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2. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

2.4. Le syndrome SUNCT

L’IASP décrit la céphalée unilatérale névralgiforme de courte durée associée à une injection conjonctivale et un larmoiement (Short-lasting Unilateral Neuralgiform headache attacks with Conjunctival injection and Tearing, SUNCT) comme « des paroxysmes répétés de douleur de courte durée (généralement 15 à 120 secondes) principalement au niveau de la zone oculaire et péri-oculaire, de nature névralgique et d'intensité modérée à sévère. Ils apparaissent généralement uniquement pendant la journée, sont unilatéraux et sont accompagnés par une injection conjonctivale marquée, un larmoiement, une rhinorrhée faible à modérée, et une transpiration frontale (infraclinique) qui sont ipsilatéraux. La douleur retrouvée dans le syndrome SUNCT n'est pas sensible à l'indométacine ou la carbamazépine, et a, jusqu'à présent, surtout été observée chez les hommes » [52]. Des différences concernant sa classification par l’IASP et l’IHS sont à noter puisque le premier organisme le classe dans les « névralgies de la tête et de la face » alors que le second le considère comme une « céphalée trigémino-dysautonomique » [31] [52]. Dans la mesure où il comporte des similarités avec les céphalées trigémino- dysautonomiques (signes autonomiques accompagnant les crises) et avec les névralgies trigéminales (douleur de nature névralgique), nous choisirons de le traiter comme une pathologie à part.

Le syndrome SUNCT a été décrit pour la première fois en 1978. Il est considéré comme une pathologie très rare puisque seulement 36 cas ont été décrits dans la littérature entre 1989 et 2000. Ce sont les hommes qui en sont majoritairement atteints (3 hommes pour une femme) et l’âge moyen de survenue est de 51 ans [20] [52].

Le début des attaques est toujours brutal, leur arrêt peut être plus progressif et un léger inconfort entre les crises peut être ressenti. La douleur, presque toujours unilatérale, est décrite comme une brûlure, un coup de poignard ou une décharge électrique. Son intensité est modérée à sévère (rarement très sévère, jamais légère) et aucune période réfractaire n’est retrouvée après une attaque. Elle est toujours accompagnée de signes autonomiques homolatéraux. Ainsi, une injection conjonctivale et un larmoiement sont constamment retrouvés, une obstruction ou un écoulement nasal, un œdème palpébral et une transpiration frontale (qui est subclinique) sont souvent observés. Dans une moindre mesure, un rétrécissement de la fente palpébrale, un myosis et une rougeur faciale peuvent également se produire (Figure 17). De plus, l’attouchement de zones gâchettes (au niveau de la chevelure, de la face ou des yeux) peut engendrer une crise, tout comme certains facteurs déclenchant (mouvements rapides des yeux, mastication, mouvements du cou, toux, brossage des dents, lumière vive, mauvaises odeurs, faim, émotions). Aucun déficit neurologique n’est constatable même si, durant une attaque, le réflexe cornéen peut être modifié (il revient à la normal dès l’arrêt de la crise) [16] [20] [52] [82].

Figure 19 Crise chez un patient atteint d’un syndrome SUNCT [31].

Concernant la topographie de cette douleur, il est important de noter qu’elle se situe sur le territoire innervé par la branche ophtalmique du nerf trijumeau. Ainsi, on la retrouve au niveau de la zone oculaire et péri-oculaire mais elle peut irradier vers la zone fronto- temporale, le nez, la joue, l’oreille, la mâchoire supérieure, le palais ou encore vers le cou [20] [52].

Enfin, les crises présentent un profil évolutif très caractéristique. D’une durée de quelques secondes à 3 minutes, elles se répètent 5 à 10 fois par heure. Il peut en fait y avoir de nombreuses attaques par heure ou uniquement quelques attaques par jour (les extrêmes allant de 5 à 80 salves par jour). Les périodes de crises ont une durée variable (2 à 10

semaines) et elles peuvent se répéter une à 2 fois par an avec des périodes de rémission pouvant aller de quelques mois à plusieurs années [20] [52] [82].

Ainsi, l’IHS présente les critères suivants pour retenir le diagnostic d’un syndrome SUNCT [31] :

A. Au moins 20 attaques répondant aux critères B à D,

B. Des crises unilatérales, de douleur orbitaire, supra-orbitaire ou temporale, en coup de poignard ou pulsatile et durant 5 à 240 secondes,

C. La douleur est accompagnée par une injection conjonctivale et un larmoiement homolatéraux,

D. La fréquence des attaques est de 3 à 200 par jour, E. Aucune étiologie n’est retrouvée.

Ajoutons que certains profils atypiques, principalement évolutifs, ont été mis en évidence. Ainsi, il est possible de constater la chronicisation du syndrome, l’apparition d’un fond douloureux continu, le chevauchement des crises (donnant l’impression de douleurs continues durant 5 à 10 minutes), l’apparition de formes bilatérales ou encore la présence d’hyper ou d’hypoesthésies et d’une dilatation des vaisseaux conjonctivaux. Mais surtout, le syndrome SUNCT peut se transformer de manière réversible en une névralgie trigéminale [20] [52] [68].

Par ailleurs, il est nécessaire de préciser que le syndrome SUNCT peut être idiopathique ou symptomatique (malformation vasculaire au niveau de l’angle ponto- cérébelleux, cavernome et autres lésions du tronc cérébral, craniosténose, adénome hypophysaire à prolactine), l’existence de ces formes symptomatiques imposant de réaliser une IRM à tout patient atteint d’un syndrome SUNCT [16] [20] [82].

Peu importe la forme (typique, atypique, idiopathique, symptomatique), la physiopathologie du syndrome SUNCT semble être analogue à celle des céphalées trigémino-dysautonomiques. En effet, une activation hypothalamique identique à celle observée dans le cluster headache a pu être visualisée en imagerie fonctionnelle chez un patient souffrant de ce syndrome [20] [49].

Enfin, il est important de parler du traitement de cette pathologie puisqu’il influera dans la réalisation du diagnostic. En effet, la douleur du syndrome SUNCT ne répond jamais (ou presque) aux traitements habituellement utilisés pour traiter les céphalées

trigémino-dysautonomiques et les névralgies trigéminales (sumatriptan, indométhacine, carbamazépine). En réalité, aucun traitement n’a encore été trouvé pour soulager réellement et de manière durable les patients, même si la cortisone semble montrer quelques effets bénéfiques dans de rares cas [20] [52].

Ainsi, le syndrome SUNCT se rapproche des NTC de la branche ophtalmique par de nombreuses caractéristiques : aspect et topographie de la douleur et implication d’une zone gâchette et de facteurs déclenchant. Rappelons toutefois que la branche ophtalmique est le territoire le moins atteint dans les NTC. La différence sera donc basée sur la présence de signes autonomiques associés (en n’oubliant pas qu’ils peuvent exister dans les formes de NTC mixtes et avec participation vasomotrice), sur la « périodicité » des crises, sur l’absence de période réfractaire après une attaque et surtout sur l’absence de réponse à la carbamazépine (au sumatriptan et à l’indométacine si on envisage le cas d’une NTC mixte). Il faut d’ailleurs envisager un syndrome SUNCT devant toute NTC pour laquelle aucun traitement médicamenteux n’est efficace. La possibilité de transformation du SUNCT en NTC et inversement peut toutefois constituer un obstacle à tout diagnostic.