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Le tétrapeptide N-terminal de la lipase gastrique humaine

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MATÉRIEL ET MÉTHODES 1 Lipidomique

2. Étude de l’effet du type de phospholipide, de la présence d’acides gras libres et de la présence de protéines sur la phase

2.2. Recherche des mécanismes impliqués dans l’amélioration du rendement de la lipolyse gastrique par le lysophosphatidylinositol

2.2.5. Le tétrapeptide N-terminal de la lipase gastrique humaine

L’extrémité N-terminale de la lipase gastrique semble être l’un des domaines spécialisés les plus intéressants de l’enzyme. En effet, d’après les travaux de Bernbäck et Bläckberg (1989), les quatre amino-acides N-terminaux de la lipase gastrique humaine, Leu- Phe-Gly-Lys, sont essentiels pour la fixation de l’enzyme à son substrat physiologique (une émulsion de triglycérides à chaînes longues stabilisée par des phospholipides).

2.2.5.1. Étude de lipases gastriques purifiées: données du séquençage

Le séquençage de trois des lipases gastriques purifiées à notre disposition (LGHB, MPA et LGH2) nous a permis de mettre en évidence, que ce tétrapeptide peut être altéré de façon plus ou moins importante. LGH2 est composée de 70 % de protéines avec un N- terminal intact et de 30 % de protéines avec un N-terminal tronqué des cinq premiers acides

-10 10 30 50 70 90 60 50 40 30 10 0 -10 -20 20 Temps (seconde) Liaison (RU) LPI PS SM PC P/O Durée d’injection de la lipase

aminés. MPA présente un N-terminal auquel il manque les deux ou trois premiers acides aminés (80 et 20 % des protéines respectivement). LGHB est la lipase purifiée la plus dégradée avec plusieurs séquences possibles au niveau du N-terminal, dont une majoritaire pour laquelle il manque les deux premiers acides aminés. Cette dégradation n’altère pas l’activité de ces lipases sur substrat à chaîne courte, puisqu’elles présentent toutes les trois des activités spécifiques proches sur tributyrine (663 à 756 U/mg de protéine). En revanche, la dégradation plus ou moins étendue du N-terminal se traduit par des activités différentes sur trioléine émulsifiée (émulsion CT), avec un rendement de lipolyse d’autant plus faible que l’extrémité N-terminale de la lipase gastrique est dégradée (12 % pour LGH2, 9,3 % pour MPA et 8,5 % pour LGHB) (Figure 42).

Figure 42: Relation entre l’amélioration du rendement de lipolyse gastrique par LPI et l’état de dégradation de l’extrémité N-terminale de la lipase gastrique purifiée.

* Valeur significativement différente de celle de l’émulsion LPI (moyenne ± SEM; CT: n=20 avec LGHB, n=14 avec MPA et n=12 avec LGH2; LPI: n=2).

Néanmoins, lorsqu’on hydrolyse l’émulsion LPI avec ces trois lipases purifiées, on ne retrouve pas les différences d’activité observées avec l’émulsion CT. Les rendements de lipolyse sont tous compris entre 15 et 19 %, parce que le LPI permet une amélioration du rendement de la lipolyse d’autant plus élevée que la dégradation du N-terminal de la lipase est étendue : 118 % pour LGHB, 66 % pour MPA et 53 % pour LGH2. Il semble donc, que le LPI soit capable de compenser la dégradation du tétrapeptide N-terminal de la lipase gastrique, et que son effet activateur puisse être, au moins en partie, un effet « restaurateur »

0 5 10 15 20 25 LGHB MPA LGH2 % de lipolyse CT LPI D Déégradationgradation du N-terminal du N-terminal ++++++ ++++ ++ +118% +118% +66% +66% +53% +53% * * *

de la perte d’activité liée à l’altération de l’extrémité N-terminale de la lipase. Ce mécanisme semble également spécifique au LPI, puisque l’amélioration de la lipolyse de l’émulsion CT, obtenue grâce à l’ajout d’acide linoléique (LA) dans le mélange lipidique avant l’émulsification, ne présente pas du tout les mêmes caractéristiques (Figure 43). En effet, dans le cas de CT+LA, on peut voir, que le rendement de la lipolyse gastrique est davantage augmenté lorsque la lipase gastrique purifiée n’est pas trop dégradée. Il semble donc, qu’ici l’amélioration obtenue soit plutôt liée à la diminution de la taille des globules lipidiques, qui permettrait à davantage de lipases fonctionnelles de se fixer à l’interface (d’où une amélioration proportionnelle à la part de lipase purifiée non dégradée).

Figure 43: Relation entre l’amélioration du rendement de lipolyse gastrique par l’acide linoléique (LA) et l’état de dégradation de l’extrémité N-terminale de la lipase gastrique purifiée.

* Valeur significativement différente de celle de l’émulsion CT+LA (moyenne ± SEM; CT: n=20 avec LGHB, n=14 avec MPA et n=12 avec LGH2; CT+LA: n=8 avec LGHB et n=4 avec MPA et LGH2).

2.2.5.2. Étude de sucs gastriques: données de la spectrométrie de masse

Afin de regarder, si le mécanisme mis en évidence avec des lipases purifiées, existe aussi en présence de sucs gastriques, nous avons cherché à analyser le tétrapeptide N-terminal de la lipase gastrique directement dans le suc. Le séquençage après transfert sur membrane PVDF n’ayant pas permis d’obtenir des résultats satisfaisants (la lipase gastrique, très hydrophobe, restait majoritairement dans le gel d’acrylamide, d’où une faible quantité d’enzyme sur la membrane de transfert donnée pour le séquençage), nous avons utilisé la

0 5 10 15 20 25 LGHB MPA LGH2 % de lipolyse CT CT+LA D Déégradationgradation du N-terminal du N-terminal ++++++ ++++ ++ +20% +20% +48% +48% +61% +61% * *

spectrométrie de masse. L’analyse au MALDI-TOF après digestion enzymatique à la trypsine du suc gastrique AR T3 montre, que la lipase gastrique est la protéine majoritaire dans la bande de gel découpée à 50 kDa (Figure 44).

Figure 44: Analyse du suc gastrique AR T3 par spectrométrie de masse (ionisation positive et mode réflectron) après digestion enzymatique à la trypsine.

Les flèches bleues indiquent les valeurs de calibration avec la trypsine (Ti). Les acides aminés en rouge et en vert forment les 9 peptides ayant permis d’identifier la lipase gastrique.

Nous avons obtenu 9 peptides (en rouge et en vert dans la séquence de la lipase gastrique, et indiqués par leur masse sur le spectre) ayant permis d’identifier la lipase gastrique, avec un taux de recouvrement d’environ 40 %.

L’analyse après digestion chimique au bromure de cyanogène a permis d’identifier deux des quatre peptides attendus, dont le peptide N-terminal à 1465,7 Da (Figure 45). L’état de dégradation de ce peptide a pu être établi grâce à la détection de trois formes tronquées : celle à 1205,5 Da (absence des deux premiers acides aminés), celle à 1352,5 Da (absence du premier acide aminé) et celle à 1148,1 Da (absence des trois premiers acides aminés).

LFGKLHPGSPEVTMNISQMITYWGYPNEEYEVVTEDGYILEVNRIPYGKKNSGNTGQRPVVFLQHGLLASAT NWISNLPNNSLAFILADAGYDVWLGNSRGNTWARRNLYYSPDSVEFWAFSFDEMAKYDLPATIDFIVKKTG QKQLHYVGHSQGTTIGFIAFSTNPSLAKRIKTFYALAPVATVKYTKSLINKLRFVPQSLFKFIFGDKIFYPHNFF DQFLATEVCSREMLNLLCSNALFIICGFDSKNFNTSRLDVYLSHNPAGTSVQNMFHWTQAVKSGKFQAYDW GSPVQNRMHYDQSQPPYYNVTAMNVPIAVWGGKDLLADPQDVGLLLPKLPNLIYHKEIPFYNHLDFIWAMD APQEVYNDIVSMISEDKK

Ti Ti

Suc gastrique AR T3 identification de la lipase gastrique

Figure 45: Analyse du suc gastrique AR T3 par spectrométrie de masse (ionisation positive et mode linéaire) après digestion chimique au bromure de cyanogène.

Les flèches rouges désignent les deux peptides permettant d’identifier la lipase gastrique humaine (les acides aminés correspondants sont également en rouge dans la séquence de la lipase). Les flèches bleues désignent les formes dégradées du peptide N-terminal à 1465,7 Dalton. Les acides aminés en vert forment les deux peptides non identifés parmi les quatre attendus.

L’analyse du peptide N-terminal de la lipase gastrique de deux autres sucs (BAK T3 et GM PG3) montre, que leur état de dégradation est différent (Figure 46). La lipase gastrique du suc BAK (figure 46A) est moins dégradée que celle du suc AR T3 : on trouve le peptide N- terminal entier et seulement la forme à 1205,5 Da. La lipase gastrique du suc GM PG3 (figure 46B) est la mieux conservée, puisqu’on ne trouve aucune forme dégradée du peptide à 1465,7 Da. LFGKLHPGSPEVTMNISQMITYWGYPNEEYEVVTEDGYILEVNRIPYGKKNSGNTGQRPVVFLQHGLLASAT NWISNLPNNSLAFILADAGYDVWLGNSRGNTWARRNLYYSPDSVEFWAFSFDEMAKYDLPATIDFIVKKTG QKQLHYVGHSQGTTIGFIAFSTNPSLAKRIKTFYALAPVATVKYTKSLINKLRFVPQSLFKFIFGDKIFYPHNFF DQFLATEVCSREMLNLLCSNALFIICGFDSKNFNTSRLDVYLSHNPAGTSVQNMFHWTQAVKSGKFQAYDW GSPVQNRMHYDQSQPPYYNVTAMNVPIAVWGGKDLLADPQDVGLLLPKLPNLIYHKEIPFYNHLDFIWAMD APQEVYNDIVSMISEDKK Suc gastrique AR T3

présence du peptide N-terminal entier et de ses formes dégradées sans Leu-Phe,

Figure 46: Analyses des sucs gastriques BAK T3 (A) et GM PG3 (B) par spectrométrie de masse (ionisation positive et mode linéaire) après digestion chimique au bromure de cyanogène.

La flèche rouge désigne le peptide N-terminal entier. La flèche bleue désigne la forme dégradée du peptide N-terminal. Les flèches vertes désignent l’absence des autres formes dégradées du peptide N- terminal.

1148,1

1352,5

Suc gastrique BAK T3

présence du peptide N-terminal entier et de sa forme dégradée sans Leu-Phe.

A

1352,5

1205,5

1148,1

Suc gastrique GM PG3

présence du peptide N-terminal entier et absence de toute forme dégradée.

B

Regardons maintenant l’amélioration du rendement de lipolyse gastrique des émulsions CT et PC P/O grâce à la présence de LPI en fonction de l’état de dégradation de l’extrémité N- terminale de la lipase gastrique des sucs AR T3, BAK et GM PG3 (Figure 47).

Figure 47: Relation entre l’amélioration du rendement de lipolyse gastrique par LPI (moyenne ± SEM) et l’état de dégradation de l’extrémité N-terminale de la lipase gastrique de certains sucs.

CT: n=4 avec AR T3, n=8 avec BAK; PC P/O: n=18 avec BAK, n=12 avec GM PG3; LPI: n=4 avec AR T3, n=28 avec BAK, n=8 avec GM PG3). * Valeur significativement différente de celle de l’émulsion LPI

On obtient une amélioration d’autant plus importante que l’extrémité N-terminale de la lipase gastrique est dégradée, ce qui confirme le mécanisme décrit en présence des lipases purifiées. La mise en évidence de ce mécanisme souligne à nouveau, que le mode d’action du LPI ne se limite pas à des mécanismes indirects, mettant en jeu des modifications de la qualité de l’interface lipidique (superficie, charge, compressibilité). Ce phospholipide semblerait bien pouvoir agir directement, notamment par le biais d’interactions directes avec la lipase gastrique, au niveau d’un site de fixation qui n’est pas son tétrapeptide N-terminal et qui reste à définir. Cela pourrait être lié à des caractéristiques propres de cette molécule, que nous avons essayé d’identifier.

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