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Le tangriste tatar Rafael N. Bezertinov, né à Bakou, est l'auteur des livres [1-8] et de nombreuses autres publications. Les livres [4, 5] sont consacrés à l'exposée d'une reconstruction du tangrisme classique sur la base de l'analyse des sources historiques [1-3] et des croyances populaires des peuples turco-mongols. Il explique :

« En raison de la simplicité des rites et de sa clarté, la doctrine du tangrisme existe depuis plusieurs milliers d'années, et avec les mêmes formes stables de rituel et de pratique religieuse. Sa praticité et l'efficacité ont assuré la conservation et la stabilité des concepts théologiques de base et de da pratique religieuse. »

« Le chamanisme coexistait avec tangrisme, sans fusionner, car leurs dogme et genèse étaient différentes. Le rites chamaniques ont survécu après la disparition du tangrisme (remplacé par les autres religions dogmatisées), ce qui a généré, en XIX siècle, chez les observateurs la confusions entre le chamanisme et le tangrisme. Pour cette raison, et aussi à cause de l'ignorance de l'essence du tangrisme, beaucoup de nos contemporains ont l'impression que le tangrisme est une forme du paganisme primitif. Mais il y avait de chercheurs, il y'en a toujours beaucoup au service des religions dominantes, donc il y a une possibilité qu'ils pourraient délibérément identifier la religion tangrienne avec le chamanisme afin de devalorisation du tangrisme. »

Le chapitre II du livre de Bezertinov [4] commence par l'affirmation : « Les (anciens) Turcs n'ont jamais eu de prophètes, de sorte que

chaque tribus, chaque famille et chaque personne pouvait se permettre d'avoir des croyances personnelles. »

Ainsi le tangrisme était un ensemble des religions personnelles basées sur le même credo et avec les rites similaires. Ceci correspond parfaitement avec un concept moderne de la religion comme un ensemble de croyances personnelles, similaires et compatibles [9]. Rappellons que la majorité des Français estiment que « de nos jours, chacun doit définir lui-même sa religion indépendamment des Eglises », seulement 16% d’eux sont d’accord avec la proposition : « Il n’y a qu’une seule religion qui soit vraie » ([10], p. 101-102).

Le livre [7] décrit l'histoire des relations entre peuples des steppes et la Chine. Dans le dernier livre de Bezertinov [8] sont décrits les conséquences fatales de l'abandon du tangrisme par les descendants de Gengis-Khan pour l'unité des peuples des steppes. Les tentatives des Dzoungars d'unifier les steppes au XVIII siècles sont échoués, car ils étaient convertis au bouddhisme tandis que les Kazakhs sont devenus musulmans à cette époque [11].

Bezertinov mentionne une certaine proximité du Culte impérial du Ciel en Chine et le tagrisme des empires des steppes. La différence principale, à notre avis, vient du fait que l'idéologie impériale chinoise avait un caractère chauviniste, considérant tous les peuples non-chinois comme des barbares, tandis que les peuples des steppes considéraient le tanrisme comme la religion naturelle de tous les peuples:

« La Chine a toujours considérait la cour du Fils du Ciel comme le centre du monde, où les ambassadeurs des peuples barbaresqui devaient arriver afin de déposer aux pieds de l'empereur leurs «tributs» et confirmer leur soumission. L'Empire du Milieu de son côté n'aimait jamais d’envoyer des ambassades officielles «aux autres» et cette pratique diplomatique chinoise continuait jusqu'au début du XXe siècle, quand même l'arrivée à la Chine des représentants des puissances occidentales imposant au pays des traités inégaux et des conditions humilantes de commerce, était enregistrée dans les chroniques officielles comme la venue des ambassadeurs avec tribut. » ([8], p. 18).

Rafael Bezertinov prône le retour aux valeurs tangristes afin d'essayer d'unifier de nouveau tous les peuples turco-mongols. Il reconnaît que la vulgarisation de ses idées unificatrices n'a pas trouvé l'écho favorable parmi les élites contemporaines des pays turcophones et mongolphones [6, 8].

Nous sommes d'accord avec les déclarations suivantes de Bezertinov: - Aujourd'hui, quand les confrontations entre les religions se sont renfoecées, une religion aussi neutre que le tangrisme est nécessaire pour toutes les personnes de bonne volonté et ça sera notre contribution au trésor de la culture universelle.

- Tout le monde devrait vivre à sa guise, sans nuire aux autres. Il faut

Travaux de recherche de N.G.Aupov

Le livre du Professeur Nuragambet Aupov (1955-2010) Tangrisme comme une conception ouverte du monde [12] est fondée sur sa thèse du docteur d'Etat (2004). Les buts des recherches sont exposés au début de ce livre :

« Deuxièmement, la nécessité de recherche scientifique objective est dictée par le fait que la plupart des travaux sur tangrisme sont descriptifs, mythologique et ésotérique, lorsque les chercheurs intuitivement et émotionnellement reconstruisent la spiritualité tangriste. Troisièmement, en raison de manque de données empiriques, des source historiques, de nombreux travaux sont de nature hypothétique et d'interprétation des bases du tengrisme devient loin de l'objectivité scientifique. ...

L'analyse objective scientifique et philosophique, du problème de tangrisme lui permettra de prendre sa place historique, non seulement dans le cadre des systèmes philosophiques anciens, mais aussi d'obtenir une lecture scientifique moderne. » ([12], p. 5).

Les principales conclusions sont les suivantes :

- Le tangrisme est une conception ouverte et universelle, capable de contribuer au rapproche-ment spirituelle et culturelle des différents peuples.

- La culture des peuples des steppes étaient caractérisée par l'esprit d'ouverture et la grande flexibilité ce qui explique la particularité de leur conception du monde.

- Le tangrisme n'a jamais aspiré à la fixation de ses dogmes.

- L'Islam populaire de l'Asie centrale est une synthèse des idées musulmanes et tangristes.

Aupov appelle à l'unification des efforts des chercheurs afin d'élucider l'histoire et la philosophie du tangrisme et de l'adapter à la modernité.

Il y a plusieurs confusions et malentendus dans les descriptions des rites tangriens dans les sources russes et europèennes, par exemple :

« Umaï dans Tengrianism est une personnification de la féminité. La son dictionnaire Mahmoud de Kashgar traduit le mot «umaï» par «placenta». Dans une interprétation (extérieure) du tangrisme Umaï comprise comme une déesse, et dans certains sujets mythologiques reconstruits, il est même considéré comme l'épouse de Tangra, ce qui est bien sûr non seulement inexact, mais tout simplement faux. » ([12], p. 19).

Tous les sources classiques (Ata-Malek Juvaini, Mahmoud de Kashgar,

l'idée, qu'il pouvait avoir une épouse de nom Umaï, est une signe de méconnaissance de ses sources. On peut penser qu'Umaï était au début du XX siècle une des esprits chamaniques chez certains peuples de la Sibérie du Sud

[13]. Chez les Yakoutes qui ont bien conservé les traditions tangriennes, le mot similaire «ymaï» signifie «utérus» ce qui est proche de sa signification dans les anciennes langues turques([14], p. 23), tandis que «umaï» se traduit par «s’enflamme». Notons que chez Kirghizs, selon T. Bayalieva, «le culte du feu est lié et parfois fusionné avec le culte d'Umaï » [13].

Les textes d'Aupov sur la mythologie et la philosophie naturelle du tangrisme contiennent, eux aussi, des éléments de convictions personnelles. Mais ce phénomène est caractéristique de presque toutes les recherches sur l'histoire et sur les autres sciences sociales.

Il est préférable d'utiliser les reconstructions intuitives et émotionnelles détaillées dans les œuvres littéraires ou publier comme hypothétiques. La reconstruction détaillée du tangrisme classique est impossible en raison du manque de données, mais son credo, ses grandes idées et ses rites le plus importants sont bien connus par les sources écrites dignes de confiance.

Nous pensons qu'il est plus important d'étudier la renaissance tangrienne actuelle et réfléchir sur les perspectives de son développement dans le monde déchiré par les contradictions idéologiques et religieuses.