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Chapitre I : Introduction

II. Etat de l’art

II.3. Généralités sur l’encapsulation

II.3.2. Les systèmes d’encapsulation à partir d’émulsion

Une émulsion est une dispersion d’un liquide (phase dispersée ou discontinue) en fine gouttelettes dans un autre liquide (phase dispersante ou continue). Les deux liquides étant non miscibles, l’un hydrophile (phase aqueuse) et l’autre hydrophobe (phase huileuse). Thermodynamiquement instable, les émulsions nécessitent des agents émulsifiants comprenant un pôle hydrophile et un pôle hydrophobe (amphiphile) dont les protéines font partie. Les émulsions sont classées en deux grands groupes ; émulsions simples et multiples

(Figure.I.9).

Les émulsions simples : sont composées d’une phase lipophile, d’une phase hydrophile et d’un émulsifiant (Figure. I.9a). Suivant la phase dispersée (interne) huileuse ou aqueuse, on distingue respectivement deux types d’émulsion : huile dans eau (H/E) ou eau dans huile (E/H). Les émulsions E/H étant les moins courantes, elles sont parfois appelées émulsions inverses. Le type d’émulsion formé dépend largement de l’agent émulsifiant mis en œuvre. De manière évidente, il est possible d’encapsuler des substances actives hydrophiles dans la phase aqueuse, des substances actives hydrophobes dans la phase huileuse. Les émulsions simples ont été largement utilisées pour encapsuler des substances bioactives hydrophobes tels que le lycopène, la lutéine, le β-carotène mais rarement les substances hydrophiles (McClements et al. 2007).

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Figure.I.9. Les principaux types d'émulsions : (a) : simple ; (b) : multiple.

Les émulsions multiples : sont des dispersions d’une émulsion simple dans une phase dispersante (Figure. I.9b). La dispersion d’une émulsion H/E dans une phase huileuse (H) donne une émulsion H/E/H. à l’inverse, la dispersion d’une émulsion E/H dans une phase aqueuse (E) donne une émulsion E/H/E. On y distingue trois phases : interne / intermédiaire / externe. Chaque phase peut contenir des substances actives différentes, ce qui permet la présence de substances incompatibles dans le même système. Dans ce type d’émulsion, il y a deux couches interfaciales différentes : l’interface entourant la phase interne et l’interface entourant la phase intermédiaire. En conséquence, deux types d’émulsifiants sont généralement nécessaires pour stabiliser les émulsions multiples. Il existe peu d’exemples d’émulsions multiples effectivement utilisées dans l’industrie alimentaire pour encapsuler des composés fonctionnels (McClements et al. 2007). Certaines émulsions E/H/E ont été utilisées pour encapsuler des molécules hydrophobes telles que la β-carotène et les acides gras ω-3. Mais principalement, les émulsions multiples ont été utilisées pour encapsuler des

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composés hydrophiles tels que la vitamine B, des immunoglobulines, de l’insuline, des protéines, des acides aminés ou encore des probiotiques (McClements et Li., 2010).

En raison de leur facilité de préparation et de faible coût par rapport aux émulsions multiples, les émulsions classiques (simples) sont plus utilisées dans l’industrie agroalimentaire. Néanmoins, les émulsions multiples offrent plus d’opportunités et de performances (protection, libération), il est même possible d’encapsuler des substances hydrophobes et hydrophiles dans la même capsule (Cournarie et al., 2004).

II.3.2.2. Stabilité des émulsions

Dans tous les cas, simple ou multiple, les émulsions sont des systèmes thermodynamiquement instables qui tendent à se séparer en deux phases distinctes, aqueuse et huileuse. Cette séparation peut avoir lieu par l’intermédiaire des phénomènes connus de floculation, coalescence et crémage (McClements et al., 2007). Par conséquent, des techniques de stabilisation ont été développées. Deux approches sont possibles, renforcement des couches interfaciales ou limitation des rencontres entre globules dispersées.

Le renforcement de la couche interfaciale consiste à mettre en place une stratégie permettant de conférer aux gouttelettes une charge électrique et les faire interagir avec un biopolymère (protéines ou polysaccarides) de charge opposé. En se basant sur cette stratégie d’interaction électrostatique, plusieurs couches peuvent être déposées (McClements and Li, 2010). Dans ce cas, d’une part, l’émulsion est stabilisée par la mise en œuvre de grandes répulsions électrostatique et/ou stérique et d’autre part, une grande rigidité est conférée à la couche interfaciale. Ainsi, la gouttelette est mieux protégée contre les agressions extérieures. Ce système est appelé émulsion multicouche (Figure.I.10).

La deuxième stratégie de stabilisation des émulsions consiste à agir sur la viscosité de la phase dispersante dans le but de limiter la collision des gouttelettes et ralentir le crémage. Elle peut être réalisée par l’ajout d’agent épaississant ou gélifiant. On parle de stabilisation rhéologique.

Les stratégies de stabilisation citées constituent toute les deux des techniques intéressantes pour la formulation de microcapsules ou microsphère individualisées. En effet, les gouttelettes de l’émulsion multicouche, récupérées par simple filtration, constituent des microcapsules très stables et performantes. Elles sont composées d’une enveloppe solide et un

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cœur liquide contenant les substances à encapsuler (système réservoir). Les microparticules à base d’émulsion multicouches semblent particulièrement prometteurs et adaptés à la problématique de la libération contrôlée (Gharsallaoui et al., 2012a; Gharsallaoui et al., 2012b ; McClements et al., 2007; McClements et Li. 2010).

Figure.I.10. Emulsion multicouches. Adapté de (McClements et Li. 2010)

La stabilisation rhéologique quant à elle, conduit à la transformation de la phase aqueuse en hydrogel de biopolymères. Si la phase aqueuse est la phase dispersante (extérieure), l’ensemble du système sera gélifié en un seul bloc contenant les gouttelettes d’huile. Dans ce cas, il n’est pas possible de former des microparticules individualisées. Par contre, si la phase aqueuse est la phase dispersée, la gélification conduit à la formation de microparticules constituant un bon support d’encapsulation (système matriciel). Dans cette étude, on s’intéresse plutôt au système d’encapsulation matriciel (microparticules) à base d’hydrogel de protéine (Figure. I.11). Il s’agit de maîtriser la formation de microparticules par une dispersion de la protéine contenant les molécules actives sous forme d’émulsion suivie d’une gélification.

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Figure.I.11. Système d’encapsulation à base d’émulsions : (a) simple et (b) multiple (double) suivies d’une gélification de la protéine.

II.3.2.3. Stratégies de gélification des protéines

Habituellement, les hydrogels de protéines sont formés par voie thermique. Il s’agit de dénaturer la protéine par chauffage dans le but de la déplier et d’exposer ces groupements hydrophobes et thiols libres. Ainsi, les protéines sont agrégées sous forme d’un réseau tridimensionnel emprisonnant l’eau contenant les molécules actives (hydrophiles). Les forces impliquées dans la stabilisation du réseau sont des liaisons non covalentes (hydrophobe,

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liaison hydrogène, force de Van der Waals) et/ou covalentes (ponts disulfures). Cependant, l’application de cette méthode est limitée par la sensibilité thermique des substances actives

(Chen et al., 2006).

L’utilisation d’agent réticulant tel que le glutaraldéhyde (Caillard et al., 2009 ; Lee et Rosenberg. 1999) peut conduire à une gélification, mais pour des raisons de toxicité, la méthode ne peut pas faire l’objet d’application alimentaire.

Compte tenu de ces limites, d’autres méthodes de gélification ont été développées : il s’agit de méthodes dites de gélification à froid. La gélification est réalisée par la maitrise de la force ionique (ajout de sel) et/ou du pH (acidification) d’une solution protéique prédénaturée thermiquement (en absence de sel) sous forme d’agrégats solubles (Maltais et al., 2005; Chen et Subirade. 2009). C’est une bonne alternative aux hydrogels à base de polysaccharide tel que l’alginate (Chen et al., 2006).

Une autre méthode peut faire l’objet d’une gélification des protéines est la réticulation par voie enzymatique par le biais de la transglutaminase (Shand, Ya et al. 2008). La réticulation enzymatique est largement utilisée pour améliorer la texture des aliments

(Yokoyama al., 2004) mais rarement pour encapsuler des substances actives (Cho et al., 2003; Heidebach et al., 2009).

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