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I. INTRODUCTION BIBLIOGRAPHIQUE

I.2 Généralités sur l’immunothérapie

I.2.2 Les anticorps en immunothérapie et en imagerie

I.2.2.4 Les différents formats d’anticorps et leur pharmacocinétique

Si l’objectif poursuivi est de conserver simplement la fonction de reconnaissance d’un antigène non couplée aux fonctions effectrices portées par le Fc, il est possible de créer et de produire par voie protéolytique ou recombinante de nouveaux fragments d’anticorps. De plus, la réponse HAMA est essentiellement dirigée contre la partie constante de l’anticorps. Ces fragments peuvent être monovalents ou polyvalents. Leur intérêt s’est amplifié par la possibilité d’obtenir également des fragments bispécifiques (voire trispécifiques) mais aussi par la fusion possible à des protéines, comme des enzymes ou des toxines, apportant une deuxième fonctionnalité.

I.2.2.4.1 Coupure protéolytique

C’est l’étude des fragments obtenus après action d’enzymes protéolytiques sur les molécules d’immunoglobulines qui a permis d’élucider les relations existant entre la structure et la fonction de la molécule d’anticorps (Figure 20).

I.2.2.4.1.1 Action de la papaïne

Sous l’action de la papaïne, la molécule d’immunoglobuline est scindée en trois fragments de taille similaire (45kD): deux fragments Fab et un fragment Fc (Kilara and Shahani, 1977).

Les fragments Fab (ab pour antigen binding) correspondent à la moitié N-terminale de la molécule d’immunoglobuline, celle qui se fixe à l'antigène. Chaque fragment Fab est composé d’une chaîne légère entière et d’un fragment de la chaîne lourde contenant les domaines VH et CH1, les deux étant reliés par des ponts disulfures. Les fragments Fab ont la propriété de se lier avec l’antigène.

Le fragment Fc (c pour cristallisable) correspond aux domaines CH2 et CH3 des chaînes lourdes reliées par un ou plusieurs ponts disulfures. Le fragment Fc a des fonctions biologiques très importantes, notamment de liaison à des récepteurs spécifiques de chaque isotype et d’activation du complément.

I.2.2.4.1.2 Action de la pepsine

La pepsine coupe la molécule d’immunoglobuline en dessous du ou des ponts disulfures qui relie(nt) les deux chaînes lourdes. Après action de la pepsine, on obtient donc un gros fragment (Fab’)2 correspondant aux deux fragments Fab reliés par un ou plusieurs ponts disulfures, et des produits de dégradation du fragment Fc appelé pFc’.

I.2.2.4.2 Ingénierie génétique

L’élucidation de la structure des anticorps organisée en domaines et l’évolution des technologies de biologie moléculaire ont offert de nouvelles perspectives de développement. Depuis le début des années 1990, des fragments d’anticorps

recombinants peuvent être obtenus par ingénierie moléculaire à partir d’ARNm

d’hybridomes sécréteurs d’anticorps ou de banques combinatoires aléatoires d’ADNc codant les régions VH et VL d’anticorps. Le développement de la biologie moléculaire et

de l’ingénierie génétique ont aussi permis la construction de différents formats d’anticorps (Figure 21).

Figure 21 : Les différents formats d’anticorps

Le fragment Fab recombinant est un hétérodimère constitué de la chaîne légère et de la partie Fd de la chaîne lourde (VH-CH1) des anticorps. L’association s’effectue par la formation d’un pont disulfure entre les domaines CH1 et CL. Toutefois, la production de Fab recombinants est souvent délicate. La proportion de Fab formés actifs est parfois faible (Plucktun and Skerra, 1989 ; Thullier et al., 1999).

Les fragments scFv (single chain fragment variable) sont l’une des structures minimales capables de lier un antigène (25kD). Les deux domaines variables VH et VL d’un anticorps sont associés de façon covalente par un lien peptidique. Ils peuvent être agencés dans l’orientation VL-VH ou VH-VL, l’extrémité C-terminale d’un domaine étant reliée à l’extrémité N-terminale de l’autre domaine par un lien peptidique qui maintient la cohésion des deux domaines variables sans perturber les contacts inter-domaines. Le lien doit être flexible, soluble et sa longueur supérieure à 12 résidus pour répondre aux caractéristiques structurales d’association des domaines VH et VL.

On peut aussi dériver à partir de scFv des formats variés dont certains peuvent conduire à des fragments d’anticorps mutispécifiques. Les formes dimériques (diabody), trimériques (triabody) et tétramériques (tétrabody) des scFv peuvent être produites. Pour

cela, la longueur du lien peptidique entre les deux domaines variables doit être réduite (Holliger et al. 1993). Un peptide court (11 résidus d’acides aminés ou moins) induit une multimérisation du fragment car des contraintes stériques empêchent l’association des domaines variables lourd et léger d’une même sous-unité. Plusieurs sous-unités peuvent alors s’associer, le domaine variable lourd d’une sous-unité s’appariant avec le domaine variable léger d’une autre sous-unité. La nature et le nombre de résidus d’acides aminés composant le bras, ainsi que l’agencement des deux domaines variables influencent la forme stable et les proportions des différents oligomères (Lawrence et al., 1998 ; Blanco et al., 2003 ; Kortt et al., 2001 ; Dolezal et al., 2000). Il est considéré qu’un lien peptidique de 3 à 12 résidus d’acides aminés permet l’obtention du diabody (bivalent) (Holliger et al., 1993). La réduction du lien à moins de trois résidus favorise la formation du triabody (trivalent) et du tétrabody (tétravalent) (Dolezal et al., 2000 ; Hudson et Kortt, 1999 ; Hudson et Souriau, 2003).

Le plus petit domaine capable de reconnaître un antigène avec de bonnes propriétés de spécificité et d’affinité est le VHH. Ce domaine est très similaire au fragment VH mais n’est pas associé à un domaine VL. Ce domaine particulier a été découvert chez les camélidés, chez qui il existe, en plus des anticorps conventionnels, des anticorps (appelés simple chaîne lourde) qui sont dépourvus de chaîne légère et de domaine CH1 (Hamers-Casterman et al., 1993). Ces fragments d’anticorps sont très faciles à produire dans la levure ou dans des bactéries et sont résistants à hautes températures (Dumoulin et al., 2002). De par leur petite taille, ces fragments se lient souvent à des cavités et constituent

une bonne source d’inhibiteurs d’enzymes (Lauwereys et al., 1998). Les VHH ouvrent de

nouvelles perspectives en biotechnologies.

I.2.2.4.3 Biodistribution et pharmacocinétique des différents formats d’anticorps

Pour de nombreuses applications thérapeutiques, notamment en immunothérapie anti-cancéreuse et anti-venin, les fragments Fab qui possèdent des caractéristiques pharmacocinétiques différentes de celles de l’anticorps entier, sont souvent mieux adaptées (Divgi and Larson, 1989 ; Gutierrez et al., 2003). Les demi-vies de distribution et d’élimination, chez le rat, passent respectivement de 6-104 heures pour l’IgG à 0,3-23 heures pour le format Fab (Weir et al., 2002). Or une clearance sanguine lente

augmente la fixation non spécifique notamment sur les cellules normales et donc diminue le ratio cellules tumorales/ cellules normales, important en radioimmunothérapie anti-cancéreuse (Buchsbaum, 1995). Toutefois, les Fab d’origine murine sont toujours immunogènes chez l’homme car ils présentent notamment le domaine CH1 de la partie constante. L’immunogénicité peut être réduite en chimérisant ou en humanisant le Fab.

L’immunogénicité des scFv est faible et ils présentent une grande capacité à diffuser dans les tissus (Gilliland et al., 1999 ; Batra et al., 2002). Toutefois, il semble que ces molécules aient une demi-vie très courte lorsqu’elles sont administrées à l’animal, leur élimination par voie rénale étant très rapide (Yokota et al., 1992 ; Colcher et al., 1999). Les fragments scFv peuvent également servir de module de base pour le développement de structures plus complexes (Rheinnecher et al., 1996; Todorovska et al., 2001). Ainsi, la multivalence peut être recherchée pour augmenter l’avidité d’un fragment d’anticorps pour un antigène, pour en accroître la taille, en moduler la demi-vie ou les caractéristiques pharmacocinétiques (Kortt et al., 1997 ; Plückthun and Pack, 1997 ; Hudson et Kortt, 1999).