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3. PCSK9

3.6. Impact de PCSK9 sur le LDLR

3.6.1. Liaison au LDLR

Des études de mutation ont démontré que la PCSK9 se liait au domaine EGF-A du LDLR 73. Cette liaison hautement localisée de PCSK9 au domaine EGF-A est frappante, car des domaines EGF-like sont retrouvés dans une multitude de protéines. Malgré cette présence quasi-ubiquitaire des domaines EGF-like, plusieurs données suggèrent que PCSK9 se lie de façon spécifique au LDLR. Premièrement, PCSK9 se lie peu ou pas du tout aux cellules n’exprimant pas le LDLR 77. Deuxièmement, le seul phénotype apparent chez les souris transgéniques pour PCSK9 est une hypercholestérolémie secondaire à une déficience en LDLR, malgré une augmentation de plus de 30-100 fois du niveau plasmatique de PCSK9 49. Troisièmement, l’absence de PCSK9 chez la souris 49,53 et l’humain 78 n’a pas d’autre phénotype clair que celui relié au récepteur LDL.

Pour déterminer les critères de cette sélectivité, des résidus conservés du domaine EGF-A du VLDLR ont été remplacés par les acides aminés correspondants du LDLR, ce qui a permis d’identifier que le résidu leucine à la position 318 était responsable de la liaison à PCSK9 73. Cette leucine (Leu318) se situe entre les troisième et quatrième cystéines (Cys317 et Cys319) du domaine EGF-A, qui sont toutes les deux liées par des ponts disulfures à d’autres cystéines. Aucun des autres membres de la famille du LDLR ne présente une leucine à cette position. L’introduction de cette leucine dans le VLDLR (résidu 354) a été suffisante pour permettre la liaison de PCSK9 au VLDLR. Par conséquent, la Leu318 contribuerait à la spécificité de liaison de la PCSK9 au LDLR. Par

contre, vu que plusieurs autres protéines contiennent une leucine à cette position dans leur domaine EGF-like, ce résidu ne peut pas être le seul déterminant de la liaison PCSK9– LDLR.

L’élucidation de la structure cristalline de PCSK9 a permis d’établir les sites de liaison au domaine extracellulaire du LDLR 79,80. Le site de liaison au domaine EGF-A du LDLR est situé sur la surface de PCSK9 et est formé des acides aminés 367 à 381. Le pro- domaine et le domaine C-terminal CHRD de PCSK9 n’interagissent pas avec l’EGF-A. Un feuillet β antiparallèle se forme entre les résidus 377-379 de PCSK9 et 308-310 de l’EGF- A. De plus, des interactions clés avec l’EGF-A sont faites par les résidus Arg194 et Asp238 de PCSK9 (Figure 10) 81. L’interface entre PCSK9 et l’EGF-A est principalement

hydrophobe et présente des interactions polaires spécifiques autour de cette interface. La Phe379 de PCSK9 est au centre de cette interface hydrophobe et fait de nombreux contacts avec l’EGF-A. D’autres résidus de PCSK9 contribuent à l’interface hydrophobe, incluant Ile369 et Cys378, qui lient la Leu318 de l’EGF-A. De nombreux ponts salins et liens hydrogène formés entre PCSK9 et l’EGF-A contribueraient à la spécificité de la liaison avec l’EFG-A du LDLR plutôt qu’au EGF-like des autres protéines. Les liens hydrogène entre Asp238 de PCSK9 et Asn295 de l’EGF-A, Thr377 de PCSK9 et Asn309 de l’EGF-A, et le pont salin entre Ser153 de PCSK9 et Asp299 de l’EGF-A contribuent à cette spécificité 81.

Figure 10. Interface entre la PCSK9 et le domaine EFG-A du LDLR. Interactions entre la PCSK9 (en gris) et l’EGF-A (en jaune) près du site de liaison du calcium (sphère verte) de l’EGF-A. Les couleurs correspondent au type d’élément : rouge, oxygène; bleu, azote. Tiré de Kwon & Lagace, PNAS, 2008 81.

Il a également été observé que la présence de calcium était nécessaire à la liaison PCSK9–LDLR. En effet, des substitutions des acides aminés de l’EGF-A du LDL-R, connus pour coordonner la liaison du calcium (Asn295, Glu296 et Asp310) empêchent la liaison de la PCSK9 au LDLR 73. De plus, l’affinité entre PCSK9 et le LDLR semble plus forte dans les endosomes à cause d’une augmentation de l’acidité 82. Une étude de liaison a démontré que la liaison de PCSK9 au LDLR était 50 fois plus forte à un pH de 5,2 qu’à un pH de 7,0, suggérant que PCSK9 lie le LDLR plus fermement après son internalisation. Donc, à cause de cette affinité accrue, l’incapacité de relâcher PCSK9 peut entraver le recyclage du LDLR et réduire son nombre à la surface cellulaire 79.

Le site de liaison de PCSK9 au LDLR est distinct de la région de liaison au ligand (domaine LA ou R1-R7) qui reconnaît les lipoprotéines LDL et β-VLDL. La suppression du domaine entier de liaison au ligand n’affecte pas significativement la liaison de PCSK9 au LDLR 73. Donc, PCSK9 peut lier le LDLR indépendamment des lipoprotéines. Cependant, nous ne savons pas si le LDLR peut lier une lipoprotéine et PCSK9 simultanément ou si la PCSK9 qui lie le LDLR in vivo est associée à une lipoprotéine ou non. De plus, il reste à déterminer si la liaison de PCSK9 à l’EGF-A du LDLR peut affecter la liaison de lipoprotéines.

Plusieurs résultats indiquent que PCSK9 redirige le LDLR vers le lysosome plutôt que vers la voie de recyclage, mais le mécanisme moléculaire n’est pas encore clairement défini. Une possibilité serait que PCSK9 contienne un signal de transport au lysosome, mais ce modèle ne corrèle pas avec le fait que la liaison de PCSK9 au LDLR est nécessaire mais non suffisante à la dégradation du récepteur. En effet, un LDLR dépourvu de son domaine de liaison au ligand ou du domaine β-propeller (YWTD) peut lier PCSK9 et entrer dans l’endosome, mais n’est pas sujet à une dégradation induite par PCSK9 83. L’explication la plus plausible serait que la liaison de PCSK9 au LDLR prévienne le changement de conformation requis par le récepteur pour le recyclage. Il est connu que des mutations du LDLR dans le domaine du β-propeller (mutations de classe 5) peuvent interrompre le recyclage du récepteur et sont associées à un renouvellement rapide du récepteur 3. En présence d’un pH acide, la cristallisation de la portion extracellulaire du LDLR a montré une association physique entre les domaines R4 et R5 avec le domaine β- propeller. Donc, PCSK9, en se liant à l’EGF-A situé entre ces deux domaines pourrait empêcher cette association physique, prévenant ainsi ce changement de conformation dépendant du pH. Des études ont démontré que PCSK9 prévenait effectivement ce changement de conformation, mais la découverte que R4 et R5 ne sont pas requis pour la dégradation du LDLR suggère que ce modèle est plus complexe que prévu. La seule prévention du changement de conformation à pH acide du LDLR par PCSK9 n’est pas

suffisante pour expliquer l’action de PCSK9 83. De plus amples études seront donc nécessaires pour élucider ce mécanisme aux niveaux moléculaire et cellulaire.