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Chapitre I La microscopie à force atomique

B. Les études d'élasticité

1. Les courbes de force-distance

Ce mode consiste à construire une courbe d'approche-retrait de la pointe par rapport à la surface. La boucle d’asservissement qui maintient constante la position du microlevier est coupée et le tracé des variations du signal (A-B) en fonction de la distance entre la pointe et l’échantillon s’appelle une courbe de force-distance (voir figure I.9).

L’interprétation de cette courbe est la suivante [Burnham et al, 1993, Cappella et Dietler, 1999]. Loin de la surface, aucune force n’agit sur le microlevier qui reste immobile (A).

Lorsque la pointe s'approche de la surface, les forces de van der Waals, agissant à longue portée comme nous l’avons vu précédemment, commence à fléchir le microlevier (B) jusqu’au point C où se produit une instabilité. En effet, à ce moment, le gradient de la force attractive devient supérieur à la constante de rappel du microlevier et celui-ci est attiré brusquement à la surface de l’échantillon. Les conditions expérimentales font varier la distance à laquelle intervient cette instabilité puisque, par exemple, la force de capillarité et un levier très souple favorisent une apparition précoce de ce saut au contact. Le point D correspond à la force attractive maximale. Si la pointe continue à pénétrer dans le matériau, les forces répulsives croissent jusqu'au point E où elles compensent exactement les forces attractives : le microlevier est au repos comme en A. Au-delà, l’interaction répulsive domine et le microlevier change de courbure.

En sens inverse, la force appliquée décroît jusqu'au retour dans le régime attractif et, au point F se produit une seconde instabilité qui ramène le microlevier au repos : la hauteur du saut représente la force adhésive maximale.

Il faut préciser que les trajets aller et retour ne se superposent pas toujours pour deux raisons essentielles. La première est l'apparition de déformations plastiques qui peuvent provoquer une variation dans la réponse du microlevier. La seconde explication réside dans la réponse du tube piézo-électrique. En effet, celui-ci est sujet à plusieurs problèmes comme la non-linéarité (surtout observée lors de grands déplacements), l'hystérésis ou les variations de réponse en fonction de la fréquence.

Figure I.9 :représentation d'une courbe de force-distance. L'imagerie se fait soit avec une force répulsive (mode contact), soit avec une force attractive (et non contact). La courbe de force-distance est généralement utilisée pour la mesure des forces d’adhésion et des propriétés élastiques. régime répulsif régime attractif Distance pointe-échantillon Fadh Si gnal A -B C A B D E F

Les courbes de force-distance ont été initialement surtout utilisées pour la mesure des forces d'adhésion puis ont rapidement été détournées de cette première utilisation pour être utilisées afin d'indenter les surfaces grâce à la maîtrise des forces appliquées entre la pointe et la surface [Burnham et Colton, 1989]. Ainsi, l'estimation de la profondeur de ces indentations mène à l'estimation du module élastique du matériau. Pour une surface souple, celle-ci se déforme sous l'effet de la force appliquée lors de l'approche de la pointe. On détecte les déflexions du microlevier, et l'indentation dans la surface correspond alors à la différence entre le déplacement du tube piézo-électrique et celui de la pointe. La calibration de ce mouvement s'obtient en faisant une courbe de force-distance sur une surface très rigide pour laquelle il n'y aura pas, ou peu, d'indentation, la déflexion du microlevier étant alors égale au déplacement de la céramique piézo-électrique (voir figure I.10). La pente de la droite correspond à la sensibilité verticale Sv du microlevier qui permet de convertir toute variation du signal (A-B) en déflexion ∆z$.

L'adaptation des courbes de force-distance à la réalisation d'image d'élasticité a été proposée et réalisée par Heuberger et al. [1994], ainsi que par Rosa-Zeiser et al. [1997] sous le nom de "pulsed-force mode".

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Nous verrons au chapitre V que cette relation entre déflexion et variation angulaire n'est pas toujours correcte, ce qui complique l'estimation des déflexions ∆z.

Figure I.10 : courbe de force sur une surface rigide (Si) et sur une surface souple (PolyEthylène Basse Densité). La surface rigide sert à calibrer le déplacement du microlevier. L'étude de la variation de l'indentation en fonction de la force appliquée permet, avec les théories élastiques du contact, de déterminer le module élastique de l'échantillon.

-0,2 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 0 100 200 300 400 500 600 indentation fo rce

Déplacement tube piézo-électrique (nm)

Sig n al A-B (un ité arb itraire) PEBD Si Sv

1.2 Les principaux résultats

Les premières mesures par Burnham et Colton [1989] effectuées sur différentes surfaces (élastomère, graphite, or) ont conduit à des mesures du module d'élasticité proches des valeurs macroscopiques. Par la suite, Weisenhorn et al. [1993] ont testé la sensibilité de la technique puisqu'ils ont réussi à caractériser deux couches de polyuréthane possédant un module élastique très proche (respectivement 14 et 30 MPa). Il est ainsi possible de distinguer deux matériaux avec des courbes de force-distance.

Cette technique a aussi été largement utilisée pour l'étude des propriétés élastiques d'échantillons biologiques tels que l'os [Tao et al., 1992], les cellules [Sato et al., 2000], les protéines [Radmacher et al., 1994] ou des fibres biologiques [Parbhu et al., 1999].

Cependant, il convient de préciser que l'interprétation quantitative des courbes de force-distance reste soumise à quelques imprécisions. Ainsi, Aimé et al. [1994] ont mis en évidence que les caractéristiques du microlevier (raideur en flexion, forme de la pointe) ainsi que la difficulté de distinguer entre les déformations élastiques, viscoélastiques et plastiques pouvaient conduire à des interprétations erronées. De même l'influence du substrat a été mise en évidence pour des dépôts minces lors d'indentations importantes [Domke et Radmacher, 1998; Akhremitchev et Walker, 1999] et mène à des estimations du module élastique fausses.

Une autre source d'imprécision vient de l'inclinaison du microlevier par rapport à la surface qui n'est jamais prise en compte. En effet l'estimation de la profondeur d'indentation est faite sur l'hypothèse d'un microlevier horizontal et induit donc a priori une surestimation de la mesure de celle-ci. De plus cette inclinaison favorise l'influence de la friction qui crée une variation angulaire parasite. Nous reviendrons largement au chapitre V sur la mesure de la profondeur d'indentation élastique δ.

2. La modulation de force

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