• Aucun résultat trouvé

B.2 Les plantes et la sécheresse

B.2.2 Le stress hydrique

B.2.2.2 Les systèmes modèles

Pour répondre à une question de recherche et identifier les processus sous-jacent, il est préférable de travailler sur des organismes présentant des aptitudes particulières quant au caractère étudié. Dans le cas de la résistance au stress hydrique, les espèces considérées peuvent se répartir en trois groupes. Nous verrons tout d’abord le cas des systèmes tolérants, puis les modèles génétiques et enfin les plantes de grande culture.

B.2.2.2.1Systèmes tolérants

Avec une teneur en eau de 10%, la graine est une structure bien adaptée au manque d’eau. Elle permet à la plupart des espèces de survivre à la dessiccation et aux basses températures mais seulement sous cette forme. Cette dessiccation est indispensable au cycle reproductif. Elle est suivit par une réhydratation massive lors de la germination et par le 23

développement des cellules embryonnaires. Une étude portant sur le pois (Pisum sativum), le maïs (Zea mays) et le soja (Glycine max) a montré que cette tolérance à la dessiccation était progressivement perdue en cas d’imbibition des graines (Koster and Leopold 1988). Les auteurs enregistrent une corrélation entre le pourcentage de levée des graines après traitement (imbibition suivie d’une dessiccation) et la teneur en sucre en fonction du temps d’imbibition. Ingram et Bartel (1996) rapportent que les graines de nombreuses espèces ont fait l’objet d’études approfondies sur le transcriptome et le protéome, telles que Arabidopsis thaliana, le coton (Gossypium spp.), l’orge (Hordeum vulgare), le maïs (Zea mays) et le riz (Oriza sativa). Un des problèmes majeurs de ce modèle d’étude est de dissocier les gènes impliqués dans la tolérance de ceux impliqués dans le développement de l’embryon. Il a néanmoins permis d’identifier une famille de protéine, les LEA (Late embryogenesis Abundant), que l’on retrouve également fortement exprimée lors de la réponse au stress hydrique. Les LEA sont des protéines hydrophiles qui s’accumulent dans les stades avancés de la maturation de la graine puis disparaissent après la germination (Galau et al. 1986; Roberts et al. 1993). Le maintien de l’état dormant est fortement lié à la présence d’Acide abscissique (ABA) dont le rôle d’inhibiteur de la germination (Bewley 1997) a été démontré chez le soja, la tomate ou le blé mais pas chez le tournesol.

Le pollen est également une structure à très faible teneur en eau. Comme les graines, les mécanismes du stress sont confondus avec ceux du développement. Mais l’étude des transcrits de pollen a permis d’identifier des gènes impliqués dans la dessiccation. C’est le cas du transcrit LLA23 cytoplasmique identifié sur Lilium longiflorum présent uniquement dans le pollen et dont la séquence est proche de celle d’autres protéines impliquées dans le stress (Lp-3, DS2 et ASR) (Huang et al. 2000).

Un autre système d’étude regroupe certaines espèces remarquables, capables de tolérer des dessiccations presque totales et de reprendre une turgescence après réhydratation. Ce sont les plantes reviviscentes ou poïkilohydriques parmi lesquelles on peut citer Xerophyta viscosa

(Baker) et Craterostigma plantagineum (Bartels and Salamini 2001) pour laquelle Peter Scott (2000) souligne les modifications du métabolisme intervenant au cours du cycle déshydratation-réhydratation. Les feuilles réduisent leur surface de 85% avec une teneur en eau comprise entre 5 et 10%, les cellules sont fortement concentrées en sucres et des protéines LEA sont fortement exprimées. L’auteur souligne aussi que très peu d’études ont été réalisées sur les racines. Ces systèmes possèdent des mécanismes de protection des cellules très développés et permettent de découvrir et d’étudier de nombreuses protéines du stress. C’est le

Synthèse Bibliographique

cas de Xerophyta viscosa (Mowla et al. 2002), pour laquelle ces auteurs décrivent une

nouvelle enzyme XvPer1 homologue à des antioxydants, ou encore de Craterostigma

Plantagineum qui a récemment permis de découvrir une nouvelle famille de gènes de réponse à la déshydratation et à l’ABA nommée PTP (Plastid Targeted Protein) (Phillips et al. 2002) ainsi que des facteurs de transcription régulant cette réponse tels que CpR18 (Hilbricht et al.

2002).

D’autres espèces sont capables de croître à la fois sur des sols à très forte teneur en sel et de

survivre à des températures très basses comme Mesembryanthemum crystallinum. Elles

constituent également de bons modèles d’étude des systèmes de tolérance à la dessiccation (Barkla et al. 1999).

Si les mécanismes de réponse sont exacerbés chez ces plantes, ils sont cependant communs aux autres végétaux. Contrairement au système « graines », ils permettent de s’affranchir des effets développementaux.

B.2.2.2.2Modèles génétiques

Une autre approche porte sur l’utilisation des plantes modèles. L’effort de recherche de la communauté scientifique sur ces espèces a permis de générer une base de connaissances conséquente en physiologie et en génomique. La séquence complète du génome est désormais disponible chez Arabidopsis thaliana ("A. thaliana genome" 2000; Initiative 2000), le riz (Yu

et al. 2002) et le peuplier. Pour d’autres espèces comme le blé, le maïs et la tomate, le séquençage du génome est en cours mais des cartes génétiques fines et des bases de données d’EST et de BAC sont disponibles, rendant possible les approches de clonage positionnel et l’étude de l’expression quasi exhaustive de l’ensemble des gènes. Des collections de mutants ou de variétés permettent d’identifier des individus sensibles, résistants et d’identifier les gènes et voies métaboliques concernées. En 2003, sur Arabidopsis, plus de 88'000 insertions par Agrobacterium avaient été localisées précisément sur le génome ce qui représentait plus de 21'700 gènes pour lesquels un mutant était désormais disponible (Alonso et al. 2003). Hirochika et al. (2004) ont recensé les ressources en mutant disponibles chez le riz dont le nombre dépasse le million. Ils soulignent l’intérêt de mettre à disposition de la communauté une banque de séquences bordant les mutations (FST, Flanking Sequence Tag) dont 1373 ont été identifiées en 2005 (Enckevort et al. 2005). En effet, la connaissance de la séquence des régions flanquant le transposon permet d’effectuer des recherches électroniques d’homologie pour un gène donné, d’identifier un mutant pour ce gène et de commander les semences pour étudier l’impact phénotypique de cette mutation.

Des mutants ultra sensible au sel (mutants sos) ont permis de déterminer les gènes régulés spécifiquement lors du stress (Gong et al. 2001). Les auteurs ont identifié une liste de 89 gènes régulés par soustraction de banques d’ADNc d’Arabidopsis sauvage contrôle vs stressé, puis ont comparé leur expression avec les mutants sos. Six gènes ont pu alors être identifiés. De nombreux autres mutants ont servi à identifier des gènes et protéines impliqués dans la réponse à la sécheresse (Chen et al. 2005). Notamment les gènes régulé par les hormones et en particulier l’ABA et les gènes ABI (ABA-insensitive) associés à la réponse à cette hormone (Campalans et al. 1999; Bianchi et al. 2002; Dong et al. 2005).

B.2.2.2.3Plantes de grande culture

Avec l’agriculture intensive, la question de l’alimentation en eau est devenue primordiale. Les exigences en eau des cultures rendent souvent l’irrigation incontournable alors que les ressources du milieu sont limitées. Les semenciers proposent une large gamme de variétés dont la résistance à la sécheresse est variable. Les surfaces plantées, les climats différents et les degrés de tolérances disponibles font des plantes de grandes cultures un objet d’étude intéressant pour des études de génétique quantitative en conditions naturelles. Les programmes de recherche des grands groupes agroindustriels ont d’ores et déjà brevetés des variétés résistantes ou modifiées génétiquement. Leurs recherches s’orientent actuellement sur des variétés résistantes à la sécheresse (ex : http://www.monsanto.com/monsanto/layout/sci_tech/prod_pipeline/

productpipeline.asp).