1.2 Caractères bactériologiques
1.2.3 Listeria monocytogenes
1.2.3.1 Caractères morphologiques.
L. monocytogenes est un petit bacille à Gram positif, non
sporulé, non capsulé de 0,5 à 2 #xm sur 0,4 à 0,5 /im, à extrémités
arrondies (figure 1). Le milieu de croissance de la bactérie
influence largement l'aspect morphologique. Dans les cultures
jeunes, en bouillon, on observe des formes coccoïdes tandis que,
dans les cultures plus âgées, des formes filamenteuses se
développent et la coloration de Gram peut être variable. La
disposition des germes n'est pas caractéristique. Ils peuvent
être isolés, par paires, groupés en amas, en palissades ou
orientés en forme de V ou Y [SEELIGER et JONES, 1986].
Ce germe est toujours mobile lorsqu'on le cultive entre 20 et
25°C. Par contre il est peu ou pas mobile à 37° C. Cette
particularité constitue un caractère important dans le diagnostic
bactériologique du germe. Cette mobilité est due à la présence
d'un à quatre flagelles d'implantation péritriche [SEELIGER et
JONES, 1986]. Dans une gélose semi solide le germe a une mobilité
à proximité de la surface, ce qui lui donne un aspect
caractéristique, dite en parapluie.
1.2.3.2 Caractères biochimiques.
L. monocytogenes possède une catalase et est dépourvue
d'oxydase. Cette bactérie fermente sans production de gaz de
nombreux glucides : glucose, rhamnose, fructose, mannose,
maltose, tréhalose, cellobiose, salicine. Par contre, le xylose,
le mannitol, le raffinose, l'inositol, le dulcitol et l'adonitol
ne sont pas fermentés. L. monocytogenes hydrolyse l'esculine et
donne des réactions de Voges-Proskauer et de rouge de méthyle
positives. Elle réduit en 24 heures le lait tournesolé en
profondeur sans attaque de la caséine ni coagulation du lait.
Elle ne possède ni gélatinase, ni uréase. L'indole et^ l'hydrogène
sulfuré ne sont pas produits.
Figure 2. Détection des Listeria par la technique de Henry
d’après WOOD (1969).
1.2.3.3 Culture et croissance.
L. monocytogenes est un germe aérobie anaérobie facultatif,
qui pousse bien sur les milieux usuels. Toutefois la culture est
favorisée par l'adjonction de 5 % de glucose ou par l'utilisation
de milieux à base de tryptone. La température optimale de
croissance est de 30 à 37°C, mais L. monocytogenes se développe
de 3 à 45°C. Le pH optimal de croissance est compris entre 7,2
et 7,6 mais la croissance est possible entre 5,6 et 9,6. Sur
gélose nutritive de type tryptone-agar on obtient en 24 heures
de petites colonies de 0,5 à 1,5 mm de diamètre, lisses,
transparentes, légèrement convexes avec une fine texture et des
bords réguliers. Examinées en transillumination oblique de Henry
(figure 2), elles ont une coloration bleu-gris très
caractéristique.
Sur gélose au sang, on observe une zone étroite d'hémolyse
de type bêta. Cette hémolyse est due à une bêta hémolysine, la
listériolysine O, active sur les hématies de mouton, de cheval,
de lapin et sur les hématies humaines.
Trois espèces du genre Listeria sont hémolytiques à savoir:
L. monocytogenes, L. ivanovii et L. seeligeri. L. monocytogenes
est pathogène autant pour l'homme que pour l'animal, L. ivanovii
est essentiellement responsable d'avortements chez les ovins et
bovins, tandis que L. seeligeri n'est pas considérée ccMune
virulente [BOERLIN et coll. 1993; LAMMERDING et coll., 1992].
1.2.3.4 Les toxines.
La listériolysine O est le principal facteur de virulence
de L. monocytogenes [GORMLEY et coll., 1989]. Cette toxine
entraîne chez l'animal des troubles de la conduction cardiaque,
et une lyse des macrophages et des hépatocytes. La listériolysine
O est une protéine de 58 kDaltons, de 529 acides aminés. Cette
toxine se fixe sur le cholestérol des membranes, puis forme des
pores, notamment dans les membranes érythrocytaires.
La listériolysine O est antigéniquement apparentée aux
cytolysines thiol-activées de certaines bactéries à Gram positif.
Ces bactéries sont toutes exclusivement extracellulaires alors
que L. monocytogenes est un germe pathogène intracellulaire
facultatif [COSSÀRT et coll., 1989; DATTA et KOTHARY, 1993].
La listériolysine O n'est pas le seul élément responsable
de la virulence de L. monocytogenes. D'autres facteurs, secrétés
ou liés à la structure de la paroi agissent en synergie avec
cette toxine. Il s'agit de la phospholipase C, de la
métalloprotéase, de l'actine et de l'internaline.
Lors de l'étape initiale d'infection, L. monocytogenes se
met en contact avec la cellule par l'intermédiaire de
l'internaline. Après fixation, la bactérie est immédiatement
phagocytée. La listériolysine 0 et la phospholipase C détruisent
la membrane du phagosome et libèrent la bactérie dans le cytosol.
Le mouvement intra et intercellulaire est facilité par la
polymérisation de l'actine intracellulaire [CZüPRYNSKI, 1994].
Par l'étude de mutants non hémolytiques, dénués de tout
pouvoir pathogène, le gène hly codant pour la listériolysine O
a été identifié et séquencé [GORMLEY et coll., 1989; DATTA et
coll., 1990].
Le nombre de gènes nécessaires pour l'expression de la
pathogénicité de L. monocytogenes n'est pas encore clairement
établi. Par l'étude de mutants, des informations partielles ont
été obtenues uniquement pour cinq gènes (figure 3). Il s'agit du
gène hly, codant pour la listériolysine O, du gène plcA, codant
pour la phospholipase C, du gène mpl, codant pour la
métalloprotéase, du gène actA, induisant la polymérisation de
l'actine, et le gène inlA, codant pour 1'internaiine. Tous ces
gènes sont situés à proximité du gène hly et sont contrôlés par
un gène régulateur, appelé prfA [DATTA et coir., 1993].
Figure 3. Représentation schématique des opérons régulés par prfA.
D’après COSSART, 1992
prfA plcA hly mpl actA plcB
ORFX OR5ZPRF
PI-PLC
+ +
AA
Listeriolysin Métalloprotéase Lecithinase ORFY
MA
Intemalin 4- MB
inW c«nc product
1 kb
1.3.1 Niche écologique.
L. monocytogenes est un germe largement répandu dans la
nature. Sa niche écologique est très difficile à définir. Ce
germe a été isolé dans le sol, la végétation, le fourrage, l'eau
des rivières et des égoûts, les matières fécales, dans les
aérosols et dans de nombreux produits alimentaires d'origine
animale ou végétale [COLBURN et coll. 1990; FARBER, 1991;
SPURLOCK et ZOTTOLA, 1991; VÀRÀBIOFF, 1992; DILLON et PATEL,
1992; NAcGOWAN et coll., 1994]. L'environnement constitue donc
un réservoir et une source très importante de contamination.
La capacité qu'a ce germe de survivre pendant de longues périodes
dans le sol et sa résistance aux conditions très hostiles
permettent une existence de type saprophytique.
1.3.2 Résistance aux agents physico-chimiques.
1.3.2.1 Thermorésistance.
Les études à propos de l'inactivation de L. monocytogenes par
la chaleur ont donné des résultats contradictoires. En effet,
pour certains auteurs, L. monocytogenes peut supporter une
pasteurisation [BEARNS et GIRAUD, 1958] ou est détruit [DONNELLY,
et coll., 1987].
Différents temps et températures ont été testés pour évaluer la
thermorésistance de L. monocytogenes dans le lait.
DOYLE (1987) a retrouvé des germes survivants après 16,4 secondes
à 73,9*C. Ces auteurs ont montré que la thermorésistance de
L. monocytogenes est liée à sa présence intraleucocytaire. Par
contre, l'étude de BUNNING et coll. (1986)
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