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Les évolutions postérieures au code pénal de 1994

Dans le document Le couple et le droit pénal (Page 109-111)

Section 1 – Une protection par le truchement des immunités familiales en matière d’atteintes à

B- Les évolutions postérieures au code pénal de 1994

Comme nous l’avons rapidement évoqué infra, le législateur a procédé à une extension du domaine des immunités familiales en matière d’atteinte à l’autorité publique. Ainsi a-t-il créé une immunité familiale en matière d’aide au séjour irrégulier d’étrangers.

Cette immunité trouve son origine dans le « délit d’aide à l’étranger en situation irrégulière »1, lui-même adopté pour la première fois par le gouvernement Daladier par un décret du 2 mai 19382. Il sera repris dans l’article 21 de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l’entrée et au séjour des étrangers avant d’être intégré en 2005 dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile à l’article L. 622-1.

Ainsi l’article L. 622-1 du CESEDA énonce : « Toute personne qui aura, par aide directe ou

indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un

étranger en France sera punie d’un emprisonnement de cinq ans et d’une amende de 30 000

euros ».

C’est avec la loi «Toubon » du 22 juillet 19963 que le législateur institue une nouvelle immunité familiale en matière d’aide au séjour irrégulier d’étrangers. Fut alors introduite l’immunité familiale au bénéfice des ascendants et des descendants de l’étranger ainsi qu’au bénéfice du conjoint de l’étranger, sauf lorsque les époux sont séparés de corps ou autorisés à résiderséparément.

Puis en 1998, une nouvelle loi dite « Resada » (Loi n°98-349 du 11 mai 1998 relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile) a étendu ces immunités au

1

M. Reydellet « Les délits d’aide à l’étranger en situation irrégulière » D. 1998, P. 148

2

Article 4 du décret du 2 mai 1938

3

conjoint des descendants ou des ascendants, aux frères et sœurs et à leur conjoint, ainsi qu’à la personne qui vit notoirement en situation maritale avec l’étranger.

Cette loi n’a fait en réalité, que donner une assise légale à des décisions qui étaient déjà adoptées par les juridictions sur le fondement d’un ordre public affectif1.

Ainsi le CESEDA contient désormais un article L.622-24 rédigé comme tel : « Sans préjudice

des articles L. 621-1, L. 621-2, L. 623-1, L. 623-2 et L. 623-3, ne peut donner lieu à des

poursuites pénales sur le fondement des articles L. 622-1 à L. 622-3 l'aide au séjour irrégulier

d'un étranger lorsqu'elle est le fait : 2° Du conjoint de l'étranger, sauf si les époux sont

séparés de corps, ont été autorisés à résider séparément ou si la communauté de vie a cessé,

ou de la personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui… ».

La rédaction de ce texte doit nous inspirer plusieurs réflexions. Tout d’abord, c’est bien le lien familial et sa valeur suprême en tant que socle de la société, qui est protégé ici par le recul du droit pénal, puisque comme pour les autres immunités, celle relative à l’aide à l’entrée et au séjour irréguliers d’étrangers ne peut plus jouer lorsque le couple est séparé de corps, autorisé à résider séparément ou lorsque la communauté de vie a cessé.

On peut noter également que le législateur a repris pour ce type d’immunité la formule suivante : « personne qui vit notoirement en situation maritale avec lui » avec ce que cela engendre d’incertitudes concernant les personnes visées par cette formulation.

En effet, pour certains cette formule est assez large pour concerner tous les concubins qu’ils soient ou non liés par un PACS2, alors que comme nous l’avons vu, P. MOUSSERON considère que la formulation visant les personne en situation maritale, elle exclut les concubins homosexuels ainsi que les titulaires d’un PACS3.

Enfin, il convient de préciser que contrairement aux immunités familiales en matière de recel de criminels qui sont des immunités irresponsabilité, les immunités en matière d’aide à l’entrée et au séjour irrégulier d’étrangers sont des immunités irrecevabilité. En effet, il est précisé à l’article L. 622-24 du CESEDA que « ne peut donner lieu à des poursuites

pénales… », formulation identique à celle utilisée par le législateur en matière d’atteintes

aux biens. Pour P. MOUSSERON, l’application de ce régime aux immunités en matière d’aide

1

TGI, Toulouse 30 octobre 1995

2

J. Leblois-Happe « L’appréhension par le droit pénal de la solidarité au sein du couple » AJ Famille 2004 p. 17 et A. Bourrat-Gueguen « Les incidences du PACS en droit pénal » in Des concubinages, p. 221, 222

3

Position que partage J. Amar tout en recommandant une application de l’immunité aux concubins homosexuels et aux personnes titulaires d’un PACS.

à l’entrée et au séjour irréguliers d’étrangers témoigne de l’influence de considérations sécuritaires sur le régime des immunités familiales.

Ainsi, même s’il demeure certains doutes sur leur portée et même si ces nouvelles immunités voient leurs effets en partie limités, reste que ces extensions en matière d’immunités familiales témoignent d’une évolution du droit pénal et d’une protection croissante accordée par celui-ci.

De façon générale, on peut ainsi considérer que les immunités familiales en matière d’atteinte à l’autorité publique sont l’expression de ce que le droit pénal tient compte de la solidarité, celle-ci étant inhérente au couple. Or pour reprendre les propos de J. LEBLOIS- HAPPE : « Rien de ce qui est essentiel à la vie en société ne saurait en effet échapper à son emprise ».

De plus, la répression ne serait ni juste ni utile si elle restait aveugle à cette considération. La solidarité est donc ici un facteur de recul de la répression. Mais il est des cas ou à l’inverse la prise en compte de la solidarité par le droit pénal conduit à la mise en place de la répression. En effet, il est des cas où le défaut de solidarité dans le couple est facteur de trouble l'ordre social ce qui engendre une répression accrue.

Section 2 – Une protection par le truchement de l’abandon de

Dans le document Le couple et le droit pénal (Page 109-111)