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Les projets et les expériences existantes

2.5 La détection directionnelle

2.5.5 Les projets et les expériences existantes

La détection directionnelle étant une stratégie de détection de matière sombre très prometteuse, de nombreux projets de détecteurs directionnels ont vu le jour ces dernières années. Ces der-niers doivent être capables de mesurer simultanément la trace (en 2 ou 3 dimensions) du recul nucléaire ainsi que son énergie. Pour atteindre cet objectif, la plupart des projets existant utilisent des chambres à projection temporelle (TPC) gazeuse à basse pression permettant d’avoir accès à la trace laissée par le recul dans le détecteur. À l’heure actuelle, les projets de détection directionnelle utilisant ce type de technologie sont : DRIFT [112], NEWAGE [113], DM-TPC [114] et MIMAC [115]. Notons qu’un autre projet se basant sur la mesure de trace en deux dimensions en utilisant l’émulsion nucléaire est développé par l’équipe de Naka et al. [116]. On se propose dans cette

dernière section de faire une revue rapide des différents projets12, autre que MIMAC13, utilisant

des TPC gazeuses.

12. Pour plus de détails, voir [101] et [117].

2.5 La détection directionnelle DRIFT

L’expérience DRIFT est le premier détecteur dédié à la détection directionnelle de la matière sombre. Le détecteur DRIFT est installé dans le laboratoire souterrain de Boulby en Angleterre depuis 2001 et est toujours le seul a avoir un volume d’un mètre cube [24]. Il s’agit d’une TPC gazeuse utilisant deux chambre à fils séparées par une cathode centrale commune. La distance de dérive est de 50 cm avec un champ électrique de 624 V/cm réalisé en imposant un potentiel de -30 kV à la cathode et en mettant les deux anodes à la masse [112]. Les deux chambres à fils sont

constituées d’un plan de 512 fils de 20µm d’épaisseur séparés les uns des autres de 2 mm. Ces fils

sont reliés à la masse et constituent l’anode de la chambre à fil. Afin de réaliser l’amplification du signal et la lecture à deux dimensions des traces de recul, l’anode est encadrée par deux plans de fils auxquels on impose un potentiel de 2757 V. Ces derniers jouent le rôle de grille permettant

l’am-plification du signal. Les 512 fils des deux grilles ont une épaisseur de 100µm et sont également

espacés les uns des autres de 2 mm. Ces derniers étant orthogonaux à ceux de l’anode, la lecture simultanée de la charge sur les fils de l’anode et de la grille permet d’obtenir une localisation à deux dimensions du dépôt de charge. La particularité de DRIFT réside dans l’utilisation d’un gaz

de CS2 à 50 mbar qui, étant très électro-négatif, capture les électrons libres issus de l’ionisation

due au passage d’une particule ionisante (recul nucléaire) pour former l’ion CS2 [112]. Ce dernier

dérive, sous l’influence du champ électrique de dérive, vers les chambres à fil et perd son électron supplémentaire à cause du champ électrique intense entre la grille et l’anode. L’électron une fois

arraché de l’ion CS2 va initier une amplification par avalanche et induire un courant sur les fils

de l’anode et de la grille. La mesure de la trace en trois dimensions s’effectue en utilisant le profil temporel de la collection de charges sur les fils de l’anode et des grilles.

NEWAGE

Le détecteur NEWAGE [113] utilise la technologieµ-PIC (Micro Pixel Chamber) [118] afin

d’ef-fectuer une lecture à deux dimensions de la projection des charges collectées sur le plan (X,Y). Le

détecteur NEWAGE-0.3a [113] utilise unµ-PIC d’une surface de 30 cm×30 cm couplé avec un

GEM (Gas Electron Multiplifier) permettant d’effectuer une première amplification du signal par avalanche avant la collection des charges sur les différents pixels. Les pixels sont d’une largeur de

400µm et sont reliés entre eux pour former les 256 voies selon l’axe X et les 256 voies selon l’axe

Y. Le détecteur NEWAGE utilise exclusivement du CF4 à une pression de 200 mbar et parvient à

effectuer une reconstruction en 3 dimensions des événements en utilisant le profil temporel de la collection de charges sur chacune des pistes. En utilisant une longueur de dérive de 30 cm, le

détec-teur NEWAGE présente un volume actif de 0,3 m3. Actuellement, le seuil du détecteur NEWAGE

est de l’ordre de 100 keV [113]. DM-TPC

La collaboration DM-TPC (Dark Matter Time Projection Chamber) [114] développe un détecteur directionnel basé sur un principe de détection très différent des deux projets précédents. Ce dé-tecteur ne cherche pas à mesurer la localisation de la collection de charges en utilisant une anode pixélisée, mais en utilisant une caméra CCD. En effet, suite à l’amplification du nombre d’électrons primaires par avalanche dans l’espace d’amplification, un grand nombre de photons sont émis dans le visible. Ainsi, l’utilisation d’une caméra CCD placée derrière la cathode permet de visualiser la

2.6 Conclusion projection de la trace du recul nucléaire sur le plan (X,Y) de l’anode. L’intérêt d’un tel système

de mesure est que les pixels de la caméra sont très petits (10 µm) permettant ainsi d’obtenir une

bonne définition spatiale. Cependant, la seule mesure de la caméra CCD ne permet pas de mesurer la trace en 3 dimensions. Pour cela, un pré-amplificateur de charges rapide connecté à la grille a été rajouté. Il permet d’obtenir le profil temporel de la collection de charges permettant alors de

retrouver la dimension de la trace selon l’axe de dérive. Le détecteur utilise un gaz de CF4 à 100

mbar et possède un seuil en énergie de 80 keV [114]. La collaboration DM-TPC est actuellement

en phase de construction d’un détecteur de 1 m3qui sera ensuite placé au laboratoire souterrain de

WIPP.

2.6 Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons présenté le principe de la détection directionnelle et avons montré qu’elle se place comme une stratégie complémentaire à la détection directe classique. En effet, en utilisant un noyau cible sensible à l’interaction axiale tel que le Fluor 19, la détection direction-nelle est capable de sonder une autre région de l’espace des paramètres de la matière sombre. De

plus, de par son contenu en spin particulier (hSpi/hSni < 0), le Fluor 19 semble être un noyau

cible privilégié dans le cas d’une matière sombre composée de neutralinos supersymétriques. En-fin, la détection directionnelle devrait être capable, de mettre en évidence une forte anisotropie dans la distribution angulaire des événements et authentifier ainsi la détection de matière sombre galactique. Cette forte signature angulaire a suscité le développement de nombreux projets expéri-mentaux dédiés à la détection directionnelle ainsi que de nombreuses études phénoménologiques tentant d’évaluer le potentiel de découverte de ces futurs détecteurs.

Chapitre 3

La physique du halo galactique

Le modèle standard du halo de matière sombre, correspondant à une sphère isotherme et isotrope, est généralement utilisé comme référence par toutes les expériences de détection directe. Cepen-dant, ce dernier n’est que marginalement favorisé par les simulations à N corps et les observations. Il est donc utile de s’intéresser à différents modèles de halo analytiques, semi-analytiques et is-sus de simulations à N-corps, afin de caractériser au mieux le signal WIMP attendu. Cependant, l’étude du halo de matière sombre est complexe car elle est directement liée à l’histoire de sa for-mation à partir de l’accrétion de différents halos plus petits durant des milliards d’années. Ainsi, la connaissance actuelle de la structure de notre halo va nous permettre de comprendre l’histoire de sa formation.

Dans ce chapitre, on présente tout d’abord les modèles analytiques et semi-analytiques, permettant d’obtenir des solutions stationnaires de la distribution dans l’espace des phases des particules de matière sombre. Ensuite, nous discuterons et détaillerons le principe des simulations à N-corps ainsi que leurs récents résultats et notamment l’existence possible de sous-structures qui pourraient modifier profondément le signal WIMP attendu. Nous finirons par une brève revue des incertitudes astrophysiques principales qui seront considérées lors des études phénoménologiques présentées aux chapitres 4, 5 et 6.

3.1 Modélisation d’un halo de matière sombre

Le halo de matière sombre peut être considéré comme un gaz de particules sans collisions et

auto-gravitant. La fonction de distribution dans l’espace des phases f(~r, ~v, t)de ce gaz, évolue selon

l’équation de Boltzmann sans interaction suivante [119] :

∂f

∂t +~v.∇f− ∇Φ.∂f

∂~v = 0 (3.1)

avec Φle potentiel gravitationnel. Un détecteur terrestre de matière sombre sonde la distribution

f(~r, ~v, t)dans un volume finiV et petit devant la taille du halo. Il est donc sensible à la distribution de vitesses locale des particules de matière sombre déterminée par :

f(~v) = 1 V

Z

3.1 Modélisation d’un halo de matière sombre

oùt0 correspond au temps présent. La distribution des particules de matière sombre dans l’espace

des phases se détermine par la résolution de (3.1) et de l’équation de Poisson qui permet de relier

le potentiel du champ gravitationnel à la distribution de densitéρ(~r)

2φ= 4πGρ(~r) = 4πG

Z

f(~r, ~v, t)d3~v (3.3)

avec Gla constante de gravitation. Il est important de noter que toutes les grandeurs utilisées par

la suite sont définies par unité de masse.

Selon le théorème de Jeans [119], toutes solutions stationnaires de l’équation de Boltzmann sans

collisionf(~r, ~v, t0)peut s’écrire en fonction d’intégrales du mouvementI(~r, ~v), telles que :

E(~r, ~v) = Ψ−1

2v2: l’énergie relative etΨ =−φ+φ0 le potentiel relatif1.

L(~r, ~v) =~r∧~v : le moment angulaire total.

Lz(~r, ~v) = px2+y2vφ: la composante selon l’axe (Oz) du moment angulaire~L.

On peut alors effectuer le changement de variable suivant :

f(~r, ~v, t0)→f(E, ~|L|, Lz) (3.4) Pour un halo de matière sombre de forme sphérique et isotrope la distribution dans l’espace des

phasesf(~r, ~v, t0)ne dépend que de l’intégrale du mouvement correspondant à l’énergie relativeE

[119]. Dans un tel cas, il y a une unique relation entref(E)et la densité de matièreρ(r), qui est

donnée par l’équation d’Eddington [119] :

f(E) = 1 π2√ 8 Z E 0 d2ρ dΨ2 E −Ψ+ 1 E Ψ=0 (3.5) L’équation d’Eddington permet de calculer analytiquement ou numériquement la distribution de vitesses des particules de matière sombre locale. Il faut alors résoudre l’équation de Poisson afin

d’exprimer la distribution de matièreρ(Ψ)en fonction du potentiel de gravitation et intégrer

ana-lytiquement ou numériquement l’équation d’Eddington.