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Une approche très prometteuse pour le développement d’inhibiteurs d’IPP consiste en la conception de molécules capables de mimer des structures secondaires de protéines.8-10

En effet, en se basant sur la nature du domaine d’interaction protéique, les structures secondaires de protéines jouent un rôle primordial dans la reconnaissance moléculaire et l’interaction entre les protéines. Avec une grande capacité à mimer des structures secondaires de protéines, les peptides représentent donc un prototype moléculaire de choix pour moduler les IPP.38, 39 Les peptides sont alors d’excellents outils pour étudier ou

moduler les IPP in vitro. Comme agents thérapeutiques, ils démontrent une forte activité biologique et une importante sélectivité. Ils possèdent également une faible toxicité, s’accumulent peu dans les tissus et présentent peu d’interaction médicament- médicament.40 De surcroît, avec un nombre important d’acides aminés disponibles, ils

offrent une immense diversité fonctionnelle ainsi qu’une grande diversité structurale étant donné les différentes structures secondaires qu’ils peuvent adopter.

Par contre, les peptides linéaires sont généralement vulnérables face aux protéases ce qui leur confère une faible stabilité in vivo et donc une faible demi-vie. Ils présentent également une faible biodisponibilité orale dû à leur hydrophilicité, leur poids moléculaire élevé et leur susceptibilité à l’inactivation enzymatique dans le tractus gastro-intestinal.41

Effectivement, les peptides se heurtent généralement à la membrane cellulaire, étant incapables de la traverser pour accéder à la cellule. Puisque la majorité des IPP se produisent à l’intérieur des cellules, il y a un besoin manifeste de molécules pouvant mimer les structures secondaires de protéines tout en étant capable de pénétrer à l’intérieur des cellules et ayant une stabilité in vivo améliorée.

Figure 8. Le peptidomimétisme pour le développement d’inhibiteurs d’IPP.

Agent thérapeutique

Peptides

Peptidomimétisme

Développement d’inhibiteurs d’IPP

• Dégradation protéolytique • Faible pénétration cellulaire

• Conservation de la diversité fonctionnelle et

conformationelle des peptides

• Augmentation de la stabilité métabolique • Meilleure pénétration cellulaire

Le peptidomimétisme permet de contourner ce problème jusqu’à un certain niveau. Une molécule peptidomimétique est une molécule dont la structure de base est non peptidique, mais dont les motifs structuraux reproduisent les caractéristiques spatiales (hélice α, feuillet , tournants, épingle à cheveux, etc.) et fonctionnelles des structures peptidiques.42-45 Ces molécules permettent donc de conserver les caractéristiques

avantageuses reliées aux peptides tout en éliminant certains désavantages. Effectivement, elles ne sont pas reconnues ni dégradées par les protéases, ce qui augmente significativement leur stabilité et leur biodisponibilité. Par exemple, la morphine (5), un alcaloïde opiacé, et ses dérivés représente un exemple classique de composés peptidomimétiques. La morphine et ses dérivés comme la phénazocine (6) reproduisent l’effet biologique des endorphines, encéphalines et dynorphines sur les récepteurs opioïdes (Figure 9).46

Figure 9. Comparaison des structures de la morphine (5), phénazocine (6) et Met-encéphaline.

Plusieurs stratégies ont été mises au point pour développer des molécules peptidomimétiques dont : 1) l’utilisation d’acides aminés modifiés (acides aminés D, acides aminés cycliques, C-alkylés, Cβ-alkylés ou N-alkylés); 2) la restriction conformationnelle

(cyclisation, résidu rigidifiant); 3) l’imitation du squelette peptidique par des structures moléculaires organiques.47 Le but ultime de ces stratégies est de : 1) augmenter la

stabilité en réduisant la reconnaissance moléculaire par les protéases; 2) accroître l’affinité envers la cible en diminuant les coûts entropique de liaison via une rigidification du squelette et 3) améliorer la sélectivité via une restriction conformationnelle plus grande pour exposer les groupements fonctionnels essentiels de manière optimale.

1.3.1 Prototypes moléculaires mimant le squelette peptidique

La mise au point de molécules capables de mimer des structures secondaires de protéines a été largement utiliser dans le développement d’agents thérapeutiques. Ces

recherches ont mené au développement d’un très grand nombre de prototypes moléculaires mimant des structures en hélice- et feuillet-β en plus d’une grande variété de coudes et tournants qui sont des composantes essentielles au sein des protéines. Plusieurs prototypes moléculaires («scaffolds») peptidomimétiques existent afin de développer des composés tête-de-série comme les benzodiazépines, qui selon la position et la nature des substituants, peuvent adopter des mimétiques d’hélice α ou de tournants.

48-50

Figure 10. Exemples de structures moléculaires mimant une conformation en hélice-.

L’hélice- est la structure secondaire la plus commune et représente environ la moitié des structures polypeptidiques retrouvées dans les protéines. Les premiers prototypes moléculaires mimant les hélice- proposés par Hamilton et al. étaient basés sur des structures terphényle (7) et terpyridyle (8) (Figure 10).51, 52 Par la suite, Boger et al. ont

décrit des structures oligoamides à base d’acide 3-alkoxy-4-aminobenzoïque (9) ayant une longueur d’environ 3 résidus (Figure 10).53 Le trimère constitue une structure rigide

permettant aux groupements substituants de mimer les chaînes latérales aux positions i,

i+4 et i+7 d’une hélice- et d’introduire des éléments de diversités moléculaires. Un autre exemple de prototypes moléculaires mimant les hélice- est une 1,4-dipipérazinobenzène

(10) proposé par Koenig et al. Cette molécule capable de mimer de courtes hélices contient les isostères de chaînes latérales sur les deux pipérazines (Figure 10).54

Figure 11. Exemples de structures moléculaires mimant une conformation en feuillet-β.

Les feuillets β sont aussi des éléments structuraux très importants chez les protéines et ils sont caractérisés par une série régulière de liaisons hydrogène intramoléculaires connectant les brins β ensemble. Il y a d’ailleurs un intérêt croissant pour ce genre de structures car de plus en plus d’études démontrent qu’elles sont impliquées dans le développement et la progression de certaines neuropathies via l’aggrégation d’oligomères adoptant des structures en feuillets β.55 La majorité des prototypes moléculaires capables

de mimer des feuillets β ont été développé en tirant avantage d’entités spécifiques possédant une structure plane et pouvant établir des liaisons hydrogènes parallèlement et comme accepteur et donneur.56 C’est le cas des mimétiques 5-amino-2-

méthoxybenzamides et hydrazides (11) pour stabiliser un feuillet β antiparallèle,57, 58 de

l’épindolidione (12) et des acides aminés méthoxypyrole (13) qui peuvent servir au cœur d’un brin β pour orienter adéquatement les fonctionnalités formeuses de liaisons hydrogènes (Figure 11).59, 60

Les coudes β («β-turns») sont la structure secondaire de protéines qui a été le plus fréquemment minés. Un coude β est une séquence tétrapeptidique où la distance entre le Ci et Ci+3 est ≤ 7Å.47 Le coude peut être stabilisé par chélation d’un cation ou liaisons

hydrogène intramoléculaire (Figure 12). Un prototype mimétique idéal devrait être rigide et orienter les chaînes latérales comme le peptide naturel tout en augmentant la solubilité et la résistance à la dégradation protéolytique. Plusieurs stratégies ont été utilisées pour le design de prototypes mimant les coudes β dont l’utilisation de petites molécules hétérocycliques (14) ou l’incorporation d’isostères dipeptidiques pour induire le coude dans un motif peptidique (15) (Figure 12). De plus, une grande variété de contraintes ont été développé pour stabiliser la structure en coude β dans une molécule macrocyclique (16) (Figure 12).

Figure 12. Exemples d’approches pour mimer les structures en coude β.

1.3.2 Modifications du squelette peptidique

Une des approches les plus conservatrices pour introduire une restriction conformationelle et stabiliser la molécule face aux protéases est la modification du squelette peptidique. Plusieurs études ont été réalisées pour remplacer les liens peptidiques par des groupements capables de mimer le lien au niveau structural, électronique et de la capacité à former des liaisons hydrogènes.61-63 Ces remplaçants du lien amide sont aussi connus

sous le nom d’isostères peptidiques (Figure 13). Par exemple, la substitution du lien amide par un groupement aliphatique augmente la flexibilité localement tandis qu’un isostère oléfine n’affecte pas la conformation. De plus, la capacité à former des liens hydrogènes

peut être modulée en utilisant divers isostères peptidiques comme un groupement sulfonamide, phosphinique ou peptoïde (Figure 13). Un grand nombre d’isostères peptidiques a été développé et étudié mais la grande majorité sont difficilement accessibles car leur synthèse requiert plusieurs étapes et beaucoup de ressources. Parmi ces groupements nous nous sommes particulièrement intéressés aux peptoïdes car ils offrent plusieurs avantages au niveau peptidomimétique. Dans un premier temps, leur synthèse est très accessible et rapide avec une possibilité de diversité moléculaire phénoménale. Les peptoïdes ont démontré des capacités peptidomimétiques très variées offrant ainsi une flexibilité au niveau des structures à mimer. Finalement, il a été démontré qu’ils possèdent significativement une plus grande capacité à franchir les membranes cellulaires que les peptides.

Figure 13. Exemples d’isostères du lien peptidique.

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