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II.7. Discussion et Conclusion

II.7.1. Liaison du nickel dans deux classes de sites métalliques

EcNikR WT et le mutant Q2E, lient 1 équivalent de Ni(II) par sous unité dans un site qualifié de site de haute affinité (HA). Ce site d’après la signature en spectroscopie d’absorption UV- Visible et la littérature présente une géométrie plan carré où le métal est coordiné par 3 résidus histidines et 1 résidu cystéine (Bloom & Zamble, 2004; Chivers & Sauer, 2000; Chivers & Sauer, 2002; Leitch et al., 2007; Schreiter et al., 2003). La métallation du site HA ne serait pas directe mais passerait par la formation d’un état transitoire de métallation d’EcNikR, n’ayant pas de signature en UV-Visible, où le Ni(II) pourrait être coordiné par des ligands présents à son embouchure (Diederix et al., soumis à publication).

La liaison du métal par EcNikR n’est pas limitée à la métallation du site HA. En effet EcNikR peut lier jusqu’à 8 Ni(II) par monomère, soit 32 Ni(II) par tétramère dont le Kd varie entre 0.2 et 12µM (Fauquant et al., 2006). Dans ces conditions de métallation et pour des pH compris entre 6 et 8, EcNikR est agrégée. Cette caractéristique est minimisée dans la littérature pourtant elle perturbe l’étude des propriétés de métallation et de liaison à l’ADN d’EcNikR. Ce phénomène d’agrégation débute au-delà de 1 équivalent de Ni(II) ajouté par sous unité et est maximal à partir de 1,5 équivalents de Ni(II) ajoutés à EcNikR Q2E. La liaison de 2 Ni(II) supplémentaires aux 4 Ni(II) présents dans les sites HA est donc suffisante pour induire une agrégation maximale.

Ces sites métalliques présentent une affinité pour le Ni(II) proche de celle du site dit de haute affinité sinon les deux phénomènes ne se succéderaient pas aussi rapidement dans une titration métallique. Les deux phénomènes que sont la métallation et l’agrégation peuvent être dissociés en assurant une protonation des ligands de liaison (Fauquant et al., 2006). Cette protonation diminue l’affinité de ces sites métalliques pour le Ni(II). Le pKa d’agrégation serait proche de 5.4, il possible que les résidus protonés qui sont impliqués dans l’agrégation soient des histidines (pKa : 6) qui sont au nombre de 48 par tétramère. Il a été proposé que le cluster d’histidines (H77, 78, 79, 92) présent à l’embouchure du site de haute affinité soit non seulement le site de métallation transitoire facilitant l’incorporation du nickel dans le site HA mais aussi celui dont la métallation induirait l’agrégation de la protéine. L’étude du mutant 3HA, auquel 3 résidus du cluster ont été mutés (H77 à 79), a révélé que la structuration au niveau secondaire de la protéine était différente de la protéine sauvage. L’environnement terminal de l’hélice α3 serait affecté par la mutation. Malgré cette différence, le mutant a conservé ses propriétés de métallation (liaison de 1 équivalent Ni(II) par sous unité, puis agrégation au-delà). La précipitation que nous supposions dépendante de ce cluster ne l’est pas ou du moins pas uniquement (Fauquant et al., 2006). Il serait intéressant de connaître la capacité de métallation de ce mutant, le nombre de sites affectés par cette mutation, la cinétique de métallation du site de haute affinité ainsi que les propriétés de liaison à l’ADN du mutant.

L’agrégation observée est un phénomène réversible « rapidement » en présence de chélateur comme l’EDTA. Les sites impliqués sont donc plutôt accessibles et exposés au solvant. La cinétique de chélation du Ni(II) contenu dans les sites HA par de l’EDTA est lente mais peut être accélérée en présence de CN- (RD-IMS observations). Ce comportement sous-entend que la plus ou moins grande rapidité de chélation du Ni(II) ne dépend pas seulement de l’affinité de l’agent chélateur pour le métal mais aussi de son accessibilité au métal. Le Ni(II) du site HA est plutôt enfoui dans la protéine. Par ailleurs les changements conformationnels du domaine de tétramérisation (structuration de l’hélice α3, déplacement de la boucle entre β3 et β4) induit par la métallation de ce site par le Ni(II) tend à « bloquer » ce domaine. Mesurer la quantité de Ni(II) liée par EcNikR directement n’équivaut pas à la mesure de la quantité de Ni(II) liée par cette protéine en présence d’agent chélateur.

concernant l’affinité du site HA d’EcNikR pour le Ni(II) où le Kd décrit est de l’ordre du picomolaire (Chivers & Sauer, 2002; Wang et al., 2004). Il s’avère que ce dernier serait de l’ordre de la centaine de nanomolaires (KD moyen de 82 ± 24 nM par la technique de liaison

sur filtre, 379nM par titration en UV-Vis à l’équilibre et 363nM par cinétique rapide) (Diederix et al., soumis à publication). Récemment des données similaires ont été proposées par le groupe de S. Ciurli pour HpNikR (Zambelli et al., 2007) à laquelle une affinité de l’ordre du picomolaire pour le site HA avait été attribuée par le groupe de D. Zamble (Abraham et al., 2006). Une technique directe a de nouveau été employée, il s’agit de mesures de calorimétrie (ITC). Les quatre sites de haute affinité d’HpNikR ne seraient pas tous équivalents mais égaux 2 à 2. Les deux premiers sites auraient un KdNi(II) proche de 10nM et

les deux autres auraient un KdNi(II) proche de 100nM. L’affinité serait fonction du pH. Des

sites de plus basse affinité ont également été décrits pour HpNikR en utilisant l’ITC. Nous sommes en contact avec le groupe de S. Ciurli pour tenter des mesures d’ITC sur EcNikR tout en sachant que les propriétés d’agrégation d’EcNikR risquent d’en limiter la faisabilité.

Le fait qu’EcNikR présente une constante de dissociation pour le Ni(II) de l’ordre de la centaine de nanomolaires semble plus cohérent avec des aspects physiologiques. Cette dernière est le métallorégulateur du Ni(II) chez E.coli et les principales protéines qui lient du Ni(II) chez les bactéries présentent une constante de dissociation pour le métal de l’ordre du µM (HypA (Atanassova & Zamble, 2005), HypB (Olson et al., 1997), UreE (Stola et al., 2006), SrnQ (Kim et al., 2003), Hpn (Ge et al., 2006), SlyD (Hottenrott et al., 1997)…). Si EcNikR présentait un Kd de l’ordre du pM, elle assurerait en permanence une répression de la transcription et les protéines liant du Ni(II) pour leur activité ne pourrait plus assurer leur fonction. Il semble donc plus probable qu’EcNikR ait une sensibilité pour le Ni(II) qui soit du même ordre de grandeur.