interpersonnelle
a. Les relations interne-MSU étaient variables en fonction des binômes
Pour la moitié des internes interrogés, une bonne relation avec le MSU reposait sur une
bonne communication, qui était présentée comme un élément constructif de cette relation :
Communiquer permettait au MSU de mieux comprendre les besoins de son interne,
et ainsi d’ajuster son comportement : « je pense qu’il faut beaucoup discuter avec le
MSU, et qu’il prenne la position pour que l’interne soit le plus à l’aise en fait » (E2),
« c’est à l’interne de lui dire comment il se sent en consultation » (E9).
Echanger avec son MSU permettait à l’interne de se rassurer quant à ses capacités :
« comme je me sentais écoutée par le MSU, je pense que moi aussi j’ai pris un petit
peu plus de confiance dans les consultations » (E2).
Les échanges, qu’ils aient lieu en dehors ou au sein de la consultation (conseils de
posture, hypothèses diagnostiques, propositions thérapeutiques…), permettaient à
l’interne de se sentir pris en compte, valorisé et respecté, tout en améliorant ses
compétences : « c’était pas je parle puis il parle […] les solutions on était les deux
à en apporter, à la fin c’était "un plus un égal deux" » (E4), « on discutait entre
nous […] j’aimais bien, parce que on se sent impliqué en fait, pris en compte en tant
qu’interne en médecine générale » (E7), « pour que ce soit formateur, il faut qu’il y
ait un échange […] pour évoluer » (E7).
Enfin, beaucoup appréciaient pouvoir partager leurs connaissances avec le MSU, et
ne pas recevoir uniquement des informations de ce dernier : « j’ai pas ressenti un
savoir unilatéral […] j’ai ressenti que moi aussi j’avais apporté des choses à mes
chefs. Partage, le mot partage » (E4), « je pense qu’on peut leur apporter des choses
nous, et eux aussi » (E7)
L’instauration d’un climat de confiance permettait également d’entretenir une bonne
relation interne-MSU : « ils m’ont tous les trois rassurée dans le sens où je les ai assez mis en
confiance pour qu’ils me laissent en autonomie. Ça a été une confiance qui je pense a été
donnée mutuellement » (E4).
33
En revanche, les relations interne-MSU pouvaient parfois être plus complexes :
Soit par manque de confiance du MSU envers son interne : « il y a pas eu une
journée où elle m’a laissée faire des consult […] parce qu’elle estimait vraiment
que certains patients sont trop compliqués, et que j’y arriverais pas » (E2).
Du fait d’une communication interne-MSU insuffisante : « j’aurais dû peut-être lui
expliquer plus moi ce que je pensais […] j’ai pas su comment lui dire en fait » (E2).
Parfois, les caractères de l’interne et du MSU étaient incompatibles : « ça dépend
vraiment du comportement du médecin avec qui on est, et puis on n’a pas les mêmes
atomes crochus de toute façon suivant les médecins avec qui on est » (E5), « je
pense que c’est son caractère parce que il est distant, il est froid, il est imprévisible
[…] c’est le personnage en fait […] c’était plutôt personnel que professionnel »
(E7).
Enfin certains internes se sentaient jugés dans leur pratique, ce qui entachait leurs
relations : « quand elle intervenait c’était pas forcément très agréable parce que
c’était un peu cassant » (E5), « c’était que dans le négatif, c’était jamais dans le
positif. Ça fait très jugeant je trouve » (E8).
b. La présence du MSU en consultation déclenchait des sentiments
contradictoires chez les internes
Pour presque tous les internes, la présence du MSU en SD était ressentie comme
gênante, et pourvoyeuse de stress : « sa présence ça me perturbait beaucoup » (E2), « on pense
au fait qu’il nous observe, et si ça ne lui convient pas, ça nous stresse » (E2).
Les internes pensaient de pas pouvoir rester « naturels » en étant observés par le MSU, et ne se
sentaient « pas à l’aise » (E11). Ils « préférai[ent] qu’il ne soit pas présent » (E8).
Plusieurs avaient « peur de passer à côté de quelque chose » (E3) ou « d’oublier quelques
détails » (E2) car ils étaient « troublés ».
Nombreux étaient ceux qui considéraient le MSU comme le « maître » de la consultation,
détenteur du savoir, et avaient peur de commettre des erreurs : « elle a un niveau de
connaissance assez impressionnant et ça me mettait une pression pas possible […] je me disais
si je dis une bêtise elle va le savoir tout suite quoi, je vais pas lui faire à l’envers, elle a dû lire
un truc là-dessus » (E5). Ainsi, ils pouvaient parfois être amenés à « se brider, pour évoquer
34
certaines suspicions diagnostiques » (E10) ou propositions thérapeutiques par peur de se
tromper.
Beaucoup d’internes appréhendaient d’être jugés dans leur pratique : « c’est le seul stage quand
même où on est observé comme ça de tout notre internat, donc c’est quand même assez difficile
forcément […] t’as toujours l’impression d’être jugé » (E5), « je me sentais un peu espionnée
et jugée » (E6), « on appréhende beaucoup la triangulation en fait, le fait d’être observé, plus
ou moins jugé » (E12). Là encore, la peur du jugement amenait les internes à « se ret[enir] de
faire des choses ou de dire des choses » (E8).
Une interne reconnaissait que cette sensation de jugement n’était pas toujours fondée
« je me sentais pas mal jugée, alors qu’elles étaient pas du tout jugeantes hein, elles m’ont mise
à l’aise tout de suite » (E6), mais elle précisait tout de même que « pour accepter la supervision
directe, il fa[llait] quand même […] accepter énormément la critique, parce que sinon c’[était]
compliqué » (E6).
Un interne reconnaissait parfois moins s’impliquer du fait de la présence de son MSU :
« j’ai pas beaucoup plus creusé avec la patiente, parce que le maître de stage il était à côté il
connaissait déjà la patiente » (E7).
Un seul interne a pu dire que ça ne lui avait « jamais vraiment posé problème que [s]on
MSU soit là ou pas », car il se comportait comme s’il « étai[t] tout seul » (E10).
Parallèlement, un grand nombre d’internes se sentaient rassurés par la présence du MSU
en consultation.
D’une part, ils se sentaient encadrés dans leur pratique, puisqu’« au moindre doute » (E6), ils
n’hésitaient pas à « solliciter l’avis du MSU » (E2) : « ça me rassurait quand même que le MSU
soit là, pour poser la question » (E2). Ainsi, ils étaient « sûr[s] de pas passer à côté de quelque
chose tant qu’il [était] là » (E3).
D’autre part, le MSU avait un rôle de réassurance de l’interne quant à ses capacités « je voulais
être rassurée sur mes connaissances, donc je posais la question […] en fait c’était un manque
de confiance en moi ! » (E2), « il m’a rassuré, il m’a dit que j’avais été bien systématique,
j’avais bien posé les bonnes questions » (E4).
35
Son rôle de conseil était apprécié des étudiants, à la fois concernant la posture, la
communication avec le patient « au niveau relationnel il va nous voir, il va nous évaluer […]
et j’avais des retours "tu aurais formulé comme ça, ça serait mieux passé" » (E3), mais
également pour corriger les erreurs « chaque problème rencontré est tout de suite pointé du
doigt et tout de suite réparé […] ce qui était intéressant c’était d’être corrigée rapidement, on
faisait souvent des rétroactions » (E6).
Tableau 3 : Relations interne-MSU et conséquences de la présence du MSU en consultation
c. Interventions du MSU en consultation : modalités et conséquences
Les MSU intervenaient fréquemment au cours de la consultation, soit lorsque l’interne
les sollicitait, soit spontanément, en interrompant parfois l’interne.
Pour solliciter les MSU, les internes pouvaient demander directement de l’aide « je leur
disais clairement que je ne connaissais pas, et que j’avais besoin d’aide » (E6), ou faire
comprendre par leur posture, leur attitude, qu’ils avaient besoin que le MSU intervienne
« quand je commençais à arriver au bout de mes questions, […] je le regardais pour lui faire
comprendre quoi, donc dans mon regard il comprenait » (E4), « je me reculais un peu dans le
fauteuil en laissant la place au MSU de discuter, de prendre la main » (E10).
Relations interne-MSU Présence du MSU en consultation
Eléments
positifs
Bonne communication
MSU ajuste son comportement
Réassurance de l’interne
Valorisation de l’interne
Partage de savoirs Relation de confiance
Réassurance de l’interne
Encadrement des pratiques
Quant à ses capacités Rôle de conseil
En communication
Correction des erreurs
Eléments
négatifs
Manque de confiance du MSU Communication insuffisante Incompatibilités des caractères Sensation de jugement Gêne/stress Manque de naturel Peur de « passer à côté » Peur de l’erreur Peur du jugement Interne peut se réfréner Manque d’implication de l’interne
36
Cependant, les MSU intervenaient souvent sans que l’interne ne le demande, et
pouvaient même interrompre les échanges. Plusieurs cas de figure ont été rapportés :
- Les MSU « bavards », qui avaient des difficultés à ne pas intervenir, y compris sur des
sujets « non médicaux » : « elle pouvait pas s’empêcher de parler ! […] elle intervenait
tout le temps, et elle prenait pas mal de place quoi » (E5), « mon MSU il est hyper
bavard […] il arrive pas à se taire pendant toute une consultation » (E8).
- Ceux qui souhaitaient un complément d’informations : « ils reposaient la question tout
naturellement, ou ils rebondissaient sur une question que j’avais posée pour
approfondir peut-être un peu plus » (E5), « De temps en temps, il demandait un petit
peu des précisions » (E9).
- Certains MSU intervenaient pour corriger une erreur de l’interne, réorienter le fil de la
consultation : « il avait tendance à couper facilement, juste j'avais fini ma phrase, il
disait "ah ben non on va mettre autre chose"! » (E9), « ses interventions […] c’était
plus pour me « recadrer » […] me faire comprendre que ce que je disais c’était pas
forcément de bonnes choses » (E10).
- Parfois, une pause trop longue dans la conversation ou une posture spécifique de
l’interne incitaient les MSU à intervenir : « c’est juste des blancs où moi je réfléchis, et
je réfléchis trop longtemps donc il prend la main » (E10), « j’ai trainé un petit peu, et
là elle a repris les rênes de la consult » (E3), « je me mettais plus en retrait, et je laissais
faire aussi » (E5), « je ne me sentais pas à l’aise donc il intervenait » (E2).
Les interventions des MSU avaient, selon les internes et les situations, des conséquences
plus ou moins favorables pour les internes :
- A la fois, le MSU était repéré comme une « ressource », en venant combler le manque
de connaissances de l’interne, et donc apportait une aide précieuse à l’interne en
difficultés : « j’étais plutôt contente et soulagée […] au moins le maître de stage il
intervenait, enfin ça me soulageait » (E7). Un interne précisait que cela lui permettait
également de se rappeler son statut d’« étudiant en formation », et non pas de
« remplaçant », et qu’il était important également que les patients aient bien cette notion
en tête (E3).
- Cependant, plusieurs internes notaient que ces interruptions venaient les perturber dans
leur consultation « quand il intervenait dans la consultation que je faisais, ça me
perturbait, après je ne disais plus rien » (E2), « celle qui donnait toujours son avis, qui
intervenait beaucoup, au début c’était très déstabilisant » (E6), au point qu’ils avaient
37
le sentiment de « perdre la main » sur leur consultation, puisque le patient avaient
tendance ensuite à « parler plus avec le médecin qu’avec [eux] » (E1) : « elle intervient
en posant des questions pas forcément médicales. Donc au final on perd facilement le
fil de la consult » (E3). Une interne pouvait même préciser qu’à force d’être
interrompue, elle se « laissai[t] aller » et elle « laissai[t] tomber », n’ayant pas envie de
« se battre pour garder l’attention du patient » (E5).
- Plusieurs internes notaient leur déception de ne pas pouvoir « gérer la consultation
entièrement » (E2-E3-E5)., et le manque de pédagogie que cela représentait « je suis un
peu déçu de pas avoir pu garder la main tout du long, […] et faire […] une consultation
comme ça, parce qu'un jour forcément j'y serai confronté. » (E10).
- Une interne soulignait son manque de progression du fait de ces interventions répétées
« elle ne pouvait pas se retenir de couper, donc du coup en SD on n’a pas trop avancé
[…] c’était pas très pédagogique de sa part » (E2).
- Enfin, plusieurs étudiants déploraient une altération des relations qu’ils avaient tissées
avec les patients du fait de l’intervention des MSU : « le maître de stage souvent coupe
le dialogue, l’échange qu’on a nous avec le patient » (E1), « intervenir en posant des
questions non médicales, après voilà on perd notre alliance avec les patients » (E3).
Une étudiante parlait de « perte de crédibilité » face au patient, en cas de désaccord du
MSU affiché devant le patient : « Le désaccord, je pense qu’il faut que ce soit fait à la
fin de la consultation, en aparté » (E5).
A l’inverse, certains MSU n’intervenaient pas du tout ou très peu en consultation : « elle
me laissait tout faire […] très vite elle a essayé de pas intervenir du tout » (E6), « souvent lui
pendant les consult, il dit vraiment rien » (E3).
Certains internes trouvaient cette approche plus formatrice « c’était top, parce que du
coup je faisais ma consultation toute seule et que je voyais un petit peu si j’arrivais à faire une
consultation de A à Z, à boucler et à conclure une consultation » (E5), et appréciaient de
pouvoir garder la main sur toute la consultation « je trouve que dans ces cas-là on a une bonne
place quoi […] j’arrivais à faire la consultation du début à la fin sans problème » (E8).
D’autres pouvaient déplorer l’absence d’intervention du MSU, qui aurait pu permettre
d’éviter de commettre certaines erreurs : « j’aurais aimé quand même qu’elle réagisse, qu’elle
ne laisse pas la patiente partir avec une prise de sang qui servait à rien » (E6).
38
Le silence du MSU était quelques fois déstabilisant pour les internes, qui pouvaient s’interroger
sur leur pratique « il dit rien, est-ce que je fais bien, je fais pas bien ? » (E7), ou se sentir jugé :
« j’aimais bien travailler en binôme, parce qu’être observée du début à la fin, pour moi c’était
vraiment, vraiment compliqué » (E5).
Carte 2 : Modalités et conséquences de l’intervention du MSU en consultation
39
Dans le document
Marjolaine MICHAUD BLONZ DOCTORAT EN MEDECINE Thèse
(Page 32-39)