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Partie 1.1.1 et Partie 1.1.2.3) et par le fait que notre étude s’intéresse spécifiquement aux IAM,

4.4. Limites de l’étude

Le type de données disponibles dans le DP est limité. La posologie et le moment de prise ne sont pas précisés. Or certaines IAM ne sont observées qu’à posologie élevée et d’autres sont évitables en respectant un délai entre l’administration des médicaments. La durée de prescription est également manquante et l’adhésion du patient n’est pas évaluée. Or l’analyse est réalisée en considérant que les médicaments sont pris. Enfin, l’exhaustivité du traitement n’est pas garantie. L’analyse des interactions pourrait alors s’appuyer sur le DPI. Mais la démarche serait alors plus chronophage et tendrait vers une conciliation.

Une partie de ces informations pourra être apportée d’ici peu avec le déploiement imminent du DMP. Mais pour obtenir l’ensemble des informations, le pharmacien doit discuter avec le patient, notamment lors de l’initiation du traitement. Les données manquantes contribuent à diminuer la pertinence de nos IP (200). Selon Mille (200), connaître le moment de prise et les habitudes de prescription réduirait de 80% les alertes non-pertinentes.

Comme suggéré par France et al. (6), le DP renforcerait d’avantage le lien ville-hôpital si les IP formulées à partir de ce dernier pouvaient y être renseignées. Dans la même optique, nous pourrions enregistrer nos avis pharmaceutiques dans le DMP.

100 Notre analyse des interactions est aussi limitée par l’évaluation de la pertinence clinique des IP signalées, autant pour les médicaments que pour les produits complémentaires. Ainsi, malgré une meilleure sensibilité, nous ne pouvons pas conclure que Drugs® est supérieur aux autres outils, car nous avons évalué sa pertinence de manière subjective (Figure 9). Comme décrit par Boiteux-Jurain et

al. (213), l’analyse pharmaceutique varie beaucoup d’un pharmacien à l’autre. La variabilité

interindividuelle est également très importante entre les patients, surtout pour les interactions pharmacocinétiques. La sévérité d’une même interaction peut aussi varier d’une base de données à l’autre, les définitions des IAM et les méthodes d’analyse n’étant pas standardisées (11,140). En effet, les éditeurs de logiciels rencontrent des difficultés à mettre à jour leur base de données et privilégient la sensibilité à la spécificité pour se couvrir judiciairement (136). Enfin, la littérature actuellement disponible ne permet pas de déterminer l’impact des IAM potentielles (140), les données relatives à la prévalence réelle des IAM impliquant des thérapies orales restent limitées (11) et, lors de la recherche d’interactions avec la phytothérapie, la partie de la plante consommée n’était pas connue (11).

Actuellement, aucun consensus n’existe pour évaluer ni la pertinence d’une IP, ni le taux d’erreurs iatrogènes potentiellement évitées (207). Certains auteurs évaluent la pertinence de l’IP par leur taux d’acceptation par le prescripteur (203). D’autres la valident a priori ou a posteriori en assurant un suivi étroit du patient par méthode invasive ou non (189,214). Ramos-Esquivel et al. ont ainsi mis en évidence que 2,7% des IAM étaient cliniquement significatives (161), Miranda et al. ont imputé une réhospitalisation à 2% des IAM (215) et Buajordet et al. ont relevé 4% de décès suite à une IAM sévère (9). Comme décrit dans la littérature (11,216), nous aurions aussi pu utiliser la méthode Delphi pour identifier les IAM cliniquement significatives ou encore réaliser une recherche bibliographique des cas d’interactions avérées, en appliquant ensuite les critères de Naranjo et al. (217). Cependant, la plupart des médicaments rétrocédés étant récents, les données de vie réelle restent limitées (218). Le recueil d’informations théoriques est donc essentiel pour attirer l’attention des prescripteurs et renforcer la surveillance du patient (11,190). A terme, une partie de la solution résidera peut-être dans le big data et dans l’intelligence artificielle.

Dans notre étude, nous avons choisi d’appliquer le principe de précaution. En effet, nous avons dispensé des médicaments à risque à des patients également à risque (1,95,157). Or, en présence de facteurs de risque, une association à faible niveau de contrainte peut être responsable de conséquences cliniques graves (97).

Notre démarche ne sécurise que partiellement la rétrocession. Elle complète l’analyse réglementaire et pharmaceutique, mais elle se limite à la recherche d’interactions. Elle correspond à l’acte de dispensation du nouveau modèle de la SFPC, se rapprochant de celui du bilan de médication si le DP est assimilé à plusieurs ordonnances. Réalisée lors des consultations pharmaceutiques dans le service « Hors Les Murs », l’analyse des IAM peut s’intégrer à un plan pharmaceutique personnalisé.

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Conclusion

La plupart des patients inclus dans cette étude disposaient d’un DP ouvert et implémenté par l’officine, sans pour autant le savoir. Largement intéressés par la démarche, ils sont souvent polymédiqués et au moins une IAM concernant le médicament rétrocédé a été relevée pour 58% d’entre eux. Pour 11% de notre file active, une IAM à risque a été signalée au prescripteur. Elle concernait principalement le posaconazole, l’idelalisib et le palbociclib. Le DP est donc un outil intéressant pour identifier les IAM avec les médicaments rétrocédés et pour sécuriser la prise en charge ambulatoire. Il contribue à anticiper les risques et à optimiser le suivi du patient, malgré des informations limitées et souvent partielles. Ces dernières seront bientôt complétées par le DMP, bien que l’intégration du DP dans ce dernier ne soit prévue que dans quelques années.

Le DP est facile à mettre en place. Contrairement à la recherche d’IAM, son utilisation n’est pas chronophage. A l’IPC, son accès vient d’être étendu aux médecins de trois services, l’oncogériatrie, l’unité des admissions imprévues et l’hospitalisation à domicile. Pour garantir la pérennité de notre démarche, l’alimentation du DP est partagée avec les préparateurs en pharmacie et la recherche des IAM est à présent réservée aux initiations de traitement.

Drugs® est l’outil d’analyse d’IAM le plus adapté à notre pratique. La recherche d’IAM sera complétée par une des bases de données française, par le tableau des interactions métaboliques des HUG et par le RCP, pour les molécules récemment commercialisées.

La présentation du DP a aussi permis d’ouvrir le dialogue avec le patient, l’encourageant notamment à aborder sa consommation en produits complémentaires. Rarement mentionnés sur le DP, ils exposaient 72% des patients concernés à un risque d’interaction. Cette question est maintenant abordée au moment de l’initiation de traitement et lors des consultations pharmaceutiques réalisées dans le service « Hors Les Murs ».

A présent, la pertinence de nos IP et leur impact restent à évaluer de manière plus approfondie pour optimiser notre démarche et valoriser notre travail.

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