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Les Solidaires locaux, des réalités encore très contrastées

Les Solidaires locaux fournissent l’un des points d’ancrage pour le développement de la dimension interprofessionnelle au sein de l’organisation, bien qu’ils ne concentrent donc pas à eux seuls la totalité de cette activité. En préparation au IVe Congrès national de 2008, Solidaires a établi une photographie, via la passation d’un questionnaire en interne, des réalités contrastées auxquels renvoient ces structures. Si la plupart se sont adossés au territoire administratif et politique constitué par le département, certains Solidaires locaux n’existent qu’à l’échelle d’une ville, voire d’une métropole. On peut penser par exemple au cas de Solidaires 34, structure très active, qui entretient des liens avec des équipes militantes à Sète ou à Agde, mais dont le périmètre d’intervention est avant tout celui de la ville de Montpellier. La diversité des moyens dont bénéficient les Solidaires locaux provient également du fait qu’ils disposent ou non d’un local, la mise à disposition de celui-ci par la municipalité relevant le plus souvent d’une longue et âpre bataille. La plupart des Solidaires locaux commencent d’ailleurs à tenir des réunions sans bénéficier d’un local spécifique, mais en s’appuyant sur les moyens de certaines structures membres, tel le SNUI ou SUD PTT.

Le questionnaire envoyé par le Bureau national de Solidaires157 (voir en annexe) avant le IVe Congrès national de 2008 fournit des renseignements intéressants sur 51 départements158. L’échantillon se décompose en trois sous groupes : 2/5e des Solidaires locaux existaient déjà en 2000, 2/5e ont été créés entre 2001 et 2003 et environ 20% après 2003. Le questionnaire permet également d’approcher la question de la participation effective des différentes organisations au sein des structures interprofessionnelles locales ou départementales. Il établit une distinction entre les organisations composant sur le plan formel le Solidaires local et les organisations « participant réellement ». Les réponses à la première question semblent assez équilibrées puisque environ 30% des Solidaires locaux rassemblent officiellement plus de quinze organisations, environ 35% entre dix et quinze et environ 35%

157 Nous remercions les membres du BN de nous avoir transmis ces données.

158 Seuls 51 Solidaires départementaux ont, en effet, répondu au questionnaire envoyé en interne. L’implantation

départementale de l’union est cependant beaucoup plus large puisque, selon les sources internes, la présence de Solidaires est établie sur tout le territoire métropolitain et d’Outre-Mer, sauf en Martinique, Guadeloupe, Corse et Meuse.

entre deux et dix. La deuxième question laisse toutefois transparaître une implication beaucoup plus restreinte. 60% des structures répondantes indiquent que leurs réunions rassemblent en général avec entre cinq et dix membres. Les Solidaires locaux qui parviennent à réunir de façon régulière plus de quinze représentants des organisations membres sont moins de 10%. Environ 16% précisent qu’ils fonctionnent avec moins de cinq représentants.

Les organisations qui apparaissent comme participant réellement avec la plus grande fréquence (dont au moins 35 des 51 SL) sont SUD PTT, SUD Education, le SNUI et SUD Santé Sociaux. SUD Rail se situe un peu en deçà de ce premier sous-groupe avec une implication régulière mentionnée dans 26 Solidaires locaux. A l’exception de SUD Collectivités territoriales et de Solidaires Douanes, toutes les autres organisations déploient une activité régulière dans moins de dix Solidaires locaux. Il est intéressant de comparer ces résultats avec ceux qui pouvaient être établis, en 1998, sur le degré d’investissement des syndicats du G10 dans ses structures décentralisées: le SNUI, SUD PTT, SUD Education, SUD CRC et SUD-Rail y apparaissaient déjà comme jouant un rôle clef159. S’il était possible, à l’époque, d’avancer une explication en termes de différence entre la culture syndicale « sudiste » et celle des « autonomes » et si ce clivage demeure en partie, d’autres questionnements peuvent être soulevés aujourd’hui dont la difficile transmission d’un relais entre les différents syndicats SUD.

Le questionnaire permet également d’appréhender les conditions matérielles qui sont celles de ces structures et leurs modes de fonctionnement. Près de 60% des Solidaires locaux qui ont répondu perçoivent des subventions, soit de la municipalité, soit du département, soit de la région (sachant que le montant de ces dernières s’avère extrêmement varié). Cela revient à pointer qu’à l’inverse, 40% des Solidaires locaux en 2008 s’organisent sans aide financière extérieure. 40% sont hébergés par la mairie (le plus souvent dans la Bourse du travail), 40% par un syndicat membre de Solidaires et 12% se trouvent dans l’obligation de louer leur local. Quelques indicateurs permettent de cerner l’activité de ces Solidaires locaux. 34% annoncent ainsi tenir une assemblée générale ou un congrès par an, les autres structures convoquant ce type d’assise de façon plus espacée (tous les deux ou trois ans). 58% réunissent leur conseil au moins une fois par mois, 16% entre une fois toutes les six semaines et une fois tous les trois mois. Seules 20% des Solidaires locaux tiennent un bureau une fois par semaine. Enfin, 38% assurent des permanences une fois par semaine et 12% ont des conseillers du salarié. 28% disposent d’un site internet.

Un dernier paramètre concerne la participation au Comité national. L’échantillon se divise en deux segments égaux : 48% des Solidaires locaux suivent ses travaux, mais 20% de façon irrégulière. 46% ne peuvent pas y participer, soit en raison de leur éloignement géographique, soit en raison d’un manque de force militante, les deux pouvant évidemment se combiner.

Le tableau qui ressort de ces quelques données atteste de la relative fragilité de ces structures interprofessionnelles encore en construction, et ce d’autant plus que l’on peut supposer que les 50 répondants figurent parmi les plus concernés, sinon les plus actifs. Or, cette fragilité, en s’installant dans la durée, pourrait limiter à terme le projet syndical qu’entend porter l’organisation ou du moins créer un décalage entre une capacité d’action encore restreinte sur le terrain interprofessionnel et la volonté de s’adresser de façon large aux salariés.

Une autre perspective, complémentaire, s’esquisse à partir des résultats du questionnaire rempli par les délégués aux différents congrès. Les militants présents ne sont pas nécessairement les plus investis dans les Solidaires locaux, même si certains ont été mandatés par ces derniers. De ce fait, la faiblesse des moyens – en termes d’investissement militant, à la fois régulier et multiforme – transparaît encore plus.

IV.2 Une place encore limitée des Solidaires locaux dans les pratiques