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La détection directe non directionnelle

FIGURE 2.6 – Taux d’événements différentiel en fonction de l’énergie de recul pour des noyaux cibles

de He, Ne, Ar, Ge, Xe et W. Ces spectres ont été calculés en considérant une masse de WIMPmχ = 100

GeV/c2, une section efficace scalaire sur le nucléonσSI= 10−9pb et le modèle standard du halo de matière

sombre. Cette figure est extraite de [82].

2.4 La détection directe non directionnelle

2.4.1 Le signal WIMP attendu

La détection directe non-directionnelle est uniquement sensible à l’énergie de recul suivant la

col-lision élastique avec une particule WIMP et mesure donc le spectre en énergiedR/dEr(2.11).

La figure 2.6 présente le taux d’événements différentieldR/dEr pour différents noyaux cibles :

He, Ne, Ar, Ge, Xe et W dans le cas du modèle standard de halo (voir chapitre 3), en considérant

une masse de particule WIMP mχ = 100 GeV/c2 et une section efficace scalaire sur le nucléon

σSI = 10−9 pb. On constate que les spectres en énergie correspondent approximativement à des

exponentielles décroissantes avec des énergies de recul moyenneshEri ∼ O(1−10)keV. On voit

clairement l’effet du facteur d’amplification de la diffusion cohérente dans le cas de l’interaction

scalaire impliquant queσSI(AX) ∝A2σSIcar àEr = 0keV le taux d’événements augmente avec

la masse du noyau cible. Enfin, on peut aussi remarquer que le taux d’événements WIMP attendu

est extrêmement faible. En effet, en considérant les valeurs de σSIet demχ utilisées pour réaliser

la figure 2.6, on peut évaluer que le taux d’événements est R ∼ O(1) evt/kg/an (événement par

2.4 La détection directe non directionnelle

2.4.2 Le bruit de fond de la détection directe

La recherche du signal de matière sombre devient encore plus difficile lorsque l’on prend en consi-dération le fait que ce dernier peut être noyé sous une contamination d’événements de bruit de fond dont le taux peut être plusieurs ordres de grandeur supérieur. Dans la plage d’énergie d’intérêt pour la détection directe de WIMP (0 à 100 keV), la principale source de bruit de fond vient des interac-tions des photons avec la matière du détecteur. Ces derniers vont induire des reculs électroniques par effet photo-électrique ou Compton et constituer la composante électronique du bruit de fond.

Les particulesαvont également contribuer à la contamination du bruit de fond, mais elles sont

fa-cilement rejetées sur la base d’analyse événement par événement (dû à leur grand dépôt d’énergie) sauf pour des expériences utilisant des liquides sur-chauffés tels que COUPP [63] et Picasso [64]. Ces sources de bruit de fond proviennent généralement de la radioactivité naturelle des matériaux environnants tels que ceux utilisés dans la fabrication du détecteur. Pour limiter la contamination de bruit de fond issue de ces sources, il est important de travailler dans un environnement propre en utilisant des matériaux les moins radioactifs possible et d’utiliser un blindage adéquat. Pour limiter

la pénétration de rayonnementγdans le détecteur, on peut utiliser un blindage à base de plomb, de

cuivre, ou autre matériaux constitués d’éléments de grand numéro atomique. On verra à la section 2.4.3 que ces événements d’origine électronique peuvent être rejetés sur la base d’analyse événe-ment par événeévéne-ment en utilisant les différentes propriétés associées à ce type de recul par rapport aux reculs nucléaires recherchés.

Le bruit de fond neutron est considéré comme le bruit de fond ultime de la détection directe car il est caractérisé par un recul nucléaire tout comme une interaction avec une WIMP. Cette com-posante du bruit de fond peut cependant être considérablement réduite en utilisant un blindage approprié et en travaillant en laboratoire souterrain. En effet, un blindage à base de matière hyper hydrogénée va permettre de modérer les neutrons par collisions successives. Il a alors été montré [83] qu’un blindage de parafine d’une épaisseur de 30 cm et de 50 cm pouvait réduire le flux de neutron entrant dans un détecteur par 3 et 5 ordres de grandeurs respectivement. Ce calcul a été réalisé en considérant que le détecteur est placé dans un laboratoire souterrain ayant les mêmes

ca-ractéristiques que celui de Modane (LSM) ayant un flux de muons cosmiques de4×10−5m2/s.

En effet, le bruit de fond neutron possède deux sources qui sont :

– la radioactivité naturelle de la roche par l’intermédiaire d’éléments lourds tels que l’238U, l’235U

et l’232Th, qui peuvent engendrer des neutrons par fission spontanée et par réaction (α, n).

– la production de neutron par processus photonucléaires. En effet, le passage d’une particule chargées de haute énergie au voisinage d’un noyau peut exciter ce dernier qui va se désexciter

par la suite en émettant un photonγ ou un neutron. La figure 2.7 présente l’évolution du flux

relatif de muons et de neutrons dans différents laboratoire souterrains en fonction de l’épaisseur de roche sous laquelle ils se trouvent. Cette dernière est exprimée en équivalent de mètre d’eau afin de pouvoir comparer tous les laboratoires entre eux. On voit alors que le flux de muons et donc de neutrons diminue fortement avec la profondeur du laboratoire.

2.4.3 Stratégie de détection des différentes expériences actuelles

Les expériences de détection directe de matière sombre possèdent des stratégies de détection diffé-rentes qui vont soit leur permettre de minimiser la contamination de bruit de fond soit de rechercher

2.4 La détection directe non directionnelle

FIGURE 2.7 –Flux normalisés des muons cosmiques (en bleu) et des neutrons induits (en rouge) pour

différents laboratoires souterrains. Cette figure est extraite de [82].

une modulation annuelle du taux d’événements mesuré afin d’effectuer une discrimination statis-tique.

Méthode de discrimination

La première stratégie est communément appelée méthode de discrimination. Elle se base sur le fait que les reculs nucléaires et les reculs électroniques vont déposer leur énergie dans le détecteur de manière différente. En effet, l’énergie d’une particule chargée peut se déposer dans le détec-teur sous la forme de chaleur, d’ionisation et de scintillation. Les quantités relatives de ces formes de dépôt d’énergie étant différentes selon la nature du recul (électronique ou nucléaire), des ex-périences permettant de mesurer simultanément deux types de dépôt d’énergie sont capables de discriminer un événement électron d’un événement nucléaire. Par exemple, les expériences telles que XENON [59] et LUX [84] sont capables de mesurer la quantité d’énergie déposée par un évé-nement dans les voies scintillation et ionisation. Les expériences CDMS [76] et EDELWEISS [85] utilisent la double détection chaleur et ionisation alors que CRESST [86] se base sur la mesure simultanée de la chaleur et de la scintillation. Dans le cas de l’expérience CDMS, le pouvoir de rejet des événements de type électron est de 99,9998% [82] permettant alors de travailler à de très faibles contaminations de bruit de fond. Bien que ces expériences parviennent à réduire considéra-blement la contamination de bruit de fond, elle ne peuvent pas discriminer les événements neutron des événements WIMP car ils correspondent tous les deux à des reculs nucléaires. Ces derniers ne sont alors pas différentiables sur la base d’une double détection comme présentée précédemment. Le seul moyen de séparer alors ces deux populations d’événements consiste à utiliser une

dis-2.4 La détection directe non directionnelle crimination statistique qui peut se faire uniquement dans le cas où le nombre d’événements est suffisamment important (modulation annuelle) ou dans le cas où les distributions d’événements WIMP et neutron sont suffisamment différentes (détection directionnelle, voir section 2.5).

La modulation annuelle

La modulation annuelle vient du fait que la Terre tourne autour du Soleil selon un axe possédant

une orientation légèrement différente, d’environ 30, du vecteur vitesse du système solaire dans le

référentiel galactique. Cela induit alors une modulation du flux de WIMP entrant dans un détecteur terrestre et donc une modulation du taux d’événements WIMP. Le taux d’événements est maximal

en Juin et minimal en Décembre. Cependant, cette modulation annuelle est d’environ∼7% dans le

cas d’un modèle de halo standard (voir chapitre 3) [87]. La collaboration DAMA a reporté une

si-gnificance de modulation du taux d’événements mesurés de 8,9σ[58] qui est largement en faveur

d’une détection de matière sombre galactique. De plus, récemment la collaboration CoGent [88] a également signalé la présence d’une modulation annuelle de leur taux d’événements mesurés. Dans le cas de CoGent, la modulation observée est incompatible avec un modèle de halo stan-dard [89, 90] car cette dernière ne concerne que les événements de haute énergie 1,6 - 3,0 keV (ionisation). De plus, la collaboration CDMS vient d’établir une limite sur la modulation annuelle des événements de basse énergie [91]. Ce résultat est incompatible à plus de 98% de niveau de confiance avec l’hypothèse d’une modulation annuelle observée par CoGent induite par des évé-nements WIMP [91]. Enfin, en effectuant une analyse “bas seuil”, la collaboration CDMS a égale-ment exclue la région favorisée par les résultats obtenus par la collaboration CoGent [88].

Dans le cas de DAMA, la modulation observée correspond exactement à celle attendue, en terme de phase, d’amplitude et de période, dans le cas d’une détection de matière sombre [58]. Cepen-dant, la région favorisée par les résultats de DAMA est largement exclue par les limites actuelles des autres expériences actuelles. Une pléthore de modèle de physique des particules ont tenté de réconcilier les résultats de DAMA avec ceux des autres expériences (voir [92] pour une revue dé-taillée).

Récemment, des études ont été conduites afin de vérifier si la modulation annuelle du bruit de fond ne pouvait pas être due à une modulation du bruit de fond [93, 94]. De nombreuses expériences, dé-diées à la mesure d’interaction de neutrino ont reporté une modulation annuelle du taux de muons [95, 96, 97]. En effet, ces derniers sont issus de la désintégration des pions et kaons produits dans la haute atmosphère. Il y a alors compétition entre interaction des pions et kaons avec les particules de l’atmosphère et leur désintégration. La densité de l’air étant inversement proportionnelle à la température, on s’attend à observer un flux maximal de muons en été et minimal en hiver. De prime abord, la modulation du flux de muons pénétrant dans les laboratoires souterrains de l’hémisphère Nord est en phase avec la modulation attendue du signal de matière sombre. Deux récentes études [93] et [94] parviennent à deux conclusions contradictoires concernant la corrélation du flux de muons avec la modulation observée par DAMA. De plus, les travaux publiés dans [94] exclus éga-lement le fait que la modulation observée par DAMA puisse être due à des activations d’isotopes

de longue durée de vie tels que le65Zn provenant de l’activation du cuivre par un muon cosmique.

La conclusion majeure de cette étude est que sans l’accès aux données de DAMA, il est impossible de pouvoir effectuer des tests supplémentaires pouvant infirmer ou non l’hypothèse d’une

détec-2.5 La détection directionnelle