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I. Introduction

I.3. Les formes orales

I.3.4. Libération prolongée

I.3.4.3. Les systèmes enrobés

Dans le cas des systèmes enrobés, la dissolution du PA est essentiellement dépendante de sa solubilité et des caractéristiques du film d’enrobage – ex. épaisseur,

perméabilité, solubilité [Hui et col., 1987]. Il s’agit de systèmes réservoirs impliquant des

processus de diffusion et de dissolution.

La diffusion d’une substance à travers une membrane est fonction du gradient de concentration (Eq. 2) [Porter et Hogan, 1984]:

dQ/dt = (S.D.Cp/h).(Ci-Cm) (Eq. 2)

dQ/dt = Quantité de PA diffusée au temps t (g/s) S = Surface diffusion (m²)

D = Coefficient de diffusion (m²/s)

Cp = Coefficient de partage du PA entre le réseau polymérique et la phase aqueuse h = Epaisseur du film (m)

Ci-Cm = Gradient de concentration entre le noyau et le milieu de dissolution (g/l) Si tous les paramètres présents à droite de l’équation restent constants, la diffusion du PA sera caractérisée par une cinétique d’ordre zéro. Les coefficients de diffusion et de partage étant des constantes caractéristiques du système, il est possible

d’obtenir une libération d’ordre zéro en gardant la surface de contact, l’épaisseur du film et le gradient de concentration constants.

Les formes monolithiques étant sujettes aux fragmentations, les formes divisées offrent l’avantage de fournir une surface de contact constante pendant un laps de temps supérieur. De plus, pour obtenir une surface de contact régulière et homogène, la compression sera préférée au procédé de pelletisation. En effet, les microbilles ne possèdent jamais une surface identique dépourvue de rugosités.

Une épaisseur constante de film peut essayer d’être conservée en appliquant une teneur suffisamment élevée pour limiter une éventuelle solubilisation de l’enrobage

[Seitz et col., 1986].

Idéalement, la forme pharmaceutique doit pouvoir réguler le gradient de concentration afin de le maintenir constant (Ci = Cs). In vitro, Cm devrait rester très faible afin de se maintenir dans les conditions SINK.

La cinétique d’ordre zéro peut alors être conservée jusqu’à dissolution presque complète du PA à l’intérieur de la forme. Par après, la libération du PA sera régie par une cinétique d’ordre 1.

Quatre principaux mécanismes régissent la libération des substances actives à partir de formes enrobées par un polymère insoluble [Ozturk et col., 1990 ; Jantzen et Robinson, 2002] :

¾ Solubilisation / diffusion à travers une phase homogène du polymère plastifié

Figure 13 : Diffusion à travers un film d’enrobage Ce type d’enrobage ne contient aucun pore. Le

plastifiant et les autres additifs sont distribués de façon homogène. Le liquide diffuse à travers l’enrobage et dissout le PA au niveau du noyau. Le PA dissous diffusera alors du noyau vers le liquide de dissolution

(Figure 13). La diffusion sera régie par un coefficient de

partage de la substance entre le polymère et la phase aqueuse au sein du noyau [Qiu et Zhang, 2000].

¾ Solubilisation / diffusion à travers des canaux de plastifiant

Le plastifiant n’est pas distribué de façon homogène au sein de l’enrobage. Il se trouve alors sous forme de canalicules permettant la diffusion du PA dissous. La diffusion dépendra toujours d’un coefficient de partage, mais cette fois entre le plastifiant et la phase aqueuse.

¾ Diffusion à travers des pores aqueux

Ce type de système peut être développé à partir d’un agent filmogène insoluble associé à un polymère présentant une solubilité pH-dépendante - ex. Eudragit® L – ou à des substances hydrosolubles dispersées au sein de l’enrobage – ex. lactose, PEG, HPMC. La libération du PA est alors dépendante de la dissolution de l’agent capable de générer ces pores de diffusion.

¾ Libération sous l’impulsion d’une pression osmotique

Le PA et l’excipient hydrosoluble génèrent une différence de pression osmotique facilitant la pénétration de l’eau à l’intérieur de la forme. Le PA dissous, diffusera à travers la membrane d’enrobage.

Composition des dispersions d’enrobage

Les dispersions d’enrobage organiques sont de moins en moins valorisées en raison du risque encouru par l’expérimentateur et des coûts importants pour l’industriel

[Hogan, 1982]. Ainsi, les dispersions aqueuses ont connu un succès croissant dû au développement de dispersions colloïdales de polymères insolubles et entérosolubles

[Pondel, 1984 ; Amighi, 1995].

Le terme «latex» désigne les dispersions colloïdales de polymères dans l’eau. La taille des particules dispersées est généralement comprise entre 10 et 1000nm. Les latex sont caractérisés par une viscosité faible. Les dispersions aqueuses disponibles sur le marché contiennent généralement 30 à 40% (m/m) de substance solide. La vitesse de

sédimentation des particules du polymère doit être inférieure à 1mm/24h [Amighi, 1995].

De nos jours, les dispersions aqueuses constituent un premier choix pour l’enrobage des formes solides en raison de leurs excellentes propriétés filmogènes

[Lehmann, 1993].

Les dérivés poly(méth)acryliques : les Eudragit®

Les premiers copolymères d’acide méthacrylique étudiés étaient gastro-résistants (solubilité intestinale pH-dépendante) – ex. protection de la muqueuse gastrique. Par la suite, cette gamme de produits a été élargie en introduisant sur le marché des dérivés poly(aminoalkyl)méthacrylate gastrosolubles et insolubles – ex. libération prolongée. Les dérivés poly(méth)acrylates utilisés en pharmacie sont plus connus sous leur dénomination commerciale d’Eudragit®[Lehmann, 1996].

La résistance de ces dérivés poly(méth)acryliques est due à la structure moléculaire rigide du polymère [Fukumori et col., 1988]. Ce dernier est composé d’une chaîne centrale carbonée stabilisée par des groupements «méthyl». Les groupes esters des dérivés polyacrylates et poly(méth)acrylates sont très résistants à l’hydrolyse

(Figure 14) [Lehmann, 1996]. CH2 C CH2 CH3 O C O R1/ R2 C H C O O R1/R2

Les polymères sont obtenus à partir de monomères de type (R1 et R2 cf. pages 41-42) : Méthylméthacrylate (MM)

Ethylacrylate (EA) Acide méthacrylique (MA)

Figure 14 : Structure chimique générale des dérivés acryliques (Eudragit®) [Lehman, 1996]

¾ Les polymères gastrosolubles mais insolubles au dessus de pH 5.0

Ces polymères sont souvent utilisés en tant qu’agents isolants afin de masquer un goût ou une odeur désagréable [Lehmann, 1989].

Eudragit® E

Copolymères cationiques de diméthylaminoéthyl méthacrylate et d’esters neutres d’acide méthacrylique.

R1 = -CH3, C4H9 R2 = -CH2-CH2-N(CH3)2 ¾ Les polymères entérosolubles

Leur caractéristique gastro-résistante permet d’éviter tout contact entre la muqueuse gastrique et des PA irritants pour cette dernière – ex. AINS. Ces dérivés peuvent également entrer dans la fabrication de formes à libération ciblée lorsque le PA doit être délivré préférentiellement au niveau intestinal (Eudragit® L et S) ou colonique (Eudragit® FS) - ex. PA sensibles en milieu acide, médicaments de la maladie de Crohn.

Eudragit® L, S et FS

Copolymères anioniques de l’acide méthacrylique (AMa) et d’éthylacrylate (EA) ou de méthylméthacrylate (MM).

R1 = -C2H5 R2 = -H

Poly(AMa-EA) 1 :1 = Eudragit® L 100-55 Poly(AMa-MMa) 1 :2 = Eudragit® S Poly(AMa-MMa) 1 :1 = Eudragit® L 100 Poly(AMa-EA) 1 :2 = Eudragit® FS

¾ Les polymères insolubles quel que soit le pH

Vu leur caractère insoluble, ces polymères entrent majoritairement dans la composition des formes à libération prolongée.

Eudragit® NE 30D (Neutral Ester)

Copolymère d’éthylacrylate et de méthylméthacrylate (2:1) R1 = -CH3 R2 = -C2H5

L’Eudragit® NE 30D étant caractérisé par une température de transition vitreuse faible, il est utilisé sans plastifiant afin d’éviter la formation de films collants

[Bindschaedler et col., 1983].

Eudragit® RL / RS

Les Eudragit® RS (Schwerdurchlässig ou peu perméable) et RL

(Leichtdurchlässig ou très perméable) sont des copolymères légèrement cationiques d’ester d’acide acrylique et méthacrylique de teneur faible en groupements ammonium quaternaire.

R1 = -H, -CH3 R2 = -CH2-CH2-N+-(CH3)3 Cl

-Leur masse moléculaire moyenne est d’environ 150000 (g/mol). La proportion en groupements triméthylaminoéthyl méthacrylate (TAM) influence fortement la perméabilité des films obtenus. Le dérivé RL en contient le double du dérivé RS.

La valeur de température minimale de formation de film (TMF) de ces dérivés étant comprise entre 40 et 50°C, la formation d’un film homogène, au cours du procédé d’enrobage, nécessite généralement l’addition de 10 à 20% (m/m) de plastifiant par rapport au poids du polymère filmogène [Bodmeier et Paeratakul, 1993].

Les plastifiants les plus efficaces sont principalement les esters citriques : le triéthyl citrate (TEC), l’acétyltriéthyl citrate (ATEC), le tributyl citrate (TBC) et l’acétyl-tributyl citrate (ATBC), la triacétine (TAC) et le diéthylphtalate (DEP) [Lehmann, 1989 ; Guo, 1994]. D’autre part, l’addition d’un plastifiant permet également d’améliorer les propriétés de résistance mécanique des films obtenus – ex. augmentation de la flexibilité.

La structure chimique variable des dérivés acryliques engendre des solubilités et des comportements différents en fonction du pH. Ainsi, il est possible de contrôler la cinétique de libération du PA et/ou le site de dissolution du polymère filmogène au niveau du tractus gastro-intestinal (Figure 15).

Figure 15 : Solubilité et comportement des polymères acryliques filmogènes en fonction du pH, au niveau du tube GI [Modifié de Lehmann, 1996].

Il semble raisonnable de libérer la quasi totalité de la substance active endéans 12 à 16 heures, ce qui correspond approximativement à la durée moyenne du transit effectué par une forme pharmaceutique de la bouche au colon transverse.

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