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LES STRATÉGIES D’ACCOMPAGNEMENT

Dans le document T ABLE DES MATIERES : OUTILS THEORIQUES (Page 128-131)

4. OUTILS THÉORIQUES : QUELQUES ÉCLAIRAGES…

4.9 ACCOMPAGNEMENT ET FORMATION

4.9.2 LES STRATÉGIES D’ACCOMPAGNEMENT

Deux fonctions peuvent être assumées par un intervenant, au sein d’une organisation (Vial et Caparros-Mencacci, 2007) :

Le pilotage du projet nécessite une posture d’expert. Ce dernier doit évaluer, poser un diagnostic et mettre en évidence des axes d’action. Il propose, parfois impose, convainc ou persuade, afin de trouver des solutions. Selon Paul (2016), le principe d’autorité se base sur l’existence d’un bien commun et partagé. Obéir devient concevable, puisqu’on reconnaît qu’un autre ayant de l’expérience peut se porter garant de ce bien. La recherche de symétrie est visée : « On passe de l’obéissance aux postures de conseil » (p.39).

L’accompagnement du processus de changement peut s’établir collectivement ou individuellement. Le consultant (coach) permet de s’organiser, d’améliorer communication et fonctionnement du groupe, de se coordonner. Il est garant de la situation où se joue le devenir de l’individu, sans être garant du type de devenir.

Bien entendu, l’intervenant peut alterner ces deux fonctions selon les besoins. Dans certaines situations, seule la posture d’expert semble envisageable, par exemple pour stopper une situation de crise. Or, Vial et Caparros-Mencacci notent que même dans cette situation, proposer un accompagnement, permettre de vivre avec le conflit ou pouvoir traverser la crise, semblent plus pertinents que de vouloir simplement l’arrêter ou l’éviter.

Paul (2016) esquisse un cadran processuel, mettant en évidence quatre types de dynamiques d’accompagnement :

La dynamique relationnelle incite à tenir compte des autres, de l’environnement et de soi-même. « L’enjeu est de passer d’une focalisation exclusive sur l’autre à une vision élargie de soi et de l’autre en relation » (p.81).

La dynamique situationnelle « consiste à mettre en mot une situation au sein d’une relation qui elle-même fait situation » (p.82).

La dynamique temporelle tient compte du fait que la relation est limitée a priori par le dispositif prévu pour l’accompagnement, mais peut se prolonger au-delà. Les liens peuvent perdurer, alors que les échanges professionnels sont terminés, car les résonances affectives (ressentis liés à l’expérience relationnelle) et cognitives (rémanences des significations partagées) peuvent dépasser le cadre donné. Le lien peut s’inscrire comme une expérience sur la durée.

La dynamique opérationnelle concerne les ressources, les stratégies, les outils utilisés pour réaliser l’accompagnement et se confronter au réel. Elle n’est pas prédéfinie et s’ajuste aux besoins. Elle prévoit de tâtonner, d’expérimenter, de faire des erreurs ou de changer d’avis.

4.9.2.1 L’étayage

L’accompagnement est une forme d’étayage. Bruner (s.d, cité dans Vial et Caparros-Mencacci, 2007) le considère comme l’ensemble des actions d’assistance, qui permettent à l’individu d’organiser ses conduites pour résoudre seul un problème. L’étayage consiste en une médiation rendant l’apprenant capable de réaliser une tâche, de surmonter un défi ou d’atteindre un but fixé. Ce ne sont pas l’enseignant, le formateur ou l’intervenant qui assument le rôle de médiateur, mais les codes et les outils utilisés, qui donnent sens aux actions. On peut se référer à la notion de médiation sémiotique de Vygotsky, qui précise que l’« étayage est dans le fait de mettre en présence l’apprenant avec ces signes. Fournir les bons signes ou baliser la route qui les fera utiliser, c’est du guidage, les faire se rencontrer, c’est de l’accompagnement » (Vial et Caparros-Mencacci, 2007, p.57). Deux approches ou deux postures se dessinent : le guidage ou l’accompagnement.

Accompagner signifie « aider les gens à comprendre au lieu de les aider à ne pas se tromper» (Vial et Caparros-Mencacci, 2007, p.96). Si l’on adopte une posture d’expert ou de guide, on conçoit qu’un changement est possible, grâce à une décision éclairée, face aux problèmes repérés. L’intervention vise la correction des décisions prises auparavant, lorsqu’elles s’avèrent peu pertinentes. Trois étapes successives, linéaires, peuvent produire l’effet attendu. Si au contraire, on adopte une posture d’accompagnement, le changement repose sur la confiance dans les potentiels de l’autre. Trois phases interdépendantes sont observées. Les deux dispositifs sont présentés dans le tableau 9, ci-dessous (Vial et

Dans le suivi d’action sociale, il est nécessaire d’introduire un élément tiers dans la relation.

C’est la qualité de l’usage de ce tiers qui distingue les pratiques de guidage de celles d’accompagnement. Dans le guidage, il faut se plier aux exigences et au guide qui sait ce qu’il faut faire. Dans l’accompagnement, l’intervenant s’engage à ce que les activités, les outils proposés régulent l’action, interpellent, entraînent l’accompagné à revoir son jugement, ses stratégies et les procédures mises en œuvre (Vial et Caparros-Mencacci, 2007).

Contrairement au guidage où l’intervenant prend de la distance, dans l’accompagnement, il

« n’est pas neutre, ni externe, il incarne le tiers (il représente l’institution). Il propose des objets tiers, des systèmes de signes pour que l’accompagné change (il introduit le tiers) » (Vial et Caparros-Mencacci, 2007, p.60). Mais pourquoi s’orienter vers une posture de guidage plutôt qu’une posture d’accompagnement ?

Tab.9 : Dispositifs de guidage et d’enseignement, selon Vial et Caparros-Mencacci (2007, p.92-94)

Le choix d’adopter telle ou telle posture est lié à plusieurs facteurs, propres à l’intervenant et à la personne avec laquelle il va cheminer ainsi qu’au contexte. Quelques éléments peuvent être mis en évidence (Vial et Caparros-Mencacci, 2007) :

Le projet de l’intervenant : le choix de la posture dépend de ce que souhaite réaliser l’intervenant. S’il veut résoudre un problème ou trouver des solutions, il développera une posture de guidage. S’il chemine vers la mise en évidence d’une problématique, d’un questionnement ou d’une émancipation, il optera pour l’accompagnement.

Les visées et les cadres de référence de l’intervenant influencent ses choix. Il peut se situer sur un registre fonctionnaliste et agir selon un objectif prédéfini, en cherchant à dévoiler les mécanismes de fonctionnement mis en œuvre, les rapports de cause à effet (posture de guidage). Il peut au contraire s’intéresser davantage à comprendre le monde, en tenant compte de la complexité des situations, encourager une « gymnastique de l’esprit » et « mettre en dialectique » (posture d’accompagnement). La dialectique est une méthode de raisonnement qui prend en considération la contradiction, la travaille et l’assume complètement (Vial et Caparros-Mencacci, 2007).

Les « registres de pensée » disponibles : le guidage repose sur une pensée par objectifs, qui renvoie à l’idée de conquête du monde, de mise en trajectoire, pour trouver le plus court chemin et arriver à ses fins. Il peut s’allier à une pensée stratégique, managériale qui s’adapte au fur et à mesure, sous forme de programmes préétablis. Il est orienté sur la gestion, l’autorité voire la domination « dans l’illusion de la maîtrise de l’autre », le manager étant celui qui met tout en place pour « que les gens ne se trompent pas, qu’ils se contrôlent en permanence » (Vial et Caparros-Mencacci, 2007, p.209). Le guidage incite à s’intéresser aux comportements, à être rationnel, en privilégiant la planification, le respect des règles, l’aplanissement des difficultés, la prévision d’éventuels problèmes et l’amélioration des pratiques pour maîtriser les situations. A l’opposé, une pensée humaniste par projets, fondée sur une « pragmatique de l’agir professionnel », va engendrer une posture d’accompagnement. Dans cette démarche, l’humain l’emporte : le

« sujet assume ses liens de dépendance, la reliance aux autres humains par le développement de plus en plus de plus de responsabilités, de plus d’esprit critique » (Vial et Caparros-Mencacci, 2007, p.208). Il s’agit d’une quête sans fin où le respect d’autrui et de soi est central. La pragmatique privilégie l’action sur le jugement. Elle n’a pas l’obsession de vouloir optimaliser les pratiques ou rationnaliser les actions.

Les « valeurs » issues des différents modes de pensée : « Les valeurs ne sont pas de simples vouloirs affichés consciemment qui valorisent la personne, ce sont des exigences que le contexte professionnel impose » (Vial et Caparros-Mencacci, 2007, p.212). Les auteurs distinguent les croyances relevant davantage de l’individu, des valeurs qui sont collectives et influencent la construction de son identité. La posture de guidage repose sur des valeurs professionnelles telles que l’efficacité, le dynamisme (pensée par objectifs), l’autonomie ou la motivation (pensée stratégique, managériale) dans un souci de qualité, de sécurité et de bien-être des individus. La posture d’accompagnement repose, comme nous l’avons vu, sur le respect de l’autre et de soi (pensée humaniste) et sur le concept de plasticité et de changement permanent (pensée par projets, pragmatique) (Vial et Caparros-Mencacci, 2007). Le professionnel doit constamment analyser quelles sont les valeurs sociales prioritaires en fonction du contexte, ce qui lui permet de développer un questionnement éthique tout au long du processus de guidage ou d’accompagnement.

L’intervenant ne peut simultanément faire du guidage et de l’accompagnement. Disposant de cette double compétence, il peut toutefois les alterner en fonction des situations. Mais pourquoi vouloir accompagner ? Trois situations complexes et problématiques peuvent susciter une demande d’accompagnement (Vial et Caparros-Mencacci, 2007) : un dysfonctionnement au sein d’une organisation, des exigences politiques visant la mise en œuvre d’un projet (innovation…) ou encore l’implantation d’une réforme. En Albanie, le projet de formation est parti du constat d’un dysfonctionnement puis les autres éléments se sont enchainés sous l’impulsion de cette première prise de conscience.

4.9.3 LES QUATRE PROCESSUS EN JEU DANS

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