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Synthèse bibliographique

I. Problématique liée à la présence de produits pharmaceutiques dans l’environnement

2.1 Les bioréacteurs à membrane (BàM)

2.1.1 Les bioréacteurs à membrane à boucle externe (BàME)

Dans une première génération de BàM, les bioréacteurs à membrane externe, sont aussi appelés « systèmes recirculés », puisque la liqueur mixte est pompée du bassin aéré vers le module de filtration placé à l’extérieur du bioréacteur (figure 2.1.1.1). Le retentat qui contient les molécules ou particules retenues est renvoyé vers le bassin d’aération.

Figure 2.1.1.1 Schéma d’un Bioréacteur à membrane Externe

La filtration, interne/externe, mise en œuvre est de type tangentiel. La vitesse de circulation doit être élevée (2 à 5 m/s) afin de générer des contraintes de cisaillement, qui vont limiter le développement du colmatage par dépôt, pour conduire à des valeurs élevées de flux de filtrat. Les modules tubulaires ou les plans sont les plus souvent utilisés. Les flux obtenus sont de l’ordre de 50 à 120 L.h-1.m-2. (Xing et al., 2000). Leurs inconvénients sont essentiellement le taux de

Bioréacteur Air Alimentation Perméat Retentât Module membranaire

cisaillement important subi par la biomasse (Wisniewski et al., 2000 ; Kim et al., 2001) ainsi que la consommation énergétique relativement élevée (de l’ordre de 10 à 50 kWh.m-3 , Gander et al., 2000 ; Le-Clech et al., 2006).

2.1.2 Les bioréacteurs à membranes immergées (BàMI)

Dans la seconde génération, le module de membrane est immergé dans le bassin d´aération (figure 2.1.2.1). Le perméat est soutiré par aspiration ce qui évite de pressuriser le bioréacteur. Ainsi la pression transmembranaire sera inférieure à 1 bar, en conséquence la dépense énergétique associée au BàMI est de l’ordre de 0,2-0,4 kWh.m-3 (Gander et al., 2000).

Les modules utilisés sont généralement des fibres creuses (la filtration a lieu de l’extérieur de la membrane vers l’intérieur des fibres) ou des membranes planes. La filtration mise en œuvre dans les BàMI peut être dite de type frontal car la vitesse du liquide est faible au voisinage de la membrane.

Les flux typiques pour des fonctionnements à long terme se situent entre 5 – 20 L.h-1.m-2. (Chang et al., 2002). Une aération par des grosses bulles est employée comme moyen mécanique pour prévenir, limiter et contrôler les dépôts et le colmatage. L´air est introduit au-dessous de la membrane et distribué de façon homogène pour optimiser l'action d’érosion de l’air à la surface de membrane.

Figure 2.1.2.1 Schéma d’un Bioréacteur à membranes immergées

Un nouveau bioréacteur (Figure 2.1.2.2), classé dans la catégorie des configurations internes, a récemment été développé. Il résulte d’un compromis entre les BàM à boucle externe et les BàMI. Les membranes sont immergées dans un carter placé à l’extérieur du bioréacteur, facilitant les

Bioréacteur Air Alimentation Perméat Module membranaire

opérations de maintenance (inspections, l'entretien nettoyage chimique). La filtration est semi- frontale, avec une très légère vitesse de circulation créée par un recyclage de la biomasse à faible débit. Les membranes utilisées sont généralement des fibres creuses. Dans cette configuration l’aération, nécessaire au métabolisme de la biomasse et à l’agitation des fibres, est découplée et ainsi optimisée. La séparation de l'unité de filtration du bioréacteur pourrait être bénéfique en cas d’une élimination avancée des éléments nutritifs (Lesjean et al., 2002).

Figure 2.1.2.2 Schéma d’un Bioréacteur à membrane à filtration semi-frontale avec module externe

2.2 Le colmatage dans les bioréacteurs à membrane

Le colmatage d’une membrane peut être défini comme l’ensemble des phénomènes qui interviennent dans la modification de ses propriétés filtrantes. Le colmatage se traduit par une diminution du flux de perméat pour une filtration à pression constante, ou une augmentation de la pression transmembranaire lors d’une filtration à flux de perméat constant. Il s’agit de phénomènes physiques, chimiques et biologiques se produisant à l’interface membrane/milieu biologique. Il peut être de nature inorganique (dépôt de particules, de CaCO3, de précipité de

sels,…) et/ou organique (Biofilm, EPS,…) (Judd 2004, Ognier et al., 2002). Les mécanismes de colmatage dans un procédé BàM sont très complexes de ce fait la prévision du colmatage reste encore difficile.

Le milieu présent dans les bioréacteurs à membrane est communément appelé boue activée ou liqueur mixte. Cette liqueur mixte est un milieu non homogène composé des diverses populations

Bioréacteur Air Alimentation Perméat Retentât Carter et Module membranaire Air

de bactéries, des matières en suspension, des macromolécules, des ions pouvant former des complexes avec les molécules organiques, des petites molécules organiques ou minérales. Chaque élément peut contribuer au colmatage des membranes. Particulièrement, la partie liquide ou surnageant de la liqueur mixte (composée de colloïdes et de substances dissoutes) participent amplement au colmatage. Les substances dissoutes proviennent à la fois de l’effluent à traiter mais aussi du métabolisme bactérien. On y trouve notamment des polymères extracellulaires (sucres, protéines, acides humiques…) qui sont reconnus comme des substances à haut pouvoir colmatant (Le-Clech et al., 2006).

On distingue communément deux grands types de colmatage. Le premier correspond à un colmatage dit réversible pouvant être éliminé in situ par différents moyens mécaniques tels que l´application de grosses bulles d´air, ou par rétrolavage à l´eau (filtration sous pression de perméat en sens inverse de la filtration, pour les BàMI), ou l’augmentation de la vitesse tangentielle le long de la membrane (pour les BàME) alors que, le colmatage irréversible nécessite obligatoirement un lavage chimique de la membrane (Jiang et al., 2003).

Hermia (1982) a proposé une classification plus précise des types de colmatage basée sur la comparaison entre la taille des pores de la membrane et celle des particules. Cette classification reste aujourd’hui très utilisée (Figure 2.2.1).

Figure 2.2.1. Schéma des différents mécanismes de colmatage.

Dépôt de particules Adsorption

Blocage des pores Membrane Alimentation Flux convectif Rétrodiffusion Perméat Biofilm Concentration en soluté Bouchage des pores Couche de gel

• Si la taille des particules est supérieure à celle des pores un colmatage en surface dit colmatage par gâteau se produit (dépôt en surface de la membrane).

• Si la taille des particules est largement inférieure à celle des pores, les particules vont entrer à l’intérieur de la membrane réduisant progressivement la taille des pores jusqu’à les boucher totalement. C’est ce qu’Hermia appelle le bouchage de pore. Il s’en suit une réduction de la surface poreuse de la membrane.

• Si la taille des particules est similaire à celle des pores un phénomène de blocage de pore se produit. Ce phénomène de blocage conduit à une diminution de la surface filtrante de la membrane.

On peut également associer à ces différents types de colmatage des phénomènes de maintien de la matière à la membrane : adsorption et polarisation de concentration. Ces deux derniers phénomènes ne font pas directement intervenir la taille des flocs mais plutôt les interactions entre la suspension et la membrane.

• L’adsorption est un phénomène irréversible du aux interactions physico-chimiques (ponts hydrogène, liaison de type Van der Waals et électrostatiques) entre les solutés et la surface de la membrane. Elle correspond à la formation d’une ou de plusieurs couches moléculaires à la surface ou à l’intérieur des pores de la membrane ou au niveau du gâteau de filtration. Il y a alors un changement de densité et de taille des pores de la membrane. L’adsorption ne peut pas être éliminée par des méthodes physiques et nécessite alors un lavage chimique adapté.

• La polarisation de concentration décrit la tendance du soluté à s´accumuler dans le voisinage de la surface de la membrane. L´accumulation progressive des espèces par convection (molécules ou particules) établit un gradient de concentration entre la paroi de la membrane et la solution. Cette différence de concentration entraîne un flux de diffusion de la membrane vers la solution (flux rétrodiffusif). Ce phénomène peut conduire à la formation d´une couche de gel et à la précipitation des solutés. La couche ainsi formée constitue une deuxième barrière filtrante pouvant retenir des particules de dimensions inférieures au seuil de coupure de la membrane.

L´épaisseur de la couche est limitée quand la turbulence est favorisée (Aimar et Sanchez, 1989). Dans le cas des bioréacteurs à membrane externe, l’augmentation de la vitesse d’écoulement du

liquide aux abords de la membrane réduit l’épaisseur de la couche de polarisation, favorisant le flux du filtrat (Lübbecke et al., 1995).

Dans le cas spécifique de la filtration d’une eau résiduaire, un dépôt de type biologique est observé. Il est issu de la colonisation par les micro-organismes de la surface de la membrane et provoque la formation d’un biofilm. Les micro-organismes du biofilm sécrètent des exopolymères qui tendent à structurer le dépôt et facilitent son adhésion au matériau membranaire. Jinhua et al. (2004) mettent en évidence la présence de l’espèce Xanthomonas au sein du biofilm et observent une production de gomme de Xanthan (polysaccharide à haute masse moléculaire) responsable de la cohésion et de la structuration du biofilm.

Les mécanismes les plus cités dans la littérature sont le colmatage par gâteau (notamment pour les BàMI) et le colmatage interne avec mise en évidence de phénomène d’adsorption ou de bouchage de pores, toutefois souvent le colmatage ne peut être réduit à un seul type. En effet, le colmatage dans sa globalité est souvent une succession des mécanismes présentés ci-dessus.

Pour expliciter le colmatage, la loi de Darcy associée au modèle de résistances en série est largement utilisée. En l’absence de colmatage, pour la filtration d’un solvant pur (eau), le flux de perméat J peut être représenté par la loi de Darcy:

m R µ P J . ∆ = Avec, J densité de flux (m3.m-2.S-1).

∆P pression transmembranaire (Pa). µ viscosité dynamique du perméat (Pa.s). Rm résistance hydraulique de la membrane (m-1).

Lorsque la membrane se colmate, une résistance supplémentaire Rc s’ajoute à la résistance de la membrane Rm (modèle des résistances en série). La loi de Darcy s’écrit alors :

(

Rm RC

)

µ P J + ∆ = .

Le terme Rc inclut les résistances dues à l’adsorption Ra, au dépôt réversible ou irréversible Rd, à

la couche limite de polarisation Rpol.

Rc=Ra+Rd+Rpol

Cette formulation mathématique est relativement simple. Elle permet de rendre bien compte du phénomène de colmatage se produisant sur les membranes des BAM (Van Kaam, 2005).