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Bonjour.

Effectivement, je suis maître de conférences en ergonomie à l’Institut d’Études du Travail de Lyon au sein de l’université Lyon 2. Je fais partie du laboratoire de recherche ECP de l’université Lyon 2, ECP pour « Éducation, Cultures et Politique ». Ma présentation va porter dans le champ de l’enseignement, en lien justement avec des problématiques de recherche développées au sein du laboratoire. Je développerai cela un peu plus loin.

Je participe également à l’équipe du Creapt depuis une vingtaine d’années. Je m’intéresse aux ques- tions de vieillissement au travail depuis une trentaine d’années. Cette problématique sera également présente dans ma réflexion.

Je fais enfin partie de l’Institut de Recherches de la FSU (Fédération Syndicale Unitaire) ; apparte- nance qui expliquera le fait que je me suis engagée dans la recherche que je vais vous présenter. Le titre que j’ai donné à ma communication est : « Changer de discipline au gré des réformes dans

l’enseignement agricole : quelles incidences sur le rapport aux élèves ? » On pourrait l’élargir à :

quelles incidences cette évolution du rapport aux élèves dans le cadre du processus de transition a eues sur la santé des enseignants ? Je terminerai mon propos par une discussion sur les problèmes de santé que génère cette réforme.

Pourquoi avoir réalisé ce travail ? En tant que membre du chantier travail de l’Institut de recherches de la FSU, j’ai reçu une demande syndicale de la part du SNETAP (Syndicat National de l’Enseignement Agricole Public) : les responsables étaient inquiets des conséquences de la recon- version disciplinaire qui touchait les professeurs techniques-bureautique et comptable, à la suite de la disparition de la filière « Service en Milieu Rural » (SMR).

Un élément de contexte est important à préciser. Était intervenue quelques années auparavant une restructuration de la filière STI2D obligeant de nombreux professeurs à se reconvertir dans d’autres disciplines. Cela avait généré beaucoup de souffrances et conduit à plusieurs suicides d’enseignants, dont le plus emblématique fut celui de Pierre Jacque à Marseille.

Dans les deux situations, le mode d’introduction de la réforme a été analogue : à l’occasion de ré- formes de filières professionnelles, on demandait à des professeurs d’enseigner une autre discipline que celle à laquelle ils avaient été formés et qu’ils enseignaient jusque-là. Dans les lycées agricoles, les enseignants de Techniques Comptable et Bureautique (que j’appellerai à partir de maintenant TCB) allaient devoir soit enseigner d’autres disciplines dans d’autres filières d’enseignement des lycées agricoles, soit sortir de l’enseignement. Conscients des risques psychosociaux liés à la re- conversion du fait de l’expérience des professeurs STI2D, nous avons pensé au sein de l’équipe de recherche de la FSU qu’il serait intéressant que l’on mène une recherche approfondie sur cette phase de transition.

Travailler pour et avec un public : l’expérience des autres

Cinquante-neuf enseignants TCB étaient concernés par la réforme de la filière ; ça ne fait pas beau- coup en soi par rapport au nombre considérable d’enseignants qui travaillent dans les établisse- ments. Et comme ils étaient peu nombreux, ils n’avaient pas vraiment suscité une attention particu- lière, y compris de la part du syndicat. Mais étant donné les enjeux en termes de santé et de compé- tences liés aux reconversions que nous avions identifiés dans le cadre de la réforme STI2D, j’ai proposé que l’on réfléchisse aux enjeux de formation, d’évolution des compétences et de santé, liés à cette reconversion TCB au travers d’une recherche de terrain.

Cette recherche s’inscrit également dans un axe de recherche de mon laboratoire de recherche ECP, intitulé « Durer dans le métier enseignant ». Comment dure-t-on dans le métier enseignant dans un contexte où l’on doit rester plus longtemps en activité professionnelle ? La professionnalité des en- seignants étant soumise à l’épreuve du temps, de l’allongement des carrières, et à de nombreux changements affectant la vie professionnelle des enseignants, comment dure-t-on dans le métier ? Comment dure-t-on dans le métier quand on ne peut plus enseigner sa discipline ? Quelles res- sources peut-on mobiliser ? Quels obstacles aussi pour durer dans le métier ?

Parmi les cinquante-neuf personnes concernées par la réforme, six ont tout de suite quitté le métier : trois sont sorties par la voie de la mise en arrêt de travail longue durée pour dépression jusqu’à l’âge de départ à la retraite, trois autres ont décidé d’anticiper leur départ à la retraite de quelques mois, voire quelques années, refusant de s’engager dans ce processus de changement. Tout ça s’est fait sous haute tension, dans un contexte, vous imaginez bien, de souffrances énormes. En référence à notre discussion d’hier, la dimension émotionnelle liée à cette situation de transition professionnelle imposée est ici très très forte. Elle est centrale pour comprendre tout ce que vont chercher à cons- truire les enseignants pour non seulement rester enseignants, mais aussi essayer de produire un tra- vail de qualité bien qu’ils soient et se disent incompétents dans la nouvelle discipline. Et ça, vous verrez, c’est compliqué.

Cette fameuse réforme TCB s’est déroulée de la manière suivante.

Le 11 octobre 2011, les enseignants qui étaient pour certains en cours, d’autres en train de préparer leurs cours à la maison, reçoivent un mail leur disant : « On supprime au niveau national la filière

dans laquelle vous enseignez principalement : la filière Service en Milieu Rural. On vous demande de vous reconvertir dans une autre discipline présente dans les lycées agricoles ou d’aller vers d’autres fonctions ». Deux éléments importants sont à souligner ici. Premièrement, ce mail était

censé être envoyé aux cinquante-neuf personnes concernées. Pourtant, quand on regarde un petit peu de près comment les choses se sont effectivement passées, on se rend compte que certains en- seignants n’ont pas reçu ce mail et n’ont pas été informés qu’il y avait la réforme : c’est parfois en discutant avec des collègues qu’ils ont appris qu’il y avait une réforme, et qu’ils se sont rendus compte que bizarrement ils n’avaient pas été contactés. On perçoit ici un peu d’improvisation dans l’information. Deuxièmement, pour ceux qui avaient reçu le mail, cette modalité d’information a été unanimement jugée inadaptée et violente compte tenu des enjeux de carrière : « ce n’est pas une

façon de faire ! » ; chacun y allant de ses termes pour justifier le fait que ce mode d’information

était inadmissible : « On ne dit pas les choses comme ça aux gens ! »

Il était prévu par le ministère que chaque enseignant concerné rencontre un inspecteur pour évaluer ses compétences, pour identifier la discipline de reconversion qui l’intéressait. Les disciplines pos- sibles de reconversion étaient les suivantes : Économie Sociale et Familiale (ESF), Technique In- formatique et Multimédia (TIM), Documentation, Économie, Maths informatique, faisant fonction de proviseur, ou autre. Autre, c’est-à-dire qu’on a dit aux enseignants : « vous pouvez même quitter

l’enseignement, vous pouvez être chargé de mission à la région, au département, devenir même secrétaire ». J’ai résumé la réorientation des dix-neuf enseignants que j’ai rencontrés dans le ta-

bleau suivant :

Rapport de recherche du Centre d’études de l’emploi et du travail, n° 104, décembre 2017

Tableau 1. Disciplines de reconversion pour les 19 personnes rencontrées Discipline de reconversion

actée par le ministère

Nombre d’enseignants (/19) ESF 6 Economie 7 TIM 4 Math Informatique 1 Documentation 1

Plusieurs inspecteurs ont été mobilisés pour assurer ces entretiens : l’inspectrice TCB elle-même en reconversion, l’inspectrice d’ESF (Économie Sociale et Familiale), l’inspecteur d’Économie... Le problème, c’est qu’il semble qu’il n’y ait pas eu d’harmonisation entre eux, et que chacun a fait un peu comme il le sentait, certains essayant de promouvoir leur discipline. C’est le cas en particulier de l’inspectrice d’ESF qui devait alimenter sa nouvelle filière « Service à la Personne » récemment mise en place : il y avait en effet des besoins dans les établissements autour de l’Économie Sociale et Familiale : « ça serait pas mal si vous y alliez parce qu’il va y avoir des besoins dans les établis-

sements ». Mais des personnes n’ont pas rencontré d’inspecteur : juste un coup de fil pour discuter

des possibilités de reconversion.

Ensuite, ce qui était prévu dans les engagements du ministère, c’est qu’il y aurait une formation pour assurer la montée en compétence des enseignants dans leur nouvelle discipline. Ces formations devaient être dispensées par l’ENFA (École Nationale de Formation Agronomique) à Toulouse. En fait, ça n’a pas été le cas pour toutes les disciplines de reconversion, comme nous pouvons le cons- tater sur le tableau 2.

Tableau 2. Processus de formation programmé pour la discipline de reconversion

Formation organisée spécifiquement pour

ces enseignants

Intégration dans des formations existantes

pour des primo arrivants

Stage Tuteur

officiel

ESF (7) 6 semaines de

formation à l’ENFA

4 semaines dans des secteurs des services différents

Oui

TIM (4) 6 semaines de

formation à l’ENFA

2 semaines de stage avec un tuteur TIM

d’un autre établissement Oui Math-info (1) 2 semaines à l’ENFA Non Non

Economie (7) Non Non Non Non

Documentation(1) Non Non Non Non

C’est-à-dire qu’il y a ceux qui sont allés vers l’ESF qui sont entrés dans un dispositif de formation de dix semaines en comptant les stages, ceux qui sont allés vers la Technique informatique et mul- timédia (TIM) qui ont eu six semaines de formation en comptant deux semaines de stage, ceux qui se sont orientés vers les maths à qui on a proposé de rejoindre un groupe de débutants dans l’enseignement sur deux semaines… Par contre, ceux qui sont allés vers l’Économie, la Documen-

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tation n’ont pas eu de formation proposée. On perçoit donc des disparités importantes entre les en- seignants selon la discipline de reconversion ; certains devant se débrouiller vraiment seuls pour développer les connaissances nécessaires aux nouveaux enseignements. Je ne développerai pas ici le contenu de la formation, qui mériterait pourtant d’être évoqué car très sommaire et peu capaci- tant.

Il est important de préciser qu’aucune décharge horaire n’a été mise en place par le ministère pour permettre aux enseignants de se former, de préparer les nouveaux cours et assurer le processus de transition. D’où un surcroît de travail que résume assez bien ce verbatim : « Ça a été extrêmement

dur de tout tenir parce que, même en notre absence, pendant qu’on était en formation, il fallait qu’on donne du travail à nos élèves, qu’on continue à les suivre en stage ».

Un tutorat avait été prévu en plus de la formation ; mais, dans le texte initial, il n’y avait pas telle- ment de formalisation de ce tutorat. Dans les faits, il n’y a jamais eu de tutorat au sein des établis- sements. Lorsqu’il s’est mis en place, il a été assuré par des personnes à distance, donc difficilement accessibles, sauf par mail. Cela n’a pas facilité les échanges, les observations, les processus de transmission et surtout la construction du genre professionnel dans la nouvelle discipline.

La reconversion a été ensuite actée par une inspection par l’inspecteur de la nouvelle discipline ; là aussi, il y aurait beaucoup à dire, mais je n’ai pas le temps.

Au vu de ce dispositif de formation rapidement brossé, je me suis interrogée sur plusieurs points : quelle prise en compte de la diversité des enseignants, et de leur parcours professionnel ? Parce qu’une des caractéristiques quand même de ces enseignants, c’est qu’il y avait beaucoup de quadras et beaucoup, beaucoup de quinquas, des enseignants très expérimentés. Comment vont-ils vivre cette réforme ? Comment va-t-on les accompagner au fil de ce processus de changement qui s’inscrit nécessairement dans un temps long ? Quel accompagnement des enseignants en forma- tion ? Dans ce contexte de fragilisation, comment allait évoluer le rapport aux élèves sachant que le fait de changer de filière d’enseignement allait amener les enseignants à côtoyer des élèves diffé- rents ? Car il faut bien comprendre que, du fait de la reconversion, la difficulté n’était pas seulement liée au changement de discipline : les élèves allaient avoir un autre profil.

J’ai centré ma présentation ici uniquement sur les enseignants reconvertis en ESF afin de simplifier mon propos. D’après les professeurs rencontrés, les élèves qui sont orientés en ESF sont beaucoup plus en difficulté scolaire que ceux qui se destinaient au secrétariat. Donc, je me suis posé plusieurs questions : comment les enseignants allaient-ils s’adapter à ce public particulier ? Comment al- laient-ils gérer le fait d’être fragiles dans leurs compétences pour enseigner ? Est-ce que cela allait changer quelque chose dans le rapport aux élèves ? Cela allait-il générer une fragilisation de l’identité professionnelle ? Est-ce qu’ils se sentiraient encore enseignants dans la nouvelle discipline ou revendiqueraient-ils encore l’ancienne appartenance disciplinaire ? Quels impacts sur la santé ?

En quelques mots, je vais présenter mon cadre théorique et méthodologique. J’ai opté pour une ap- proche systémique du processus de reconversion ; j’ai essayé de comprendre l’ensemble des dimen- sions qui allaient participer à ce processus de changement. Je me suis intéressée à la fois au contenu du travail, aux référentiels, à la manière dont les enseignants préparaient leurs cours, à la formation qu’ils avaient reçue, aux processus de coopération ou aux tensions liées aux reconversions entre professeurs et collègues, entre professeur et hiérarchie. Je me suis également intéressée à l’impact de cette réforme sur l’organisation des établissements, car le redéploiement des enseignants sur des disciplines déjà affectées, parfois à des vacataires, a eu des incidences sur les emplois du temps des collègues, suscitant des tensions, voire des conflits.

Rapport de recherche du Centre d’études de l’emploi et du travail, n° 104, décembre 2017

Ma démarche s’inscrit également dans une approche diachronique de l’activité et de la santé. J’ai essayé de resituer ce changement dans le parcours des enseignants, dans le processus de construc- tion des compétences au fil du temps, tout en analysant l’impact de la réforme sur la santé.

Comme je le fais habituellement, j’ai mobilisé le modèle du système des activités (Curie), parce qu’il permet de comprendre l’incidence du travail sur la vie hors travail, les conflits qui peuvent émerger lorsqu’il y a trop de déséquilibres dans les formes d’engagement dans un sous-système de vie.

Et puis, j’ai mobilisé dans ce travail l’approche constructiviste développementale (Falzon), afin de questionner la dimension capacitante du dispositif mis en place pour accompagner la réforme, la dimension capacitante de l’organisation au sein des établissements et les conditions de développe- ment des nouvelles compétences.

D’un point de vue méthodologique, j’ai réalisé dix-neuf entretiens individuels longs (19/59), dix- sept femmes et deux hommes, de 39 à 60 ans. Durant ces entretiens, j’ai effectué des rétrospectives de carrière afin d’identifier leur parcours professionnel et de repérer d’éventuelles transitions pro- fessionnelles antérieures. J’ai essayé de comprendre dans quel contexte ils avaient reçu l’information de la suppression de leur discipline et comment ils l’avaient vécue. Je me suis intéres- sée à la manière dont ils avaient fait le choix de leur discipline de reconversion, aux délibérations pour opter plutôt pour telle discipline plutôt que telle autre. Je les ai interrogés sur le dispositif de formation mis en œuvre à l’ENFA, son contenu, son adéquation à leurs besoins, la manière dont ils l’avaient vécue. Arrivaient-ils à mobiliser le contenu de la formation dans leurs nouveaux ensei- gnements ? Pouvaient-ils mobiliser des ressources locales informelles ? Ont-ils mobilisé le réseau des collègues en reconversion en ESF ?

Je me suis également intéressée aux emplois du temps. Pourquoi les emplois du temps ? Parce que c’est une porte d’entrée intéressante pour aborder les négociations qu’ont tenté de mettre en œuvre les enseignants pour limiter le coût du changement. Y a-t-il eu des négociations avec les chefs d’établissement ou des collègues de maths-info pour garder une partie de l’informatique qu’ils assu- raient auparavant en tant que professeurs TCB ? Dans certains établissements, il y a eu des régula- tions de ce type-là, limitant la charge de travail liée aux nouveaux enseignements. Par contre, d’autres chefs d’établissements ont été moins compréhensifs : « Aujourd’hui, il n’y a plus de profs

TCB, vous n’êtes plus TCB, donc vous n’avez plus ces heures. Vous êtes reconvertie en ESF ; vous êtes en ESF. Donc moi, j’ai des heures à caser en ESF, je vous donne ces heures ». Ces régulations

au sein des établissements sont vraiment importantes à saisir pour comprendre le vécu de la réforme et les problèmes de santé au travail.

J’ai centré ma communication uniquement sur les profs TCB reconvertis en ESF, essentiellement des femmes de plus de 40 ans, qui étaient au nombre de six.

Je voudrais d’abord insister sur la diversité de ces professeurs. Elles n’avaient pas toutes la même formation initiale : certaines avaient fait une formation d’assistante de direction, de gestion des en- treprises, secrétariat de direction, d’autres avaient fait un BTS comptabilité ou un IUT de droit. Cer- taines avaient des compétences en bureautique, en secrétariat, des bases en comptabilité, mais il y en avait d’autres qui avaient des compétences un peu plus larges que celles qui étaient demandées. Il y a aussi des personnes qui, avant de rentrer dans le lycée professionnel, avaient exercé profes- sionnellement dans des entreprises, et d’autres pas du tout. Cette formation initiale de départ, même lointaine, et ces expériences antérieures ont constitué des ressources dans le cadre de la reconver- sion. Donc, chaque enseignante avait un parcours différent.

Mais elles avaient toutes un point commun : leur modalité d’intégration dans l’enseignement en lycée agricole. Du jour au lendemain, vous arrivez parce que vous avez vu une annonce, vous vous

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présentez au chef d’établissement ; et deux jours après, vous êtes en situation d’enseignement. Je vous ai pris un verbatim qui résume bien la manière dont les choses se sont passées : « J’ai rempla-

cé un congé maternité. Le vendredi, je me présente, et je vois le proviseur qui me dit : ‘je vous laisse dans la cage aux fauves, vous commencez lundi’. J’avais 20 ans ; mes élèves en avaient 19 : ce n’était pas facile, j’avais très peur ». Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que, tout de suite, ces en-

seignantes ont dû répondre aux besoins des établissements : le chef d’établissement comptait sur leurs connaissances pour assurer les cours, même si elles n’avaient jamais enseigné auparavant. Cela veut dire qu’il y a cette idée que l’enseignement, c’est quelque chose qu’on peut faire assez spontanément et assez vite avec un minimum d’investissement et surtout sans formation. Donc, l’entrée dans le métier a été très compliquée pour toutes. D’autant qu’à cette époque-là, le peu de différence au niveau des âges a créé beaucoup de fragilité dans leur métier d’enseignante. C’est important de comprendre cela, parce que c’est ce qu’on demande aujourd’hui encore aux ensei- gnants avec la réforme TCB : d’improviser dans une nouvelle discipline, en apprenant beaucoup sur le tas et par soi-même.

En plus de rentrer comme cela dans le métier, on leur demandait d’être polyvalentes dans les disci- plines à enseigner. C’est-à-dire que pour « faire leur service » (18h/semaine), elles devaient accep- ter des heures dans d’autres matières : « Écoutez, nous, on a des heures à donner en maths, en fran-