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1.4 L’influence du mésosystème famille-école sur la réussite scolaire

1.4.1 Les facteurs influençant la collaboration famille-école

Les caractéristiques des parents. Bon nombre d’études indiquent un lien significatif entre la participation des parents au suivi scolaire et les caractéristiques familiales telles que le revenu, le niveau de scolarité des parents, la structure familiale, le nombre d'enfants et le statut professionnel. Par exemple, les familles biparentales et plus scolarisées participent davantage à la maison et à l’école que les familles monoparentales et peu scolarisées (Baker & Stevenson, 1986; Coleman, 1987; Dombusch & Ritter, 1988, 1992; Grolnick & Slowiaczek, 1994). Les parents avec moins d’enfants participent plus à la maison, mais la taille de la famille ne semble pas affecter leur participation à l’école (Dauber & Epstein, 1993). Par ailleurs, les mères qui travaillent à l’extérieur s’impliquent moins à l’école, mais leur participation à la maison n’est pas pour autant diminuée (Dauber & Epstein, 1993; Eccles & Harold, 1993).

Toutefois, les résultats de quelques études mettent en doute le postulat à l’effet que les parents ayant un niveau de scolarité inférieur ne peuvent ou ne veulent pas s’engager au suivi scolaire de leurs enfants (Epstein, 1990b). Dauber et Epstein (1993) ont mené une enquête portant sur l’opinion des parents en regard de leur participation au suivi scolaire et des stratégies de l’école mises en place pour favoriser leur participation. Au total, 2 317 parents de huit écoles de niveaux élémentaire et premier cycle du secondaire ont participé à l’étude. Les chercheurs ont tenté de déterminer les facteurs qui influencent le temps consacré par les parents à superviser leur enfant et à l’aider dans ses devoirs. Ils ont alors constaté que les variables scolarité des parents, taille de la famille et statut marital avaient une influence non significative. Il ressort que les parents de groupes minoritaires et de milieux défavorisés participent au suivi scolaire de leur enfant et à un degré encore plus élevé, si les stratégies des enseignants favorisent leur collaboration.

Selon les auteurs Eccles et Harold (1993), les caractéristiques familiales et parentales qui influent le plus sur la participation parentale sont les ressources sociales et psychologiques disponibles aux parents, la confiance dans leur capacité d’aider leur enfant dans ses apprentissages, la perception qu’ils ont de ce dernier, en termes d’habiletés scolaires et d’aspirations, les croyances face à leur rôle d’éducateur et leurs attitudes face à l’école.

S’ajoutent, d’après Clark (1994), les expériences négatives alors qu’ils étaient eux-mêmes élèves.

Les caractéristiques des élèves. Le sexe, l’âge de l’enfant, sa personnalité et ses antécédents scolaires semblent aussi influencer l’engagement des parents (Eccles & Harold, 1993). A titre d’exemple, les parents ont tendance à aider davantage un enfant qui en est à ses premières difficultés scolaires. De même, les parents d’un jeune qui réussit bien participent plus souvent à l’administration de l’école et aux activités parascolaires (Baker & Stevenson, 1986; Coleman, 1987; Dauber & Epstein, 1993). Dans leur étude réalisée auprès d’un échantillon composé de 179 élèves âgés de 5 à 17, de leurs parents et de leurs enseignants, Stevenson et Baker (1987) ont observé chez les garçons une relation entre l’âge et l’engagement des parents ainsi qu’entre le niveau de scolarité de la mère et la participation parentale. Plus le garçon est âgé, moins les parents s’impliquent et plus le niveau de scolarité de la mère du garçon est élevé, plus elle participe à son suivi scolaire. Cependant, ces résultats sont réfutés dans l’étude de Grolnick et Slowiaczek (1994) menée auprès de 300 élèves âgés de 11-14 ans et auprès de leurs enseignants. En effet, les auteurs ne relèvent aucune relation entre le niveau de participation parentale au suivi scolaire et les variables correspondant à l’âge et au genre de l’enfant.

Les caractéristiques des éducateurs et de l’école. La formation professionnelle des enseignants semble être associée au niveau de collaboration parentale. Il appert que ceux qui ont reçu une formation sur la collaboration famille-école favorisent davantage la participation parentale au suivi scolaire des jeunes (Bermudez, 1994; Becker & Epstein, 1982; Chavkin & Williams, 1988). Selon Christenson et al. (1992), les enseignants qui impliquent moins les parents accordent habituellement plus d’importance aux règlements tout en étant plus structurés et moins flexibles. Ils croient que l’école et la famille sont des institutions parallèles et attribuent aux parents des valeurs qui sont en conflit avec celles de l’école alléguant même parfois une influence négative de la famille sur la vie scolaire.

Dans une étude réalisée auprès de 171 enseignants répartis dans huit écoles de niveaux élémentaire et premier cycle du secondaire du Maryland, Epstein et Dauber (1991) ont constaté que les professeurs de mathématique, de sciences physiques et de sciences humaines

utilisent moins de stratégies favorisant la collaboration famille-école que ceux qui enseignent les langues. De plus, le niveau auquel l’éducateur enseigne présente des liens significatifs avec sa perception de la valeur du programme de collaboration famille-école en vigueur à son institution: les enseignants du primaire favorisant davantage la participation parentale au suivi scolaire que ceux du premier cycle du secondaire. Dans la même foulée, les travaux de Hoover-Dempsey et ses collègues (1987) ont démontré une relation entre l’efficacité de l’éducateur, le niveau socio-économique de l’école et la participation parentale au suivi scolaire (Christenson et al., 1992).

Les attitudes des parents et des éducateurs. Maintes recherches attribuent le degré de collaboration des parents aux attitudes des enseignants (Becker & Epstein, 1982; Krasnow, 1990). Au Québec, une enquête (St-Laurent, Royer, Hébert & Tardif, 1994) réalisée auprès de 630 enseignants du primaire et 957 parents de la région 03 indique que 97% des parents et 99% des enseignants croient qu’une collaboration entre l’école et les parents peut améliorer le rendement scolaire et le comportement de l’enfant en classe. Les résultats de l’enquête d’Epstein et Dauber (1991) précédemment mentionnée révèlent également une attitude favorable des enseignants à l’égard de la participation parentale. Néanmoins, les programmes de collaboration famille-école et les pratiques actuelles des éducateurs ne reflètent pas leur attitude favorable. Les auteures soulignent des liens entre l’importance accordée par les éducateurs à certaines stratégies favorisant la participation parentale et leur perception de la valeur du programme de collaboration famille-école développé dans leur institution (Epstein & Dauber, 1991).

Dans une enquête antérieure auprès de 3 700 enseignants et de leurs directeurs provenant de 600 écoles élémentaires de l’état du Maryland, Becker et Epstein (1982) ont conclu qu’une minorité d’enseignants initient des interactions avec les parents qui dépassent les attentes habituelles à leur égard. Lors de leur enquête, St-Laurent et ses collègues (1994) ont également conclu que la communication avec les parents est à développer davantage en milieu scolaire québécois. Règle générale, le personnel enseignant et les administrateurs scolaires sont en faveur d'une participation parentale traditionnelle: campagnes de financement, accompagnement lors de sorties, supervision de devoirs, etc. (Chavkin & Williams, 1987; Christenson et al., 1992; Henderson, 1988; Jennings, 1990). Cette attitude

s’explique par leur conviction que les parents ne veulent pas être impliqués dans le suivi scolaire de leur jeune (Clark, 1994; Connors & Epstein, 1994; Epstein & Dauber, 1991) ou encore qu’ils n’ont pas assez de formation pour participer aux prises de décision dans le milieu scolaire (Christenson et al., 1992).

Certes, quelques éducateurs sont réticents face à la participation parentale dans le suivi scolaire des élèves. Ils craignent que les parents ne remettent en question leur compétence, ne les attaquent ou les critiquent ou encore ne les blâment pour les problèmes de leur enfant (Epstein & Becker, 1982; Christenson et al., 1992; Kurtz, 1988). Ils semblent donc percevoir la présence parentale comme une menace à leur autonomie professionnelle (Bobango, 1994; Davies, 1987; Oison, 1990) et cherchent plutôt à créer des frontières professionnelles entre eux et les parents (Christenson et al., 1992). D’autres la perçoivent comme un ajout à leur tâche (Christenson et al., 1992; Connors & Epstein, 1994; Krasnow, 1990) car ils ne considèrent pas la coopération avec les parents comme étant indispensable (Becker & Epstein, 1982; Epstein & Becker, 1982;; Krasnow, 1990) ou encore comme partie intégrante de leur rôle professionnel (Seely, 1991). A cet effet, lors d’une enquête auprès de 7 836 élèves du secondaire, de 3 746 parents et de 307 enseignants, Dornbusch et Ritter (1988, 1992) ont constaté que 62% des enseignants étaient convaincus de ne pouvoir influencer le niveau de participation parentale. Les auteurs ont conclu que les enseignants du secondaire ne sont pas prêts pour un changement massif dans les relations entre l’école et les familles. Ils ont également déploré que la présente organisation des écoles secondaires ne favorise guère la collaboration entre les familles et l’école. De toute manière, un grand nombre d’enseignants déclarent ignorer comment initier la collaboration avec les parents, d’où l’importance de prévoir une formation pour les enseignants reliée à la collaboration famille- école (Becher, 1984; Bermudez, 1994; Bermudez & Padron, 1988; Chavkin & Williams, 1988; Epstein, 1989; Connors & Epstein, 1994; Epstein & Becker, 1982; Epstein & Connors, 1994; Epstein & Scott-Jones, sous-presse; Moles, 1982; Ziegler, 1987).

De l’autre côté, certains parents délèguent leurs responsabilités aux écoles (Seely, 1991), prétextant un manque de temps occasionné par les exigences familiales ou professionnelles, par des problèmes de santé ou par la présence de jeunes enfants (Epstein & Becker, 1982; Leitch & Tangri, 1988; Moles, 1982). Bref, un bon nombre de parents

abdiquent et deviennent eux-mêmes des «décrocheurs» (Poissant & Fortin, 1993). A l’image de certains enseignants qui les perçoivent comme une «clientèle difficile à atteindre», quelques parents considèrent l’école comme étant inaccessible (Christenson et al., 1992; Heleen, 1988; Moles, 1982). Au Québec, les résultats de l’enquête de St-Laurent et al. (1994) à laquelle nous avons référé précédemment rapportent que 67% des parents désirent plus de réunions d’information sur les programmes et l’utilisation du matériel en lecture, en écriture et en mathématiques. De plus, 87% d’entre eux se disent prêts à donner du temps pour aider leur enfant dans ses travaux scolaires, laissant ainsi supposer que les parents souhaitent s’impliquer davantage dans le suivi scolaire de leur jeune.

Les pratiques des enseignants et des écoles. Lors de leur enquête, Dauber et Epstein (1993) ont observé que les stratégies des enseignants visant à favoriser l’engagement des parents et les programmes de collaboration famille-école s’avèrent les variables les plus prédictrices de la participation parentale. Les pratiques des écoles influencent donc les pratiques familiales. En effet, les parents participent davantage à la maison et à l’école lorsqu’ils perçoivent que cette dernière favorise leur collaboration (Epstein, 1990a; Dauber & Epstein, 1993). Cependant, la situation semble différente au secondaire. Selon Epstein (1990a), il se peut que les caractéristiques familiales aient un plus grand impact sur la participation parentale au secondaire car les écoles de ce niveau font encore très peu pour informer activement les parents des activités qui pourraient les aider dans l’éducation de leur adolescent.

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