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Chapitre 1 : Synthèse bibliographique

III. Les margines

3.2. Composés vitaminiques

3.2.1. Les caroténoïdes

3.2.1.1. Propriétés générales

Les caroténoïdes sont un des groupes principaux pigments d’origine naturelle (figure 7), largement répandus dans la nature et qui absorbent électivement la lumière. Ce sont des pigments montrant une grande diversité en terme de structure, et leur distribution est universelle dans la matière vivante, quel que soit le degré d’évolution et de complexité : on les retrouve des archéobactéries et procaryotes aux angiospermes, et des protozoaires aux mammifères (Cuttriss et al., 2011).

Les xanthophylles, carotènes et lycopènes sont responsables, respectivement des colorations jaune, orange et rouge. Les caroténoïdes végétaux sont transférés aux produits animaux, parfois en grande quantité (jaune d’œuf ; Skřivan et Englmaierová, 2014), ou de manière moins importante, comme pour les produits issus des ruminants chez lesquels ils modifient la couleur du lait, des produits laitiers ou de la graisse corporelle (Kalaç & Samková, 2010). Les consommateurs sont sensibles à la coloration des produits, même si leurs préférences diffèrent selon les pays ou les régions. Une coloration jaune du lait est associée aux pâturages, ce qui, confère une connotation d’alimentation naturelle (Nozière et al., 2006b). Ainsi, les caroténoïdes pourraient être des indicateurs d’élevage plein air.

3.2.1.2. Structure générale et propriétés physico-chimiques

Les caroténoïdes rassemblent plus de 750 composés, appartenant à la famille chimique des terpénoïdes, dont le point commun est une longue chaîne polyénique comportant en moyenne 11 doubles liaisons conjuguées (Nisar et al., 2015). Ils regroupent deux classes de composés : les carotènes, hydrocarbures polyéniques à 40 atomes de carbones (C40), et les xanthophylles synthétisés à partir des carotènes et qui possèdent au moins une fonction oxygénée (hydroxyle, époxyde, carbonyle ou carboxyle). La majorité des caroténoïdes appartient à cette dernière classe (Button, 1995). Parmi les caroténoïdes les plus fréquents du règne végétal, on trouve deux formes principales de carotènes (α-carotène et β-carotène) et cinq xanthophylles

Pigments naturels

Dérivés tétrapyrroles Dérivés benzopyranes

Chlorophylles Pigments sanguins et biliaires Flavonoïdes Anthocyanine s CAROTENOÏDES Xanthophylles (Phylloxanthines) Carotènes Zéaxanthine s Lutéine Cryptoxanthine s β-carotène α-carotène β-carotène

(lutéine, zéaxanthine, violaxanthine, anthéraxanthine et néoxanthine ; McQuinn et al., 2015) (figure 8).

L’introduction d’une fonction hydroxyle dans le α-carotène permet la formation de lutéine, alors que le β-carotène est le précurseur de la zéaxanthine, la violaxanthine, et l’anthéraxanthine. Ce mécanisme est à l’origine de leurs propriétés anti-oxydantes (Chen et al., 2015).

Les caroténoïdes peuvent adopter des configurations E (trans) ou Z (cis) du fait de la présence des doubles liaisons. A l'état naturel, ils sont généralement présents sous la forme E, configuration la plus stable d'un point de vue thermodynamique, mais susceptibles de s'isomériser pour donner des isomères Z sous l'effet de la lumière ou de la chaleur.

Les caroténoïdes sont dits chromophores, c’est-à-dire qu’ils absorbent les photons dans le spectre visible entre 320 et 550 nm. La caractérisation du chromophore est liée au nombre de doubles liaisons et à la variation de groupes fonctionnels et de diverses conformations. Ces variations de structure entraînent la modification de l’absorption lumineuse et donc, de la couleur. Elles permettent aussi leur identification par spectrophotomérie.

3.2.1.3. Intérêts nutritionnels

Dans l’alimentation humaine, une cinquantaine de caroténoïdes est consommée de façon relativement fréquente, une dizaine d’entre eux de façon importante et les trois principaux (le β-

carotène, la lutéine et le lycopène) constituent 80 % des apports en pigment (McDowell, 2000). Les carottes sont la principale source de β-carotène, comme le sont les tomates pour le lycopène et les épinards pour la lutéine et la zéaxanthine. Les quatre principales fonctions identifiées des caroténoïdes incluent des fonctions provitamine A, antioxydantes, stimulatrices de la communication intercellulaire et du système immunitaire (Burton-Freeman et Reimers, 2011).

Le métabolisme des carotènes conduit à la formation de composés nommés rétinoïdes : rétinol, rétinal, acide rétinoïque (Bonet et al., 2015). Le rétinal et l’acide rétinoïque correspondent aux formes biologiquement actives de la vitamine A : rétinal pour la vision (Bernstein et al., 2016), l’acide rétinoïque dans le processus d’expression et de régulation génomique (Li et al., 2015), alors que le rétinal correspond à la forme de transport (Burri et al., 2016). Les études sur les potentialités antioxydantes des caroténoïdes ont révélé que les caroténoïdes sont de bons piégeurs de radicaux libres et de l’oxygène singlet (l'1O2), le plus actif étant le lycopène suivi de l'astaxanthine, de la cantaxanthine et du β-carotène (Bonet et al., 2015 ; Chen et al., 2015). De nombreuses études épidémiologiques ont montré l’existence d’une association entre une augmentation de la consommation de certains caroténoïdes et la diminution du risque de cancer (Choi et al., 2014). Les effets biologiques du lycopène, de la cantaxanthine et de la cryptoxanthine sur la communication intercellulaire pourraient expliquer, en partie, cette association (Burri et al., 2016). Enfin, les travaux de Chew (1993) ont mis en évidence un effet stimulant du β-carotène sur la prolifération des lymphocytes T et B, et sur le nombre et l'activité des cellules "natural killers" (NK). De plus, le β-carotène est impliqué dans le mécanisme d'action non spécifique du système immunitaire (Lucas et al., 2014) et la prévention contre certaines maladies inflammatoires (Lin et al., 2016) et cardiovasculaires (Wang et al., 2014).

Les fonctions des caroténoïdes chez les ruminants sont probablement similaires à celles décrites pour l’homme, même si elles n'ont pas forcément été mises en évidence (Calderon, 2007). Des aspects plus spécifiques aux ruminants, en particulier en ce qui concerne leur action sur la fertilité (Dewhurst et al., 2009), la fonction de reproduction (Michal et al., 1994), et sur la santé de la mamelle (Jucola et al., 1996), doivent cependant être soulignés.

Chez les plantes, les caroténoïdes et leur produits de clivage enzymatique et oxydatif, appelés apocaroténoïdes, sont cruciales pour diverses processus biologiques, tels que l'assemblage des photosystèmes et de complexes d'antenne de lumière pour la photosynthèse et la photoprotection, ainsi que pour la régulation de la croissance et le développement (Havaux, 2014). Les apocaroténoïdes sont également proposées pour servir de molécules de signalisation

et ont été impliqués dans les interactions entre les plantes et leur environnement (Cazzonelli & Pogson, 2010) .

3.2.1.4. Caroténoïdes des olives et des margines

Les caroténoïdes sont des composés liposolubles associés aux fractions lipidiques des organismes ou des matrices. Ainsi, leur présence dans les margines serait liée aux particules végétales en suspension ainsi qu'à l'huile résiduelle après le processus d'extraction. La présence et les concentrations de ces composés dans les margines n'ont jamais été étudiées. Cependant, dans l'huile d'olive, leur taux est très variable, allant de 6,22 à 1,15 mg/kg (Manai-Djebali et al., 2012). Leur concentration dans l'huile d'olive est liée à la variété d'olive (Manai-Djebali et al, 2012), au degré de maturité du fruit et au procédé d'extraction de l'huile (Inarejos-García et al., 2011).