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Chapitre 1 : Etude bibliographique

I.5 La transition résistive ou « quench »

I.5.2 Les conséquences d’un quench sans protection

La dégradation des conducteurs

Les supraconducteurs sont utilisés là où leurs propriétés sont très avantageuses et où leur utilisation est nécessaire. Les applications sont développées en tenant compte de l’état non dissipatif de ces conducteurs. Lorsqu’un problème survient, l’état non dissipatif est localement perdu. L’énergie stockée dans l’aimant est alors dissipée dans la partie résistive qui se propage plus ou moins vite. Cela entraine une hausse importante de la température qui est d’autant plus forte que l’énergie stockée est importante et que le volume de conducteur dissipant l’énergie est faible. Dans certains cas la hausse de température est telle que l’aimant est endommagé, voire détruit.

La hausse de température de 𝑇𝑜𝑝 à 𝑇𝑚𝑎𝑥 peut-être estimée facilement par la formule 1-13 en considérant un bobinage adiabatique stockant une énergie 𝐸𝑚𝑎𝑔, ayant un volume

dissipant l’énergie 𝑉𝑟𝑒𝑠𝑖𝑠𝑡 et une capacité thermique volumique 𝐶𝑝𝑣(𝑇).

𝑬𝒎𝒂𝒈 = 𝑽𝒓𝒆𝒔𝒊𝒔𝒕∗ ∫𝑻𝒎𝒂𝒙𝑪𝒑𝒗(𝑻)𝒅𝑻

𝑻𝒐𝒑

48 En utilisant cette formule pour déterminer la température maximale d’un bobinage stockant 150 kJ, comportant 20 km de ruban SCS4050 (~2 kJ/kg) et fonctionnant à 4 K, on obtient les résultats présentés dans la Figure 1-29. En général la température maximale dans un aimant est considérée comme viable en dessous de 200 K, risquée entre 200 K et 300 K et très risquée au-delà de 300 K [3]. Cette délimitation des zones risquées tient compte des contraintes différentielles dans l’aimant et de la dégradation des isolations et des soudures. Des études sur des échantillons courts ont montré que les rubans d’YBCO pouvaient dépasser les 300 K (voire

Figure 1-29: Estimation de la température maximale d’une bobine stockant 150kJ et

utilisant 20km de ruban SCS4050

500 K) sans être endommagés [36–39]. Dans notre cas une température inférieure à 200 K nécessite de dissiper l’énergie dans 2 km de conducteur et la limite de 500 K nécessite une longueur supérieure à 200 m (soit 1 % du bobinage). Cette longueur est à mettre en rapport avec la faible vitesse de propagation de la transition résistive dans les SHTC qui donne des zones transitées inférieures à quelques mètres. La température du point chaud dépasse les 2000 K si l’énergie est dissipée dans ces quelques mètres. La destruction du bobinage est alors inévitable. Cet exemple est accentué dans un aimant stockant 20 kJ/kg.

Si l’on regarde la température admissible pour les soudures des rubans (>150 °C ou 423 K), les risques ne sont pas liés aux matériaux eux mêmes mais aux contraintes engendrées dans le bobinage par l’augmentation rapide et localisée de la température. Certaines études montrent que l’endommagement des supraconducteurs SHTC n’est pas uniquement dû à la température maximale atteinte, mais aussi au gradient de température dans le bobinage et à la vitesse de montée en température [30, 31]. La vitesse d’échauffement du conducteur SCS4050 peut être estimée en considérant le cas d’un échauffement localement adiabatique du ruban par la formule 1-14. Dans le cas du ruban SCS4050, la résistivité 𝜌𝑚 correspond à celle calculée par le modèle loi de puissance (IV.3.2), 𝐶𝑐𝑝 est la capacité thermique volumique moyenne du ruban et 𝛼 est la proportion

de cuivre et d’argent dans le ruban (0,44). Le résultat pour un ruban SCS4050 en champ propre et transportant 200 A est présenté sur la Figure 1-30.

𝝏𝑻 𝝏𝒕 = 𝝆𝒎(𝑻) 𝑪𝒑𝒗(𝑻)∗ 𝜶 ∗ 𝒋𝒆𝟐 1-14 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 102 103

Zone sans risque Zone moyennement risquée

Zone très risquée Temp é ra tu re ma xima le [K]

Longueur dissipant l'énergie [km]

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

49

Figure 1-30 : Vitesse d’échauffement estimée du ruban SCS4050 en champ propre et transportant 200 A obtenus par la formule 1-14.

La densité de courant est importante dans ces supraconducteurs et cela entraine une dissipation très forte et donc une augmentation de température très rapide. Lorsqu’on se trouve en dessous de la température de partage, la température n’augmente pas puisque le ruban est supraconducteur et lorsqu’on dépasse cette température, la hausse de température est très rapide pouvant atteindre plus de 1000 K/s dès 150 K. Cette estimation correspond à l’ordre de grandeur mesuré expérimentalement sur un ruban d’YBCO vendu par AMSC en 2005 [36]. Des augmentations de température de l’ordre de 1800 K/s à 450 K ont aussi été mesurées. Des températures plus élevées sont aussi atteignables sans détérioration avec d’autres conducteurs (700 K ont par exemple été mesurés dans le cas du Bi-2223/Ag sans endommagement visible [3]).

De telles températures ont été mesurées sur des échantillons courts. Une variation brutale menant à des températures aussi élevées dans des bobines peut être beaucoup plus dommageable. Les gradients thermiques générés entraînent en effet des contraintes mécaniques s’ajoutant aux contraintes magnétiques, et amènent à une dégradation progressive du supraconducteur [32, 34, 35, 36].

L’endommagement ou la rupture des isolants

Un quench peut aussi avoir des conséquences sur les isolants et principalement ceux séparant les spires. Les isolants utilisés, en particulier les résines organiques, voient leurs propriétés se dégrader lorsqu’ils sont soumis à une température élevée (il est considéré qu’au-delà de 380 K, ces matériaux perdent leur résistance mécanique [3]). Cela peut entrainer des court-circuits entre les spires ou des arcs électriques pouvant endommager localement les conducteurs.

0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 100 101 102 103 104 d T /d t [K /s] Température [K]

50 Endommagement des soudures

La plupart des alliages de soudure fondent à des températures inférieures à 500 K. Certains à plus basse température (320 K pour les alliages à base d’Indium et 456 K pour le 63Sn37Pb). L’augmentation localisée de la température peut donc aussi endommager des soudures dans le bobinage, telles que les joints entre longueurs de conducteurs, les soudures d’instrumentation, ou encore les conducteurs eux-mêmes s’ils sont composés d’une âme soudée dans une gaine.