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Les éléments majeurs de la trajectoire genevoise

Chapitre 4 Genève, de l’euphorie automobile à l’ouverture transfrontalière

1 Éléments du contexte genevois

2.1 Les éléments majeurs de la trajectoire genevoise

Après la mise en œuvre d’un urbanisme presque exclusivement calqué sur l’automobile depuis les années 1950, les conceptions de la politique d’aménagement genevoise se sont inversées avec la prise de conscience, dans les années 1980, des problèmes liés à la circulation et la mise en valeur progressive des transports collectifs : d’une ville adaptée aux transports, on passe alors des transports adaptés à la ville (figure 5).

6 Ligne ferroviaire de type RER en cours de construction, reliant la gare principale de Cornavin, à Genève, aux Eaux-Vives,

Figure 5 – Les principales phases de la coordination urbanisme-transports à Genève

Il y a une cinquantaine d’années, le réseau de tramway de l’agglomération genevoise, pourtant un des plus développés en Suisse a été quasi-totalement démantelé. Le canton de Genève est alors – et a toujours été –le plus motorisé de Suisse. C’est la période de l’enthousiasme techniciste et des grands projets qui mettent la priorité sur la circulation automobile, à l’image du plan alvéolaire qui devait découper la ville en zones fonctionnelles au moyen d’un réseau de voies express circulaires.

Mais la congestion du réseau routier, qui ne pouvait plus être étendu, et les nuisances de la circulation ont amené les Genevois à une prise de conscience progressive des problèmes urbains qui s’est illustrée par l’initiative de 1983 lancée par des partis écologistes en faveur du redéploiement du réseau de transports collectifs. Cette tendance s’est confirmée en 1988 avec une votation en faveur d’un réseau de transports publics efficaces. Cet événement a relancé les études et mesures visant à redéployer les transports publics. De plus, la Loi fédérale sur la protection de l’environnement de 1983, avec ses deux ordonnances pour la protection de l’air et pour la protection contre le bruit, est venue renforcer les mesures à prendre en la matière et le climat ambiant des préoccupations environnementales. Le redéploiement des transports publics s’est finalement fait dans une optique de double accessibilité, les politiques de transports ne visant pas la mise en place de mesures d’accompagnement contraignantes sur la circulation automobile : « Il est vrai d’ailleurs que les places au centre ville sont actuellement

en totale contradiction avec cette volonté de rupture. Il y a aussi un problème, c’est que souvent, les personnes sont ravies d’être dans les embouteillages. (…) La voiture est donc extrêmement populaire parce qu’elle est extrêmement pratique » (entretien du 21 juillet 2006).

Au-delà de cette prise de conscience des problèmes urbains liés à la circulation automobile et aux préoccupations environnementales qui résument bien la première rupture de la trajectoire genevoise, une deuxième période de changement, plus récente, a orienté la conception des politiques de transports et d’urbanisme : la prise en compte de l’agglomération à une échelle régionale plus large, marquée entre autres par une volonté de coopération avec le canton de Vaud et la France voisine, et tenant compte du fait que ce bassin de vie dépasse largement les limites imposées par la frontière. En réalité, les deux périodes de changement mentionnées ne s’excluent pas, car la seconde est largement liée aux décisions et changements issus de la première.

En effet, le Comité régional franco genevois (CRFG) voit le jour en 1973 déjà, mais la véritable prise en compte de ce bassin de vie transfrontalier et intercantonal pour penser l’agglomération, son système de transports et son développement urbain, s’est concrétisée plus tard. La charte du CRFG sera un des éléments de cette ouverture, mais d’autres projets liés voient le jour pendant cette période, notamment la charte « Pour le développement des transports publics régionaux dans le bassin franco-valdo- genevois » dite DTPR, qui fixe les objectifs majeurs en matière de transports publics au niveau de la région.

Depuis quelques années, la relance du projet CEVA occupe une place centrale dans les documents de planification de l’agglomération, et se trouve au cœur de tous les débats qui touchent à l’agglomération. Cette liaison ferroviaire entre la Suisse et la France, basée sur une convention datant de 1912 avec la Confédération, est considéré comme la colonne vertébrale du futur réseau RER genevois, avec des implications souhaitées en matière d’aménagement coordonné à cette ligne.

La dimension régionale s’ancre aussi dans une optique de revalorisation de l’agglomération sur le plan international et à la nécessité d’agir selon les principes de développement durables, sociaux, économiques et environnementaux. Le plan directeur actuellement en vigueur met tout particulièrement l’accent sur ces principes et sur la volonté d’harmoniser les projets de transports et d’aménagement du territoire.

La mise en place du projet d’agglomération, actuellement en cours et soutenu tant par la Confédération que par l’Etat français, marque bien cette volonté de coopérer dorénavant sur les problématiques des transports et de l’aménagement, mais pas seulement. Les divers chantiers thématiques issus de cette collaboration recouvrent une large palette d’aspects touchant au bassin franco-valdo-genevois. C’est à la fin de l’année 2007 que doivent être déposés les projets d’agglomération en Suisse, qui seront évalués pour recevoir ensuite un éventuel soutien financé de la part de la Confédération.

La concrétisation de cette perspective régionale dans la volonté de coopérer entre les divers acteurs concernés de part et d’autres de la frontière étant particulièrement récente, les actions concrètes sont encore difficiles à évaluer. Néanmoins, au-delà des outils de planification et des projets en cours comme le CEVA, les entretiens menés auprès des acteurs locaux nous donnent des pistes pour mieux comprendre le climat actuel et les enjeux à venir.