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Chapitre 4 Stratégies de pilotage décentralisé et centralisé des générateurs

IV.2 Les solutions de pilotage des GED existantes

Suite à la forte augmentation de raccordements de GED sur le réseau public de distribution et les problématiques vues dans le chapitre II qui en découlent, de nombreuses stratégies de pilotage ont été, et sont étudiées dans la communauté scientifique internationale. Quelques-unes de ces stratégies sont déjà exploitées dans certains pays, notamment en Allemagne suite à la loi sur les énergies renouvelables [EEG 12]. Pour être implémentées les solutions de pilotage proposées doivent être en accord avec les normes de raccordement des GRD. Les normes françaises en vigueur concernant le raccordement sont données partiellement dans le chapitre II.

- 113 - Avant de présenter les solutions de pilotage étudiées dans ces travaux de thèse, les paragraphes suivants abordent les principaux pilotages utilisés à l’heure actuelle et ceux présents dans la littérature.

IV.2.1 Le Volt VAr Control (VVC)

Les pilotages décentralisés des GED de type Volt Var Control, ou plus communément appelés VVC, sont les plus fréquents. Initialement pensé pour coordonner le pilotage de bancs de condensateurs et de transformateurs avec régleur en charge, le VVC est désormais fréquemment utilisé pour des pilotages de GED. Il consiste à utiliser la GED pour injecter ou absorber de l’énergie réactive sur le réseau en fonction du niveau de tension en son point de connexion. De nombreux articles scientifiques présentent des pilotages visant à limiter les fluctuations de la tension au point de connexion de la GED en pilotant l’échange de puissance réactive avec le réseau. Cette solution présente l’avantage d’être facilement implémentable sur les onduleurs et de fonctionner de façon parfaitement décentralisée [DOM 11].

Dans ses travaux, [JAH 13] évalue un pilotage d’onduleur solaire de type VVC. Le réactif injecté par l’onduleur dépend du gabarit présenté sur la figure IV.1. Les seuils de ,/2Æ sont ajustés en temps réel en fonction de la puissance active qui transite dans l’onduleur de façon à ne pas dépasser la puissance apparente de l’onduleur. Les seuils sur le module de la tension aux bornes de l’onduleur sont fixés par le GRD. Dans le cas d’étude, sur un réseau rural réel modélisé, le pilotage développé par [JAH 13] permet de supprimer les dépassements de contrainte en tension. En revanche, pour un mauvais réglage de la bande morte Ñ (voir figure IV.1), les pertes Joule sur le réseau peuvent augmenter de plus de 20 %. Ce constat est fréquent, le pilotage de GED basé sur des solutions de type VVC entraine fréquemment l’augmentation des pertes sur le réseau.

De nombreux autres articles présentent des pilotages de type VVC, parmi lesquels [NEA 11], [KOB 11] et [BRA 09] exposent des solutions de pilotage du réactif intéressantes.

Figure IV.1 : Gabarit de VVC [JAH 13]

Le diagramme vectoriel de la figure IV.2 illustre l’augmentation des pertes sur le réseau dues à une sur-injection de puissance réactive par un pilotage de type VVC d’une GED. Cette augmentation des pertes réseau est la conséquence de l’augmentation du module du courant circulant dans les conducteurs. Le courant de ligne est la somme vectorielle d’un courant actif (noté 2) et d’un courant réactif (noté l). Si le courant réactif injecté par la GED (noté l œ•™), suite à une tension en son point

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de connexion trop faible, est supérieur au double du courant réactif circulant initialement dans la ligne, le module du courant dans la ligne est alors plus grand. En effet avec |l œ•™| = 2 ∗ |l| le module du courant en ligne ÒSk2 sera identique à celui pour l œ•™= 0 mais avec un angle de signe opposé. Pour |l œ•™| > 2 ∗ |l| le module du courant ÒSk2 est plus important que sans injection de réactif par la GED et donc les pertes augmentent.

Figure IV.2 :Illustration de l’augmentation du module du courant de ligne avec la VVC

En limitant le courant réactif injecté par la GED à deux fois le courant réactif circulant dans la ligne en son point de connexion, les problèmes d’augmentation du module du courant seraient résolus. Cependant, connaitre le courant de ligne implique l’installation de capteurs sur le réseau du GRD pour chacune des GED, ce qui ne parait guère envisageable. Les solutions de pilotage décentralisé présentées dans la suite de ce chapitre visent à limiter les problèmes d’augmentation des pertes tout en utilisant des données locales.

IV.2.2 Pilotage du facteur de puissance en fonction du niveau de puissance active

Il est intéressant de regarder l’évolution des normes sur le pilotage des GED en Allemagne où le taux d’insertion des énergies renouvelables est beaucoup plus important qu’en France. En 2013, la puissance crête des PV installés en Allemagne était de 35700 MWc pour 4320 MWc en France [EUR_80].

Le guide d’application VDE-AR-N 4105 en vigueur en Allemagne depuis le 1er août 2011 impose aux installations PV de modifier leur facteur de puissance d’injection en fonction du niveau de puissance active produit. La figure IV.3 présente le gabarit du facteur de puissance. Ce pilotage du facteur de puissance permet de réduire la hausse de la tension locale aux heures de forte production, et ainsi augmenter la capacité d’accueil du réseau.

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Figure IV.3 : Facteur de puissance en fonction du niveau de puissance active produit [GAI 12]

IV.2.3 Le pilotage de la puissance active

Comme l’ont montré les paragraphes précédents, en cas de déviation importante de la tension, le pilotage de la puissance réactive des GED peut vite montrer ses limites et engendrer une augmentation des pertes sur le réseau. A l’heure actuelle, la législation concernant le pilotage de la puissance active des GED diffère grandement d’un pays à un autre. Pour certains, en cas d’écart important de la tension, un changement de consigne peut être appliqué sur la puissance active des GED. Par exemple au Japon, l’actif diminue lorsqu’une limite haute de tension est atteinte [UED_08], ou en Allemagne, les installations solaires d’une puissance crête supérieure à 30 kWc doivent désormais être capables de limiter leur puissance active de sortie sur demande du gestionnaire [GAI 12]. Inversement, aux Etats-Unis, les normes basées sur le standard IEEE 1547 [IEE 03] interdisent le pilotage de la puissance active des GED connectées en basse tension [BRA 11].

Le pilotage de la puissance active engendre évidemment une perte de production, puisque par défaut, les GED sont construites pour injecter, à partir de la puissance primaire qu’elles reçoivent, la puissance électrique maximum. Cependant, si diminuer l’injection de puissance active sur un faible pourcentage de temps permet d’augmenter significativement la capacité d’accueil du réseau, le pilotage de l’actif devient intéressant.

Bien que les problématiques fréquentielles ne soient pas traitées dans ces travaux, il est intéressant de noter que la puissance active peut également être pilotée sur variation fréquentielle, allant de la diminution suivant un gabarit Puissance active = f (fréquence), jusqu’à la déconnexion de la GED sur seuil de fréquence haute.

IV.2.4 Le Régulateur Auto-Adaptatif [LE 06]

Toujours dans l’objectif de rendre les GED actives dans le service système, et plus précisément dans la régulation de la tension locale, le Régulateur Auto-Adaptatif (RAA) est conçu pour piloter la puissance réactive, puis la puissance active, en fonction du niveau de tension. Dans ses travaux de thèse Thi Minh Chau Le [LE 06] présente le fonctionnement de ce dispositif qui fait l’objet d’un brevet [TRA 07].

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Le RAA adapte son type de pilotage en fonction du niveau de tension à son nœud de raccordement. Trois régimes de fonctionnement sont distingués : le régime normal, le régime perturbé et enfin le régime critique. La figure IV.4 illustre les régimes de fonctionnement du RAA en fonction des niveaux de tension. Les trois fonctionnements sont décrits ci-dessous.

- Le régime normal : la tension est comprise entre ± $ém lé (voir figure IV.4), le RAA ne pilote pas la puissance active et agit sur la puissance réactive de façon à injecter, selon le choix, à puissance réactive constante ou à facteur de puissance constant. L’objectif étant de minimiser les pertes sur le réseau en injectant ou en absorbant de l’énergie réactive.

- Le régime perturbé : la tension sort de la plage ± $ém lé mais reste inférieure aux limites ± 2$/ m 4 , le RAA ne pilote toujours pas la puissance active mais passe en mode régulation de tension par contrôle de la puissance réactive (VVC).

- Le régime critique : la tension sort de la limite ± 2$/ m 4 , le pilotage de la puissance réactive n’est pas suffisant pour réguler la tension, le RAA pilote également la puissance active.

Figure IV.4 : Les trois régimes du RAA en fonction des niveaux de tension [LE 06]

Contrairement à un pilotage de type VVC traditionnel, le RAA présente l’avantage de distinguer différents modes de fonctionnement. Ainsi, en régime normal le risque d’augmenter les pertes par une surcompensation, identifiée précédemment, est diminué avec un bon choix de facteur de puissance ou de niveau de puissance réactive. Inspiré du RAA le troisième pilotage, présenté dans la suite de ce chapitre, bascule d’un mode de fonctionnement à un autre en fonction du niveau de tension à ses bornes.