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B.2.f Lien entre la diffusion quantique et la nature du spectre 75

Les relations pr´esent´ees ici, entre la diffusion quantique et les dimensions anormales du spectre, sont valables pour tout syst`eme, de dimension quelconque d, ayant un spectre continu ou singulier continu.

Soit un ´etat |ψi initialement localis´e sur un seul site du syst`eme, dont la mesure spectrale locale est not´ee dµψ(E). G´en´eralement, dµψ(E) a les mˆemes propri´et´es mul-tifractales que la mesure spectrale totale dµ(E), et on peut donc d´efinir des dimensions anormales Dψ

q.

Consid´erons d’abord la fonction d’autocorr´elation temporelle (III.9). On peut mon-trer, par d´ecomposition spectrale, que la probabilit´e de retour `a l’origine p(t) d´epend uniquement de la mesure spectrale locale dµψ(E) :

p(t) =

Z +∞

−∞ψ(E)

Z +∞

−∞ψ(E0)e−i(E−E0)t/¯h. (III.12)

La seconde int´egrale est domin´ee par les ´energies E0 telles que |E − E0| < ¯h/t. En dehors de cet intervalle, l’exponentielle oscille rapidement avec E0 et son int´egrale est petite. On s’attend donc `a ce que p(t) soit de l’ordre de la corr´elation moyenne (III.8) de la mesure spectrale dµψ(E), avec ∆' ¯h/t. D’o`u :

p(t)∼

µ1 t

¶Dψ2

. (III.13) Ceci n’est pas exact. En revanche, il existe une relation exacte pour C(t) [17] :

C(t)∼

µ1 t

¶D2ψ

. (III.14) D’o`u l’exposant α (d´efini par (III.10)) :

α = D2ψ. (III.15) Dans un cristal, D2ψ = 1 et C(t) d´ecroˆıt en 1/t. Si Dψ2 < 1, C(t) d´ecroˆıt moins vite que 1/t. Cela peut se comprendre en remarquant que la d´ecroissance de p(t) est due au d´ephasage progressif des diff´erentes composantes d’´energies E0 dans la formule (III.12). Dans un spectre singulier continu, les ´etats ont des ´energies plus proches que

dans un spectre continu, et ils se d´ephasent donc moins rapidement les uns par rapport aux autres.

Contrairement `a C(t), l’´etalement quadratique moyen ∆r2(t) ne d´epend pas unique-ment du spectre du syst`eme. Mais il existe des relations approch´ees, les premi`eres ayant ´et´e obtenues par Guarneri [18, 19, 20]. Le raisonnement de Guarneri consiste `a majorer le poids de |ψ(t)i sur chaque site n du syst`eme. On d´efinit la moyenne temporelle de ce poids :

Cn(t) = 1 t

Z t

0 |hn|ψ(t)i|2dt0. (III.16) |ψ(t)i est initialement localis´e sur le site 0 et C0(t) est donc la fonction C(t) d´efinie plus haut. Elle d´ecroˆıt en 1/tDψ2. Pour n6= 0, on n’obtient qu’une majoration, par une d´ecomposition spectrale analogue `a (III.12) :

Cn(t) < A

µ1 t

¶D2ψ

, (III.17) o`u A est une constante ind´ependante du site n. Consid´erons un (( cube )) de cˆot´e L dont le centre est le site de d´epart n = 0. Le poids moyen du paquet d’ondes, entre les instants 0 et t, sur les Ld sites de ce cube est major´e par :

ALd

µ1 t

¶Dψ2

. (III.18) Il faut donc un temps t proportionnel `a Ld/D2ψ pour que le poids du paquet d’ondes devienne nettement inf´erieur `a 1 dans le cube. Le paquet d’ondes se trouve alors ma-joritairement en dehors du cube, donc ∆r2(t) est au moins de l’ordre de L2. D’o`u :

∆r2(t) > BL2

µ1 t

¶2Dψ2/d

, (III.19) o`u B est une constante. Un raisonnement un peu plus pr´ecis permet de remplacer D2ψ par Dψ1 > Dψ2, en ´eliminant du spectre les composantes qui se propagent le plus lentement et ne contribuent donc que minoritairement `a ∆r2(t). On obtient l’in´egalit´e de Guarneri pour l’exposant de diffusion β :

β ≥ Dψ1/d. (III.20) D1ψ/d n’est g´en´eralement pas une bonne estimation de β, surtout en dimension d > 1. Par exemple, dans un cristal 3D, Dψ1/d = 1/3 et β = 1. Cependant, l’in´egalit´e de Guarneri nous permet d’affirmer que si le spectre est continu (Dq = 1, ∀q), alors β = 1 en 1D (balistique), β ≥ 1/2 en 2D (interm´ediaire entre diffusif et balistique) et β ≥ 1/3 en 3D. Il existe des am´eliorations des in´egalit´es de Guarneri, dont certaines prennent en compte la r´epartition spatiale des ´etats [21, 22, 23, 24].

III.B Les quasicristaux : structure et propri´et´es ´electroniques 77 0 100 200 300 400 500 50 100 150 200 250 300 C on du ct iv it e ( cm )-1 T (K) 0

"parfait" "avec defauts"

i-Al63Cu24.5Fe12.5 i-Al62.5Cu Fe25 12.5 i-Al 70.5Pd Mn 22 7.5 "parfait"

Fig. III.4 – Conductivit´e d’alliages qua-sicristallins en fonction de la temp´erature et de la qualit´e structurale. 0 2000 4000 6000 8000 0 2000 4000 6000 ω(cm−1) < e σ ) (Ω 1.cm 1)

Fig. III.5 – Conductivit´e optique d’une phase icosa´edrique AlCuFe. D’apr`es [31].

III.B.3 Transport ´electronique dans les quasicristaux

Nous rappelons ici quelques r´esultats exp´erimentaux importants sur les propri´et´es ´electroniques des quasicristaux, en nous limitant aux phases icosa´edriques. Les r´ef´eren-ces [25, 26, 27], et plus r´ecemment [28], sont beaucoup plus exhaustives.

La densit´e d’´etats pr´esente g´en´eralement un creux appel´e (( pseudogap )), centr´e sur le niveau de Fermi et dont la largeur est de l’ordre de 1 eV. Aux bords du pseudogap, la densit´e d’´etats est celle d’un bon m´etal tel que l’aluminium tandis qu’au niveau de Fermi, elle est 2 `a 3 fois moindre. La position du niveau de Fermi au milieu d’un pseudogap est probablement li´ee `a la stabilit´e des quasicristaux, qui ob´eiraient aux r`egles dites de Hume-Rothery pour la stabilit´e des alliages.

La plupart des phases icosa´edriques sont m´etalliques mais ont, `a basse temp´erature, une conductivit´e environ 106fois plus faible que celle de l’aluminium : σDC est de l’ordre de 100 (Ω.cm)−1. De plus, `a l’inverse des m´etaux, σDC augmente avec la temp´erature et avec la densit´e de d´efauts structuraux. Sur la figure III.4, on observe une loi de Mathiessen inverse :

σ(T ) = σ(0) + δσ(T ), (III.21) c’est `a dire que les contributions σ(0) (due `a la structure) et δσ(T ) (due aux phonons) sont presque ind´ependantes et s’additionnent dans la conductivit´e. Le rˆole du d´esordre a ´et´e confirm´e par une ´etude r´ecente [29] d’une phase icosa´edrique AlPdMn, dans laquelle le nombre de d´efauts peut ˆetre estim´e en comptant le nombre d’atomes de mangan`ese magn´etiques. Notons qu’il existe aussi une phase icosa´edrique isolante, AlPdRe, dont le comportement est diff´erent [30].

La conductivit´e optique<e σ(ω) a elle aussi une variation avec la fr´equence qui est inverse de celle des m´etaux [31, 32]. Dans les m´etaux, il y a un pic de Drude `a ω = 0, tandis que dans les phases icosa´edriques, on observe un creux de conductivit´e (figure III.5).

Tout cela est qualitativement expliqu´e par la th´eorie de la diffusion anormale (voir partie I.E), qui donne les lois de Drude g´en´eralis´ees pour σDC [33, 34, 35, 36] et pour σ(ω) [37]. Cette th´eorie suppose que l’ordre `a longue distance des quasicristaux joue un rˆole dans le transport ´electronique. Il existe d’autres th´eories qui supposent que l’ordre local jouerait le plus grand rˆole, en rendant les ´electrons presque localis´es.