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La physique des cavités résonantes parallélépipèdiques électromagnétiques est bien connue. La prédiction analytique du champ électrique en un point particulier dans la cavité est tout à fait possible. L’ajout dans la cavité d’un brasseur mécanique dont la géo-métrie est considérée comme arbitraire1 engendre des configurations de champs qui sont elles-mêmes aléatoires. L’essence de la mesure en chambre réverbérante est de créer des situations d’illuminations aléatoires afin de garantir une homogénéité statistique pour un essai. Les approches statistiques s’intéressent à plusieurs observables comme le niveau des composantes rectangulaires du champ électrique ou la puissance. Ces quantités sont dé-crites par des distributions statistiques. Elles donnent accès au comportement statistique moyen de la chambre afin de réaliser des essais CEM.

Il faut distinguer deux approches statistiques distinctes. La première approche cherche à caractériser de manière statistique le fonctionnement d’une chambre réverbérante en associant des lois de distributions à certaines grandeurs caractéristiques. Cette approche se nourrit de considérations théoriques et de mesures pour constituer des modèles statistiques. La seconde approche probabiliste du fonctionnement de la chambre a été développée par David A. Hill [6]. Elle consiste à modéliser le champ présent dans la chambre comme une superposition d’ondes planes dont les caractéristiques statistiques sont précises. Cette approche se basant sur un modèle idéal permet d’accéder à la description statistique d’une chambre en régime idéal.

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Chapitre 4. Modèles statistiques

4.1 Modèles statistiques de champ dans une chambre

réver-bérante

4.1.1 Modèles statistiques de chambres réverbérantes en régime idéal

Dans [4], l’auteur propose un modèle statistique pour décrire les champs dans une chambre réverbérante. Le champ électrique total peut se décomposer en trois composantes cartésiennes. Chaque composante cartésienne nécessite deux composantes pour être décrite (le module et la phase ou bien la partie réelle et la partie imaginaire). Au final le champ électrique nécessite six composantes pour être décrit.

~

E “ pExr` ıExiq~ex` pEyr` ıEyiq~ey` pEzr` ıEziq~ez. (4.1) Chacune de ses six composantes résulte de la superposition d’un grand nombre de modes (si la chambre est utilisée dans des conditions idéales, c’est-à-dire à une fréquence suf-fisamment élevée et avec des antennes éloignées des parois). Le théorème central limite permet d’affirmer que chaque composante est distribuée suivant une loi normale. Dans des conditions idéales d’utilisation et sans couplage direct entre les antennes, on peut supposer que les lois normales de chacune des composantes sont identiques et centrées. Le module du champ || ~E||suit alors une loi du chi à six degrés de liberté. Chaque composante rectan-gulaire du champ suit une loi du chi à deux degrés de liberté, soit une loi de Rayleigh. La puissance associée à chaque composante rectangulaire suit une loi exponentielle (dans [5], l’auteur propose aussi un modèle statistique permettant d’en déduire la distribution de la puissance). Dans [4], l’auteur vérifie ce modèle théorique à travers des mesures du champ électrique dans la chambre et propose une relation entre la variance σ2des lois normales de chaque composante et le facteur de qualité de la chambre Q. En outre, il donne les bases nécessaires aux calculs des incertitudes associées aux mesures de champ et de puissance en chambre réverbérante. Dans [46], l’auteur réalise une comparaison entre les modèles statistiques idéaux de densité de puissance et des mesures réalisées dans sept chambres réverbérantes différentes et dans cinq cavités réelles (des fuselages d’avions) dont le facteur de qualité est plus faible. L’auteur montre que le modèle statistique s’applique parfaitement aux sept chambres réverbérantes ainsi qu’aux cinq cavités réelles. Dans [47], l’adéquation ou non aux distributions théoriques idéales du champ électrique permet de mesurer qua-litativement l’effet de trois brasseurs dont les caractéristiques physiques sont distinctes. L’utilisation des propriétés statistiques des champs permet de prévoir la puissance maxi-male que l’on peut espérer observer en N observations. La prédiction de la puissance maximale est une donnée essentielle pour effectuer un essai en immunité. Dans [48], l’au-teur donne l’espérance de la puissance maximale pour N positions de brasseur en utilisant la théorie des valeurs extrêmes et compare ses résultats à plusieurs mesures. Cette approche est reprise par Harima [49], Höijer [50,51], Orjubin [45] et Gradoni [52] qui emploient une distribution des valeurs extrêmes généralisées.

4.1.2 Modèles tenant compte des imperfections des chambres

réverbé-rantes

La modélisation de la chambre à travers des distributions statistiques ne s’intéresse pas seulement au régime idéal, c’est-à-dire lorsque la chambre est surdimensionnée. À plus basse fréquence, la quantité de modes excités peut être insuffisante et les distributions

4.2. Modèle d’ondes planes de David A. Hill 39

statistiques des champs changent. Dans [53], Mitra s’intéresse au régime non idéal, c’est-à-dire au fonctionnement de la chambre autour et en dessous de la LUF. À travers des mesures, il analyse l’écart des paramètres de la distribution de la densité de puissance dans la chambre pour différentes fréquences avec la théorie, et essaie de les relier au nombre M de modes dans une largeur de bande à 3 dB autour de la fréquence excitée. Il analyse aussi l’effet de la fréquence sur la fonction de corrélation spatiale et compare les résultats théoriques à plusieurs mesures. Cette étude cherche à donner un critère statistique à travers le paramètre M pour estimer la LUF d’une chambre. Dans [54], l’auteur emploie des compositions de distributions exponentielles pour caractériser le fonctionnement à basse fréquence (en dessous de la LUF) de la chambre. Dans [55], l’auteur utilise la distribution de Weibull (qui comporte deux paramètres) pour généraliser le fonctionnement de la chambre réverbérante, le comportement idéal étant simplement un cas limite de la distribution de Weibull. Enfin, dans [56], des tests statistiques (notamment des tests d’Anderson Darling) déjà évoqués dans les perspectives d’études dans [53], permettent de quantifier la non idéalité du fonctionnement de la chambre et de vérifier que la distribution de Weibull est largement acceptée à basse fréquence. De plus, l’auteur établit une corrélation entre la taille de l’antenne et la distribution observée : plus l’antenne est grande et plus la distribution est idéale (les composantes rectangulaires du champ suivent une loi de Rayleigh, le paramètre de forme de la distribution de Weibull tend vers 2). D’autres approches à travers des distributions à trois paramètres [57] permettent de caractériser la statistique de la chambre réverbérante dans des cas d’utilisations non idéales, en présence de trajets non brassés ou à des fréquences en dessous de la LUF.

Les modèles statistiques de chambres réverbérantes sont largement utilisés pour me-ner des essais CEM, vérifier le bon fonctionnement d’une chambre réverbérante, optimi-ser la construction d’un brasseur, mais aussi pour vérifier que les modèles numériques de chambres réverbérantes reproduisent correctement le comportement statistique de la chambre modélisée.

4.2 Modèle d’ondes planes de David A. Hill

Le modèle de chambre réverbérante de Hill [6], s’appuie sur une description simplifiée du fonctionnement d’une chambre réverbérante. Ce modèle par superposition d’ondes planes de Hill est un modèle probabiliste très simple qui a tout d’abord été introduit dans [58] puis repris dans [59] pour exprimer de manière théorique la décorrélation spatiale du champ électrique dans la chambre réverbérante. Finalement, l’article [6] reprend dans le détail l’approche choisie dans [58] et se concentre sur la statistique du champ électrique et de la puissance vue d’un objet sous test. Le champ obtenu en un point donné dans la chambre réverbérante est le résultat de la superposition d’un grand nombre d’ondes planes ayant des angles d’incidence uniformément distribués sur les 4π stéradians. Le champ électrique en ~r, ~Ep~rqs’écrit : ~ Ep~rq “ ż ~ F pΩqeı~k.~rdΩ (4.2)

où ~k est le vecteur d’onde de l’onde incidente (dans la direction ´~er), ~F pΩq est le vecteur polarisation de l’onde incidente pour l’angle solide Ω. À partir de ce modèle probabiliste, l’auteur retrouve les propriétés d’uniformité statistique du champ dans la chambre et les densités de probabilités usuelles du champ électrique et de la puissance incidente sur une

Chapitre 4. Modèles statistiques

antenne ou un objet sous test données dans [4]. Dans [60], la décorrélation spatiale est étudiée plus finement en introduisant une corrélation transverse et longitudinale des champs électriques. Le modèle que propose Hill est certainement le modèle probabiliste le plus simple, capable de représenter le comportement aléatoire du champ électromagnétique dans une chambre réverbérante en régime idéal. Ce modèle par intégration d’ondes planes est largement utilisé par la communauté scientifique dans des modèles hybrides, pour lesquels un objet sous test décrit de manière déterministe est plongé dans un spectre d’onde planes afin de simuler son comportement dans une chambre réverbérante. Dans [61], Hill propose une adaptation de son modèle pour simuler les champs à proximité d’une paroi métallique infinie (l’intégration se fait sur le demi-espace, 2π stéradians) et des coins. Son analyse, qui utilise la théorie des images, montre l’effet de la proximité des parois sur l’homogénéité du champ et sur la corrélation spatiale. Il en déduit de manière théorique une distance à partir de laquelle le champ n’est plus vraiment affecté par la ou les parois.

4.3 Limitations des modèles statistiques

En utilisant des modèles statistiques de chambres en régime idéal, il est très difficile de reproduire l’effet de paramètres physiques comme le facteur de qualité ou les dimensions de la chambre sur la statistique de chaque composante du champ. L’emploi de modèles intégrant les imperfections de la chambre à basse fréquence permet de réaliser des simu-lations plus proches de la réalité physique. Mais à l’inverse des modèles déterministes, ces modèles ne permettent pas de comprendre les détails des mécanismes physiques mis en jeu dans la chambre réverbérante lors d’un essai. Les modèles statistiques permettent de simuler des expériences à travers des tirages de Monte Carlo et de prédire la statistique de quantités particulières, comme par exemple l’espérance de la puissance maximale en N observations [45, 49–51]. La prédiction de telles quantités est pertinente pour mener des essais CEM. L’utilisation d’un spectre d’ondes planes permet de produire des champs dont les caractéristiques spatiales sont statistiquement conformes aux champs aléatoires obtenus dans une chambre réverbérante parfaitement brassée. La principale difficulté est de relier le champ simulé au facteur de qualité de la chambre réelle, c’est-à-dire de prendre en compte les pertes dans la cavité. Cette approche permet d’étudier les propriétés des champs et d’en déduire des propriétés particulières comme la décorrélation spatiale [59,60]. Cependant ces propriétés ne sont pas toujours transposables aux cavités rectangulaires réelles et les écarts parfois observés entre les distribution idéales obtenues par des modèles comme celui de Hill et les mesures sont souvent attribués à la non prise en compte de la cavité rectangulaire dans le modèle [60].

Chapitre 5

Modèles hybrides

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