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Les culicoides et la fièvre catarrhale ovine

BILAN DES ACTIVITES DE RECHERCHE

4.2 Les culicoides et la fièvre catarrhale ovine

4.2.1 Historique et répartititon

La fièvre catarrhale ovine (FCO) ou Bluetongue (BT) est une maladie virale, infectieuse, non contagieuse, transmissible, à déclaration obligatoire et qui affecte les ruminants domestiques ou sauvages. La FCO est observée pour la première fois en 1880, en Afrique du Sud, sur un troupeau importé de moutons de race mérinos (Hutcheon, 1881). C’est également Hutcheon, en 1902, qui fait la première description de la maladie sous le nom de Malarial catarrhal fever of

sheep (Erasmus, 1985; Hutcheon, 1902; Verwoerd & Erasmus, 1994), puis Spreull, de manière

plus détaillée, en 1905 sous le nom de bluetongue (Spreull, 1902; 1905). L’origine virale de la maladie ainsi que les espèces sensibles ont été définies dès 1905 par Theiler (Howell, 1960; 1970; Theiler, 1906) et le virus a été isolé pour la première fois en Australie en 1975. En 1948, Neitz met en évidence l’existence de plusieurs sérotypes viraux au travers d’études de protections croisées chez le mouton (Neitz, 1948). L’implication du rôle vecteur de Culicoides

imicola connu également sous la dénomination de C. pallidipennis est établie en 1944 par Du

Toit (Du Toit, 1944); depuis, la capacité de transmission du virus de la FCO a été démontrée pour de nombreuses autres espèces de Culicoides.

La maladie s’est limitée au continent africain jusque dans les années 1940 puis s’est étendue à partir de 1943 dans le bassin méditerranéen (Chypre, Israël, Turquie, Syrie, Oman, Arabie Saoudite), et l’Asie (Inde, Chine, Pakistan, Japon, Indonésie, Malaisie) (Verwoerd & Erasmus, 1994). On la retrouve également de manière endémique en Amérique du Nord (USA, Canada), Amérique Centrale, Amérique du Sud (Mexique, Chili, Brésil, Guyane), Australie et Nouvelle-Zélande dès les années 1950. Dans la littérature, la FCO est traditionnellement décrite comme une maladie présente sur tous les continents dans une zone géographique comprise entre des latitudes de 40°- 50° Nord et 20°-30° Sud (Lefèvre, 2003). En revanche, les sérotypes ne sont pas représentés de manière uniforme sur tous les continents. Plus récemment, en 1998, cette maladie est réapparue en Grèce, puis en 1999 en Bulgarie, Tunisie et Turquie ; en 2000 en Tunisie, Algérie, Italie (Sardaigne, Sicile et Calabres), Espagne (îles Baléares), et en France (Corse) (Zientara et al., 2000; 2002, Mellor et al., 2008). La propagation de la maladie en Europe a suivi deux voies : une première introduction du virus par l’Asie (sérotypes 9, 16) et une seconde par le Maghreb (sérotypes 1, 2, 4). La maladie s’est également étendue vers le Nord et a sévi en Bulgarie, au Kosovo et en Serbie (Purse et al., 2005). En août 2006, plusieurs dizaines de foyers ont été diagnostiqués pour la première fois dans le Nord de l’Europe, Allemagne, Belgique, Hollande et France (OIE, 2006). Le sérotype incriminé est le sérotype 8 (Toussaint et al., 2007). Une des caractéristiques de cette épizootie est la pathologie sévère observée chez les bovins (Thiry et al., 2006). L’origine de l’infection par ce nouveau sérotype, jusqu’alors inexistant dans le bassin méditerranéen, est inconnue. De plus, une espèce de

Culicoides locale décrite comme vecteur potentiel semble avoir pris le relais du vecteur avéré

dans le bassin méditerranéen, C. imicola, absent dans cette zone. Ainsi C. chiopterus a été identifié comme vecteur majeur de la maladie au cours de cette épizootie (Dijkstra et al., 2008).

La figure 1 fait un état des lieux de la répartition géographique actuelle de la maladie dans le monde entier. Les raisons des changements dans l’épidémiologie de la FCO sont complexes et sont liées à différents facteurs notamment à de récentes extensions de la distribution de son vecteur majeur, C. imicola, mais aussi à l’implication de nouveaux insectes vecteurs du genre Culicoides pouvant jouer alors le rôle de relais. Les variations climatiques et notamment de températures peuvent jouer un rôle à la fois dans l’augmentation de la compétence vectorielle dans les populations de Culicoides (Mullens et al., 1995; Wittmann et

al., 2002) mais également dans la capacité de transmission chez des espèces habituellement

réfractaires à l’infection (Mellor, 2000b).

Figure 2 - Carte de répartition de la fièvre catarrhale ovine en 2009

Adapté de Barber, 1979; Clavijo et al., 2002; Daniels et al., 1995; Dulac et al., 1989; 1992; Gibbs & Greiner, 1988, 1994; Lefèvre, 2003; Sharifah et al., 1995. Les sérotypes incriminés sont précisés pour chacune des zones géographiques.

4.2.2 Le vecteur

La FCO est transmise essentiellement par des insectes hématophages appartenant au genre Culicoides (Diptera: Ceratopogonidae) Latreille 1809. La famille des Ceratopogonidae comprend environ 5500 espèces réparties en 125 genres dont le genre Culicoides (Mellor et al., 2000a). Ce dernier compte, à lui seul, plus de 1254 espèces (Beckenbach & Borkent, 2003) réparties en 25 sous-genres dont le genre Avaritia Fox, 1955 comprenant plusieurs espèces impliquées dans la transmission de la FCO. Seulement une trentaine d’espèces de Culicoides ont été incriminées dans la transmission du virus de la FCO (Tableau 1) (Mellor, 1990; Meiswinkel, 2004). Ces insectes sont également impliqués dans la transmission de nombreuses maladies, humaines ou vétérinaires. Ainsi, ils sont responsables de la transmission de nématodes, de protozoaires (Linley, 1985) et de nombreux virus de la famille des Bunyaviridae (virus Akabane), Rhabodoviridae et Reoviridae (virus de la peste équine africaine (AHSV) et de la maladie hémorragique du daim (EHDV).

La diffusion de ces insectes se fait beaucoup par transport passif, notamment par le vent (Sellers, 1980). Ainsi des vols jusqu'à 700 Kms seraient possibles (Mellor et al., 2000b). De nombreuses études ont montré que l’introduction de nouvelles maladies était très fortement liée

40 – 50°N

20 – 30°S

Amérique du Nord et Mexique: 2, 10, 11, 12, 13, 17 Amérique Centrale et Caraïbes: 1, 3, 4, 6, 8, 12, 17 Amérique du Sud 4, 6, 12, 14, 17, 19, 20 Europe du Nord: 8 Bassin méditerranéen: 1, 2, 4, 9, 16 Afrique subsaharienne: 1 à 16 ; 18, 19, 22, 23, 24 Asie: 1, 2, 3, 7, 9, 12, 16, 21, 23 Moyen orient: 1, 2, 3, 4, 6, 9, 10, 12, 13, 14, 16, 17, 19, 20 Australie et Pacifique: 1, 3, 9, 15, 16, 20, 21, 23 Répartition de la Fièvre catarrhale ovine

1995 2007

1, 6, 8 et 11 1, 2, 4, 8 , 9 et 16

à des mouvements passifs de Culicoides (Homan et al., 1990; Mohammed & Taylor, 1987; Sellers et al., 1979; Sellers & Maarouf, 1989). La capacité de transmission d’agents pathogènes, notamment du virus de la FCO, n’a été établie de manière définitive que pour quelques espèces de Culicoides et est suspectée pour d’autres espèces (Delécolle & Schaffner, 2003). Celle-ci est conditionnée par le vecteur lui-même, le virus, l’hôte et les conditions climatiques (Hardy et al., 1983). La capacité vectorielle des Culicoides dépend également de facteurs environnementaux dont la température principalement (Mullens et al., 1995). En effet, les basses températures diminuent le taux d’infection, la virogenèse, la fréquence des repas, et repoussent la date de la première piqûre infectante. A l’inverse, des températures élevées augmentent ces mêmes phénomènes et accélèrent les processus de réplication virale à l’intérieur de l’insecte (Gerry & Mullens, 2000).

De plus, il a été suggéré que des températures élevées pourraient augmenter la capacité vectorielle d’espèces qui ne sont habituellement pas considérées comme vectrices (Wittmann, 1999). L’identification des espèces et la systématique en général, sont réalisées en fonction de ressemblances morphologiques sur la base d’une clé d’identification (Delécolle, 1985) et notamment grâce aux motifs alaires composés de zones claires et de zones sombres (Figure 2). Lorsque le patron alaire ne permet pas une identification précise de l’espèce, les spécimens doivent être disséqués et montés sur lames pour être identifiés microscopiquement. L’identification des femelles est basée sur la forme des spermathèques, l’espace inter oculaire, le nombre et l’arrangement des soies présentes sur les antennes. Pour les mâles, la forme du genitalia est généralement suffisante pour établir une identification spécifique (Meiswinkel et

al., 1994). Les larves des différentes espèces de Culicoides sont difficilement identifiables sur

le plan morphologique.

Figure 2 - Patrons alaires de Culicoides obsoletus et Culicoides scoticus

D’après Jean-Claude Delécolle, communication personnelle.

Objectifs du travail de biologie moléculaire élaboré sur les vecteurs