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La liquidation de la faillite

B. La liquidation des entreprises en diffi culté : la loi du 8 août 1997 sur les faillites

5. La liquidation de la faillite

56. Dès le dépôt du premier procès-verbal de vérifi cation des créances, les curateurs procèdent à la liquidation de la faillite184.

Il s’agit de procéder à la meilleure réalisation possible de l’actif de la faillite, afi n de désintéresser au mieux les créanciers. Le juge-commissaire convoque d’abord le failli, en présence des curateurs, pour recueillir ses observations sur la meilleure réalisation possible de l’actif. Ensuite, les curateurs font vendre les immeubles185, marchandises et effets mobiliers du failli, sous la surveillance du juge-commissaire. Par ailleurs, ils recher-chent et recouvrent toutes les créances ou sommes dues au failli. Les deniers provenant des ventes et recouvrements faits par les curateurs sont versés à la Caisse des dépôts et consignations dans le mois de leur réception. Afi n de fi nancer les opérations courantes, le curateur peut néanmoins conser-ver un montant limité sur un compte bancaire individualisé par faillite, sous la surveillance du juge-commissaire, qui fi xe le montant maximum186.

Une vente en bloc de l’entreprise du débiteur failli pourrait être, il est vrai, plus avantageuse ; de surcroît, une telle formule peut favoriser la continuité de l’activité et garantir le maintien d’un certain volume d’em-ploi. L’article 75§4 prévoit dès lors qu’à la demande des curateurs, le tribu-nal de commerce peut homologuer le transfert d’une entreprise en activité selon des modalités conventionnelles dont l’exécution peut être poursui-vie par les curateurs ou, après la clôture de la faillite, par tout intéressé187.

Dans l’hypothèse où les opérations de liquidation doivent, compte tenu de la complexité de la faillite en cause, s’étaler sur une longue période, la loi prévoit la possibilité, consentie au juge-commissaire, de convoquer à tout moment une assemblée des créanciers ou de certains d’entre eux, en vue, le cas échéant, de faire le point sur la situation. En tout état de cause, une telle assemblée peut se tenir, à la demande des créanciers, dès la

troi-184 Loi de 1997, préc., note 2, art. 75§1.

185 En ce qui concerne la réalisation des immeubles, voir : id., art. 100.

186 Id., art. 51.

187 Les aspects sociaux d’une telle cession en going concern sont réglés par la Convention collective de travail 32 bis conclue le 7 juin 1985 au sein du Conseil national du travail, concernant le maintien des droits des travailleurs en cas de changement d’employeur du fait d’un transfert conventionnel d’entreprise et réglant les droits des travailleurs repris en cas de reprise de l’actif après faillite (pour plus de détails : cf. infra, section III, n° 71 et suivants).

sième année après la date anniversaire du jugement déclaratif de faillite188. Elle devra être convoquée, si la demande émane de créanciers représentant plus d’un tiers des dettes de l’entreprise faillie.

Une fois les actifs du failli réalisés, le juge-commissaire ordonne, s’il y a lieu, une répartition « avant clôture » entre les créanciers et en fi xe la quotité. Le montant de l’actif du failli, déduction faite des frais d’adminis-tration de la faillite, des secours qui auraient été accordés au failli et à sa famille et des sommes payées aux créanciers privilégiés, est réparti entre tous les créanciers, au marc le franc de leurs créances189. Tout paiement effectué sur ordre du juge-commissaire ou avec son autorisation entraîne la décharge des curateurs190.

In fi ne, les sommes qui, à la clôture de la faillite, n’ont pu être réparties191 sont versées à la Caisse des dépôts et consignations au profi t des créanciers concernés192.

Si les curateurs ont contesté certaines créances déclarées par les créan-ciers du failli et que les contestations n’ont pas encore été défi nitivement tranchées, il ne peut être procédé à une répartition, en faveur des autres créanciers, du produit de la réalisation des actifs du failli que moyennant la mise en réserve de la part correspondant aux créances contestées193. 6. La clôture de la faillite et l’excusabilité du failli

a) La clôture de la faillite

57. Lorsque la liquidation de la faillite est terminée, le failli et les créanciers sont convoqués par les curateurs, sur ordonnance du juge- commissaire194.

Au cours de l’assemblée ainsi convoquée, le compte des curateurs – qui reprend le montant de l’actif, les frais et honoraires des curateurs, les dettes de la masse et la répartition aux différentes catégories de créanciers –,

188 Loi de 1997, préc., note 2, art. 76.

189 Id., art. 99.

190 Id., art. 77.

191 Par exemple, en raison du changement d’adresse d’un créancier.

192 Loi de 1997, préc., note 2, art. 52 al. 3.

193 Id., art. 78.

194 Id., art. 79 al. 1er.

est débattu et arrêté. Dans le même temps, les créanciers sont appelés, le cas échéant, à donner leur avis sur l’excusabilité de la personne physique faillie.

Le reliquat de la réalisation des actifs qui n’a pas fait l’objet d’une « avant clôture » est alors réparti et, si le compte défi nitif présente un solde positif, celui-ci revient de droit au failli.

Sur le rapport du juge-commissaire, le tribunal ordonne ensuite la clôture de la faillite, après avoir tranché le cas échéant les contestations rela-tives au compte et redressé celui-ci s’il y a lieu195. Si le failli est une per-sonne morale, la décision du tribunal entraîne sa dissolution et la clôture immédiate de sa liquidation196.

Le jugement ordonnant la clôture de la faillite est notifi é au failli par les soins du greffi er. Le tribunal peut décider que le jugement qui ordonne la clôture de la faillite sera publié par extrait au Moniteur belge. Cette publi-cation doit avoir lieu si le failli est déclaré excusable.

Sauf pour ce qui concerne son exécution, la clôture de la faillite met fi n aux fonctions des curateurs. Elle emporte leur décharge générale197, mais uniquement à l’égard des créanciers impliqués dans la faillite. Les tiers préjudiciés pourraient par conséquent encore assigner les curateurs en responsabilité devant le tribunal de commerce198.

Dès la clôture de la faillite, la suspension des voies d’action des créan-ciers prend fi n. Ces derniers recouvrent par conséquent le plein exercice de leurs droits : ils peuvent en principe agir contre le failli, dont le dessaisisse-ment a pris fi n, afi n d’obtenir le solde du remboursedessaisisse-ment de leurs créances, sauf si celui-ci a été déclaré excusable, comme on va le voir maintenant.

b) L’excusabilité du failli

58. L’un des apports les plus marquants de la loi de 1997 concerne en effet le régime de la déclaration d’excusabilité du failli. En effet, si ce der-nier est déclaré excusable, l’exécution des créances existantes au jour de la

195 Id., art. 80 al. 1er.

196 Id., art. 83.

197 Id., art. 80 in fi ne.

198 I. VEROUGSTRAETE (dir.), préc., note 130, p. 714.

déclaration d’excusabilité ne peut plus être poursuivie par ses créanciers199. Les dettes du failli, qui n’auraient pas été complètement apurées par la procédure de faillite, se trouvent ainsi purement et simplement effacées – en ce compris les dettes sociales et fi scales200. Le législateur a en effet consi-déré que, lorsque le failli a fait preuve de probité, aussi bien dans la gestion de son entreprise commerciale que dans la procédure de faillite qui lui a succédé, l’intérêt général était mieux servi si le failli se voyait offrir la pos-sibilité de prendre un « nouveau départ », ou « fresh start »201, en vue de sa réinsertion dans le circuit économique. En revanche, si le failli n’est pas déclaré excusable, les créanciers retrouvent, dès la clôture de la faillite, le droit d’exercer individuellement leurs actions sur ses biens.

La ratio legis du mécanisme de l’excusabilité ainsi exposé, on comprend aisément que le législateur a entendu en réserver le bénéfi ce aux seules personnes physiques ayant été déclarées en faillite. Les personnes morales faillies ne peuvent donc, aux termes de l’article 81 de la loi, être reconnues excusables202. Selon la Cour constitutionnelle de Belgique, cette différence de traitement entre personnes physiques et personnes morales n’est en rien contraire au principe constitutionnel d’égalité :

« si une personne physique peut se trouver exclue du circuit économique parce que la charge de ses dettes la dissuade de recommencer une activité commer-ciale, il n’en est pas de même d’une personne morale puisque, après sa faillite, son fonds de commerce peut faire l’objet d’une cession. Le souci de permettre

’un nouveau départ’ peut, sans violer le principe d’égalité, être réservé aux personnes physiques. » 203

59. Les conditions d’excusabilité des personnes physiques faillies sont énoncées par l’article 80, al. 2 de la loi de 1997. Depuis que cette disposi-tion a été modifi ée par la loi du 4 septembre 2002, le principe est le sui-vant : le failli « malheureux et de bonne foi » doit bénéfi cier de l’excusabilité, sauf circonstances graves spécialement motivées. L’octroi de l’excusabilité est donc devenu la règle et son refus l’exception ; le tribunal ne peut s’en

199 Loi de 1997, préc., note 2, art. 82 al. 1er.

200 Doc. parl. Sénat, sess. 1996-1997, 498/011, p. 150 et 151.

201 Le législateur belge prétend s’être inspiré, à cet égard, du chapitre 11 du Bankruptcy Code américain.

202 Loi de 1997, préc., note 2, art. 81.

203 C.C., 30 juin 2004, arrêt n° 114/2004, Arr. C.A., 2004, p. 1301.

écarter qu’au prix d’une motivation adéquate. Dans l’appréciation des cir-constances graves qui excluent le failli du bénéfi ce de l’excusabilité, les tri-bunaux sont attentifs tant à la manière dont ce dernier a exercé son activité commerciale passée qu’au comportement qu’il a adopté pendant la procé-dure de faillite et, notamment, à la qualité sa collaboration avec le cura-teur204.

60. A l’origine, la question de l’excusabilité du failli n’était discutée qu’au stade de la clôture de la faillite. Désormais, l’article 80, al. 5 de la loi permet au failli de demander au tribunal de statuer sur son excusabilité dès qu’un délai de six mois à compter du jugement déclaratif de faillite est écoulé. S’il n’a pas usé de cette faculté, le failli ainsi que les créanciers sont alors convoqués à l’audience de clôture et il est statué sur son excusabilité dans la foulée205.