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Chapitre 1 Objectifs de la thèse

II. Les technologies de détecteurs

3. Les détecteurs matriciels

Les détecteurs matriciels mettent en parallèle une multitude de détecteurs ponctuels. Ainsi, obtenir des détecteurs bas bruits sur toute la surface de la matrice est un défi technologique de taille mais qui tire parti des développements des procédés de fabrication en microélectronique dans les fonderies silicium. Ainsi un imageur matriciel est composé de deux parties : le détecteur et le circuit de lecture ROIC (Read Out Integrated Circuit).

Le matériau composant le détecteur détermine la gamme spectrale de fonctionnement du capteur, typiquement le silicium pour le visible, l’InGaAs pour la bande I et le MCT pour les bandes II et III. Nous nous focaliserons ici seulement sur les deux premiers types de détecteurs.

Il existe deux grandes familles technologiques de circuits de lecture aux fonctionnements très différents :

La technologie CCD (Charge Coupled Device) où les charges produites par la photodiode sont accumulées dans un puit de potentiel au niveau de chaque pixel. Puis une grille d’électrode fait varier le potentiel du puit et transfère les charges d’une colonne jusqu’à la sortie où s’effectue la conversion en tension.

La technologie CMOS (Complementary Metal Oxide Semi-Conductor) où chacun des pixels possède son propre convertisseur en tension, en utilisant des transistors. Il existe de nombreuses architectures de pixels de lecture avec chacune leurs avantages. Ces matrices sont fabriquées dans les mêmes fonderies que celles utilisées en mircroélectronique. Ainsi les progrès et la réduction des coûts de fabrications sont spectaculaires [34] et la technologie CMOS tend à supplanter la technologie CCD.

Il y a de plus de nombreux avantages à utiliser des matrices CMOS plutôt que CCD. Les tensions de fonctionnements CMOS peuvent être de 3 V alors que 15 V sont nécessaires pour les CCD. Chaque pixel possédant son propre circuit électronique, les CMOS peuvent fonctionner à des cadences beaucoup plus grandes et sont aussi beaucoup moins sensibles aux perturbations et aux parasites contrairement aux CCD qui doivent manipuler de faibles photocourants sur la surface du capteur. Enfin de nombreuses fonctions électroniques, de calculs et de traitement du signal peuvent être intégrées directement sur le circuit CMOS.

Dans le domaine des imageurs en bande I, il faut hybrider (relier électriquement pixel par pixel) le détecteur en technologie InGaAs et le circuit de lecture en silicium. Dans le cas des détecteurs visibles CMOS, l’hybridation n’est pas nécessaire : la partie électronique des circuits de lecture est co-intégrée avec la partie optique des pixels. Des détecteurs très hautes performances sont ainsi obtenus. On peut en particulier citer les capteurs Fairchild Imaging [35] comme celui que nous avons utilisé dans nos expériences d’imagerie. Il est composé

600 nm est obtenue avec un bruit de lecture de seulement 1 e- rms (1 électron en valeur efficace).

L’hybridation entre un détecteur InGaAs et un circuit de lecture CMOS est beaucoup plus complexe et engendre des surplus de bruit de lecture difficilement améliorables. Plusieurs types d’hybridations sont possibles, la plus utilisée est l’hybridation par des contacts sur chaque pixel par microbille d’indium (Figure 1-15). Quelques constructeurs se partagent actuellement le marché tels que le III-V Lab (Thales, Nokia, CEA Leti), Xenics, Sensor Unlimited, NIT, SCD, Chunghwa, Teledyne, Aerius photonics et Flir. Les meilleures performances obtenues en bruit de lecture sont de l’ordre de 30 e

rms pour des efficacités quantiques de 80% à 1550 nm. De plus, la majorité de ces capteurs sont fabriqués par des entreprises basées aux États-Unis et sont donc soumis au contrôle des exportations d’armes US (ITAR).

Figure 1-15 : Image MEB d’hybridation par bille d’indium [34].

La réponse spectrale des détecteurs matriciels InGaAs est similaire à celle des monodétecteurs. En revanche, en ce qui concerne les détecteurs CMOS visibles (Figure 1-16), le maximum de sensibilité est atteint autour de 600 nm, ce qui est plus bas en longueur d’onde que les détecteurs silicium ponctuels. Le rendement quantique est de 60%, contre 80% pour les détecteurs InGaAs. C’est peut-être le seul paramètre où les détecteurs InGaAs sont meilleurs que les détecteurs Si. En effet, les propriétés de dynamique, linéarité, uniformité des pixels, courant d’obscurité et coût sont indiscutablement à l’avantage des détecteurs CMOS pour le visible.

Figure 1-16 : Courbe d’efficacité quantique d’un capteur CMOS Fairchild Imaging [35].

Le développement de détecteurs matriciels à InGaAs étendu, pour atteindre la gamme spectrale autour de 2 µm manque cruellement de moyens, et il n’existe actuellement aucun produit hautes performances disponible sur le marché. Les applications de niches de ces détecteurs ne permettent pas un développement industriel suffisant pour une montée en maturation de cette technologie. Ainsi trouver des alternatives de détection pour ces longueurs d’ondes est une nécessité.

Les niveaux de bruits obtenus dans les détecteurs visibles permettent de s’approcher de la détection de photons uniques. Plusieurs technologies sont en développement pour espérer atteindre ces régimes. On peut citer par exemple l’ebCMOS [36] où les photo-électrons sont accélérés par un champ électrique intense (de l’ordre du kV/mm) avant de bombarder la puce CMOS. Dans ces dispositifs, le bruit de lecture n’est pas réduit mais c’est le signal incident qui est amplifié, ce qui augmente le rapport signal à bruit.

Une autre technologie en développement est celle des matrices de SPAD qui consiste en la mise en parallèle de photodiodes à avalanche en mode Geiger déjà présentées dans la partie sur les détecteurs ponctuels. Seules de petites matrices ont actuellement été obtenues (64x64 pixels) avec des tailles de pixels de l’ordre de la centaine de µm. Chacun de ces pixels possédant sa propre électronique, la mise en parallèle est complexe et volumineuse.

Enfin, la technologie CMOS continue à progresser, en particulier avec les travaux d’Eric Fossum de la Thayer School of Engineering à Dartmouth (USA) qui a récemment mis au point un capteur CMOS possédant un bruit de lecture de seulement 0,21 e- rms, un courant d’obscurité de 0,2 e

-/s et des efficacité quantiques de 70% [37].

Cependant tous ces travaux novateurs concernent principalement les détecteurs pour le domaine visible et les détecteurs infrarouges pour la bande I et au-delà progressent à un rythme bien moins soutenu.

III. Détection par somme de fréquence : propriétés, limites et état