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Libération de l’énergie : reconfiguration du champ magnétique

un champ magnétique contenant des courants électriques. On parle également de champ magnétique porteur de courants électriques (induits).

3.2.1.2 Décomposition d’un champ magnétique

Cas général. Soit un champ magnétique, B, solénoïdal (∇ · B = 0), quelconque (i.e., B peut être un champ potentiel ou non-potentiel), dans un volume, V, délimité par une surface, S. D’après ce que nous venons de voir (Sect. 3.2.1.1), les conditions aux

limites de B sur S, fixent l’unique champ magnétique potentiel, Bp (dans V), associé à

la distribution de B sur S, et défini par : ˆ

n· Bp|S = ˆn· B|S. (3.41)

Nous verrons section3.2.3que cette propriété a des conséquences concernant le minimum d’énergie magnétique d’un système donné.

Par conséquent, pour un champ magnétique, B, donné, Bpétant unique, Bj = B−Bp

définit un unique champ magnétique. L’équation (3.41) implique que ce champ magné- tique, Bj, est tel que :

ˆ

n· Bj|S = ˆn· (B − Bp)|S = 0 . (3.42) D’autre part, la condition solénoïdale pour Bp et B implique :

∇ · Bj = ∇ · B − ∇ · Bp = 0 , (3.43)

i.e., Bj est, lui-aussi, un champ magnétique solénoïdal.

Enfin, les équations (3.37) et (3.40) imposent :

∇ × Bj = ∇ × B − ∇ × Bp = ∇ × B = µ0j, (3.44)

Par conséquent, si B est un champ magnétique potentiel, nous avons Bj = 0 et

∇ × Bj = 0, et nous retrouvons bien B = Bp. Si B est un champ magnétique non-

potentiel, nous avons Bj 6= 0 et ∇ × Bj = µ0j 6= 0, qui signifie que Bj est la composante

de B contenant tous les courants électriques portés par B.

Plus généralement, les équations (3.41 –3.44) montrent qu’un champ magnétique solénoïdal, B, peut s’écrire comme la somme d’une composante potentielle, Bp, et d’une composante non-potentielle, Bj, et que cette décomposition est unique.

Problématique des extrapolations de champ magnétique. Dans le cas de l’at- mosphère solaire, la distribution du champ magnétique est généralement mesurée à la surface photosphérique (Sect.2.2.1), et le champ magnétique est supposé nul aux limites de l’héliosphère. Pour une distribution du champ magnétique photosphérique donnée, il existe donc un unique champ magnétique potentiel, Bp, définit par l’équation (3.41). Plu-

sieurs méthodes permettent ensuite de calculer le potentiel P, et d’extrapoler le champ magnétique potentiel à partir de la distribution du flux magnétique sur S (Sect. 3.1.2.5 ; e.g., Nakagawa & Raadu 1972;Chiu & Hilton 1977; Sakurai 1989).

Pour ce qui est de Bj, ou de B en général, les magnétogrammes vectoriels permettent

de donner la condition aux limites pour les courants sur S :

µ0 nˆ · j|S = ˆn· ∇ × B|S. (3.45)

En ajoutant une condition sur le champ magnétique dans l’atmosphère solaire, e.g., si l’on suppose que le champ magnétique est sans force (non-linéaire, Eq. (3.34)), il est alors possible d’extrapoler le champ magnétique, B, à partir des équations (3.34) et (3.35) et de l’équation :

où α est donc constant le long d’une ligne de champ (mais varie d’une ligne de champ à l’autre). En revanche, comme je l’ai mentionné Sect. 3.1.2.5, la solution de B extrapo- lée n’est pas unique (e.g., Amari et al. 1999). Différentes extrapolations pourront donc donner différentes solutions de B, et donc, différentes composantes Bj. Par conséquent,

dans le cadre des extrapolations de champ magnétique sans force non-linéaire, la décom- position de B en une composante potentielle et une composante non-potentielle n’est pas unique (elle n’est unique que pour une extrapolation donnée, et sera différente d’une extrapolation à une autre pour une distribution photosphérique donnée de B).

3.2.2 Courants électriques induits

En MHD, les courants électriques (induits) ont deux rôles importants. Tout d’abord, les courants électriques couplent le champ magnétique et le plasma à travers la force de Lorentz (Eq. (3.2)). Ils permettent au champ magnétique d’avoir un effet rétroactif sur le plasma ou de lui imposer sa dynamique (Sect. 3.1.2.4), et de convertir de l’énergie magnétique en énergie cinétique. Nous verrons section3.4.1.2, que les courants électriques jouent également un rôle important pour la reconnexion magnétique, i.e., le processus considéré comme responsable de la libération de l’énergie magnétique lors des éruptions solaires et CMEs.

Comme nous venons de la voir section3.2.1.1, les courants électriques sont uniquement dus à la présence de champs magnétiques non-potentiels. Plus un champ magnétique est porteur de courants électriques intenses, plus il est non-potentiel (i.e., plus il s’éloigne d’un champ potentiel). La mesure de ces courants électriques nous donne donc une quan- tification du degré de non-potentialité du champ magnétique.

Comme nous l’avons remarqué section 2.2.1, les observations ne donnent accès à la mesure vectorielle du champ magnétique qu’au niveau de la photosphère, soit à B(z = 0) = (Bx, By, Bz). Ici, (x, y, z) sont les coordonnées cartésiennes d’un référentiel tel que

le plan (xOy) corresponde à la photosphère, et la direction verticale (Oz) soit normale à la photosphère et orientée vers l’observateur. Par conséquent, la composante normale à la photosphère, jz = (∇ × B)z = ∂xBy − ∂yBx, est la seule composante de la densité

de courant que l’on puisse calculer directement à partir des observations faites à une altitude de l’atmosphère solaire. Pour obtenir la distribution de la densité de courant complète, j, dans tout le volume atmosphérique occupé par la région active, il faut connaître la distribution volumique du champ magnétique, et donc, d’abord recourir à une extrapolation de champ magnétique (cf. Sect. 3.1.2.5).

Remarquons cependant, que jz permet tout de même d’obtenir une information sur la

distribution volumique de la densité de courant électrique, et sur la quantité de courants électriques dans le champ magnétique coronal d’une région active. En effet, en appliquant l’opérateur divergence à l’équation (3.11), on trouve ∇ · j = ∇ · (∇ × B/µ0) = 0, i.e.,

que les courants électriques se referment sur eux-mêmes. Dans le cas d’une région sans force comme la couronne solaire, les courants sont alignés avec le champ magnétique (voir Sect. 3.1.2.5). La condition ∇ · j = 0 signifie alors que les courants électriques sortant d’une polarité magnétique se referment dans la polarité magnétique opposée. Dans ce cas, l’intégralité des courants électriques induits traversant la photosphère, et dont les caractéristiques sont données par jz et Iz =RSjz· dS, circule dans le champ magnétique

degré de non-potentialité des champs magnétiques dans l’atmosphère solaire, en terme de courants électriques.

Notons également que le champ magnétique étant sans force dans la couronne solaire (Sect.3.1.2.5), nous avons µ0j = αB, où α est le cisaillement magnétique et est constant

le long d’une ligne de champ magnétique (cf. Eq. (3.34) et (3.35)). En faisant l’hypo- thèse qu’α est de plus isotrope, il est alors possible de déterminer la distribution de α dans le champ magnétique d’une région active à partir d’un magnétogramme vectoriel photosphérique de la région active, via l’expression :

α(x, y, z = 0) = µ0jz(x, y, z = 0) Bz(x, y, z = 0)

. (3.47)

Le calcul du cisaillement magnétique α dans les observations offre une alternative à jz et

Iz pour quantifier la non-potentialité des champs magnétiques (e.g., comme dans Martin

et al. 1994;Pevtsov et al. 1995;Pevtsov 2002; Zirker et al. 1997;Yeates et al. 2007;Yang et al. 2009).

3.2.3 Énergie magnétique libre

Dans l’application de la MHD à l’atmosphère solaire, l’énergie magnétique est l’une des quantités clés pour étudier les propriétés des régions actives et leur éruptivité. En effet, comme nous l’avons vu section 2.4.2, c’est l’énergie magnétique qui est la source de l’énergie libérée lors des éruptions solaires.

Dans cette partie, nous allons voir que c’est une forme particulière d’énergie magné- tique qui est fondamentale pour l’éruptivité des régions actives : l’énergie magnétique

libre.

3.2.3.1 Définition

L’énergie magnétique d’un champ magnétique, B, dans un volume V délimité par une surface S, est : Emag = Z V B2 0dV . (3.48) Par définition, l’énergie (magnétique) libre, Elibre, est l’énergie magnétique en excès

par rapport à l’énergie magnétique du champ magnétique potentiel, Bp, d’une distribu-

tion de champ magnétique donnée sur S. Soient Emag, l’énergie magnétique totale du

champ magnétique, B, dans le volume V, et Ep, l’énergie magnétique de la composante

potentielle de B, avec : Ep = Z V B2 p 0dV . (3.49) L’énergie libre du système est alors :

3.2.3.2 Énergie magnétique libre et le théorème de Thomson

À présent, nous allons démontrer un résultat fondamental non-trivial : l’énergie libre est en fait l’énergie magnétique de la composante non-potentielle du champ magnétique, B. Pour cela, considérons un champ magnétique, B, parfaitement solénoïdal, dans un volume V délimité par une surface S, et tel que B soit nul à l’infini. Comme je l’ai démontré section 3.2.1.2, nous pouvons alors décomposer ce champ magnétique en sa composante potentielle (sans courants, Bp = ∇P ; cf. Sect. 3.2.1.1), et sa composante

non-potentielle (qui contient tous les courants, Bj; cf. Sect. 3.2.1.2), tel que :

B = Bp+ Bj. (3.51)

L’énergie magnétique du système, dans le volume V délimité par la surface S, est alors (Eq. (3.48)) : Emag = 1 0 Z V(Bp+ Bj) 2dV (3.52) = Ep + Ej + 1 µ0 Z VBp· BjdV , (3.53)

où Ep et Ej sont respectivement l’énergie magnétique de la composante potentielle de B

(ou énergie potentielle) et l’énergie magnétique de la composante non-potentielle de B (ou énergie non-potentielle).

En utilisant la formule ∇·(fa) = a·∇f +f∇·a, l’expression de l’énergie magnétique du système devient : Emag = Ep+ Ej+ 1 µ0 Z V∇ · (PBj)dV − 1 µ0 Z VP(∇ · Bj)dV (3.54) = Ep+ Ej+ 1 µ0 Z SPBj · ˆ ndS − 1 µ0 Z VP(∇ · Bj)dV , (3.55) avec R V∇ · adV = R

Sa· ˆndS (théorème de Green-Ostrogradski), et ˆn étant le vecteur

unitaire sortant, normal à S.

D’après la section 3.2.1.2, les équations (3.42) et (3.43) impliquent que l’intégrale surfacique et l’intégrale volumique de l’équation (3.55), s’annulent. Par conséquent, nous obtenons finalement que l’énergie d’un champ magnétique (parfaitement solénoïdal) dé- composé en sa composante potentielle (sans courant), et sa composante non-potentielle (contenant tous les courants) est simplement la somme de l’énergie magnétique de cha- cune des composantes :

Emag(B = Bp + Bj) = Ep+ Ej. (3.56)

C’est l’application du théorème de Thomson pour les fluides incompressibles : l’énergie magnétique d’un champ magnétique parfaitement solénoïdal est la somme de son énergie potentielle et de son énergie non-potentielle.

Le théorème de Thomson implique donc que l’énergie libre (Eq. (3.50)) est l’énergie non-potentielle du champ magnétique, B, i.e., l’énergie magnétique associée aux courants électriques induits. Il en résulte donc que l’énergie libre est l’énergie magnétique associée à la présence de cisaillement et de torsion magnétique d’une région active (Sect. 3.2.2).

3.2.3.3 Minimum d’énergie magnétique

Comme nous l’avons vu section 3.2.1.1, une distribution du flux magnétique de B sur S donnée, fixe l’unique solution du champ magnétique potentiel, Bp, associé à B. En

conséquence, l’énergie magnétique de la composante potentielle est, elle-aussi unique, et fixée pour une distribution du flux magnétique de B sur S, donnée. Par contre, la com- posante non-potentielle n’est, quant à elle, pas uniquement fixée par la seule distribution du flux magnétique de B sur S (cf. Sect.3.2.1.1). Cela implique qu’à une distribution de

ˆ

n· B|S, correspond une infinité de possibilités de Bj, et donc de B. De toutes ces solu-

tions, celle qui possède le minimum d’énergie magnétique est celle pour laquelle Bj = 0

(et donc Ej = 0, puisque l’énergie magnétique est, par définition, positive). C’est le théo-

rème fondamental de l’énergie magnétique : pour une distribution donnée du flux magnétique sur S, la configuration magnétique possédant le minimum d’énergie magné- tique est celle de l’unique champ magnétique potentiel correspondant à cette distribution (voir aussi Sakurai 1989).

Ce théorème implique que l’énergie libre est l’excès d’énergie magnétique par rap- port au minimum d’énergie possible d’une configuration magnétique donnée, et donc la quantité d’énergie magnétique réellement disponible pour l’éruptivité. Par conséquent, une région active contenant une plus grande quantité d’énergie libre, pourra théoriquement donner lieu à une plus grande libération d’énergie, et donc, une plus forte activité. Cela explique les résultats de plusieurs études observationnelles montrant que les régions actives ayant un champ magnétique fortement non-potentiel sont plus éruptives (car elles possédent plus d’énergie libre ; e.g., Schrijver et al. 2005;Dun et al. 2007;Jing et al. 2010, et leurs références).

3.2.3.4 Quantifier l’énergie libre à partir des observations

Comme nous l’avons rappelé section3.2.2, les observations ne permettent la mesure du champ magnétique qu’au niveau de la photosphère (voir aussi section2.2.1). Or, l’énergie magnétique libre est une quantité globale dont le calcul fait intervenir une intégrale vo- lumique, et par conséquent, requiert de connaître la distribution 3D complète du champ magnétique atmosphérique de la région active. Pour calculer l’énergie libre, il faut donc recourir à la reconstruction du champ magnétique à partir des observations photosphé- riques. Notons que le calcul du flux photosphérique d’énergie, ou flux de Poynting, ne constitue pas une alternative à la reconstruction du champ magnétique. En effet, le flux de Poynting caractérise le flux d’énergie totale, i.e., potentielle plus non-potentielle, sans possibilité de séparation des deux composantes.

3.2.4 Hélicité magnétique relative

L’hélicité magnétique est la grandeur mathématique qui permet de quantifier les pro- priétés géométriques globales d’une configuration magnétique, telles que le cisaillement et la torsion magnétique (e.g., Elsasser 1956).

L’hélicité magnétique, Hm, d’un champ magnétique, B, dans un volume, V, est (e.g.,

Berger 1984) :

Hm = Z

V

où A est le vecteur potentiel définit par B = ∇ × A. L’hélicité magnétique est homogène à un flux magnétique au carré, et son unité dans le système international est le Wb2

(Webber2).

3.2.4.1 Hélicité magnétique et nombre de liens

Plus généralement, la définition de l’hélicité magnétique trouve son origine dans une quantité mathématique définie par le mathématicien Karl Friedrich Gauss : le nombre de liens.

Gauss a découvert une formule intégrale permettant de calculer le nombre de liens entre deux courbes orientées fermées (un sens de circulation privilégié est défini pour chacune des deux courbes). Ce nombre de liens correspond au nombre de fois où l’une des courbes entoure l’autre. Plus précisément, si l’on définit une surface s’appuyant sur l’une des deux courbes, alors le nombre de liens est la somme algébrique du nombre de fois où la deuxième courbe coupe cette surface (voir Fig.3.3).

Figure 3.3: Exemples du nombre de liens entre deux courbes (Pariat 2006). Gauche : L = 0.

Centre : L = −1. Droite : L = 3.

Soient C1 et C2 deux courbes fermées d’abscisse curviligne respectif σ et τ. Et soit

x(σ), respectivement x(τ), l’équation de la courbe C

1, respectivement C2. Le nombre de

liens entre ces deux courbes, L(C1,C2), est alors donné par :

L(C1,C2) = 1 I C1 I C2 dx′ dτ × x− x′ |x − x′|3 ! ·dx dτ dσ . (3.58) Le nombre de lien est une quantité symétrique (L(C1,C2) = L(C2,C1)). Ce nombre est

invariant à toute déformation des courbes n’impliquant pas qu’elles s’ouvrent ou qu’elles se coupent (i.e., qu’il existe un couple (σ, τ) tel que x(σ) = x(τ)). Cette propriété

rend l’utilisation de ce nombre particulièrement intéressante pour les quantités physiques possédant une description en terme de tubes de flux discrets (e.g., champs magnétiques, mais aussi champs de vitesse, ou encore courants électriques).

Moffatt (1969) a montré que l’hélicité d’une quantité vectorielle peut alors s’écrire comme la somme des nombres de liens de chaque couple de lignes de champ de cette quantité (voir aussi e.g., Berger 1999). Si normalement ce concept est limité à des courbes discrètes complètement contenues dans un volume V, la définition de l’hélicité se généralise aux quantités définies continûment, et a été étendue aux cas où les lignes de champ ne sont pas entièrement contenues dans le volume V (e.g., Berger 1984; Démoulin et al. 2006, pour le cas de l’hélicité magnétique).

Dans le cas du champ magnétique atmosphérique d’une région active, l’hélicité ma- gnétique peut alors être définie comme la somme du nombre de liens de chaque couple (i, j) de tubes de flux magnétique élémentaires, (dΦi,dΦj), représentés par les courbes

(Ci,Cj) : Hm = Z Φi Z Φj L(Ci,Cj) dΦi dΦj. (3.59)

Cette expression montre que cisaillement et torsion magnétique sont donc des représenta- tions de l’enroulement (ou enlacement), dans un volume, des lignes de champ magnétique les unes autour des autres5.

L’hélicité magnétique permet donc de mesurer quantitativement des propriétés telles que l’enlacement, le cisaillement, et la torsion des lignes de champ magnétique dans un volume donné (voir Fig. 3.4). C’est une quantité mathématique dont le signe indique le sens de rotation des lignes de champ magnétique (voir Fig. 3.4).

3.2.4.2 Définition de l’hélicité magnétique relative

Pour un volume, V, délimité par une surface S, tel que du flux magnétique traverse S (i.e., B · dS|S 6= 0 ; e.g., V est une partie de l’atmosphère solaire),Berger & Field(1984)

ont démontré qu’il est possible de définir une hélicité magnétique relative, correspondant à la différence entre l’hélicité du champ magnétique étudié et l’hélicité d’un champ magné- tique de référence. En prenant le champ magnétique potentiel comme champ magnétique de référence,Finn & Antonsen (1985) ont montré que l’hélicité magnétique relative peut s’écrire : H = Z V(A + Ap) · (B − Bp) dV (3.60) = Z V(A + Ap) · Bj dV , (3.61)

où A (respectivement Ap) est le vecteur potentiel définit par B = ∇×A (respectivement

Bp = ∇ × Ap), et Bp est le champ magnétique potentiel ayant la même distribution de

flux magnétique que B sur S (cf. Eq. (3.41)).

Remarquons tout de suite que l’hélicité magnétique relative se simplifie en :

H = Hm(B) − Hm(Bp) + Z

S(A × Ap) · dS (3.62)

H = Hm(B) − Hm(Bp) , (3.63)

à la condition suffisante que :

A× dS|S = Ap× dS|S. (3.64)

Avec cette condition, l’hélicité magnétique relative est simplement la différence entre l’hélicité magnétique du champ étudié et l’hélicité magnétique du champ potentiel cor- respondant.

Si de plus, on se place dans le cadre de la jauge de Coulomb :

∇ · Ap = 0 , (3.65)

H<0 (chiralité gauche) 

H>0 (chiralité droite) 

Figure 3.4: Haut : Propriétés géométriques quantifiées par l’hélicité magnétique (Berger 2003) : torsion des lignes de champ dans un tube de flux magnétique (gauche), enlacement de deux lignes de champ/tubes de flux magnétique (centre), et cisaillement des lignes de champ/tubes de flux magnétique (droite). Bas : Tubes de flux magnétiques torsadés et signe correspondant de l’hélicité magnétique (adapté de Bothmer & Schwenn 1998).

l’hélicité magnétique du champ potentiel (Bp = ∇P) vaut alors :

Hm(Bp) = Z VAp· BpdV (3.66) = Z V∇ · (PAp)dV − Z VP∇ · ApdV (3.67) = Z SPAp· dS . (3.68) En prenant Ap· dS|S = 0 , (3.69)

comme condition aux limites pour calculer Ap, alors l’hélicité magnétique du champ

potentiel est nulle, et l’hélicité magnétique relative définie par rapport au champ poten- tiel est strictement égale à l’hélicité magnétique donnée par l’équation (3.57). Dans ces conditions, l’hélicité magnétique relative donne l’hélicité magnétique associée à la com- posante non-potentielle, Bj(= B −Bp; cf. Sect.3.2.1.2), du champ magnétique, et donc,

caractérise la géométrie de cette composante. L’hélicité magnétique relative représente donc un proxy de la non-potentialité du champ magnétique d’une région active, et son existence vient donc directement de l’existence de courants électriques dans la structure magnétique étudiée.

3.2.4.3 Invariance de jauge

Notons qu’une propriété importante de l’hélicité magnétique relative est que cette quantité est invariante de jauge, i.e., invariante pour toute transformation du vecteur potentiel, du type A′ → A + ∇ξ, où ξ est une fonction quelconque. En effet, pour toute

transformation de jauge, A′ → A+∇ξ et A

devient : H′ = Z V  A′+ A′p· Bj dV (3.70) = H +Z V∇ (ξ + ξp) · Bj dV (3.71) = H +Z S(ξ + ξp) Bj· dS (3.72) = H , (3.73)

l’intégrale surfacique s’annulant à cause de la condition imposée par l’équation (3.42). C’est l’invariance de jauge qui justifie la signification physique des valeurs d’hélicité magnétique relative calculées dans les études observationnelles (e.g., Berger 1999). 3.2.4.4 Conservation

On peut montrer6 que la variation d’hélicité magnétique relative dans un volume, V,

de surface, S, fixe, vaut : dH dt = −2 Z V E· BdV − 2 Z S(E × Ap) · dS , (3.74)

où E est le champ électrique. Le terme volumique (premier terme du membre de droite) décrit la dissipation d’hélicité sous l’action d’un champ électrique (e.g., dissipation oh- mique). Le terme surfacique (second terme du membre de droite) décrit la variation d’hélicité dans V due aux échanges avec l’extérieur (flux d’hélicité à travers S).

En MHD idéale, les champs électrique et magnétique sont orthogonaux (voir Eq. (3.17)), la dissipation d’hélicité magnétique est donc nulle (Eq. (3.74)). Par conséquent, en MHD idéale, l’hélicité magnétique d’un système est conservée. En fait, l’hélicité magnétique est même quasi-conservée en MHD dans les milieux à haut nombre de Rey- nolds magnétique comme l’intérieur et l’atmosphère solaire (e.g., Ji 1999).Berger(1984) a trouvé une limite supérieure à la dissipation d’hélicité magnétique possible en présence de résistivité électrique : ∆H H ≤ s ∆t τd , (3.75)

où H est l’hélicité totale d’un système, τd = L2 est le temps de dissipation d’une

structure hélicoïdale de taille L par dissipation ohmique, η est la résistivité électrique, et ∆H est la dissipation d’hélicité pendant une durée ∆t. Modélisons une région active comme un tube de flux magnétique de diamètre photosphérique L ∼ 30 Mm (taille caractéristique des taches solaires). En supposant que la résisitivité coronale puisse très localement être augmentée et atteindre une valeur η ∼ 104 − 105 m2 s−1 (comparé au

η∼ 1 m2 s−1 de la résistivité de Spitzer dans la couronne, Sect.3.1.2.1; e.g., Schumacher & Kliem 1997;Büchner & Elkina 2006;Singh & Subramanian 2007), alors on trouve qu’il faut de l’ordre de ∆t ≥ 100 ans à ∆t ≥ 1000 ans pour dissiper l’intégralité de l’hélicité magnétique de la région active par dissipation ohmique. La durée de vie caractéristique d’une région active étant de quelques mois, l’hélicité magnétique d’une région active n’est pas dissipée dans l’atmosphère solaire.

L’hélicité magnétique est quasi-conservée également lors des événements de recon- nexion magnétique (e.g., Berger 2003). Cela vient du fait que la reconnexion magnétique est un processus résistif très localisé (du fait de Rm ≫ 1 aux grandes échelles), se produi-

sant à des échelles spatiales bien plus petites que l’ensemble de la structure magnétique (voir Sect. 3.4.1). Par conséquent, même si la reconnexion affecte localement la connec- tivité des lignes de champ magnétique, la géométrie globale de l’ensemble des lignes de champ n’est pas suffisamment modifiée pour faire varier sensiblement la quantité globale d’hélicité magnétique.

La conservation de l’hélicité magnétique dans les milieux à haut nombre de Reynolds magnétique impose une contrainte sur l’évolution et la dynamique du champ magnétique dans ces milieux. Pour cette raison, l’hélicité magnétique est considérée comme jouant un rôle important dans l’évolution et la dynamique des régions actives. En effet, la dissipation de l’énergie magnétique dans une région où l’hélicité magnétique est finie ne conduit

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