI, un mécanisme conçu par Konnov est également disponible sur le web [122] et a été mis en jour régulièrement de la version 0.1 à la version 0.5. Le mécanisme couvre non seulement les réactions impliquant l’oxydation du méthane (ou

gaz naturel), mais aussi la combustion des hydrocarbures C2-C3 et leurs dérivés, la chimie

N-H-O, la formation des NOx en flamme et la réduction des NOx par le « reburning » au gaz

naturel. Il a été validé par des données expérimentales dans une large gamme de conditions, y compris celles obtenues en tube à onde de choc, flamme laminaire et réacteur piston.

Cependant, la validation est majoritairement axée sur les cinétiques des espèces H2, CO, N2O,

NO2 et NH3, plutôt que sur les hydrocarbures C1-C3.

La version actuelle A.Konnov 0.5 comprend 127 espèces et 1200 réactions et a été utilisé par Konnov et al. (2004) [123] pour modéliser l’oxydation partielle du méthane en réacteur piston. Les mélanges réactifs sont riches en CH4, et fortement dilués par N2. Les conditions expérimentales sont les suivantes : 1.2 bar, 550-1260°C, s. Les auteurs ont ajusté le modèle cinétique afin de reproduire précisément les données expérimentales à faible temps de passage. Afin d’expliquer les écarts observés pour les temps de passage plus longs, l’intervention de réactions hétérogènes menant à l’inhibition de la réaction globale a été proposée.

 Mécanisme de Leeds

Un mécanisme d’oxydation du méthane a été construit par l’Université de Leeds qui permet de traiter également de la cinétique d’oxydation de l’hydrogène, du monoxyde de carbone, de l’éthane et de l’éthylène. Hughes et al. (2001) [124] ont publié un article

présentant les performances du mécanisme de Leeds version 1.4 en ce qui concerne les vitesses en flamme laminaire, les délais d’auto-inflammation et les profils des espèces en flamme. La version actuelle Leeds Méthane 1.5 comprend 351 réactions irréversibles et 37 espèces et est disponible sur le web [125]. Malheureusement, nous n’avons pas trouvé d’informations détaillées sur la performance de ce mécanisme concernant l’oxydation du méthane.

 Rasmussen et al. (2008)

Rasmussen et al. (2008) [126] ont développé et validé un mécanisme de combustion du méthane et de l’éthane pour des températures comprises entre 500 et 1100 K et de hautes pressions jusqu’à 100 bar. Les expérimentations ont été menées dans un réacteur à

écoulement à 600-900 K, 50-100 bar et pour des richesses  couvrant un large domaine. Ils

ont obtenu un accord satisfaisant entre les prédictions du modèle et les données expérimentales. En outre, le mécanisme a été étendu par un certain nombre de réactions importantes à haute température et testé avec des données expérimentales obtenues dans des tubes à onde de choc, des flammes laminaires et des réacteurs piston.

 Conclusion de cette étude

Nous avons constaté que les nombreux mécanismes disponibles dans la littérature ont été validés dans différentes conditions. Trois mécanismes globaux sont disponibles sur le web et mis à jour régulièrement : les mécanismes de Konnov, de Leeds et du GRI, bien que ce dernier n’ait pas été réévalué depuis février 2000. Les mécanismes comportent plusieurs centaines de réactions et plusieurs dizaines d’espèces. Une comparaison de cinq modèles

cinétiques a été effectuée par Rolland et al. (2004) [127] en utilisant un outil (CHEMDiffs)de

Visual Basic. Leurs résultats indiquent que la description des mécanismes varie beaucoup en termes du nombre d’espèces et de réactions communes. Hughes et al. (2001) [124] ont abouti à la même conclusion en comparant les réactions sensibles et les constantes de vitesse des réactions les plus importantes sur quatre mécanismes détaillés. Une comparaison générale des mécanismes de l’oxydation du méthane est effectuée dans le Tableau 1-4.

Tableau 1-4. Récapitulatif des caractéristiques des mécanismes concernant le méthane

Mécanisme Hydrocarbures Nombre

d’espèces Nombre de réactions

Mackie. (1991) [100] CH4 31 147

Mécanisme de Dagaut [101, 102] Gaz naturel 65 453

Ranzi et al. (1994) [103] Gaz naturel 70 1600

Hunter et al. (1994) [112] CH4 40 207

BaseC0C2 [113] CH4-C2H6 42 450

GDF-Kin ®3.0 [118] Gaz naturel 121 883

Gri-Mech 3.0 [121] Gaz naturel 53 325

Akonnov 0.5 [122] CH4-C3H8 127 1207

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