CHAPITRE II : SELS DE LITHIUM DE TYPE POLYSILSESQUIOXANE ; SYNTHESE ET
C. Les 2 PSS : deux mobilités ioniques différentes
La résonnance magnétique nucléaire à gradient de champs pulsé est une technique couramment utilisée pour mesurer les coefficients de diffusions de molécules ou ion101-103 dans un solvant.
Des sondes nucléaires comme le fluor, le lithium et le proton ont l’avantage de présenter des sensibilités, abondances naturelles et temps de relaxation (compris entre 50 et 1000 ms) très favorables. La possibilité d’obtenir ces mesures pour le 1H, le 7Li et le 19F permet de mesurer sélectivement la mobilité du solvant, du lithium et de l’anion fluoré.
Chapitre II
74 La mesure des coefficients de diffusion par RMN à gradient de champs pulsé a été effectuée par en collaboration avec Patrick Judenstein (Commissariat à l'Energie Atomique et des Energies Alternative à Saclay). Les coefficients des macro-polyanions PSS-Eras et du cation lithium ont été comparés à ceux d’un sel témoin monochargé de formule voisine (figure 51). Ce sel présente plusieurs avantages en termes de synthèse (purification aisée) et en termes de stabilité (pas de possibilité d’hydrolyse/condensation ou polymérisation).
Figure 51: Sel témoin pour les études de coefficients de diffusion : Propargyle-Eras
Dans une séquence d’écho stimulé par gradient de champ pulsé, l’amplitude relative de l’écho E est atténuée du fait de la diffusion translationnelle associée au coefficient de diffusion D selon l’équation 15 :
E = exp [-Dg2 δ 2 γ 2
(Δ-δ/3)] Équation 15
où g et δ sont l’intensité et la durée des deux impulsions de gradient, Δ est l’intervalle de temps entre ces deux impulsions, γ est le rapport gyromagnétique du noyau sonde.
La figure 52 représente l’amplitude relative de l’écho E (rapport des aires des signaux avec et sans impulsion du gradient) mesurée à 300K, pour les sels de lithium propargyle-Eras a) et PSS-Eras b), dissous dans l’acétonitrile.
Dans cette représentation, la pente des courbes relatives à chaque espèce (anion, cation et solvant) est proportionnelle au coefficient de diffusion de cette espèce.
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75 Figure 52: Fonctions de diffusion des espèces
Propargyle-Eras et PSS-Propargyle-Eras
Toutes les courbes peuvent être ajustées selon un mode de diffusion unique à l’exception de l’anion PSS-Eras qui semble lui être régi par un régime bimodal. Ce régime est caractéristique de la présence de deux familles de PSS-Eras. Cependant, il est difficile de quantifier précisément ces deux populations.
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76 Tableau 9 : Valeurs des coefficients de diffusion de l’anion, du cation lithium et du
solvant Espèces 19F D (cm2s-1) (*105) 7Li D (cm2s-1) (*105) Acétonitrile D (cm2s-1) (*105) Propargyle-Eras 1,07 (±0,05) 1,22 (±0,08) 3,5 (±0,2) PSS-Eras 0,77 (±0,08) 0,33 (±0,04) 1,5 (±0,1) 4,1 (±0,1)
Dans le cas du propargyle-Eras, les coefficients de diffusion de l’anion fluoré et du lithium sont comparables. On constate une diminution nette des coefficients de diffusion de l’anion dans le cas du PSS-Eras, en plus de leur dédoublement, alors que le lithium garde un coefficient de diffusion inchangé, quelles que soient la taille et la charge de l’espèce anionique. Ces résultats semblent montrer une bonne dissociation du sel perfluorosulfonate de lithium puisque le coefficient de diffusion du lithium reste lui stable quelle que soit la taille de l’anion. C’est ce que nous allons vérifier par la suite par le calcul.
La relation de Stokes-Einstein peut être utilisée pour obtenir une évaluation des rayons des espèces solvatées :
D = kBT/6πηRh Équation 16
avec : kB la constante de Bolzmann 1,38×10-23 J.K-1, T la température et η la viscosité de la solution.
En première approximation, on peut considérer toutes les espèces comme des objets denses, ce qui implique que Mw est proportionnel àR3. La relation de Stokes-Einstein donne alors une estimation des masses moléculaires des différentes espèces puisque (équation 17):
Équation 17
Cette équation permet de connaître le rapport des rayons des espèces étudiées (équation 18) :
Équation 18
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77 et en particulier le rapport des rayons des ions lithium (équation 19):
Équation 19
Or en première approximation, la viscosité ηi d’une espèce est inversement proportionnelle au coefficient de diffusion de cette espèce dans l’acétonitrile Di,ACN, d’où l’équation 20:
Équation 20
On peut alors déduire du tableau 4 et des équations 15 et 16, l’équation 21 : Équation 21 D’où :
RLi, propargyle = 1.05 RLi, PSS
Équation 22
Ce résultat confirme l’excellente dissociation du perfluorosulfonate de lithium puisque l’espèce diffusive Li+
n’apparaît pas influencée par la nature de l’anion (peu ou pas de paires d’ions). De même, la valeur élevée du coefficient de diffusion du cation lithium comparée à celle du l’anion propargyleperfluorosulfonate montre que le lithium est solvaté de manière importante par l’acétonitrile.
La même démarche est appliquée à l’anion et la relation suivante est obtenue :
Équation 23
On sait que Mw R3, ce qui conduit à la relation 24 qui donne une évaluation des masses molaires des différentes populations de macro polyanions PSS-Eras :
Équation 24
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78 Tableau 10: Valeurs des Mw déterminées par RMN à gradient de champs pulsé
Espèce Mw (g/mol) Propargyle-Eras X 350 PSS-Eras 1,64 3,83 1 500 19 000
Il est intéressant de comparer ces masses molaires à celles obtenues en CES (tableau 11).
Tableau 11: Comparaison des masses molaires déterminées par CES et RMN
CES (Mw g/mol) RMN (Mw g/mol)
PSS-Eras minoritaire inconnu 1 500
PSS-Eras majoritaire 12 000 19 000
La différence entre les Mw déterminées par ces méthodes peut être expliquée par les approximations faites en RMN pour déterminer les masses moléculaires. On retrouve cependant bien qualitativement la présence de deux populations de masses molaires complètement différentes.
A partir des coefficients de diffusion déterminés par RMN, il est maintenant intéressant d’évaluer de manière théorique la conductivité des espèces anioniques en fonction de leur charge et des concentrations utilisées lors de la mesure des coefficients de transport (CPSS = 0,066 mol/L et Cpropargyle-Eras = 0,085 mol/L), ainsi que le nombre de transport du lithium.
D’un point de vue théorique, on sait que la conductivité est liée au coefficient de diffusion d’une espèce ionique par l’équation 8:
Équation 8
Le nombre de transport est quant à lui déterminé par l’équation 3 :
Équation 3
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79 Tableau 12: Conductivités déterminées à partir des coefficients de diffusion obtenues en
RMN
Propargyle-Eras
PSS-Eras T24 (espèce
majoritaire) PSS-Eras (espèce minoritaire)