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Les mesures de campagne et les nouveaux r´eseaux

2.3 L’acquisition de nouvelles donn´ees : le travail de terrain

2.3.1 Les mesures de campagne et les nouveaux r´eseaux

Au cours de ces trois ann´ees de th`ese, j’ai eu l’occasion de participer `a l’organisation et `

a la r´ealisation de 6 missions de terrain sur les r´eseaux du LiA “Montessus de Ballore” et suis rest´ee plus de 5 mois sur place. Ces missions ´etaient g´en´eralement destin´ees `a remesurer ou r´enover des r´eseaux de marqueurs de campagnes pr´eexistants et `a agrandir ou installer des r´eseaux enti`erement nouveaux dans les zones non-instrument´ees du Chili (l’extension des r´eseaux r´ealis´ee depuis 2009 est repr´esent´ee sur la figure 2.6). De nouvelles vitesses intersismiques ont ainsi pu ˆetre obtenues et analys´ees en terme de couplage intersismique (voir section3).

2.3.1.1 Technique de mesure

Les r´eseaux d´evelopp´es au Chili avant les ann´ees 2000 ´etaient principalement constitu´es de marqueurs en inox scell´es dans l’affleurement dont la position exacte ´etait mesur´ee par tr´epied. Dans ce dispositif de mesure, pr´esent´e en figure2.7, l’antenne GPS est plac´ee horizontalement `a l’aplomb du marqueur `a l’aide d’une embase solidaire d’un tr´epied. Elle est reli´ee au r´ecepteur GPS situ´e dans une caisse de plastique pour le prot´eger des intemp´eries. Celui-ci est aliment´e

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Figure2.6: R´eseau franco-chilien de campagne pr´eexistant (points noirs) et nouveaux r´eseaux install´es au cours de la th`ese (points rouges). Les points bleus sont des marqueurs install´es en 2012 sur lesquels aucune vitesse intersismique n’a encore ´et´e calcul´ee. Les points jaunes marquent les nouvelles stations permanentes install´ees dans la r´egion de Maule suite au s´eisme du 27 f´evrier 2010.

Figure2.7: Photographies de deux types d’installations de mesure de la position d’un marqueur : cas d’une mesure par tr´epied (haut) ou par centrage forc´e (bas).

pendant la dur´ee de la mesure par une batterie. Les premi`eres campagnes de mesure men´ees au Chili dans les ann´ees 90 par les ´equipes de l’IPGP (notamment JC Ruegg) disposaient d’une poign´ee de r´ecepteurs seulement, assez lourds et peu autonomes car les batteries de l’´epoque ne pouvaient les alimenter que pendant quelques heures. Il s’agissait alors de mesurer la position du point pendant des sessions courtes de quelques heures au moment o`u un maximum de satellites de la constellation GPS ´etaient visibles, ce qui ´etait tr`es contraignant et affectait la pr´ecision des mesures. Aujourd’hui, les r´ecepteurs sont bien plus maniables et les batteries fournissent une autonomie de plusieurs jours, ce qui permet de mesurer la position du marqueur par des sessions de 24 h continues sur 4 `a 5 jours. Ces mesures permettent de s’affranchir d’une partie des sources d’erreurs qui se compensent `a l’´echelle d’une journ´ee (effets m´et´eos, centre de phase de l’antenne etc). La mesure par tr´epied permet ´egalement de limiter l’effet des multitrajets sur la d´etermination de la position. En effet, `a chaque mesure, la hauteur de l’antenne par rapport au marqueur sera diff´erente a priori et les multitrajets seront donc diff´erents d’une mesure `a l’autre. Ils s’annuleront donc th´eoriquement sur une longue s´erie de mesures. N´eanmoins, cette technique de mesure est contraignante. Premi`erement, le dispositif de mesure est tr`es vuln´erable car il est visible de loin et peut susciter de la curiosit´e chez des promeneurs ou les habitants de la r´egion. Deuxi`emement, il est imp´eratif que le tr´epied ne bouge pas ni ne se d´ecentre au cours de la mesure pour ˆetre certain de bien mesurer la position exacte du marqueur. Or le vent, les curieux ou les animaux peuvent faire facilement bouger l’ensemble du dispositif. Enfin, la mesure manuelle de la hauteur d’antenne introduit une source d’erreur suppl´ementaire sur la d´etermination de la position verticale.

2.3. LE TRAVAIL DE TERRAIN 47 La mesure par “centrage forc´e” pallie `a un certain nombre de ces inconv´enients (figure 2.7). Son principe est simple : au lieu de graver une croix sur l’affleurement ou d’y sceller un clou g´eod´esique comme dans la technique de mesure par tr´epied, on scelle dans la roche un marqueur muni d’un pas de vis femelle rigoureusement vertical. Il suffit ensuite de visser un adaptateur dont la hauteur est connue dans ce pas-de-vis et d’y visser ensuite l’antenne. Celle-ci est donc dispos´ee exactement `a l’horizontale et `a une hauteur fixe du marqueur. Elle est ´egalement peu visible car assez proche du sol ce qui permet d’installer ce dispositif de mesure en bord de route par exemple. L’effet des multitrajets est cependant d´ecupl´e car la hauteur d’antenne est inchang´ee d’une campagne `a l’autre. Par souci de moindre visibilit´e et de l´eg`eret´e de l’installation, tous les nouveaux marqueurs que nous avons install´es au cours de cette th`ese sont des marqueurs de mesure par centrage forc´e. Entre les campagnes, l’´ecrou est prot´eg´e par un cache en plastique et est g´en´eralement retrouv´e intact lors de la mesure suivante.

La mesure des r´eseaux se fait en g´en´eral sur des p´eriodes courtes de moins d’un mois. Il est essentiel de mesurer simultan´ement un certain nombre de points du r´eseau pour stabiliser la proc´edure de traitement en multipliant les lignes de base. On adopte donc des plannings de mesure qui permettent un roulement des r´ecepteurs sur l’ensemble du r´eseau.

2.3.1.2 L’extension du r´eseau du petit Nord

Le r´eseau d’Ovalle-La Serena a ´et´e largement ´etendu vers le Nord `a partir de 2008 pour acqu´erir de nouvelles vitesses intersismiques et mieux d´efinir les limites de la zone partiellement coupl´ee. De d´ecembre 2008 `a d´ecembre 2009, le r´eseau s’est ainsi enrichi de 15 nouveaux sites localis´es dans la baie de La Serena, autour de la p´eninsule de Choros et jusqu’aux villes de Huasco et de Vallenar (∼28.5S, figure 2.8). Plusieurs marqueurs pr´eexistants install´es par les ´equipes CAP et SAGA ont ´et´e int´egr´es dans les mesures du r´eseau, notamment dans la cordill`ere. Au Nord de 28S, le d´esert de l’Atacama se fait nettement plus aride et les affleurements corrects et accessibles se font plus rares, `a l’image des lieux habit´es. Cette r´egion est ´egalement difficile d’acc`es car il faut pr`es de 10h de route depuis Santiago pour atteindre Vallenar, et 7h depuis Antofagasta environ. L’acheminement du mat´eriel est donc plus compliqu´e. En juin 2010, quelques mois apr`es le s´eisme de Maule qui toucha durement la partie la plus peupl´ee du Chili, un r´eseau enti`erement nouveau est pourtant install´e dans cette r´egion jusqu’au port de Taltal (∼25S). Il est constitu´e de 22 nouveaux marqueurs et s’articule autour de trois grands profils perpendiculaires `a la fosse (les profils de Totoral, Copiap´o et Cha˜naral, figure2.8) et d’un profil cˆotier. Les points les plus ´eloign´es de la fosse sont situ´e `a ∼150 km de la cˆote, dans le contreforts des Andes et sont assez difficiles d’acc`es. La mise en place de marqueurs au del`a de ces points n´ecessiterait un investissement en temps et en argent bien sup´erieur au gain scientifique dans le cadre de la probl´ematique qui nous int´eresse ici qui est celle du couplage intersismique. Le r´eseau est donc assez dense `a la cˆote et dans les 200 premiers kilom`etres (un point tous les 25 km `a la cˆote, puis tous les 50 km dans l’int´erieur des terres).

Ce nouveau r´eseau a ´et´e mesur´e enti`erement `a trois reprises en juin 2010, 2011 et 2012. Il continue `a ˆetre densifi´e avec l’installation de deux nouveaux points cˆotiers en 2011 et l’installation r´ecente d’un profil de 6 points `a la latitude de Taltal sur lequel les vitesses intersismiques ne sont pas encore connues (figure2.8). L’effort instrumental men´e dans cette r´egion depuis 2008 permet d’apporter des connaissances enti`erement nouvelles sur la d´eformation dans une des zones les moins instrument´ees du Chili.

Figure2.8:Etat actuel du r´eseau c- et s-GPS dans la r´egion du petit Nord (ou Centre-Nord Chili). Le nom des nouveaux profils est indiqu´e dans des rectangles rouges.

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Figure2.9:Etat actuel du r´eseau c- et s-GPS dans le Grand Nord. Le nom des anciens et des nouveaux profils est indiqu´e dans des rectangles respectivement noirs et rouges.

2.3.1.3 La densification du r´eseau du Grand Nord

Le r´eseau du Grand Nord est un des premiers r´eseaux de mesures dedi´e `a l’´etude de la subduction mis en place au Chili dans les ann´ees 90. La base de ce r´eseau est constitu´ee d’un profil cˆotier de 9 points et de quatre profils perpendiculaires `a la fosse : les profils d’Arica, d’Iquique, de Tocopilla et de Paranal (figure2.9). Le profil d’Iquique est particuli`erement dense (17 points), mais peu de vitesses intersismiques ont ´et´e publi´ees sur les points le constituant, du fait notamment des difficult´es techniques de mesure et du faible nombre de campagnes r´ealis´ees avant le s´eisme de Tarapac´a qui a affect´e la r´egion en 2005 [Chlieh et al.,2004]. Ces profils sont espac´es de pr`es de 200 km et sont insuffisamment denses dans la r´egion cˆoti`ere pour contraindre pr´ecis´ement les variations du couplage intersismique [Chlieh et al.,2011].

En juin 2010, nous avons donc d´ecid´e de densifier ce r´eseau et d’installer de nouveaux profils interm´ediaires aux latitudes de Camarones (19.2S), Pisagua (19.5S) et Punta Patache (20.7S). 23 nouveaux points `a centrage forc´e et parfois situ´es sur des monuments en b´eton construits dans le d´esert, viennent donc s’ajouter aux 43 anciens points du r´eseau de mesure par tr´epied (figures 2.6 et 2.9). Certains marqueurs, install´es il y a pr`es de 20 ans, ´etaient endommag´es ou introuvables et ont du ˆetre remplac´es par la mesure d’un des points auxilliaires, ou dans le pire des cas par l’installation d’un marqueur enti`erement nouveau. De nombreux probl`emes de rattachements ont du ˆetre r´esolus afin d’´etablir une s´erie temporelle fiable sur ces points. 17 marqueurs des ´equipes CAP et SAGA ont ´et´e int´egr´es dans le nouveau r´eseau, notamment dans la r´egion de la p´eninsule de Mejillones et du profil de Paranal.

L’ensemble du r´eseau a ´et´e mesur´e en juin 2010 et juin 2012, et la partie Sud du r´eseau (au Sud de Tocopilla, 22S) a ´et´e ´egalement mesur´ee en juin 2011. De nouvelles vitesses intersis-miques sont donc d’ores et d´ej`a disponibles sur ce nouveau r´eseau et ont vocation `a ˆetre affin´ees lors de prochaines campagnes de mesure.