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Limites imposées par la consistance des systèmes cimentaires étudiés

Chapitre 4. La rhéométrie appliquée aux systèmes ciment/superplastifiant compatibles et

4.1. La rhéométrie à l’usage des systèmes cimentaires

4.1.2. Le Système de Mesure à Boule (S.M.B.)

4.1.2.4. Limites imposées par la consistance des systèmes cimentaires étudiés

En vue d’établir les propriétés d’écoulement de combinaisons ciment/superplastifiant avec le Système de Mesure à Boule, une étude préliminaire des valeurs mesurées par l’appareil a été menée. L’objectif était de mesurer des contraintes de cisaillement à vitesse de cisaillement constante et d’observer le profil de mesure fourni par le rhéomètre.

Les mesures ont été conduites sur des mortiers de consistance courante. La plasticité de ces mélanges a toutefois été améliorée afin de favoriser un écoulement correct. Pour cela, une diminution du rapport sable/ciment (S/C) en comparaison à la composition normalisée a été appliquée. Les masses et les proportions des différents constituants sont indiquées dans le tableau 12. L’étalement Haegermann de ces mélanges à la fin du malaxage, soit à 7 minutes d’hydratation, a été mesuré et s’élève à 235 ± 2 mm.

Tableau 12 : Composition massique des mortiers de consistance courante utilisés pour les mesures rhéométriques (Ciment B, Sable normalisé).

Ciment (g) Eau (g) Sable (g) E/C S/C

550 292 1350 0,53 2,45 Dans un premier temps, l’évolution de la contrainte de cisaillement à vitesse de cisaillement constante est étudiée. Puis, dans un deuxième temps, l’influence de la durée de l’hydratation sur la mesure de la contrainte de cisaillement est considérée.

− Évolution de la contrainte de cisaillement à vitesse de cisaillement constante. Les différents processus intervenant lors de la mise en œuvre des matériaux de construction mettent en jeu des vitesses de cisaillement variables. Le tableau 13, ci-dessous, indique les principales correspondances.

Tableau 13 : Domaines de vitesse de cisaillement impliqués dans différents processus de mise en œuvre des matériaux [75].

Processus Domaine de vitesse de cisaillement Sédimentation des grandes particules 10-4 à 10-1 s-1

Étalement sous l’effet de la pesanteur (autoplaçant) 10-2 à 10-1 s-1 Ressuage sous l’effet de la pesanteur 10-2 à 10-1 s-1

Malaxage 10 à 103 s-1

Une vitesse de cisaillement constante, s’élevant à 0,04 s-1 et correspondant à une vitesse de rotation n de 0,1 min-1, a été appliquée au mélange afin de permettre l’enregistrement d’un grand nombre de points sans que le système de mesure n’effectue une rotation complète au sein du mortier. Une contrainte de cisaillement constante était attendue en admettant que le mortier présente un écoulement de Bingham. Le profil de mesure obtenu est donné à la figure 42 ci-dessous.

0 50 100 150 200 250 300 0 10 20 30 40 50 60 70 Durée de la mesure (s) Contrainte de cisaille m ent (Pa)

Zone de matériau modifié par la pénétration de la boule

Zone de matériau modifié par l'accumulation de matière à l'avant de la boule

Mortier de consistance courante - Etalement initial = 235 mm Vitesse de cisaillement = 0,04 s-1

Zone intermédiaire = Mesures exploitables

Figure 42 : Évolution typique de la contrainte de cisaillement enregistrée à vitesse de cisaillement constante dans un mortier de consistance courante.

L’examen de l’enregistrement de la contrainte de cisaillement à vitesse de cisaillement constante conduit à identifier deux zones dans lesquelles les mesures sont vraisemblablement faussées.

− Première zone : modification structurale due à la pénétration du S.M.B. La première zone correspond à la forte augmentation de la contrainte de cisaillement au début de la mesure et est attribuée à une modification structurale du matériau. Lors de la pénétration verticale du S.M.B. au sein de l’échantillon, le matériau au contact de la sphère subit des altérations irréversibles du fait de sa consistance. Le mortier situé sur le chemin de la boule va être comprimé en-dessous de celle-ci. Par contre un vide est créé au-dessus. Le matériau environnant la sphère n’est donc pas en mesure de produire un écoulement laminaire au début du déplacement horizontal et les contraintes de cisaillement mesurées dans cette zone sont par conséquent erronées. Un certain temps est donc nécessaire pour que le matériau entourant la boule soit intact et que les contraintes de cisaillement correspondantes soient valables.

− Deuxième zone : accumulation de matière à l’avant du S.M.B.

La deuxième zone commence à partir d’un certain déplacement en raison d’une accumulation de matière à l’avant du S.M.B., laquelle se traduit par une augmentation constante de la contrainte de cisaillement enregistrée. Les mortiers étudiés ont une consistance plastique, il présente un étalement sous l’effet d’une action extérieure mais pas sous l’action de leur propre poids. Ainsi, lors du déplacement du Système de Mesure à Boule, une partie du matériau ne s’écoule pas autour de la boule et s’accumule à l’avant. Ce phénomène se traduit par une augmentation continue de la contrainte de cisaillement à vitesse de cisaillement constante. Par conséquent, après un certain parcours, les contraintes de cisaillement mesurées par le Système de Mesure à Boule sont surestimées.

La figure 43 illustre l’écoulement limité du matériau autour de la boule avec l’accumulation en aval du courant de déplacement créé par le S.M.B. et la création d’un canal en amont, lequel limite de plus les mesures à une seule rotation.

Accumulation Canal Sens de rotation Accumulation Canal Sens de rotation

Figure 43 : Formation d’un « canal » en amont du S.M.B. et accumulation de matière en aval. − Évolution de la consistance dans le temps

Une des caractéristiques fondamentales des suspensions de ciment est l’évolution dans le temps des propriétés rhéologiques. Une évaluation a donc été effectuée à différents temps d’hydratation d’un même mortier, pour une vitesse de cisaillement constante, afin de comparer les profils d’enregistrement obtenus. Entre deux mesures, le mortier est placé dans le simulateur de transport. La figure 44 présente l’évolution de la contrainte de cisaillement dans ces conditions.

0 100 200 300 400 500 0 10 20 30 40 50 60 70 Durée de la mesure (s)

Contrainte de cisaillement (Pa) 30 min 50 min 70 min Mortier de consistance courante

Vitesse de cisaillement = 0,04 s-1

Durée de l'hydratation :

Figure 44 : Influence de la durée d’hydratation sur l’augmentation de la contrainte de cisaillement avec l’avancée du S.M.B.

Il apparaît, tout d’abord, que l’augmentation initiale de la contrainte de cisaillement varie peu avec l’avancée de l’hydratation. Cette partie de l’enregistrement n’est que faiblement influencée par l’évolution de la consistance des mélanges. Cette zone a pour seule origine la pénétration de la boule et est donc par conséquent indissociable de l’utilisation du Système de Mesure à Boule.

Par contre, l’augmentation de la contrainte de cisaillement liée à l’accumulation de matière à l’avant de la boule est d’autant plus forte que la durée de l’hydratation est longue. La consistance des mélanges est ici directement mise en cause. En effet, la perte de plasticité du mortier avec l’avancée du processus d’hydratation rend l’écoulement autour de la boule plus difficile. La déviation de la mesure de la contrainte de cisaillement par rapport à la valeur réelle devient par conséquent plus importante.

La fluidité des mélanges cimentaires étudiés n’est pas assez élevée pour autoriser une utilisation conventionnelle du rhéomètre. En effet, plusieurs travaux réalisés avec le S.M.B. [85, 131, 132] proposent d’étudier les propriétés d’écoulement d’un fluide donné en une seule rotation. La vitesse de rotation du S.M.B. et, par conséquent, la vitesse de cisaillement sont alors progressivement augmentées. Un tel mode opératoire n’est pas applicable dans le cadre de ces travaux. Dans un premier temps, les premières mesures, réalisées pour des vitesses de cisaillement de l’ordre de 10-3 s-1, seraient nombreuses à être concernées par les modifications structurales causées par la pénétration de la boule. Dans un deuxième temps, l’accumulation de matière à l’avant du S.M.B. entraînerait une surestimation des contraintes de cisaillement mesurées. Enfin, la durée nécessaire pour effectuer une rotation en faisant varier la vitesse de cisaillement de 10-3 à 30 s-1 est d’environ sept minutes. Une telle durée de mesure est inenvisageable compte tenu de l’avancée des réactions d’hydratation, lesquelles modifient directement les propriétés d’écoulement d’une pâte de ciment.

Le Système de Mesure à Boule présente un certain nombre d’avantages par rapport aux rhéomètres rotationnels classiques. Les coefficients de proportionnalité entre les grandeurs rhéologiques primaires (vitesse de rotation, moment de rotation) et les grandeurs rhéologiques secondaires (vitesse de cisaillement, contrainte de cisaillement) apportent une simplification manifeste. L’absence du film glissant à la surface de l’échantillon est également importante en ce qui concerne l’exactitude des mesures. Cependant, l’application de ce dispositif aux combinaisons ciment/superplastifiant semble délicate. La consistance des matériaux utilisés limite considérablement le potentiel du S.M.B. ; un mode opératoire adapté doit, par conséquent, être élaboré afin d’éviter les zones de mesures erronées, appréhender au mieux les propriétés rhéologiques des mélanges et mettre ainsi en œuvre une étude comparative des combinaisons ciments/superplastifiants compatibles et incompatibles.

4.2. Mise au point d’un mode opératoire adapté à la consistance des