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II. Marqueurs moléculaires : à chacun son histoire 85

1.   Les marqueurs à transmission biparentale 86

L’ADNnu étant diploïde, les marqueurs analysés sur ce génome (sauf pour la région NRY) présenteront deux allèles possibles, l’un hérité du père et l’autre de la mère. Pour un locus donné, les individus seront soit homozygotes, si les deux allèles sont identiques, soit hétérozygotes, si les allèles hérités de chacun des parents sont différents.

Pour cette étude, les marqueurs à transmission bi-parentale seront essentiellement étudiés dans le but de mieux comprendre les pratiques funéraires de certaines des populations anciennes analysées.

1.1. Détermination du sexe des individus : le gène de l’amélogénine.

La diagnose sexuelle constitue une étape indispensable à toute étude des pratiques funéraires. Cependant, les méthodes d’anthropologie classique ne permettent pas toujours de réaliser cette diagnose sexuelle. En effet, la méthode la plus fiable pour les individus matures étant basée sur le dimorphisme des os coxaux (Bruzek, 2002), un squelette incomplet ou des os

fragmentés empêcheront toute détermination du sexe. De plus, il n’existe pas de méthode fiable pour la détermination du sexe des immatures, privant les anthropologues d’informations pour toute une partie des populations anciennes. La détermination du sexe moléculaire par l’analyse d’un marqueur génétique est donc la seule méthode fiable permettant de déterminer le sexe des individus anciens, matures et immatures.

La détermination du sexe génétique, ou sexe moléculaire, se fait grâce à l’analyse du gène de l’amélogénine situé sur les chromosomes sexuels. Ce gène code pour des protéines retrouvées dans l’émail de la dent. La présence d’une délétion de 6 paires de bases dans une région du premier intron de ce gène permet de différencier l’allèle porté par le chromosome X de celui porté par le chromosome Y (Mannucci et al., 1994; Sullivan et al., 1993). Un individu féminin présentera un profil homozygote composé d’un produit d’amplification à la taille de 106 paires de bases alors qu’un individu masculin présentera un profil hétérozygote composé de deux produits d’amplification aux tailles de 106 et 112 paires de bases.

Aujourd’hui, de nombreux kits commerciaux d’amplification PCR permettent d’amplifier simultanément des marqueurs nucléaires ainsi que ce gène de l’amélogénine. Nous avons choisi d’adopter cette stratégie qui permet d’obtenir plusieurs informations à partir d’une seule réaction d’amplification par PCR.

1.2. Détermination des profils génétiques : analyse de marqueurs autosomaux.

Le génotypage d’un ensemble de marqueurs autosomaux (chaque locus présentant une combinaison de deux allèles) permettra de déterminer le profil génétique d’un individu. L’établissement de ce profil génétique a deux objectifs principaux très différents : (1) la comparaison deux à deux de l’ensemble des profils établis permettra d’éliminer les possibles contaminations et ainsi sera un critère supplémentaire permettant d’authentifier les résultats ; (2) les profils génétiques sont les plus informatifs pour les problématiques de détermination de liens de parenté.

L’étude des relations de parenté au sein d’ensembles funéraires est un aspect important pour comprendre les pratiques funéraires de populations anciennes. Cependant, les méthodes

88 Deuxième partie : Matériel et méthodes.

classiques fondées sur l’étude de caractères discrets s’avèrent peu fiables. Bien souvent, les liens de parenté ne sont donc que supposés. Dans ce cadre, la paléogénétique possède un certain nombre d’outils (dont certains sont utilisés en criminalistique) permettant de déterminer les liens unissant les échantillons anciens de manière tout à fait fiable et fine. En effet, grâce une combinaison de marqueurs autosomaux à transmission bi-parentale, permettant de déterminer les profils génétiques et de marqueurs haplotypiques à transmission uni-parentale (région hypervariable de l’ADNmt et portion non recombinante du chromosome Y) permettant d’étudier les lignées maternelles et paternelles (Figure 13), les liens de parenté (proches ou plus éloignés), mais aussi le mode de recrutement funéraire ainsi que les schémas maritaux des populations anciennes pourront être abordés.

Figure 13 : Illustration de la transmission des marqueurs uni- et bi-parentaux.

Parmi les marqueurs à transmission bi-parentale, les STR autosomaux (STRa), dont le nombre de répétition est très variable en fonction des individus, sont des marqueurs de choix pour ces problématiques. La combinaison d’un certain nombre de ces marqueurs possède le pouvoir discriminant le plus élevé lorsqu’il s’agit d’étudier les liens génétiques unissant deux individus.

Aujourd’hui, il existe de très nombreux kits commerciaux, dédiés pour la plupart à des applications dans le domaine de la criminalistique, qui permettent l’amplification simultanée d’un certain nombre de STRa (entre 9 et 16 suivant les kits utilisés). De plus, il existe de nombreuses bases de données de références publiques compilant les fréquences alléliques des marqueurs analysés dans ces kits, dans différentes populations contemporaines, ce qui permet par la suite de réaliser des comparaisons entre populations anciennes et contemporaines pour étudier l’évolution des populations, comme celle des marqueurs. Nous avons donc choisi d’adapter ces kits à nos applications, puisqu’ils présentent plusieurs avantages essentiels pour les études d’ADNa.

Même si les STR autosomaux apparaissent aujourd’hui comme des marqueurs indispensables pour l’établissement des profils génétiques, ils peuvent présenter quelques inconvénients, notamment lorsque l’on travaille à partir d’extraits d’ADN très fortement dégradé. En effet, certains des marqueurs analysés sont amplifiés au sein de fragments relativement grands (la taille des fragments pouvant aller jusqu’à 400 paires de bases) et peuvent donc s’avérer difficilement amplifiables. Pour certains échantillons anciens fortement dégradés et fragmentés, les profils obtenus pourront être partiels, conduisant à une perte d’information. Pour palier à ce problème, l’utilisation de miniSTR est préconisée. Ces miniSTR sont amplifiables au sein de fragments plus courts et peuvent donc être intéressant pour compléter les profils obtenus avec les STRa.

Ces dernières années, d’autres marqueurs ont été utilisés pour répondre à ces problématiques d’identification individuelle et de parenté. Ainsi, l’intérêt pour les SNP ou les petites insertions délétions (indels) particulièrement adaptés à l’analyse de l’ADN dégradé car analysables au sein de fragments très courts, est grandissant. Si les SNP présentent des caractéristiques très intéressantes pour l’analyse d’ADN dégradé il apparaît que le nombre de marqueurs permettant d’atteindre un degré suffisant de discrimination est relativement élevé (au minimum 52 pour égaler le niveau de discrimination des STR) (Sanchez et al., 2006). Dans le but de trouver toujours plus de marqueurs intéressants pour les applications d’ADNa, nous avons également testé l’intérêt de l’utilisation d’indels pour l’identification individuelle d’individus humains anciens, et éventuellement pour la détermination de liens de parenté. Ainsi, nous avons utilisé un kit d’amplification nouvellement commercialisé, permettant d’amplifier simultannément 30 indels, pour analyser nos échantillons anciens.

90 Deuxième partie : Matériel et méthodes.