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Les inégalités territoriales face à la mobilité

2. EVALUATION DES BESOINS LIES AUX ACTIVITES ET EQUIPEMENTS POUR LES

2.3.2 Les inégalités territoriales face à la mobilité

Suite à l’esquisse de la hiérarchie urbaine et de la structure des pôles d’équipements du territoire wallon, nous allons maintenant envisager ce même territoire selon la capacité à être mobile des ménages. Pour cela nous utilisons principalement les Enquêtes sur les Budgets des Ménages effectuées par l’Institut National de Statistique à partir de 1978.

2.3.2.1 Les transports « souples » et les territoires réseaux Face à l’émergence des « territoires réseaux » –

produite par l’instabilité professionnelle et familiale, la fragmentation des horaires et la multiplication des déplacements 72 – les ménages wallons sont de plus en plus contraints d’investir dans la voiture, les deux-roues et autres transports « souples ». C’est ce que nous allons montrer ici à partir de l’analyse des budgets des ménages wallons entre 1978 et 2000.

Pendant cette période, la Région Wallonne connaît une augmentation absolue et relative des dépenses liées à la mobilité. Lorsque l’évolution de ces dépenses est rapportée à celle des prix à la consommation ou à celle des revenus, il apparaît que la mobilité est un poste de dépenses dont l’importance ne peut être expliquée par les prix des voitures ou la hausse des revenus, particulièrement depuis 1997.

Figure 2.3.3 – Indices de prix à la consommation, revenus disponibles et dépenses liées à la mobilités en Région Wallonne, de 1970 à 2000 (base = 1980).

0 50 100 150 200 250 300

1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002

Dépenses liées aux mobilités Total du revenu disponible Indice général base 1980 Voitures neuves base 1988 Voitures neuves base 1996

Sources : Indices des prix à la consommation (INS 2000), Enquête sur les Budgets des Ménages 2000 (INS 2001).

72 Voir CPDT – Programme 2000 – Thème 1.1 – Rapport final – pp. 210-232.

« Souples » versus « durs » Le sociologue Jean Rémy oppose les équipements « divisibles » aux équipements « indivisibles ». D’une part, il s’agit des « équipements individuellement appropriables, comme la voiture ou l’ordinateur à domicile » (Rémy ; 2000 : 172-173) et d’autre part il s’agit des équipements « qui supposent une utilisation conjointe et collective, comme le transport en commun et la macro-informatique » (idem : 173). Afin d’alléger la lecture, nous utilisons les termes « souples » et « durs ».

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L’analyse des différents postes de dépenses liées à la mobilité montre que la hausse soudaine de celles-ci est principalement le fait des sommes dépensées aux transports souples.

Le ménage wallon accepte d’investir ou doit investir des sommes importantes afin de se déplacer en voiture : de 1978 à 2000, il dépense le plus pour l’achat de voitures – poste dont la croissance est d’ailleurs la plus rapide –, le carburant, l’assurance, l’entretien et la réparation, les autres frais et les taxes de roulages. Et depuis 1995, l’achat de véhicules à deux roues – motos, vélos, motocyclettes, … – croit considérablement ainsi que la location de véhicules, qui est une forme souple mais coûteuse de transport.

Figure 2.3.4 – Évolution des postes de dépenses liées à la mobilité dans les budgets des ménages en Région Wallonne, de 1978 à 2000.

0

78-79 87-88 95-96 96-97 97-98 1999 2000

"Souples" Autres frais et taxes de roulage Locations de garages ou de véhicules Pièces détachées et accessoires Achat de véhicules à deux roues Transport par chemin de fer (SNCB) Voyages "tout compris" en Belgique

Source : Enquêtes sur les Budgets des Ménages 2000 (INS 2001)

L’intérêt d’opposer les transports souples aux transports durs est d’utiliser les courbes dont l’écart est le plus grand et dont l’évolution est la plus différenciée : les dépenses en transports souples (voiture, deux-roues, location de véhicules) augmentent le plus vite et s’opposent à une stagnation des plus faibles dépenses en transports durs (transports par chemin de fer, vicinaux, urbains, services spéciaux). Ou en d’autres mots, en regroupant les transports souples d’une part et les transports durs d’autre part, nous rendons compte de l’évolution et de l’émergence des pratiques actuelles de sociabilités et de mobilités.

Récapitulons : la hausse soudaine des dépenses en mobilités ne peut être imputée à une hausse des revenus ; elle est le fait des transports souples et plus particulièrement de l’achat de voitures ; elle ne peut être expliquée par une hausse des prix des voitures dont l’évolution est semblable à celle des autres prix et à celle des revenus disponibles. Selon nous, sa cause doit être recherchée dans les taux de motorisation.

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96 Une analyse des taux de motorisation montre que la hausse des dépenses en mobilités peut être rapportée au fait que les ménages et personnes disposent, en moyenne, de plus en plus de véhicules : en Belgique, entre 1994 et 2001, le parc de voitures et de motocyclettes augmente de 15% tandis que le nombre de personnes reste quasi le même et que celui des ménages privés n’augmente que de 5% (FEBIAC 2002, INS 2002). En 2000, 1000 personnes wallonnes disposent entre 500 et 600 véhicules et 1000 ménages wallons disposent entre 1200 et 1600 véhicules.

Tableau 2.3.1 – Nombre relatif de véhicules selon la province en Région Wallonne, en 2000

Nombre de véhicules

Province Par 1000 habitants Par 1000 ménages

Luxembourg 621 1611

Brabant Wallon 575 1513

Namur 555 1408

Liège 542 1273

Hainaut 514 1235

Belgique 550 1333

Sources : FEBIAC 2002

En guise de comparaison : en 1980, les taux de motorisation par personne des arrondissements de Liège, Virton, Arlon et Huy se situent entre 340 et 380 pro mille et en 1990, entre 380 et 420 pro mille ; en 1993, les études prévoient que, dans ces mêmes arrondissements, le seuil de 480 pro mille sera atteint en 2010 (MET, 1993, pp. 18-19).

La motorisation accrue des ménages est-elle le fait de la contrainte ou du choix ? Il est difficile de répondre de manière univoque à cette question mais le fait que les revenus disponibles augmentent moins vite que les dépenses en mobilités suggère que la nécessité joue un rôle dans la motorisation croissante des ménages. Aussi, l’analyse des postes de dépenses montre qu’entre 1978 et 2000, les dépenses extraordinaires – voyages à l’Étranger ou en Belgique – augmentent de la moitié (de 100 à environ 150 points) tandis que les dépenses ordinaires et quotidiennes, davantage liées à la contrainte et à la nécessité, ont plus que doublé (de 100 à 230 points) pendant cette même période (INS, 2002). Donc : si certains ménages choisissent d’investir des sommes de plus en plus importantes en mobilités, et plus particulièrement en mobilités souples, d’autres y sont vraisemblablement contraints par l’émergence des territoires réseaux.

En ce qui concerne les transports publics, les dépenses stagnent et les prix connaissent des évolutions différenciées selon qu’il s’agisse des chemins de fer ou des transports en autobus. En guise de comparaison nous avons ajouté au graphique ci-dessous l’indice des prix des transports en taxi qui est, comme la location de véhicules, un moyen de transport souple mais coûteux.

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Figure 2.3.5 – Indices des prix à la consommation selon le type de produit en Région Wallonne, de 1996 à 2001

90 95 100 105 110 115

1996 1997 1998 1999 2000 2001

Indice général des prix à la consommation Indice chemins de fer Indice transports en autobus Indice transports par taxi

Sources : INS 2002.

Il est probable que les transports en commun aient du mal à faire face aux mobilités quotidiennes post-fordistes Une piste d’action peut consister à élaborer des transports durs c’est-à-dire qui supposent une utilisation conjointe et collective qui soient plus adéquats aux mobilités plus éclatées des ménages : la création de parcs automobiles, le co-voiturage, la densification des réseaux en commun, etc.

Pour conclure : face aux nouveaux territoires émergents, les ménages wallons sont de plus en plus contraints d’investir dans les transports souples, transports qui augmentent la capacité à être mobile mais qui sont aussi coûteux et discriminatoires comme le montre l’analyse suivante.

2.3.2.2 Le cercle vertueux de la mobilité

Les inégalités socio-économiques face à la mobilité se révèlent lorsque nous confrontons les dépenses en mobilités au revenu du ménage, envisagé selon l’appartenance de celui-ci aux déciles de revenus régionaux. Elles apparaissent dans l’écart (1) des sommes dépensées, (2) des dépenses luxueuses, (3) de la capacité de mobilité confrontée au taux d’effort, (4) des inégalités territoriales. Ces quatre arguments constituent le fil rouge de ce qui suit et s’enchevêtrent dans la thèse du « cercle vertueux de la mobilité », thèse qui peut être résumée de la manière suivante : plus on est riche, plus on est mobile, moins ça coûte et plus c’est facile.

Entre les plus pauvres et les plus riches, il existe une différence importante quant à la capacité économique à être mobile – capacité qui est évaluée ici par les sommes dépensées en mobilités. Supposons que les dépenses en valeurs absolues du premier décile équivalent un indice 100, alors les mêmes dépenses effectuées par le dixième décile atteignent un indice de quasi 1500 points, soit une somme qui est 15 fois plus importante que celle que

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98 peut dépenser le ménage le plus pauvre. Supposons qu’on fasse le même exercice pour l’achat de voitures, alors l’indice au dixième décile atteint 2800 points. Et en ce qui concerne les dépenses extraordinaires, c’est-à-dire les voyages à l’Étranger et en Belgique, le cap des 3000 est quasi atteint.

En d’autres mots : plus on est riche, plus on dépense en mobilités et plus on a le loisir de dépenser en mobilités extraordinaires. C’est le premier principe du cercle vertueux de la mobilité.

Figure 2.3.6 – Dépenses des ménages liées à la mobilité selon trois catégories de dépenses et les déciles de revenus en Région Wallonne en 2000.

0 500 1000 1500 2000 2500 3000

Décile 1 Décile 2 Décile 3 Décile 4 Décile 5 Décile 6 Décile 7 Décile 8 Décile 9 Décile 10

Dépenses ordinaires Dépenses extraordinaires Achat de voitures

Enquête sur les budgets des ménages 2000 (INS 2001).

Sur le graphique exposé ici (figure 2.3.6), les courbes des dépenses les plus luxueuses – voiture, voyage – se situent au-dessus de celle des dépenses ordinaires. La thèse proposée s’en trouve renforcée car cela veut dire que l’écart qui existe entre les riches et les pauvres est d’autant plus important que la dépense est libre, choisie et hédoniste.

L’inégalité de la capacité et du choix de mobilité est également démontrée par quelques détails dans l’analyse des différents postes de dépenses, signes de luxe et de choix de mobilité. Dans le graphique suivant, les courbes se croisent rarement mais néanmoins de manière significative : l’achat de voiture ne devient le premier poste de dépense qu’à partir du 3ème décile et part en flèche à partir du 8ème décile ; les voyages à l’Étranger grimpent en troisième position qu’au 10ème décile ; la location de garages ou de véhicules ne grimpe qu’à partir du 8ème décile de revenus.

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Figure 2.3.7 – Dépenses des ménages liées à la mobilité selon tous les postes de dépenses et les déciles de revenus en Région Wallonne en 2000.

0 50000 100000 150000 200000 250000

Décile 1 Décile 2 Décile 3 Décile 4 Décile 5 Décile 6 Décile 7 Décile 8 Décile 9 Décile 10

Achat de voitures Carburant Voyage à l'Etranger Assurance liée au transport Location de garages ou de véhicules Entretien et réparations (pièces incluses) Autres frais et taxes de roulage Achat de véhicules à deux roues Pièces détachées et accessoires Transport par chemin de fer (SNCB) Autres services de transport

Voyages touristiques "tout compris" en Belgique Transport par autobus vicinaux

Transport urbain (tram, bus, métro) Lubrifiant et antigel

Transport par bus s.s.

Frais divers

Sources : Enquête sur les budgets des ménages2000 (INS 2001).

Ces quelques constats amènent le deuxième principe du cercle vertueux de la mobilité : la richesse crée une plus grande élasticité et des marges de manœuvre plus larges dans l’investissement en mobilités.

La location de véhicules et l’achat des deux-roues concernent principalement les deux derniers déciles, c’est-à-dire 20% de la population. Dès lors, si le deux-roues peut agir comme substitut souple de la voiture – par exemple au 7ème décile l’achat de voiture chute tandis que celui des deux-roues augmente soudainement – il est néanmoins le plus souvent utilisé en complément à celui-ci. Cela amène le troisième principe du cercle vertueux de la mobilité, qui sera renforcée par l’analyse territoriale ci-dessous : plus on est riche, plus on a accès à une mobilité multimodale et diverse.

Mais l’argument le plus convaincant de notre thèse est amené par une série de graphiques dans lesquels nous comparons des séquences absolues et relatives afin de confronter la capacité de mobilité – mesurée par la capacité à dépenser pour la mobilité – à l’effort fourni pour atteindre cette capacité – mesurée par le poids de la dépense dans la totalité des dépenses d’une part et dans les revenus disponibles d’autre part. En émerge le principe suivant : plus on est riche, plus on dépense, plus on est mobile et moins ça coûte ! Voilà l’essence même du cercle vertueux de la mobilité.

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100 Figure 2.3.8 – Les dépenses des ménages en transport souples (voiture, deux-roues, location) selon le type de valeur envisagée et les déciles de revenus en Région Wallonne en 2000.

0 50 100 150 200 250 300

Décile 1 Décile 2 Décile 3 Décile 4 Décile 5 Décile 6 Décile 7 Décile 8 Décile 9 Décile 10

Valeurs absolues Valeurs relatives à la consommation totale Valeurs relatives aux revenus disponibles

Sources : Enquête sur les Budgets des Ménages en 2000 (INS 2001), propres calculs.

Qu’il s’agisse de l’achat de voitures, de dépenses liées à la voiture ou de dépenses en transports souples – dont nous montrons le graphique ci-dessus – on observe que la capacité et l’effort croissent selon le revenu. Mais pour la moitié la moins fortunée de la population, la capacité est toujours moindre que l’effort à fournir et inversement, pour la moitié la plus favorisée la capacité est toujours plus importante que l’effort (mesurés en rapport à la valeur médiane estimée qui est la base 100). A partir du 7ème décile l’écart entre la capacité et l’effort à fournir se creuse et le 10ème décile connaît un taux d’effort moins important que la plupart des plus fortunés et même des moins fortunés.

Une deuxième série de graphiques vient appuyer la thèse du cercle vertueux : à moindre effort, plus de mobilité pour les riches.

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Figure 2.3.9 – Les dépenses des ménages en mobilités ordinaires selon le type de valeur envisagée et les déciles de revenus en Région Wallonne en 2000.

0 200 400 600 800 1000 1200 1400 1600

Décile 1 Décile 2 Décile 3 Décile 4 Décile 5 Décile 6 Décile 7 Décile 8 Décile 9 Décile 10

Valeurs absolues Valeurs relatives à la consommation totale Valeurs relatives aux revenus disponibles

source : Enquête sur les Budgets des Ménages en 2000 (INS 2001), propres calculs.

Figure 2.3.10 – Les dépenses des ménages en mobilités extraordinaires selon le type de valeur envisagée et les déciles de revenus en Région Wallonne en 2000.

0 500 1000 1500 2000 2500 3000

Décile 1 Décile 2 Décile 3 Décile 4 Décile 5 Décile 6 Décile 7 Décile 8 Décile 9 Décile 10

Valeurs absolues Valeurs relatives à la consommation Valeurs relatives aux revenus disponibles

Sources : Enquête sur les Budgets des Ménages en 2000 (INS 2001), propres calculs.

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102 Une analyse socio-économique des dépenses liées aux transports publiques amène le dernier principe du cercle vertueux de la mobilité : plus on est riche, plus c’est facile car la richesse permet d’une part une mobilité multimodale et d’autre part une localisation stratégique sur le territoire wallon.

Figure 2.3.11 – Les dépenses des ménages liées aux transports en commun selon le poste de dépenses et les déciles de revenus en Région Wallonne en 2000.

0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 7000 8000

Décile 1 Décile 2 Décile 3 Décile 4 Décile 5 Décile 6 Décile 7 Décile 8 Décile 9 Décile 10

Transport par chemin de fer (SNCB) Transport par autobus vicinaux Transport urbain (tram, bus, métro) Transport par bus s.s.

Sources : Enquête sur les Budgets des Ménages en 2000 (INS 2001), propres calculs.

Lorsqu’on sait que les prix des chemins de fer ont augmenté ces dernières années contrairement aux prix des transports vicinaux qui ont diminué (voir plus haut figure 2.3.11), l’analyse des dépenses en transports publics suggère que les chemins de fer profitent aux plus favorisés, contrairement au bus vicinaux qui profitent aux moins favorisés. Car les dépenses en transports par chemins de fer croissent le plus vite selon les revenus et seules les dépenses en transports par autobus vicinaux diminuent à partir du 5ème décile. Le transport urbain, lui, semble profiter aux 2ème et 9ème déciles, ce qui reflète vraisemblablement la polarisation relative des revenus et l’absence relative des revenus moyens en ville.

Nous avons mené une analyse du territoire qui consiste à mettre en rapport le réseau de communications de la Région Wallonne avec les localisations résidentielles des plus riches et des plus pauvres – localisation évaluée à partir de la moyenne communale des déclarations de revenus.

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Figure 2.3.12 – Zones de résidence et réseau de communications en Région Wallonne.

Sources : Ministère de la Région Wallonne et DGATLP (1998), propre réalisation.

Les ménages les plus riches ont la capacité à négocier leur localisation résidentielle dans des zones du territoire où se multiplient les réseaux de transports. Ils profitent non seulement de la proximité de l’agglomération urbaine, de leur capacité à se procurer des transports souples mais aussi de la présence d’autres moyens de transport tels les chemins de fer, le TGV et les moyens de transports rapides qui leur sont mis à disposition par les sociétés de transports vicinaux. Cela confirme ce que d’autres sociologues, notamment en France, ont théorisé : les riches peuvent négocier des localisations « barycentriques » et ainsi démultiplier leur capacité à se mouvoir tandis que les pauvres sont relégués dans les zones plus marginales (voir notamment les travaux de François Ascher).

En conclusion, nous reformulons la thèse du cercle vertueux de la mobilité. La richesse crée une plus grande mobilité de celui qui la possède, tant au niveau d’une mobilité nécessaire et quotidienne qu’au niveau d’une mobilité luxueuse ou extraordinaire qu’elle favorise particulièrement. Elle ne limite pas les possibilités à un type de transport mais permet l’investissement dans plusieurs moyens et modes de mobilité, ce qui est d’autant plus efficace que cette même richesse permet à celui qui la possède de négocier une localisation résidentielle aux nœuds infrastructurels de la mobilité en Région Wallonne. La richesse permet de créer ce déploiement de mobilités à relativement peu de coûts financiers et dans une grande maîtrise du territoire, ses nœuds, ses pôles urbains et de ses réseaux. En d’autres mots : plus on est riche, plus on est mobile, moins ça coûte et plus c’est facile.

2.3.2.3. La périphérie, la ville et la campagne

Nous analysons ici les différences en dépenses qui existent entre les ménages résidant dans la « région urbanisée », ceux résidant dans la « région intermédiaire » et ceux résidant dans la « région rurale » du territoire wallon. La confrontation des dépenses au critère de densité et plus globalement au critère d’urbanisation montre que la périphérie connaît les localisations optimalisées vis-à-vis du réseau de communications, que la ville en tire moins partie et que la campagne est la moins desservie. C’est ce que nous montrons ici.

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104 Les trois types territoriaux sont l’oeuvre de l’Institut National de Statistique qui distingue les ménages selon qu’ils habitent dans une commune comptant plus de 500 habitants / km2 – le

« ménage urbain » – ou entre 100 et 499 habitants / km2 – le « ménage suburbain » – ou moins de 100 habitants / km2 – le « ménage rural ». Envisagé de la sorte, le territoire wallon se structure de la manière suivante :

Figure 2.3.13 – La région urbanisée, la région intermédiaire et la région rurale en Région Wallonne en 2000.

Légende : Région urbanisée = brun Région intermédiaire = vert Région rurale = jaune

Sources : INS 2002.

Le ménage rural dépense le plus en mobilités : en 2000, il dépense 5.355 euro contre 4.313

Le ménage rural dépense le plus en mobilités : en 2000, il dépense 5.355 euro contre 4.313