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Chapitre 1- Introduction : Problématique et Etat de l’art

I.2 Les tiques du bétail en Afrique de l’ouest

I.2.4 La lutte contre les tiques et les agents pathogènes transmis

I.2.4.2 Lutte contre les agents pathogènes transmis par les tiques

I.2.4.2 Lutte contre les agents pathogènes transmis par les tiques

Si la lutte anti-vectorielle constitue un premier pas dans la lutte contre les agents pathogènes transmis par les tiques, elle est complétée par l’utilisation de produits antimicrobiens et de vaccins ciblant ces agents pathogènes.

La lutte contre les agents d’anaplasmoses fait ainsi appel à la chimiothérapie et la vaccination (Demessie & Derso 2015). L’application de tétracycline (5-10 mg/Kg), d’imidocarbe (Taylor et al. 2007) ou de médicaments stimulant la production d’hématies ou protégeant le foie (Lefevre et al. 2010) constituent les traitements administrés en cas de déclenchement d’anaplasmose. Les animaux introduits en zone d’enzootie sont vaccinés au préalable. Il existe deux grandes familles de vaccins contre les Anaplasma spp : ceux à base de souches vivantes et ceux à base de souches inactivées - c'est-à-dire mortes ou du moins incapables de se reproduire (Demessie & Derso 2015)- lesquels induisent une réponse immunitaire de plus courte durée chez les bovins que les vaccins à base de souches vivantes (Radostits et al. 2007). Les moyens de prévention et de lutte contre les babésioses incluent la lutte anti-vectorielle, l’immunisation du bétail et la chimio-prophylaxie (Demessie & Derso 2015). Le succès des traitements chimiques dépend de la rapidité et de la pertinence du diagnostic. L’utilisation d’une combinaison d’imidocarbe et du diminazene (trypanocide) protège les bovins pendant plusieurs mois. Le « Trypan blue » est très efficace contre Babesia bigemina mais n’a aucun effet sur B. bovis (Demessie & Derso 2015). L’imidocarbe, quant à lui, est efficace contre B. bigemina et B. bovis. La combinaison de l’imidocarbe dipropionate et de l’oxytétracycline est le moyen de traitement le plus efficace contre les Babesia spp chez le mouton et la chèvre (Ijaz et al. 2013). Par ailleurs, l’importance relative des espèces de Babesia influe sur la composition des cocktails vaccinaux. B. bigemina cause plus de maladies que B. bovis dans plusieurs régions africaines (dont l’Afrique de l’ouest), alors qu’en Australie, B. bovis est responsable de 20 fois plus de pertes économiques que B. bigemina (Bock et al. 2004). Des vaccins à bases de souches vivantes peuvent fournir plus de 95% de protection chez les animaux (Bock et al. 2004). Des recherches sur des vaccins recombinants (Norimine et al.

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21 2002; Wilkowsky et al. 2003) et de vaccins dérivés de souches cultivées (Pudney 1992) ont également été entreprises.

Les principaux moyens de lutte contre les agents pathogènes de la theileriose (T. parva notamment) comprennent : (i) d’une part, la lutte anti-vectorielle, le contrôle des déplacements de bovins, l’immunisation des animaux ou la chimiothérapie, et (ii) d’autre part, les méthodes intégrées qui combinent tous ces moyens de lutte (Gachohi et al. 2012). Il existe deux types de vaccins contre les Theileria spp : les vaccins à base de sporozoïtes, et ceux, privilégiés, à base de schizontes (Mandal 2012). La vaccination contre T. parva est basée sur le couplage d’une infection volontaire et d’un traitement curatif. Ceci correspond donc à une vaccination des bovins avec une solution dérivée de sporozoïtes issus de tiques qui est doublée d’un traitement à base de tétracycline. Il s’ensuit une réaction apparente de theileriose suivie d’une guérison (Morisson & Mc Keever 2006)). L’oxytétracycline constitue un moyen efficace de lutte contre la theileriose si elle est appliquée au même moment que la vaccination afin de bloquer à la fois le parasite et la maladie (Nambota et al. 1994).

La lutte contre E. ruminantium (agent pathogène de la cowdriose) est basée sur la lutte contre la tique vectrice (A. variegatum), le couplage de l’injection volontaire de l’agent pathogène et d’un traitement curatif, ainsi que sur l’administration régulière d’antibiotiques (tétracyclines) (Allsopp 2009). Ces différentes méthodes ont montré leurs limites, ce qui a incité à des expérimentations de trois types de vaccins : des vaccins à base de souches inactivées (Jongejan 1991; Martinez et al. 1994; Totté P et al. 1997; Mahan et al. 1998; Adakal et al. 2010b), de souches atténuées (Zweygarth et al. 2005, 2008) ou d’ADN recombinants (Nyika et al. 1998; Collins et al. 2003; Simbi et al. 2006). Malgré des résultats très satisfaisants obtenus en conditions de laboratoire [induisant jusqu’à 100% de protection dans certains cas, (Collins et al. 2003)], ces vaccins induisent souvent des résultats bien moins satisfaisants sur le terrain, c'est-à-dire pour des animaux confrontés à l’infection par des souches sauvages. Ces insuccès révèlent donc une forte variabilité antigénique dans les populations naturelles d’E. ruminantium , et ce, au sein d’un même village burkinabé (Adakal et al. 2004). Toutefois, il s’avère difficile de caractériser ce niveau de variabilité antigénique- et donc d’adapter les cocktails vaccinaux en conséquence – puisque la base génétique des antigènes d’E. ruminantium reste encore inconnue. Pour autant, la structure génétique observée à partir de gènes de ménage d’E. ruminantium est-elle totalement inutile à la compréhension de la

situation épidémiologique et/ou à la lutte contre cet agent pathogène ? Nous adresserons ces questions dans le chapitre 3 en nous focalisant sur le cas du Bénin et du Burkina Faso.

Les méthodes traditionnelles de lutte contre les maladies à tiques en Afrique de l’Ouest rejoignent pour la plupart celles utilisées pour lutter contre les tiques (Cf. section II.4.1). Il n’existe pas de méthode spécifique à chaque agent pathogène transmis par les tiques. Cependant, les plantes utilisées pour les traitements varient souvent selon l’affection en cause. De plus, le jus d’écorce ou le décocté de l’écorce de Khaya senegalensis mélangé à l’urine de bovin cicatrise ou accélère la cicatrisation des plaies causées par la fixation des tiques (Dossou-Gbete et al. 2006). Toutefois, l’utilisation d’antibiotiques conventionnels pour lutter contre les maladies à tiques rentre de plus en plus dans la pratique des éleveurs au Bénin et au Burkina Faso.

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23 I.3 Deux espèces de tiques d’importance vétérinaire majeure au Bénin et au Burkina Faso

L’expansion de la distribution géographique des tiques est liée non seulement aux déplacements de leurs hôtes, mais aussi à de nombreux facteurs d’origine anthropique tels que les échanges commerciaux à longues distances, l’aménagement des territoires et/ou les effets des changements climatiques (Léger et al. 2013). A. variegatum et R. (B.) microplus (Figure 2) sont deux espèces de tiques d’importance vétérinaire majeure dans nos zones d’études que sont le Bénin et le Burkina Faso.

Les analyses biogéographiques servent à retracer l’histoire démographique des espèces. Elles consistent en des analyses phylogénétiques de séquences obtenues pour des gènes très conservés (i.e. à faible taux de mutation et évoluant principalement sous l’action de pressions de sélection purifiante) et localisés dans des régions non-recombinantes du génome de l’espèce étudiée. Il s’ensuit l’identification des lignées évolutives regroupant, chacune, les séquences les plus apparentées, puis l’inférence des mouvements de dispersion à partir de l’aire de distribution de chaque lignée évolutive (Chevillon & Huber 2016).

Figure 2: Cycle de développement d’Amblyomma variegatum (à gauche) et Rhipicephalus (Boophilus)

microplus (à droite).

La première est une espèce trixène, c'est-à-dire qu’elle exploite trois individus-hôtes différents au cours de son cycle, tombant à terre pour muer ou pondre après chaque repas sanguin. La seconde est une espèce monoxène, c'est-à-dire qu’elle accomplit l’ensemble de sa vie parasitaire sur le même individu-hôte. Ces deux espèces diffèrent également par leur gamme d’hôtes : la première parasite l’ensemble des ruminants domestiques ou sauvages. La seconde est plutôt spécialisée sur les espèces du genre Bos bien que sa présence sur des hôtes cervidés sauvages soit rapportée en Nouvelle Calédonie & au sud des Etats-Unis. Les lettres réfèrent aux événements suivants. A : Après éclosion des œufs les larves se mettent en grappe dans les herbes à l’affût d’un hôte. B : Après le repas sanguin sur le 1er hôte les larves chutent au sol où elles se métamorphosent en nymphes. C : Après gorgement sur le 2ème hôte les

nymphes chutent au sol où elles se métamorphosent en adultes. D : Les adultes se gorgent sur le 3ème hôte. Les femelles gravides chutent pour pondre à terre. E : Les femelles pondent des œufs (10 à 20 000,

A. variegatum et 500, R. (B.) microplus) sous une touffe d’herbe ou une pierre. F : Eclosion.

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