• Aucun résultat trouvé

Analyses mécaniques (DMA)

CHAPITRE III : SYNTHESE ET CARACTERISATION STRUCTURALE DE MEMBRANES

A. Analyses mécaniques (DMA)

Afin de compléter la caractérisation de nos matériaux, nous nous sommes attachés à étudier leur comportement mécanique par DMA. L’Analyse Mécanique Dynamique, ou DMA, consiste à appliquer au matériau une sollicitation mécanique sinusoïdale (contrainte) de faible amplitude afin de rester dans le domaine linéaire de la déformation (c’est-à-dire le domaine élastique). Suivant la nature du matériau, un déphasage δ apparaît entre la sollicitation exercée sur le matériau et la réponse de ce dernier. Le couplage de cette analyse avec une programmation de température permet de connaître l’évolution structurale du matériau en fonction de la température.

Figure 79: Principe du déphasage en DMA

A titre d’exemple, lorsque le déphasage δ est nul le matériau présente alors un comportement purement élastique, à l’inverse lorsque le déphasage est de 90° le matériau est parfaitement visqueux.

L’étude DMA permet d’avoir de nombreuses informations telles que : - le taux de cristallinité des membranes obtenues,

Chapitre III

103 - l’impact du lithium sur les propriétés mécaniques.

Les analyses DMA ont été effectuées à l’aide d’un pendule de torsion en collaboration avec l’équipe MATEIS (INSA de Lyon) par le post-doctorant Cyril Vechambre (figure 80). Brièvement, ce pendule est constitué de bobine d’Helmholtz permettant d’appliquer une sollicitation sinusoïdale à l’échantillon. Typiquement, la gamme d’angle imposée est comprise entre 10-2 et 10-3 rad. Les membranes, découpées sous forme d’éprouvettes (L=15 mm, l=3 mm, e=0.2 mm) sont placées entre deux mors. L’échantillon est refroidi rapidement jusqu’à 90 K (-183 °C), puis soumis à une rampe de 1 K.min-1

avec une fréquence de sollicitation de 1 Hz. Une vitesse de montée aussi faible permet d’avoir une meilleure précision sur les valeurs des températures.

Figure 80: Schéma de montage d'une analyse DMA

Le suivi du module de cisaillement au cours d’une rampe en température permet d’accéder aux modifications structurales ayant lieu au sein du matériau. Ces modifications structurales, appelées relaxations moléculaires, sont reliées aux mouvements des chaînes polymères. Du point de vue macroscopique cela se traduit par des évolutions de comportement plus brutales pour certains domaines de température. Une transition principale (pic en angle de perte), appelée relaxation principale, délimite le passage de l’état vitreux, à basse température, à l’état caoutchoutique, à température intermédiaire. La température au maximum du module de perte (G’’) est définie comme la température de relaxation principale (Tα). Le plateau caoutchoutique prend fin lors de l’écoulement du polymère, c’est-à-dire lorsqu’il entre dans son état fluide.

Chapitre III

104 La lecture de l’état de l’art montre l’importance de la structure cristalline sur la conductivité. Nos analyses DSC ont mis en évidence un taux de cristallinité nul quelque soit le taux de précurseur lithié inséré. Il est intéressant de le vérifier par DMA.

i. Cristallinité des membranes avant incorporation de lithium

La figure 81 représente l’évolution du module de cisaillement de la membrane sans lithium en fonction de la température. On peut y observer un comportement vitreux à basse température (<210 K), la transition de l’état vitreux à l’état caoutchoutique (210-300 K), suivie du plateau caoutchoutique (>300 K). Cette transition vitreux-caoutchoutique est associée à un pic en angle de perte qui correspond à la relaxation principale. Un épaulement sur l’angle de perte est observé au-delà de la transition principale (270 K). Cet épaulement est associé à un phénomène réversible (observé lors d’une série consécutive de montées et descentes en températures) et semble impliquer la présence d’une très faible cristallinité. La DMA met ainsi en évidence une très légère cristallinité, non quantifiable et qui n’était pas détectable par DSC. Cette différence peut être expliquée par la précision de la mesure et la différence de programmation de température.

Figure 81: Analyse DMA de la membrane sans lithium

Le plateau vitreux est de l’ordre du giga pascal, valeur caractéristique des matériaux polymères. La température de la relaxation mécanique principale, obtenue à partir du pic de G’’ (non représenté), est de 233 K (-45 °C). Au-delà de 300 K, un plateau caoutchoutique est obtenu dont la valeur est associée aux caractéristiques du réseau formé (taille des chaînes entre points de réticulation).

Chapitre III

105 Partant de l’hypothèse que toutes les chaînes de PEO sont actives (participent au système), chaque chaîne étant reliée à deux points de réticulation, il est possible de se baser sur la théorie de l’élasticité entropique pour déterminer le module caoutchoutique théorique (Equation 25).

Équation 25

avec : Mc : Masse entre deux siliciums soit 1183g/mol ; R : constante des gaz parfaits 8,314 J mol-1 K-1

; T : Température (K) ; d :densité du PEG 100 à 293 K (1.2g.cm-3)

Dans le cas présent, Gthéorique est égal à 2,47 MPa, ce qui est assez proche de la valeur expérimentale obtenue (2 MPa). Nous avons ainsi confirmation de taux de condensation et de réticulation élevés dans les membranes.

ii. Effet de l’incorporation du lithium

L’effet structural du lithium est illustré par les mesures DMA (figure 82) réalisées sur une membrane de type sulfonate avant et après remplacement des protons acides par des cations lithium (EO/Li-33).

Figure 82: Impact de l'insertion du lithium sur une membrane sulfonate (EO/Li-33) (symboles pleins : module (GPa); symbole vide : Tα (K))

Chapitre III

106 On peut observer qu’avant l’incorporation du lithium dans la membrane de type sulfonate, cette dernière présente une température de relaxation mécanique principale très proche de la membrane sans lithium di-uréthanosil non modifiée. Après l’échange proton / lithium, il est observé une augmentation d’environ 8 °C de la Tα (qui correspond à la Tg). Cette observation peut être expliquée par la complexation du Li+ par les groupements éthers des chaînes PEO, créant ainsi une réticulation physique. A l’image de la DSC, l’augmentation du taux de lithium au sein de la membrane (figure 83) conduit à une augmentation de la Tα. On peut aussi observer dans le domaine caoutchoutique une évolution du module de cisaillement avec l’augmentation du taux de lithium avec tout d’abord une baisse de ce module pour EO/Li=33 puis une augmentation, jusqu’à une valeur proche de celle de la membrane sans lithium initiale (PEO seul) pour EO/Li=11.

Figure 83: Influence de la quantité de précurseur sur les propriétés mécaniques des matériaux (M-SO3Li) (symboles pleins : Module ; symboles vides : Tα (K))

Bien que la différence entre les modules des EO/Li-33 et 11 soit faible, l’augmentation de la valeur du plateau caoutchoutique est à mettre en relation avec une réticulation de type physique des PEO par les cations lithium. Cet effet est encore plus clair avec les membranes de type perfluorosulfonate de lithium (figure 84), où l’augmentation du module caoutchoutique en fonction du taux de lithium est telle que celui-ci dépasse largement la valeur du plateau caoutchoutique de la membrane sans lithium initiale. Cette différence peut s’expliquer par une dissociation plus importante du perfluorosulfonate de lithium. Il est à souligner enfin que les membranes, aussi bien sulfonate que perfluorosulfonate de lithium, sont parfaitement amorphes au-dessus de 300 K (30 °C environ).

Chapitre III

107 Figure 84: Influence de la quantité de précurseur perfluorosulfonate de lithium sur les

propriétés mécaniques des matériaux