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Les autres espèces

Dans le document RIVIÈRE RICHELIEU (Page 24-30)

D'autres espèces, parmi les plus vulnérables du fleuve Saint-Laurent, devraient également bénéficier de l'aménagement d'une passe migratoire efficace de la mi-mai à la mi-octobre : le suceur ballot (Moxostoma carinatum), l'alose savoureuse (Alosa sapidissima), et l'esturgeon jaune (Acipenserfulvescens) pourraient ainsi rejoindre des milieux de reproduction de meilleure qualité dans les rapides de Chambly. -

Le suceur ballot est une espèce considérée rare, menacée ou disparue dans la majeure partie de son aire de répartition, exclusivement nord-américaine (Parker

1988). Au Québec, le noyau de sa population serait situé dans la rivière Richelieu, en aval de Chambly (Beaulieu et Huot 1992). Sa présence a été régulièrement notée en aval du barrage de Saint-Ours (Boulet et al. 1996) et il fraye dans les rapides de Chambly (Boulet et al. 1995).

L'alose savoureuse est un gros clupéidé anadrome, considéré en situation précaire au Québec (Beaulieu et Huot 1992). Ce poisson passe la majeure partie de sa vie en mer et utilise certaines rivières de la côte est de l'Amérique du Nord pour se reproduire. Il s'agit d'une espèce multipare, très fidèle à son lieu de reproduction. À chaque année, en mai et juin, au moins un stock remonte le fleuve Saint-Laurent et quelques-uns de ses tributaires majeurs. Une seule frayère a pu être identifiée avec certitude, dans le lac des Deux Montagnes, en aval de Carillon (Provost et al. 1984). Des géniteurs ont été régulièrement capturés en juin au pied du barrage de Saint-Ours. En dépit d'un effort intensif dans les années 1990, un seul géniteur fut capturé à Chambly, en 1984 (Mongeau et al. 1986, Boulet et al. 1995).

L'esturgeon jaune est une des espèces clés de la pêche commerciale dans les eaux intérieures du Québec. Toutefois, son caractère grégaire et les particularités de son cycle vital (maturité sexuelle très tardive, à un âge dépassant 27 ans chez les femelles; intervalle de plusieurs années, jusqu'à neuf ans, entre deux frayes) en font une espèce sensible à l'exploitation. Dans le réseau du Saint-Laurent, le nombre de frayères est limité et en régression (~umont et al. 1987; Fortin et al. 1992, 1993). Des ressources importantes ont été investies par le MEF et ses partenaires, notamment Hydro-Québec,

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pour améliorer la qualité et l'accessibilité des lieux de reproduction encore utilisés.

Il est toujours présent dans la rivière Richelieu en aval du barrage de Saint-Ours, mais il est maintenant rare en amont (Mongeau 1979). Les résultats de fouilles archéologiques, au site du Fort Chambly (Walker et Cumbaa 1982) révèlent la présence de restes culinaires d'esturgeon pendant 'toute la période couverte par

l'étude : pré-1665 jusqu'à circa-1760. Des entrevues effectuées en 1975 auprès de pêcheurs commerciaux ayant oeuvré dans la rivière Richelieu au cours de la première moitié du XXe siècle (Ma10 et al. 1996) mentionnent la capture de très gros spécimens dans les rapides de Charnbly (dont au moins une femelle à caviar, signe de maturité sexuelle avancée).

être rehaussés. Quant au barrage, une structure plus basse que l'actuel ouvrage, il a 3 LE BARRAGE DE SAINT-OURS

3.1 Historique

Après de multiples péripéties (changement de plans, faiilites, etc.), la construction d'un premier ensemble barrage-écluse a débuté en 1846. L'écluse était en bois et le barrage, une structure rectiligne de 187 m, conçue en caissons à claire-voie, remplis de roche (figure 3, [A]). Les travaux ont été complétés au printemps 1849. Cet ensemble n'avait pas pour but de submerger un secteur de rapides à la hauteur de Saint- Ours mais de rehausser le niveau d'eau de la rivière Richelieu pour en faciliter la navigation jusqu'à Chambly. En effet, des battues de sable rendaient la circulation diffi- cile dans les secteurs de Saint-Denis-Saint-Antoine et de Saint-Charles. Il y avait également un tronçon d'eaux vives (un banc de gravier et de grosses roches) à la hauteur de Beloeil. Il semble qu'il n'y avait aucun rapide ou autre obstacle infranchissable à Saint-Ours. Deux difficultés mineures avaient été identifiées au début du XIX" siè-

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une grosse pierre et un haut-fond de gravier aux deux extrémités de l'île que

nous connaissons aujourd'hui sous le nom d'île d'Avard. » (Sévigny 1983). Le haut-fond aval pourrait être un de ceux sur lesquels la fraye du suceur cuivré a été observée en

1995 et 1996.

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Dès 1850, les murs de l'écluse, submergés par la crue printanière, durent

connu de nombreux problèmes au cours de son existence à cause de l'impétuosité du courant et de la forte prévalence des hautes eaux au printemps. Il a même été partielle- ment détruit en 1854 et 1855 par les glaces et le courant.

Figure 3. Reproductions photographiques de l'ancien barrage de Saint-Ours [A], remplacé entre 1967 et 1969, et de la passe migratoire p ] opérée jusqu'à

1967. Les photographies datent respectivement du 12 septembre 1934 et du 25 novembre 1943 (photos : Parcs Canada).

En fait, les difficultés que l'on éprouvait à réparer et à renforcer le barrage provenaient de sa structure même. En choisissant, lors de l'élaboration du devis de construction, une digue à encoffrement en charpente (en anglais cribwork), on n'avait pas prévu les effets des hautes eaux, du courant et des glaces sur une telle structure. Continuellement disloqués et broyés, les caissons laissaient s'échapper les pierres qui aboutissaient dans le lit de la rivière, en aval du barrage. Le tablier de ce dernier, fait de planches de bois, subissait régulièrement le même sort.

En 1856, en coulant en eau profonde et tout contre le barrage des caissons plus résistants, on crut avoir solutionné le problème. Pourtant, en 1861, "the dam still continues to require constant attention and frequent repairs". C'est que, malgré les caissons renforcés, l'eau continuait ses ravages mais, cette fois, dans le lit de la rivière.

"The dam is about 650 feet long, constructed of crib-work, of a height that admits of a constant flow of water; and during freshets, there is frequently a depth of from 8 to 10 feet passing over it, the re-action of which has repeatedly formed large holes in the bed of the river, and caused such land slips at both ends of the dam as to seriously endanger the structure." (Sévigny 1983).

Après vingt ans d'essais et d'erreurs, plus ou moins catastrophiques, la situation s'est améliorée. Ainsi en 1868, grâce à des tonnes de pierres, le barrage, ses aboutements et les berges de l'île Darvard ont été renforcés. Par la suite, le barrage demanda une attention immédiate à deux reprises.

En 1899, d'abord, ses fondations étaient minées sur une longueur d'environ 15 m et son affaissement était à craindre. On utilisa du béton pour remplir les cavités. Deux ans plus tard, en 1901, le tablier du barrage était à son tour tellement délabré qu'il ne réussissait même plus à retenir l'eau. (Sévigny 1983).

L'écluse d'origine fut remplacée par une autre, parallèle à la première et construite entre 1929 et 1933, à l'image de celle des grands canaux new-yorkais avec une profondeur d'eau de 3,6 m.

En 1966, il est devenu évident que le vieux barrage de Saint-Ours n'est plus en mesure de servir efficacement. Comme le souligne un citoyen de l'endroit, "la vieille dame laisse couler l'eau par dessus et par dessous", ce qui la met hors d'état de jouer son rôle qui consiste à régulariser le niveau de l'eau en amont de l'écluse Saint-Ours. (Sévigny 1983).

Il semble donc que de 1849 à 1969, le barrage de Saint-Ours ne constituait pas un obstacle aussi infranchissable par le poisson que l'actuel ouvrage. Des photos datant du début des années 1940 montrent également que l'ouvrage était doté d'une passe migratoire, accolée à l'île Darvard en rive droite (figure 3, [BI). Nous ne connaissons pas l'efficacité de cette passe. Cependant, des témoignages indiquent qu'elle existait encore au milieu des années 1960 et qu'elle était utilisée par différentes espèces comme l'anguille, la perchaude et le doré (Ma10 et al. 1996). Un rapport de l'Office de Biologie du Québec (1944) fait état de pêches au verveux à l'entrée de la passe : 327 poissons y ont été capturés entre le 22 juin et le 18 juillet 1944. Les archives de la collection ichtyologique du MEF rapportent en fait la capture de 328 spécimens appartenant à 14 espèces (annexe 1). La laquaiche argentée (Hiodon tergisus), un poisson à la morphologie semblable à celle de l'alose savoureuse, domine ces captures, avec 117 spécimens. Cinq Catostomidés, quatre meuniers noirs et un Moxostoma non identifié, ainsi qu'un esturgeon jaune ont également été rapportés. Les petites anguilles ne sont pas vulnérables à la pêche au verveux.

Dans le document RIVIÈRE RICHELIEU (Page 24-30)

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