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II. La régulation de l’épissage

II.2 L’action des protéines régulatrices

II.2.3 Les voies de signalisation régulant l’épissage

Les protéines SR et hnRNP et plus largement les répresseurs et activateurs de l’épissage fonctionnent majoritairement par effet antagoniste. La fixation de protéines activatrices empêche l’action des inhibitrices et inversement. Ce blocage résulte d’encombrement stérique ou d’inhibition directe. De ce fait, un élément prépondérant de la régulation est le ratio de protéines activatrices et régulatrices au moment de l’épissage. Il a été par exemple montré par l’équipe de Krainer que le ratio entre SRSF1 et hnRNP A1 est déterminant pour la sélection d’un site d’épissage 5’ lors de l’excision d’un intron: SRSF1 promeut l’utilisation du site d’épissage proximal alors que hnRNP A1 favorisera l’utilisation d’un site plus distal en bloquant l’accès au premier (Mayeda and Krainer, 1992).

La régulation de la quantité des protéines régulatrices au moment de l’épissage est donc primordiale. La fonction et la localisation subcellulaire sont en grande partie régulées par des modifications post- traductionnelles dont la phosphorylation, l’acétylation et la méthylation.

Parmi les différentes modifications post-traductionnelles impactant l’épissage la phosphorylation est probablement la plus influente et la mieux caractérisée. Ce processus contrôle la localisation et la fonction des protéines SR et hnRNP mais également les interactions protéines-protéines et protéines-mRNA. La phosphorylation module la fonction des protéines régulatrices de l’épissage. Dans la majorité des cas, l’état de phosphorylation correspond à un statut d’activation: la phosphorylation de la kinase AKT l’active et une déphosphorylation l’inactive (Liu et al., 2014).

Mais dans d’autres cas, le changement de statut de phosphorylation inverse la fonction protéique : SRSF10 est activatrice de l’épissage sous sa forme phosphorylée mais devient inhibitrice lorsqu’elle est déphosphorylée (Shin and Manley, 2002) (Feng et al., 2008).

La localisation et le transport des facteurs d’épissage sont également dépendants du statut de phosphorylation (Naro and Sette, 2013a): le niveau de phosphorylation des protéines SR doit être faible pour permettre leur import nucléaire, puis fort afin de permettre l’assemblage du spliceosome. L’activation du spliceosome et donc la catalyse de l’épissage nécessite en revanche une diminution du niveau de phosphorylation des SR et donc une déphosphorylation partielle. Une fois l’épissage terminé, l’ARNm doit être exporté vers le cytoplasme afin d’y être traduit. Cet export se fait grâce aux protéines SR

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associées au transcrit qui doivent alors être intégralement déphosphorylées pour être exportées (Fig 25). Des cycles successifs de phosphorylation/déphosphorylation sont donc nécessaires à la catalyse de l’épissage (Naro and Sette, 2013b).

Figure 25: La phosphorylation régule l’activité des protéines SR

Des cycles de phosphorylation/déphosphorylation conditionnent la localisation sub-cellulaire des protéines SR. L’action de SRPK induit l’entrée des SR dans le noyau où elles sont regroupées au sein de granules nucléaires. Un second cycle de phosphorylation par les CLK libère les SR de ces granules pour faciliter l’assemblage du spliceosome. L’action de phosphatases catalyse l’épissage et regroupe les SR au sein des granules nucléaires. Une déphosphorylation complète exporte les SR associées au pré-ARNm épissé vers le cytoplasme.

Niaro & Sette, Int J Cell Bio, 2013

La localisation sub-cellulaire des hnRNP est également modulée par des modifications post- traductionnelles, mais le résultat est inverse à celui observé pour les protéines SR (Xie et al., 2003). La phosphorylation de hnRNP K par la voie de signalisation RAS/RAF/MEK/ERK suite à un stimulus extra- cellulaire provoque sa rétention cytoplasmique (Habelhah et al., 2001). Le même résultat est constaté lors

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de la phosphorylation de hnRNP A1 par p38-MAPK lors d’un stress cellulaire (van der Houven van Oordt et al., 2000).

Deux grandes familles de protéines kinases sont responsables de la majorité des phosphorylations des protéines de l’épissage : les familles SRPK et CLK.

Les protéines SRPK sont associées à de nombreuses protéines chaperonnes cytoplasmiques, et suite à la transduction de signaux intracellulaires transloquent dans le noyau grâce au recrutement d’autres chaperonnes telles que HSP90 (Zhong et al., 2009). Elles phosphorylent les domaines RS des protéines SR sur 10 à 12 résidus sérines, principalement au niveau de dipeptides sérine-arginine.

Les protéines CLK (Cyclin-dependant like kinase) interagissent avec les protéines SR au sein de granules nucléaires et ne sont pas exprimées au niveau cytoplasmique. La phosphorylation se déroule sur des résidus sérine au niveau de dipeptides sérine-proline, sérine-lysine et sérine-arginine.

L’acétylation peut également participer à la régulation de la transcription : Choudhary a montré en 2009 que les domaines RRM des protéines régulatrices de l’épissage étaient des sites fréquents d’acétylation (Choudhary et al., 2009). L’acétylation de protéines impliquées dans l’épissage pourrait ainsi modifier leur stabilité, leur transport intra-cellulaire et donc leur localisation ou encore leur faculté d’interaction. Elle empêche également leur dégradation en bloquant l’ubiquitinylation.

La méthylation est un processus de contrôle de l’expression génique primordial chez les eucaryotes. L’ajout de résidus méthyl au niveau d’ilots CpG de promoteurs contrôle la transcription des gènes de manière complexe.

En plus de contrôler la transcription, la méthylation est impliquée dans la régulation de l’épissage des ARNm. Il a été constaté que le niveau de méthylation était plus important au niveau des exons constitutivement inclus qu’au niveau d’exons alternatifs (Lev Maor et al.). La méthylation pourrait participer à la distinction des exons et des introns, ainsi qu’à l’inclusion de certains exons par recrutement de facteurs régulateurs (Yearim et al., 2015) (Fig 26).

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Figure 26: La méthylation de l’ADN module l’épissage

(A) Lorsque l’ADN est non méthylé, l’exon alternatif (marron foncé) est inclus dans le transcrit mature.

(B) Lorsque l’ADN est méthylé, les protéines de la famille HP1 (hétérochromatin proteins 1) interagissent avec les histones méthylées et recrutent des facteurs régulateurs de l’épissage tels que SRSF3 ce qui favorisent l’exclusion de l’exon alternatif. D’après Yearim et al, Cell Reports 2015

L’ajout de groupements méthyl peut également intervenir sur les résidus lysines de polypeptides tels que les facteurs régulateurs de l’épissage.

La méthylation de hnRNP K empêche certaines interactions avec les pré-ARNm dont hnRNP K régule l’épissage (Yang et al., 2014).

Il a également été démontré qu’une tri-méthylation de SRSF1 était nécessaire à sa correcte localisation nucléaire, et qu’une déméthylation entrainait une rétention cytoplasmique qui participe à l’origine de l’activité oncogénique de SRSF1 par dérégulation de l’épissage (Sinha et al., 2010).

La méthylation pourrait également modifier la localisation subcellulaire des hnRNP : la présence dans le cytoplasme de hnRNP A2 pourrait être conditionnée par la méthylation de son domaine RGG (Nichols et al., 2000) même si ces résultats ont été contredits lors d’une autre étude menée chez le rat (Friend et al., 2013).

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