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3.2 Les complexes thiols-ions m´etalliques d 10

3.2.3 Les mod`eles de prot´eine MerR, site HgS 3

La biochimie du mercure est bas´ee sur sa capacit´e `a se lier fortement aux prot´eines riches en soufre. Sa forte toxicit´e est donc directement li´ee `a sa forte affinit´e pour ces prot´eines, d’autant plus que la liaison Hg-thiolate est thermodynamiquement tr`es stable. Le vivant a donc ´elabor´e un moyen, bas´e sur l’affinit´e mercure/soufre, en r´eponse `a une intoxication ´eventuelle. Il va complexer, s´equestrer, le mercure par des prot´eines riches en cyst´eines. Par exemple, la r´esistance bact´erienne envers le mercure est contrˆol´ee par la prot´eine MerR. La prot´eine MerR est une prot´eine m´etallor´egulatrice qui intervient en r´eponse `a une intoxication au mercure. Cette prot´eine MerR a fait l’objet d’un grand nombre d’´etudes afin de comprendre la g´eom´etrie du mercure au sein du site actif de cette prot´eine.

• Les travaux de O’Halloran et coll., sur des mod`eles de MerR ont permis de mettre en ´evidence un environnement trigonal du mercure au sein de cette prot´eine [186]. Les ´etudes de spectroscopie UV-Visible [186] montrent clairement l’apparition de bandes `a transfert

de charge qui n’existent pas dans les sites de type HgS4 (un environnement t´etra´edrique

du mercure). La comparaison des r´esultats obtenus par RMN du 199Hg [187] avec des

d´eplacements chimiques de mod`eles de mercure-thiolate poss´edant une g´eom´etrie trigonale connue, confirme un environnement trigonal du mercure(II) (Table 16).

Complexes de mercure UV, bande LMCT δ ppm, RMN du199Hg [Et4N][Hg(SBut)3] 235 nm, ǫ = 24 000 M−1 cm−1 260 nm, ǫ = 17 000 M−1 cm−1 Hg(SEt)2 228 nm,ǫ = 4700 M−1 cm−1 - 985 ppm 282 nm, ǫ = 740 M−1 cm−1 Hg(SPri) 2 228 nm, ǫ = 3400 M−1 cm−1 - 816 ppm 262 nm, ǫ = 650 M−1 cm−1 Hg-MerR 240 nm, ǫ = 16 620 M−1 cm−1 -106/-109 ppm 260 nm, ǫ = 11 150 M−1 cm−1 290 nm, ǫ = 4120 M−1 cm−1

Table 16 – Syst`eme de mercure HgS2 et HgS3 [186]

• Pecoraro et coll. ont mis au point des syst`emes peptidiques capables de favoriser en solution aqueuse le mode de coordination trigonale du mercure connu pour la prot´eine

MerR. Pour cela, ils utilisent un peptide appel´e TRI de s´equence G(LKALEEK)4G qui

forment des h´elices α qui s’enroulent entre elles en triple h´elice (helical coiled coil pep- tides (Fig 35). Dans cette s´equence, une leucine a ´et´e remplac´ee par une cyst´eine ou une p´enicillamine en position 9, 12 ou 16 afin d’obtenir des triples h´elices contenant trois don- neurs soufr´es pour coordonner le mercure [188].

Figure 35 – Repr´esentation de l’enroulement des h´elices des trois peptides TRIL16X o`u

la L-p´enicillamine a substitu´e la leucine en position 16 [189]

Les mesures RMN du 199Hg et de spectroscopie montrent que ces triples h´elices pepti-

diques, encapsulent le mercure et le cadmium dans une g´eom´etrie trigonale. Notons que la stabilit´e de cette triple h´elice favorise cette g´eom´etrie. Les bandes LMCT S− → M2+ sont

caract´eristiques de cette g´eom´etrie. En effet, la bande LMCT `a 247 nm est particuli`ere au syst`eme HgS3 et la bande LMCT `a 235 nm est sp´ecifique au syst`eme CdS3. Cependant, des

´etudes par dosage pH-m´etrique mettent en ´evidence la formation, `a bas pH, du complexe

formation du complexe HgS3 d´epend donc du pKa de la troisi`eme fonction thiol. Plus ce

pKa est bas, plus le complexe HgS3 est favoris´e [190] [191]. L’´equilibre, de ces deux formes,

s’´ecrit selon l’´equation 9. Il a ´et´e montr´e r´ecemment que la d´eprotonation de la troisi`eme cyst´eine pour former le complexe HgS3 avait lieu dans la triple h´elice pr´eform´ee (HgS2SH)

comme repr´esent´ee sur la Figure 36 [192]. La pr´esence de cette troisi`eme cyst´eine libre

pr`es du mercure influence la valeur du d´eplacement chimique du syst`eme HgS2 en RMN

du 199Hg (-908 ppm au lieu de -844 ppm) [192].

HgII(RS)2+ RSH ⇋ HgII(RS)−3 + H+ (9)

Le cadmium, quant `a lui, forme essentiellement le complexe tricoordin´e selon l’´equation 10 CdII + (RS)3−3 → CdII(RS)−

3 (10)

Figure 36 – Repr´esentation de la coordination du mercure par la famille TRI [192]

Les donn´ees spectroscopiques obtenues avec les diff´erents peptides TRI sont r´epertori´ees dans la table 17. Ces donn´ees nous servirons de r´ef´erence pour caract´eriser un syst`eme HgS3 de g´eom´etrie trigonale par rapport `a un syst`eme HgS4 ou HgS2.

Complexes UV, Bande LMCT et Bande CD δ ppm, RMN199Hg ǫ en M−1 cm−1 Hg-(TRIL16C)2− 240 nm, ǫ = 2700 -834 Hg-(TRIL16C)3− 247 nm, ǫ = 19 200 248 (+), 268(+), 300(-) -179, pH = 8.0 265 nm, ǫ = 11 900 295 nm, ǫ = 5800 Hg-(TRIL12C)3− 230 nm,ǫ = 21 300 247 nm, ǫ = 15 000 297 nm, ǫ = 5500 Hg-MerRa 240 nm, ǫ = 16 620 -106/-109 ppm 260 nm, ǫ = 11 150 290 nm, ǫ = 4120 Ref,(CdS3−) 190-260 nm, 570-660 ǫ = 15 000 `a 26 000 Cd(TRIL16C)3− 232 nm, ǫ = 22 600 (+) 238, (-) 274 625 Cd(TRIL12C)3− 231 nm, ǫ = 20 600 (+) 239, (-) 260 619

Table17 – Complexes TRIL16C et TRIL12C avec les m´etaux Cd et Hg [192] [193],a: [186]

L’environnement trigonal du mercure et du cadmium n’est pas tr`es commun, mais pas impossible `a obtenir. En effet, la d´etermination par diffraction de rayons X de structures de type HgS3 ou CdS3 a ´et´e r´ealis´ee pour des compos´es comportant des thiolates alipha-

tiques.

• Rodolfo et coll. [194] ont ´elabor´e des complexes mononucl´eaires de mercure et de cadmium de g´eom´etrie trigonale. Les complexes [Ph4P][Cd(S-2,4,6-i-Pr3C6H2)3] et [(n-

Bu)4N][Cd(S-2,4,6-i-Pr3C6H2)3] pr´esentent un atome de cadmium de g´eom´etrie trigonale

(Fig 37). Le premier syst`eme a une sym´etrie de type C3h o`u chaque angle S-Cd-S vaut

120◦. Le changement de contre ion, dans le deuxi`eme syst`eme, entraˆıne une distortion de

la sym´etrie de 120◦. Les angles S-Cd-S d´evient de la valeur de 120.

Les complexes [(n-Pr)4N][Hg(S-2,4,6-i-Pr3C6H2)3] et [Ph4P][Hg(S-2,4,6-i-Pr3C6H2)3] mo-

nonucl´eaires o`u le mercure poss`ede un environnement trigonal, pr´esentent une g´eom´etrie de type Y (Fig 37). Les angles S-Hg-S sont diff´erents et ont subi une distortion. Les dis- tances Hg-S montrent, elles aussi, une distortion.

Cette ´etude souligne que la distance M-S est un bon indicateur du nombre de coordina-

tions. En moyenne, les distances Cd-S et Hg-S des syst`emes [Cd(SR)3] et [Hg(SR)3] sont

tr`es proches. Dans les syst`emes [M(SR)4], les distances Hg-S et Cd-S sont, elles aussi,

Figure 37 – Structure cristallographique de CdS3 (`a gauche) et HgS3 (`a droite) avec le sel P4Ph [194]