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Les fonctions données à une telle intervention

4. ANALYSE DES DONNÉES

4.2. Liens avec les hypothèses

4.2.3. L’hypothèse 2 : des centres de loisirs pour les aînés

4.2.3.1. Les fonctions données à une telle intervention

« L’animation socioculturelle, c’est les activités sociales. Au fond ce qui se joue là-derrière, c’est la vie. »270

Marianne

Pour toutes les professionnelles, l’animation socioculturelle destinée à des personnes âgées dépendantes qui vivent encore à domicile aurait différentes fonctions. Spontanément, Marianne en cite quatre lorsque nous lui demandons si elle fait un lien entre l’animation socioculturelle et la personne âgée :

« […] maintenir la vie

maintenir le contact

maintenir le lien

maintenir l’intérêt ».271

Manuella trouve également qu’une action socioculturelle aurait « […] un effet qualitatif important de lien »272. Elle rajoute cependant deux autres fonctions qui sont très reliées :

 « […] maintenir la personne âgée à domicile

aider les familles ».273

Pour Mélissa, il serait important de prolonger la vie à domicile et surtout de donner l’opportunité à nos aînés de :

 « […] restaurer leur estime de soi

réduire le stress

aider à résoudre les conflits du passé ».274

270 Entretien 1

271 Entretien 1

272 Entretien 5

273 Entretien 5

274 Entretien 7

Manuella pense que notre démarche est « extraordinaire »275 et elle estime que nous avons un avenir dans ce domaine du fait que, selon elle, c’est un plus pour ces personnes. En outre, elle insiste sur le fait que cette démarche doit être soutenue par les politiciens, l’État et les professionnels/-les de la santé.

Les avantages liés à l’aspect relationnel ayant été développés plus haut, nous reviendrons sur ces derniers seulement en cas de besoin. Par contre, nous donnerons des éléments de précision concernant d’autres fonctions nommées par nos interlocutrices.

Favoriser l’autonomie et la participation active

Pour Marianne, l’autonomie comprise comme « la capacité à faire des choix » a une place toute particulière dans la problématique de la dépendance des personnes âgées, d’autant plus qu’elle est davantage mise en danger dans de telles circonstances.276 D’après notre cadre théorique, nous avons tendance à confondre ces deux termes et penser que le fait d’être dépendant mène forcément à la perte d’autonomie. En définissant la dépendance, Marianne cherche à séparer ces deux concepts :

« Là je crois que l’on peut parler de dépendance qu’il faut effectivement distinguer d’autonomie parce que l’on peut être extrêmement dépendant et rester autonome. C’est-à-dire je peux assez bien savoir ce dont j’ai besoin, ce dont j’ai envie, ce dont je n’ai pas envie en étant très touché du point de vue fonctionnel. Il faut distinguer les choses. »277 avis. Pour expliquer à quoi pourrait servir un/e animateur/-trice socioculturel/le dans le champ de la dépendance et du vieillissement, Mélissa pose également comme l’une de ses priorités le fait que ce/cette dernier/-ère peut « […] aider à garder l’autonomie des personnes âgées »280. En parlant des valeurs qui lui tiennent à cœur, Michelle fait part de l’importance qu’elle donne à l’autonomie :

« Et puis d’un point de vue professionnel, c’est continuer de tenter de maintenir cette autonomie au sens pas "bête" de faire pour continuer à faire. Ce n’est pas dans le faire, c’est vraiment essayer de prendre en considération si c’est possible l’envie, les désirs, certaines décisions encore, de conserver ces aspects-là. »281

Bien qu’elle montre une certaine sensibilité à ce sujet, elle n’associe pas directement ce concept au travail de l’animateur/-trice.

Marie, animatrice, trouve qu’une intervention destinée aux personnes âgées dépendantes qui vivent à domicile se doit de correspondre à l’une des principales valeurs soutenue par l’animation socioculturelle, qui est de favoriser la participation active. Nous remarquons que pour cette professionnelle, il est impératif de ne pas faire à la place des personnes. Marianne est également d’avis que l’action de l’animateur/-trice socioculturel/le ne peut se faire que dans la construction d’un projet de vie construit avec la personne et non pas pour elle.

Cela s’avère particulièrement difficile avec la population à laquelle nous nous intéressons.

Pour Marianne, en intervenant à domicile on court le danger de « […] leur enlever ce qui faisait leur autonomie et dire "laisse, je fais à ta place" »282. Aussi, à la question « Comment voyez-vous la prise en charge d’une personne âgée dépendante ? », Marie commence sa approche. […] Si c’est physique, il y a certainement des formes d’animation que l’on peut mettre en place même au niveau physique. »283

De plus, l’animatrice pense qu’il y a une autre difficulté qui pourrait intervenir et qu’il faudrait prendre en compte : « […] la motivation de la personne »284. Quand une personne est dépendante, elle n’éprouve plus la même motivation qu’auparavant, « […] elle a tendance à être consommatrice »285. Il faut vraiment que la personne soit motivée. Si elle l’est, il y a une véritable action qui peut se mettre en place. Ce qu’il faut savoir, c’est que les personnes âgées dépendantes ont tendance à se fatiguer très vite, cela peut donc avoir un effet sur leur motivation à participer ou non, d’où l’importance de l’écoute. Cela nous fait dire qu’il serait pertinent de parler de la méthode de validation, méthode à laquelle Mélissa s’est formée.

Selon cette professionnelle, la validation permet de « […] développer une communication verbale et non-verbale »286. Cela démontre bien l’impact qu’une telle intervention peut avoir : il n’y aurait pas forcément besoin de se comprendre pour se parler. Si de tels liens s’établissent, il semblerait qu’un sentiment de confiance puisse se créer plus aisément. Ainsi, il sera peut-être plus facile pour les bénéficiaires de montrer leur motivation en exprimant d’une quelconque manière leurs besoins.

Il nous paraît important de ne pas vouloir occulter cet élément mais au contraire de le garder en tête car « faire à la place de » serait contraire à notre idéalité professionnelle et ne favoriserait en rien la stimulation des personnes auxquelles nous nous intéressons.

Soulager les familles

Nous avons déjà vu que les professionnelles considèrent les proches comme des acteurs/-trices importants/-es dans la relation d’aide établie avec l’usager. Aussi, lorsque l’on parle de ce que pourrait apporter les animateurs/-trices, la famille n’est pas laissée pour compte. Nos interlocutrices y font souvent référence. Myriam s’exprime sur la question :

« Et puis je dis même pour les gens, ce qu’il y a d’important aussi, c’est qu’on prône de plus en plus le fait de garder les gens le plus longtemps à domicile. Et c’est souvent les familles et les structures qu’il y a autour qui assurent cela. Mais il y a… À un moment-donné, il faut aussi penser à soulager ces familles qui…

Stimuler

Toujours en se référant aux besoins et à une manière hiérarchique de les concevoir, Michelle exprime son opinion sur la question de l’ennui qu’elle considère comme un facteur de dépendance : « […] ça vient déjà dans les besoins supérieurs mais c’est vrai que […] les personnes qui s’ennuient, ça devient même très vite des personnes très dépendantes parce qu’elles n’ont aucune activité de stimulation »288.

Plus loin, il semble qu’elle associe ce besoin « supérieur » à l’animation socioculturelle :

« Pour moi, l’animation socioculturelle c’est une stimulation d’une personne à exister déjà pour elle-même et puis avec autrui. »289.

Rendre professionnelle une activité qui existe déjà et soulager les acteurs qui la conduisent Dans son mandat de conseillère communale, Myriam est responsable du dicastère « social » et s’occupe donc de tout ce qui concerne la population des « aînés ». Habitant une petite commune, c’est elle qui va à la rencontre des personnes âgées pour découvrir quels sont leurs besoins. Par la suite, elle met en place des activités et notamment une journée annuelle consacrée à la population qui nous intéresse. Si elle met sur pied ces projets avec beaucoup de plaisir, elle regrette cependant le manque de professionnalisme et avoue se sentir parfois démunie. Elle fait notamment remarquer : « Ça serait mon rêve de dire ben voilà, il y a une personne qui est là, qui s’occupe des aînés. Parce que moi, j’ai aussi un métier à côté… Ce n’est pas mon métier et j’ai mes ressources qui s’épuisent,[…] aller organiser un repas par mois, c’est juste pas possible. »290 En fait, elle constate qu’elle n’a pas suffisamment de ressources temporelles et professionnelles pour monter des projets qui concordent avec les besoins des personnes âgées. Elle se rend compte par exemple qu’elle ne possède pas les outils pour mettre en place une action innovante. Elle avoue donc se reposer sur ses acquis en proposant régulièrement les mêmes activités. Pour offrir une qualité d’intervention aux aînés, elle relève: « À un moment donné, il faut du professionnalisme et il faut de la qualité […] »291. Évidemment, elle s’appuie sur les prestations de Pro Senectute, mais cet organisme a besoin de pouvoir compter sur des personnes-relais. Pour elle, il est plus facile d’endosser ce rôle que de monter un réseau de bénévoles. Elle pense que le regard d’un/e professionnel/le de l’animation permettrait donc d’être novateur et créatif dans une commune. À ses yeux, il est nécessaire de prendre en compte ces critères pour offrir un meilleur mode d’intervention aux aînés.

Valoriser la personne âgée

Pour Mylène, un des buts à atteindre est le fait que ces personnes soient « […] revalorisées et reconnues […] »292 car on a tendance à les mettre à l’écart et à ne plus prendre en compte l’opinion de ces dernières. Mylène collabore donc régulièrement avec des partenaires et un réseau de bénévoles qui favorisent avant tout cette valorisation de la personne âgée en s’appuyant sur les besoins et les demandes des aînés. Par rapport à cela, elle explique :

« Donc tout à coup, nous on intervient avec le foyer et le club des ainés à dire ben voilà : "Si on organisait quelque chose tous ensemble pour aussi mettre en avant et valoriser la personne âgée". »293

Par rapport à cela, elle soulève également l’importance pour le sujet âgé d’être reconnu par des tiers : « Ben le lien c’est que justement la personne a besoin d’être valorisée, d’être

toute la communauté en fait […] »294. Donc, selon elle, l’un des objectifs vers lesquels il faut tendre est le fait que les aînés dépendants participent activement à la vie sociale de la commune.